David Madore's WebLog: 2004-05

Vous êtes sur le blog de David Madore, qui, comme le reste de ce site web, parle de tout et de n'importe quoi (surtout de n'importe quoi, en fait), des maths à la moto et ma vie quotidienne, en passant par les langues, la politique, la philo de comptoir, la géographie, et beaucoup de râleries sur le fait que les ordinateurs ne marchent pas, ainsi que d'occasionnels rappels du fait que je préfère les garçons, et des petites fictions volontairement fragmentaires que je publie sous le nom collectif de fragments littéraires gratuits. • Ce blog eut été bilingue à ses débuts (certaines entrées étaient en anglais, d'autres en français, et quelques unes traduites dans les deux langues) ; il est maintenant presque exclusivement en français, mais je ne m'interdis pas d'écrire en anglais à l'occasion. • Pour naviguer, sachez que les entrées sont listées par ordre chronologique inverse (i.e., la plus récente est en haut). Cette page-ci rassemble les entrées publiées en mai 2004 : il y a aussi un tableau par mois à la fin de cette page, et un index de toutes les entrées. Certaines de mes entrées sont rangées dans une ou plusieurs « catégories » (indiqués à la fin de l'entrée elle-même), mais ce système de rangement n'est pas très cohérent. Le permalien de chaque entrée est dans la date, et il est aussi rappelé avant et après le texte de l'entrée elle-même.

You are on David Madore's blog which, like the rest of this web site, is about everything and anything (mostly anything, really), from math to motorcycling and my daily life, but also languages, politics, amateur(ish) philosophy, geography, lots of ranting about the fact that computers don't work, occasional reminders of the fact that I prefer men, and some voluntarily fragmentary fictions that I publish under the collective name of gratuitous literary fragments. • This blog used to be bilingual at its beginning (some entries were in English, others in French, and a few translated in both languages); it is now almost exclusively in French, but I'm not ruling out writing English blog entries in the future. • To navigate, note that the entries are listed in reverse chronological order (i.e., the most recent is on top). This page lists the entries published in May 2004: there is also a table of months at the end of this page, and an index of all entries. Some entries are classified into one or more “categories” (indicated at the end of the entry itself), but this organization isn't very coherent. The permalink of each entry is in its date, and it is also reproduced before and after the text of the entry itself.

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Entries published in May 2004 / Entrées publiées en mai 2004:

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(lundi)

En avant vers le mois de juin !

Ces prochains jours vont être un peu la course. Avoir beaucoup de choses inscrites dans mon emploi du temps, lorsqu'il s'agit de choses plutôt plaisantes, m'est évidemment agréable, mais en même temps c'est un peu stressant parce qu'on a l'impression de devoir sans arrêt courir d'un endroit à un autre, ou d'une personne à une autre, et de ne pas pouvoir se permettre de souffler un peu ni d'improviser quelque chose qui n'était pas prévu. Il est vrai que je m'inquiète de peu (ce que j'appelle un emploi du temps chargé, pour d'autres, ce serait le désert) ; accessoirement, comme d'habitude, ma capacité à répondre à mon mail s'en ressent.

Quelques repères importants. Demain, mardi 1er → voir mon directeur de thèse le matin pour faire le point ; dîner prévu au restaurant sichuanais le soir. Vendredi 4 → double anniversaire à célébrer à l'ENS. Dimanche 6 → projection entre amis du Déclin de l'empire américain et des Invasions barbares. À caser quelque part → visiter les jardins Albert Kahn à Boulogne, présenter Mouton à Péter et réciproquement (j'aime beaucoup faire se rencontrer des gens). Probablement du 12 au 15 → petit voyage à Lyon pour faire la connaissance de ma famille adoptive. Mercredi 16 → départ pour Göttingen. Mercredi 23 → retour à Paris. Samedi 26 → marche des fiertés.

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(lundi)

Rédaction

J'ai passé la journée à rédiger[#] ce qui est censé être le dernier calcul de ma thèse. Globalement, je suis plutôt dans le mode « ça marche » en ce moment : j'ai eu quelques hésitations au cours de la rédaction (du type, zut, pourquoi c'est vrai, ça, au fait ? et si c'est faux ça met tout en l'air), mais en fin de compte tout a eu l'air de se dérouler correctement. La possibilité d'une erreur n'est pas du tout encore exclue (même quand les choses sont très proprement écrites, d'ailleurs, on peut toujours s'être trompé), mais elle est au moins un peu éloignée ; et si demain matin (enfin, dans quelques heures, en fait…) mon directeur de thèse semble convaincu par mes explications, ce sera un assez grand soulagement pour moi. La rédaction de cette partie-là sera encore à améliorer grandement (pour l'instant c'est toujours un demi-brouillon), il faudra écrire une introduction et concaténer les différentes choses que j'ai déjà mises au propre, mais je commence à avoir quelque chose qui ressemble à une thèse (et un certain espoir de soutenir vers l'automne).

[#] Bon, je ne prétends pas que je n'ai pas été occasionnellement distrait par quelques jeunes conscrits en train de faire les marioles en salle informatique.

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(dimanche)

Une entrée pour aujourd'hui

Le Mouton essayait de me persuader de ne pas écrire d'entrée pour aujourd'hui. Et moi je disais que ça décevrait les gens. Alors juste par esprit de contradiction : j'écris quand même une entrée aujourd'hui, et elle est toute pourrie donc elle décevra quand même les gens. C'est vraiment crétin, hein ?

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(samedi)

Un mystère

[La carte postale mystérieuse]Imaginez que vous receviez la carte postale suivante : un côté de la carte est complètement blanc (pas de photo ou quoi que ce soit). L'autre côté (qui indique POST CARD — The address to be written on this side) comporte sur la moitié gauche la seule phrase le lichen se développe (sic ; apparemment imprimée sur la carte, à l'encre grise, dans une police genre Futura, au milieu de la carte en hauteur), et sur l'autre l'adresse du destinataire (David Madore / 11 rue Simonet / F75013 Paris / FRANCE) et celle de l'expéditeur (Jo Lewington / 119 Mayfair / Reading, Berkshire / RG30 4RB / ENGLAND) dont vous n'avez absolument jamais entendu parler ; le cachet de la Royal Mail indique que la carte a été postée à Reading le 12 mai 2004. Vous n'avez, bien entendu, jamais mis les pieds à Reading (au plus, vous l'avez traversé en train en allant, vraisemblablement, de Londres à Oxford, et le train a pu s'y arrêter quelques minutes ; et vous avez entendu parler de, ou lu, la ballade de la geôle de Reading d'Oscar Wilde, mais c'est à peu près tout ce que vous savez[#] sur cette ville), et vous ne connaissez personne qui y habite. La phrase le lichen se développe ne vous évoque rien du tout, et n'évoque à Google qu'une page pas spécialement remarquable sur l'élargissement de l'Union européenne. Quant à Jo Lewington de Reading, elle évoque à Google une page du site de la BBC où il est dit : The last time Bletchley Park code breaker Jo Lewington was due to see her friend Frances Harvey was at Frances' wedding. But Jo, now an 81-year-old living in Reading, missed her train, arrived too late and never saw her friend again. Vous êtes, pour le coup, absolument persuadé de ne pas connaître de vétéran cryptographe anglaise de 81 ans, et vous vous demandez bien comment elle aurait pu avoir votre adresse (bon, par le Web, certes, j'imagine, mais pourquoi ?).

Maintenant, la question à 2000 zorkmids : vous en concluez quoi ? Je précise que ceci n'est pas une expérience de pensée complètement fumée. Le cas est vraiment arrivé à quelqu'un tout près de vous.

[#] Ah, aussi : que ça se prononce [ˈɹɛdɪŋ] comme si ça s'écrivait Redding, et non pas comme le participe présent du verbe to read.

Dans le genre énigme invraisemblable, celle-ci est assez forte. Et, non, je n'ai pas la réponse, et je n'en ai aucune idée. Si le but était de m'intriguer, c'est assez réussi : ceci dit, c'est intrigant jusque dans le mystère lui-même (il y avait beaucoup plus économique pour m'intriguer). Pareil si le but était que j'en parle ici. Si le but était de me faire passer un message, c'est complètement raté.

Entre autres observations qu'on a pu faire : les mots Reading (et il s'agit bien de la ville dont je note la prononciation trompeuse) et lichen apparaissent justement dans un fameux poème sur les difficultés de prononciation de l'anglais que j'ai retapé (et que j'avais commencé à transcrire systématiquement en phonétique, sans avoir le courage d'aller jusqu'au bout), en plus, à une seule strophe d'écart et au même endroit dans la strophe. Et la Jo Lewington (qu'elle soit ou non vraiment la personne ayant expédié la carte) est censée être cryptographe, donc peut-être évoquer un message à comprendre dans la phrase. Ou encore, peut-être y a-t-il un lien entre la page renvoyée par Google en recherchant la phrase imprimée sur la carte et mon entrée récente sur l'élargissement de l'Union européenne.

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(vendredi)

Quelques petites vérités

Les gens, c'est compliqué. Et c'est pour ça que c'est bien.

Les ordinateurs, ce n'est pas toujours si compliqué[#]. Et ce n'est pas pour autant que c'est bien.

Les maths, c'est parfois compliqué. Et puis c'est bien, de temps en temps. Surtout quand ça marche.

Le reste, je ne sais pas trop. J'y réfléchis encore.

[#] Le problème auquel je faisais allusion est résolu dans le noyau Linux 2.6.7-rc1, me dit-on. Je tâcherai de rajouter un lien vers le thread approprié sur linux-kernel quand il sera apparu sur Google.

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(jeudi) · Premier Quartier

Un bon jour

Il y a des jours, comme ça, où tout va bien. Où il fait beau, où on se sent bien, où on arrive à faire des choses dans la journée, où les maths marchent plutôt bien, où les ordinateurs font semblant de fonctionner, où on va voir un bon film en agréable compagnie avec laquelle on passe un excellent moment, et où globalement on n'arrive pas à trouver la moindre raison de ne pas être pleinement satisfait.

Je suis heureux. Profitons-en, on ne sait jamais ce que demain apportera !

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(jeudi) · Premier Quartier

La Mala Educación

Je viens de voir le dernier Almodóvar. Un film magnifique, et très émouvant. La construction est un peu sophistiquée (avec des mises en abyme un peu borgesiennes), mais cela ne retire rien à la force de l'histoire. Il y a une partie de l'histoire qui rappelle La Ville dont le prince est un enfant, mais il y a aussi des parties bien différentes.

Pas forcément le meilleur film du réalisateur, mais assurément une réussite.

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(jeudi) · Premier Quartier

“Il était une fois” commence à Göttingen

La saison des écoles d'été en mathématiques est revenue. L'an dernier j'avais fait un petit tour à Lens et un autre à Besançon. Cette fois-ci ce sera une semaine à la prestigieuse Georg-August-Universität de Göttingen, à la mi-juin, pour assister à une conférence sur la géométrie diophantienne organisée par Yuri Tschinkel. Je devrais y faire un exposé (le 22 juin à 16h) sur l'approximation faible sur les surfaces cubiques sur les corps de fonctions (sans doute le résultat le moins inintéressant de ma thèse…). J'ai rempli aujourd'hui les papiers administratifs pour le financement de mon déplacement.

Bon, j'ai toujours la phobie des voyages (encore un handicap pour devenir mathématicien), mais je pense qu'une semaine à Göttingen j'arriverai encore à survivre. Au moins le programme semble-t-il assez alléchant.

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(Wednesday)

More Linux woes

I don't know how (or even exactly when) it started, but my computer has this strange problem which causes it to unpredictably replace certain parts of random files by null bytes (always a multiple of 256 bytes, it seems, and aligned at such multiples; typically around 2 kilobytes in a given file). As one can expect, this causes all sorts of horrendous difficulties, and it tends to be pretty damn hard to find out where the problem lies (even knowing that this behavior occurs, finding exactly which file has been altered to cause a given malfunction is not an easy task).

So far none of my personal data has been affected, it seems—only various system files, which I have been able to recover. But the nagging doubt is always present: what if one of my important files gets corrupted and I don't notice it and make backups of it in various places, and really end up screwing everything? I'd like to have my peace of mind back.

The trouble is that I have no idea what causes the problem. It's probably not a hardware flaw: I have good reasons to believe that memory, CPU and hard drives are sane. I suspect a bug in the Linux kernel, in the ReiserFS layer, perhaps occurring only in SMP boxen, and perhaps starting only with the 2.6.6 or 2.6.5 version. But the bug has proven remarkably elusive: I tried all sorts of intensive stress-testing on the filesystem (creating a small number of large files, a large number of small files, simultaneously writing and reading, and all sorts of variants, with RC4 streams), and found no way to reproduce the corruption in vitro if I may say. So I can't write any kind of bug report that would be of any use, and I don't know which Linux version I should downgrade to (or even whether the problem is really in the kernel and not, for example, some obscure part of the C library).

I'm rather annoyed at this, but I really don't know what to do. If I had just a little more knowledge about the problem I could post on the linux-kernel mailing-list, but as things are this would be pretty useless.

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(Tuesday)

Update on the comments system

I made a couple of rather major changes to the comments system. A couple of security issues and bugs have been fixed, but more importantly, certain (non-ASCII) Unicode characters are now permitted in nicknames (technically, Latin letters from the Latin-1 and Latin Extended A supplements), and a moderation system has been put in place.

Concerning account names: they are now case-insensitive and accent-insensitive (if your account is called Joë, you will be able to log in by typing joe or J Ô E or similar things), but the accents and capitalization provided at creation are preserved (so it will always display as Joë). If you are unhappy about the way your account is named or capitalized or accented, please send me an email, and I'll make the necessary changes; I can also allow non-Latin characters on a case-by-case basis. Automatization of the possibility of making changes to one's account settings is next in the TODO list.

The other major change concerns moderation. I am becoming rather tired of the number of people (essentially anonymous cowards) who post comments which are entirely content-free or blatantly off-topic. It's not so much that it annoys me, but it sort of drowns out more interesting and pertinent comments from people who have useful or sensible things to say. It's a shame, given the number of extremely competent people who sometimes do me the honor of commenting on this blog, to have their signal drowned under the noise of irrelevant chattering. On the other hand, I strongly dislike any kind of censorship, and so long as there is no clear abuse I don't see why I should refuse to spare a few kilobytes on my hard drive for some marginally-relevant posts.

So I will now be moderating comments, but the moderation is elective: by default, only positively moderated comments will be displayed, but if the user so chooses he can view all comments, or at any rate those comments which have not yet been moderated one way or another. The choice is made by using the form at the bottom of every page in the comments system; it requires cookies to be accepted (the cookie is called showlevel and has value 0, 1 or 2), and the choices should be self-explanatory; the default value is to display only positively moderated (aka approved) comments. This is quite independent from the possibility of creating an account (I won't be storing your display level on the accounts database: it exists only in the form of the cookie which you keep on your computer). Even when the user chooses to view all comments (well, except those which are deleted, this is another thing; I probably won't be deleting people's comments for any reason, but the posters themselves are allowed to do so), comments which have been moderated down (aka disapproved) or have yet to be moderated are indicated as such: please do not reply to comments which have been moderated down. Incidentally, for Mozilla users, who can see the number of comments on each entry through an XBL binding, this number should take into account your present level of display. I'm not sure it really works, though.

All this is still rather experimental. Please tell me if anything breaks (and you don't think I would notice).

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(mardi)

Was this the face that launch'd a thousand ships, / And burnt the topless towers of Ilium?

Μῆνιν ἄειδε θεὰ Πηληϊάδεω Ἀχιλῆος…

Je suis allé voir (avec mon petit frère 😉) le grand péplum planétaire du moment, Troie. Eh bien je ne l'ai pas trouvé mauvais du tout.

Le plus gros reproche que je lui ferai est qu'Agamemnon et Ménélas sont montrés de façon vraiment simpliste comme des personnages entièrement méchants et négatifs : le parti pris (puisque apparemment Hollywood n'arrive pas à raconter une histoire, et surtout une guerre, sans prendre de partie) est plutôt celui des Troyens ; Priam est présenté comme indiscutablement bon (quoique faible), Hector est parfaitement honorable et globalement un chic type, et Pâris est un brave garçon. Côté grec, Achille a une personnalité assez complexe, il est bien joué et ne tombe pas trop dans la caricature (certes, tout cela n'a peut-être aucun rapport avec le personnage présenté sous ce nom dans l'Iliade, mais who cares?). Et Ulysse (Odysseus) n'est pas mal du tout (et son côté rusé et habile ressort bien).

De grosses libertés ont évidemment été prises avec l'histoire canonique, mais je pense que c'est normal ; la guerre de Troie reste le mythe fondateur de notre civilisation, il est normal qu'on le raconte à une époque donnée selon ce que l'imaginaire de cette époque en conçoit (et le cinéma américain peut bien prétendre au rôle de forgeron de l'imaginaire). En tout cas je ne crie pas au scandale : si on me demande d'imaginer, naïvement et comme un enfant qui veut être émerveillé, l'histoire en question, je ressortirai quelque chose de pas trop loin de ce que ce film présente. Bien sûr, la vision vieillira mal. Mais ceux qui veulent voir la présentation telle qu'on la faisait peut-être au IXe siècle avant l'ère commune peuvent lire le poème qu'on sait.

Les dieux sont ici les grands absents. Je pense que c'est une bonne décision, car il aurait été délicat de décider comment les montrer (et l'homme est la mesure de toute chose, non ?). Certes, représenter Achille comme impie et Hector comme agnostique (fatigué de voir son père suivre toujours aveuglément les augures), c'est osé, mais je trouve qu'ils s'en sortent bien. Ils auraient pu tirer quelque profit en montrant le sacrifice d'Iphigénie, mais ils ne l'ont pas fait (Clytemnestre est entièrement absente, et Agamemnon est tué par Briséis, ce qui n'était pas forcément utile). J'ai apprécié le clin d'œil consistant à montrer, lors de la fuite des Troyens, Pâris donnant son épée à un jeune homme qui aide son vieux père à fuir, et il lui demande comment il s'appelle — Énée (vous pensez qu'ils vont faire une suite, Les Troyens contre-attaquent : la fondation de Rome ?).

Accessoirement, j'en suis à me demander : au fait, Hélène elle-même, elle est censée devenir quoi, à la fin, dans l'histoire ? (À part avoir une amourette avec Faust pas mal de siècles plus tard, je veux dire.)

Sinon, l'incendie et le sac de Troie m'ont paru bien rendus, et on pense bien à la magnifique force des vers de l'Andromaque de Racine,

Songe, songe, Céphise, à cette nuit cruelle
Qui fut pour tout un peuple une nuit éternelle.
Figure-toi Pyrrhus, les yeux étincelants
Entrant à la lueur de nos palais brûlants,
Sur tous mes frères morts se faisant un passage,
Et de sang tout couvert échauffant le carnage.
Songe aux cris des vainqueurs, songe aux cris des mourants,
Dans la flamme étouffés, sous le fer expirants.

J'ai aussi aimé la scène où Priam va supplier Achille de lui rendre le corps de son fils. C'est sans doute le moment le plus fort de l'Iliade (24:477s), et ils s'en tirent ici avec les honneurs (mais Peter O'Toole, qui joue le roi troyen, n'est pas exactement un mauvais acteur…).

Bon, et puis si on n'est pas féru de culture hellénique, on peut toujours y aller pour voir la beauté ténébreuse d'Orlando Bloom (Pâris) ou les magnifiques biceps huilés de Brad Pitt (ah… la scène où Achille se déshabille… rhâââ…). Si vous vous demandez, rien n'est montré, et très peu est suggéré, entre Achille et Patrocle ; ce n'est pas forcément plus mal, en fait. Pour ceux qui préfèrent les femmes, la beauté la plus fameuse de toute l'Histoire est jouée par Diane Kruger, mais je ne sais pas si son visage aurait suffi à faire partir mille nefs.

Voilà voilà. En un mot : allez le voir si vous avez trois heures à perdre, ou si vous aimez ce genre de spectacles grandioses, ou si vous voulez mater de beaux garçons. N'allez pas le voir si vous êtes un ayant-droit de ce M. Homère.

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(lundi)

La recherche en clignotant

Vous connaissez la blague du fou qui demande à un autre fou si son clignotant marche bien, et l'autre répond : il marche — il ne marche pas — il marche — il ne marche pas… ?

C'est pareil avec la recherche mathématique. Je ne sais pas si tous les mathématiciens le vivent pareil, mais ma thèse (enfin, la partie finale de ma thèse sur laquelle je travaille en ce moment, mais c'était pareil pour toutes les autres) n'arrête pas de marcher, de ne plus marcher, de marcher à nouveau, de ne plus marcher, etc. C'est horriblement stressant. On part sur un truc, une esquisse de démonstration, qui semble marcher ; on s'aperçoit qu'il y a un problème à un endroit, et on le corrige, en rendant les choses un tantinet plus compliquées, en faisant un petit détour, en renforçant les hypothèses ou en affaiblissant la conclusion, ou en changeant un peu le cadre, ou quelque chose comme ça ; puis on s'aperçoit d'un autre problème, et ainsi de suite. À chaque fois qu'on trouve un de ces trous, on a l'angoisse que ça réduise tout à néant, y compris les corrections précédentes (et c'est peut-être cela qui est le plus stressant : se dire que le soulagement qu'on a éprouvé en corrigeant le trou n−1 était absolument vain si le trou n se maintient) : car la démonstration ne vaudrait alors rien. Et même si on trouve une façon de faire marcher les choses, on a l'impression de passer « plus juste » si j'ose dire, de risquer encore plus au prochain trou parce qu'on aura « moins de marge » pour faire marcher les choses, et ainsi de suite ; et à chaque fois la démonstration est rendue plus compliquée, et plus pénible. Même si on arrive à s'en sortir à chaque fois, on se demande si le processus finit vraiment, si on n'est pas en train de construire une démonstration fractale, où chaque morceau de démonstration rencontre un obstacle et le contourne en rencontrant d'autres obstacles en chemin…

Il faut aussi noter qu'il y a plusieurs sortes de problèmes qui peuvent se poser dans la recherche d'un raisonnement mathématique. On peut ne pas trouver de piste du tout, bien sûr, ou on peut trouver une piste mais ne pas arriver à la rendre rigoureuse ; ou on peut aussi poursuivre une piste assez loin en espérant qu'elle marchera, et découvrir au final qu'elle ne marche pas, et qu'on n'a donc pas avancé du tout (l'idée étant qu'on cherche à prouver A, qu'on essaie de passer par B, et qu'on s'aperçoit après une longue recherche pour prouver B que ce dernier est en fait faux, donc que cette piste est vraiment impossible, et qu'on n'a plus la moindre idée pour prouver A).

Il y a huit-dix mois, mon directeur de thèse me proposait, pour avoir un « petit » quelque chose à ajouter à ce que j'avais déjà fait comme travail, de faire un calcul explicite (d'un « groupe de Chow de zéro-cycles modulo équivalence rationnelle sur une hypersurface cubique n'ayant pas d'obstruction de Brauer-Manin », si vous voulez les détails techniques). En octobre j'ai commencé à faire sérieusement ces calculs (techniquement, une recherche de modèle régulier, en résolvant par éclatements explicites les singularités du modèle naïf), qui auraient dû ne pas être très compliqués, sur la variété qu'on m'avait proposée ; en novembre, je me suis rendu compte que ces calculs devenaient inextricables. En janvier, mon directeur de thèse, qui avait discuté avec Pierre Deligne en Inde, m'a rapporté la suggestion de celui-ci : utiliser des résolutions toroïdales. Ces dernières donnent un nouvel espoir : on arrive à trouver explicitement la désingularisation recherchée ; malheureusement, elle est incontrôlable : mi-mars, on se rend compte qu'il faudra contrôler la jacobienne intermédiaire d'une hypersurface cubique, ce qui est très technique, en plus de majorer un Néron-Severi pas du tout évident — et le résultat final est peut-être faux. J'ai alors l'idée de changer de variété, et j'en trouve une qui semble miraculeusement donner une désingularisation (toujours par les méthodes toroïdales proposées par Deligne) encore plus contrôlable (la composante irréductible horizontale « difficile » de la fibre spéciale est rationnelle). Je refais les calculs. Il y a quelques difficultés techniques supplémentaires qui apparaissent, mais je progresse : samedi soir (avant-hier) je crois en être arrivé enfin au bout. Ce matin, je raconte ces dernières évolutions, et mon directeur s'aperçoit qu'il y a une erreur importante (j'avais « oublié » que la norme sur une courbe elliptique est surjective par extension finie d'un corps fini) : nous avons eu un moment de profond abattement, parce que cela rendait vaine toute la recherche effectuée dans ce sens (c'est-à-dire un bon nombre de mois). Finalement, j'ai eu l'idée de proposer de chercher sur un corps différent, et il a réussi à en dénicher un pour lequel le problème ne se pose pas (et où la conclusion est quand même intéressante). Donc je suis de nouveau dans le mode « ça marche » : mais pour combien de temps ?

On en finit par ne plus oser réfléchir au problème, parce qu'on se dit que si on y pense trop on va trouver un trou qui fait que plus rien ne marche.

Vraiment, c'est stressant, la recherche en maths.

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(dimanche)

Moi content

Ce soir je vais me coucher avec l'impression d'avoir fait quelque chose d'utile, et de Bien.

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(dimanche)

Cauchemar

J'ai rêvé que j'étais dans Jussieu (qui ressemblait, encore beaucoup plus qu'il ne l'est dans la réalité, à un labyrinthe de contreplaqués, avec des couloirs bas, des salles désertées, etc.) et que j'y rencontrais une petite fille (elle devait avoir quelque chose comme dix ans) complètement folle, qui voulait absolument m'arracher une mèche de cheveux (ben oui ça fait très mal, me disait-elle, c'est pour ça que je veux le faire) ; j'ai dû m'enfuir dans des toilettes obscures (et désertes). Je me suis réveillé quand elle était sur le point de me trouver.

En racontant ça, je me rappelle aussi vaguement le fragment précédent de mon rêve : j'étais avec un ami (que j'identifie, mais je ne vais pas le nommer, de toute façon c'est peu important) et son père et un ou deux autres amis, et le père (qui était censé être original et décalé, mais pas fou, on notera la subtilité) se livrait à des simulations très gore de mutilations rituelles (juste des simulations, mais avec quand même pas mal de vrai sang qui coulait, sinon ce n'est pas drôle).

Je me permets de piquer cette parole à Garoo : Je ne sais pas ce qui se passe dans ma tête en ce moment, mais j'aimerais autant ne pas être dedans quand ça va péter pour de bon.

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(samedi)

Tachycardie et hypocondrie

J'ai encore fait un crise de tachycardie ce matin : elle a duré nettement plus longtemps que les précédentes (au bout de dix minutes j'avais toujours un pouls dans les 140 ; forcément, ça m'a inquiété encore plus, donc mon cœur a battu encore plus vite), j'ai fini par appeler le SAMU, qui après interrogatoire (mené avec compétence et efficacité — déjà c'est rassurant en soi) m'a renvoyé sur SOS médecins.

Le médecin qui est passé m'a assuré que ce n'était pas dangereux tant que mon rythme cardiaque restait bien régulier. Elle m'a prescrit un anxiolytique. Quoi, je suis anxieux, moi ?

Peut-être qu'il faudrait créer SOS hypocondriaques, en fait, pour les gens comme moi, pour éviter d'encombrer inutilement le SAMU : d'après Google, ça n'existe pas encore (dommage !).

(Et hop, encore un mot à orthographe traîtresse : c'est hypocondriaque en français, mais hypochondriac, avec un ‘h’, en anglais.)

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(vendredi)

Les gens sont fantastiques

Il y a des jours où je croirais presque à la providence. Je me disais qu'il serait bien que je voie des gens (que ce soit des nouvelles têtes ou des anciennes pas vues depuis longtemps) pour me changer un peu les idées. Et le hasard, donc, a apparemment entendu ma prière, parce qu'il m'a envoyé deux surprises plaisantes.

La première, c'est un mail que j'ai reçu d'une personne un peu inattendue (je ne dis pas : inconnue), et dont le contenu était encore plus inattendu : je suis tombé de très haut, même, mais c'était une chute en fait assez agréable. OK, ce que je dis là est extrêmement vague (parce que je veux juste indiquer l'effet que ça m'a fait, sans rien révéler de ce dont il est question : ce n'est pas à moi qu'il appartient de le dire, ce sont les affaires d'un autre), mais, en gros, mettons que j'avais émis une idée en plaisantant et que sans m'en douter j'ai visé complètement juste (ce qui veut dire que j'ai mis les pieds en plein dans le plat, cependant ce n'est pas forcément si mauvais que ça). En tout cas, j'ai appris une chose qui m'a fait plaisir (et qui va peut-être me permettre, incidemment, de faire un petit peu de Bien). Bon, là le lecteur est normalement complètement confused, alors assez dit.

La deuxième surprise, c'est que j'ai croisé Ludmilla, que je n'avais pas vue depuis une éternité. Elle ne suit normalement pas mon blog (honte sur elle, elle préfère lire le site du Monde pour tout savoir du monde), donc nous n'avons pas eu trop du temps de prendre un café et le dîner ensemble pour nous mettre au courant de la vie, l'univers et tout le reste. De toute façon, je suis incapable de cacher quoi que ce soit à Ludmilla (vraiment rien : devinez qui a pris la photo…) : si jamais j'essaie d'éviter un sujet, elle va le sentir et dans la minute qui suit me poser précisément la question que je voulais contourner — c'est pour ça que je l'adore, et que je l'appelle affectueusement l'Inquisition espagnole. (Enfin, là j'ai réussi à ne pas évoquer ce à quoi je fais allusion dans le paragraphe précédent, mais c'est sans doute parce que ça ne m'aurait pas trop dérangé d'en parler.) Mais apparemment je ne dois pas être le seul auquel Ludmilla extorque des informations, parce qu'elle m'a raconté plein de choses sur diverses connaissances communes (pas exactement des secrets, pas exactement des ragots, et on ne pourrait pas vraiment la taxer d'indiscrétion) qui m'ont beaucoup intéressé, ne serait-ce que parce qu'elle m'a montré du doigt certaines évidences qui m'avaient échappé (et beaucoup de mystères s'éclairent quand on remarque ce qui va bien).

Qu'est-ce que je tire de tout ça ? Que les gens sont vraiment fantastiques, et que je les adore (vous avez compris, gens ? je vous adore), parce qu'ils sont si riches et si compliqués. Allez, pour le plaisir, je cite de nouveau Gandalf :

‘My dear Frodo!’ exclaimed Gandalf. ‘Hobbits really are amazing creatures, as I have said before. You can learn all that there is to know about their ways in a month, and yet after a hundred years they can still surprise you at a pinch. I hardly expected to get such an answer, not even from you.’

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(jeudi) · Ascension

The road goes ever on and on…

Tout en évitant le grand déballage (si j'y arrive[#]), je voudrais dire quelques mots de ce qui ne va pas (mais qui va déjà mieux). Enfin, tout le monde aura compris qu'il s'agit d'une peine de cœur — j'eus commis l'imprudence de m'engager sur la voie d'un amour impossible. Pas énormément à dire sur l'affaire, en vérité : le charmant garçon en question (qui répond à un nom de code désignant certains ovins) est hétéro (modulo toutes les précautions nécessaires sur l'usage de ce mot) et il a une copine (dont il n'a pas la moindre intention de se séparer — il n'en a jamais été question — et c'est tant mieux — et il ne compte pas non plus essayer de se partager en deux). Et je n'ai donc jamais eu autre chose que la certitude que c'était impossible ; enfin, j'ai pu me faire par moment quelque illusion, parce que c'est tentant de s'en faire, mais je savais bien que c'étaient des illusions ; sur le fond, donc, les choses étaient claires dès le commencement[#2].

Ça n'aura pas été la première fois, et on peut même dire que j'ai une certaine expérience en la matière. J'ai tendance à prétendre qu'à force de sang, de sueur et de larmes, j'ai acquis une certaine capacité à ne pas tomber amoureux (capacité que tout le monde doit acquérir, ceci dit, mais quand même surtout les homos dans un monde où 95% de la population ne l'est pas), ou même, si c'est déjà le cas, à cesser de l'être. Alors pourquoi pas cette fois-ci ? Tout simplement parce que j'ai été confronté à une situation qui était pour moi complètement inédite : normalement, quand je tends à tomber amoureux de quelqu'un, je me heurte soit à un refus clair et net soit à l'indifférence la plus complète (ou l'apparente ignorance de mon existence même) — c'est ce qui permet de passer rapidement à autre chose. Or cette fois c'est avec tout sauf refus ou indifférence que j'ai été accueilli : il ne faut pas oublier qu'entre la situation où les choses marchent et celle où elles ne marchent pas du tout, il y a de la marge pour des régions de clair-obscur où, même si on est persuadé qu'à terme cela va casser, il est très tentant de profiter de ce qu'on reçoit. Et d'autant plus si on n'a pas connaissance de mieux.

Est-ce que j'ai à regretter ? Pas forcément : même si je souffre maintenant de ne pas avoir écouté dès le début la voix de la sagesse, si je l'avais fait j'aurais peut-être été moins blessé mais je n'aurais aussi pas eu cette chance d'avoir une petite idée de ce que cela peut être qu'un amour réciproque ou de tenir dans mes bras quelqu'un que j'aime — et comme je ne suis pas du tout persuadé que l'existence me donne jamais la chance d'en savoir plus, c'est toujours bon à prendre ; il n'est pas clair que les pertes dépassent les gains. (Et je compte sur ma résilience pour minimiser les pertes.) Après tout, de même, ce n'est pas parce que nous vivons avec la certitude qu'au final nous mourrons et que tout aura été vain, que nous ne devons pas profiter de la durée qui nous est impartie.

Maintenant, il faut cependant que cela cesse, parce que je ne contrôlais vraiment plus grand-chose, et que j'étais plus amoureux que jamais avant. Nous avons donc mis les points sur les ‘i’, je dois sacrifier cet amour (et Mouton aussi doit sacrifier quelque chose, mais ce n'est pas à moi d'en parler). En même temps, il est hors de question que nous rompions le contact : ce serait un gâchis trop immense, et ce serait céder trop facilement à une fatalité stupide. Cependant, notre complicité doit cesser d'être amoureuse pour devenir amicale et fraternelle : cela va me demander un effort constant et une vigilance permanente — mais je pense vraiment pouvoir y arriver (et là aussi, j'ai une certaine expérience).

Ce qui est dur, aussi, c'est de revenir à l'idée — qui m'est pourtant si familière — de la solitude affective. On comprend qu'il est tentant de s'accrocher désespérément au moindre signe de tendresse, aussi vain et désespéré fût-il dans son avenir, s'il n'y a en regard qu'un désert où l'espoir ne brille pas par sa présence. Il est vital que je me remette en quête de quelqu'un, et que je fasse semblant d'y croire, quel que soit la futilité de cette quête — ce n'est pas par ses chances de succès mais en elle-même qu'elle importe.

[#] Je sais que j'ai tendance à ne pas faire preuve d'une grande retenue dans ce que je raconte (quoi, exhibitionniste, moi ?). Mais je pense qu'écrire cette entrée m'aide à tourner la page.

[#2] S'il faut éclaircir la citation, Marcellus était le neveu d'Auguste et son héritier présomptif, qui est mort prématurément. Tu Marcellus eris (Tu seras Marcellus), c'est la prophétie du ciel qu'on voudrait croire, mais dont on sait qu'elle ne se réalisera pas.

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(mercredi) · Nouvelle Lune

I will survive

Je vais déjà nettement mieux qu'hier. Merci pour les témoignages de sympathie que j'ai reçus (parfois d'où je ne les attendais pas). Finalement je crois que je m'en sors bien, compte tenu d'à quel point j'étais tombé amoureux ; et je pense aussi qu'il sortira du bien de tout ça. Je vais m'en tenir à ça pour aujourd'hui, parce que je suis physiquement exténué, je vais faire un gros dodo, là.

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(mardi)

I will not say: do not weep; for not all tears are an evil

Quelque chose a cassé. Je n'ai pas la force d'en dire plus pour l'instant, j'essaierai demain. Je n'ai pas été très honnête avec ce blog, parce que je n'ai pas parlé (ou alors seulement de façon allusive et indirecte) de ce qui m'importait le plus pendant ces quelques dernières semaines (enfin, il y en a un certain nombre qui comprennent tout de même) ; je ne dirai de toute façon pas tout, mais je peux parler un peu pour mieux faire mon deuil. Une vive lumière s'est éteinte, il faut que je me réhabitue à l'obscurité.

Quelque chose a cassé, mais tout n'est pas perdu : car c'était sans doute le mieux, et de toute façon c'était inévitable (et je le savais dès le commencement). Et quand les choses sans espoir se sont cassées, on peut construire à la place — pas en aussi grandiose, mais en plus solide.

Donc, si la question est : ça va, David ?, la réponse est, non, pas du tout. Mais — et c'est ce qui importe — si la question est : ça ira ? (dans quelques jours, ou quelques semaines), alors la réponse est oui, oui, je pense bien.

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(Monday)

How many strokes on the dollar sign?

A very important question for all of us professional hair-splitters out here: how many vertical strokes are there on a dollar sign (‘$’)? Unfortunately, this question admits no definite answer, since apparently both the single-stroke and double-stroke variants are equally correct. Nobody knows for sure what the origin of the symbol is: the most common theories seem to be that it is initially a deformed handwritten version of a ‘p’ with a superscript ‘s’ used as an abreviation of the plural “pesos”, or else that it comes from an ‘S’ with a superimposed ‘U’ (as a kind of monogram of the United States); if we believe one or the other, the single-stroke or double-stroke variant may be more correct—but it could be that both these theories are wrong (perhaps the symbol simply originates from an accounting sign like there were many at some time). I have checked typographic specimens of various typefaces, and the single-stroke version seems more common, but the double-stroke one is used in (at least certain modern versions of) Baskerville (regular but not semibold), Bembo, Caslon and Plantin; all “modern” typefaces, from Times to Stone (through Futura, Optima, Perpetua and Frutiger) use a double stroke, so it is probably safe to say that typographers have made their choice in favor of the single stroke. Also, the Unicode's standard display sample uses a single stroke (but this isn't very significant: they just took a standard Times font for such characters).

One could also ask how many horizontal strokes the pound sign (‘£’) is supposed to have (I refer to the real “pound sign”, not to the number sign, ‘#’ which some Americans confusingly call the pound sign, and which undoubtedly has two horizontal strokes and two vertical ones). I have no answer as to that, but the symbol of the yen (‘¥’) typically has two strokes, even though Unicode says: glyph may have one or two crossbars. There are always two bars on the symbol of the euro (‘€’)—however, the latter is not properly speaking a symbol, it is a logotype (in the sense that its design is fixed and defined by the European Union, it should not depend on the font). Speaking of currency sumbols, there is in ISO Latin-1 a symbol, ‘¤’, which is “CURRENCY SYMBOL” in Unicode, and also known (still according to the Unicode standard) as Filzlaus or Ricardi-Sonne (“Ricardi sun”? what the hell is that?), and I have no idea what it stands for or how it got there; it is sometimes confused with the euro sign, because the ridiculous Latin-9 encoding (which looks confusedly much like Latin-1) replaced the one with the other, and some fonts or systems fsck up between the two. I tend to use that strange ¤ sign as the symbol of the zorkmid which has gone into hacker jargon in phrases such as do not pass go, do not collect two hundred zorkmids.

Maybe some other time I'll speak about the ampersand (‘&’), which is originally a handwritten form of “et”, or the at sign (‘@’), which comes from “ad”, or again the slash sign (‘/’), which is properly called a solidus (that's what Unicode calls it) or virgule (another confusing name, because in French it refers to a comma). Or about that number sign (‘#’) which goes by so many different names (the most ridiculous being “shibboleth”). Read more about all this in the Jargon file.

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(dimanche)

Conseils et méta-conseils

Je crois que j'ai besoin de conseils. L'ennui, c'est que je crois savoir déjà quels conseils me donneraient chacune des différentes personnes à qui je pourrais demander. Donc finalement, c'est plutôt de méta-conseils que j'ai besoin : savoir de qui je devrais suivre les conseils. Aïe, encore un méta overflow.

À part ça, sans aucun rapport, je me demande pourquoi je me sens systématiquement morose le dimanche soir. Ce n'est pas comme si ma vie était fortement liée au rythme des semaines…

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(samedi)

Quelle heure est-il ?

J'ai déjà eu le rythme circadien décalé, mais jamais à ce point-là. Je n'arrive plus à compter les jours, je ne sais plus quelle heure nous sommes. Je crois que les dernières fois que j'ai dormi, c'était de 2004-05-13T07+02 à 2004-05-13T19+02, puis de 2004-05-14T17+02 à 2004-05-15T00+02, puis encore de 2004-05-15T15+02 à 2004-05-15T18+02 (c'est une sieste, ça, ou une nuit ?), et je n'y Comprends Plus Rien® (ne parlons même pas de savoir quand et quoi j'ai mangé !). J'ai raté plein de choses que je comptais faire, et j'ai perdu tout mon temps à… je ne sais même pas quoi, au juste, d'ailleurs, mais je crois que c'était plutôt à somnoler qu'autre chose. Je me sens vraiment malade, à force (je ne sais pas si c'est la cause ou l'effet, mais je penche plutôt pour l'effet).

Il est temps de réagir.

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(vendredi)

Jus de fruits

Tropicana sort régulièrement, en ce moment, des nouveautés (au moins sur le marché français ; je ne sais pas quels sont les rapports entre leurs gammes de produits sur les différents marchés du monde). Assez récemment, ils ont introduit le mélange mandarine framboise, que j'aime beaucoup, et voilà maintenant qu'est venu le tonic breakfast : eh bien c'est très bon (sauf, je suppose, si on n'aime pas les agrumes…), surtout parce qu'ils ont eu la bonne idée de mettre un peu de jus de citron, qui rafraîchit très agréablement l'ensemble sans le rendre trop acide. Bref, je recommande.

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(Thursday)

arc4gen

My entry for today is a program that I wrote tonight (took me longer than expected, I'm afraid—like, all night). Not an interesting program by any means: just a pseudo-random number generator, an ARC4 stream, to be precise; it can be downloaded here: arc4gen.c (instructions for use and compilation are contained in the comments within the program itself; Public Domain), and there is also a Debian package for the same.

(What's the point of writing a self-standing random number generator, you ask? Well, one possible use is this: you generate a huge file from the ARC4 stream with a given key, and then you check it repeatedly against the stream generated anew from the same key—which should be the same since the generator is deterministic. Any CPU or RAM or filesystem malfunction is pretty likely to be noticed in the process. In fact, that's exactly the reason I wrote this thing: I suspect there's something wrong somewhere on my PC, and I intend to make sure.)

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(mercredi)

ATER or not ATER ?

Un an après, me revoilà en train de remplir un dossier de candidature en tant qu'ATER, en espérant avoir un poste en 2004–2005. Mais cette fois-ci j'y crois beaucoup moins : on va penser que j'ai beaucoup trop traîné à soutenir ma thèse (ce qui n'est pas faux, du reste), puisque mon inscription (officielle !) remonte à 2000, et je ne suis pas du tout convaincu qu'« on » m'accorde une seconde année. Le dossier est excessivement fastidieux à remplir (ça n'a l'air de rien, remplir un dossier de candidature, mais la liste des pièces demandées est énorme, et j'y ai bien passé l'après-midi, à retrouver où j'avais planqué mon attestation de réussite en DEA, mon arrêté de nomination à l'agreg, mon contrat d'ATER de l'année précédente, et ainsi de suite, ainsi qu'à mettre au point un CV qui se tienne à peu près et qui ne souligne pas trop que je n'ai pas assez bossé et que je m'éternise). Et faire ça quand on est d'avance assez découragé, c'est plutôt saoulant. Je me demande si ça vaut la peine que je remplisse un dossier de demande pour d'autres facs (sachant que beaucoup de dates limites doivent déjà être passées, et que d'ailleurs si on ne me prend pas à Orsay les chances ailleurs sont sans doute encore nettement plus exiguës).

Si je n'ai pas cette reconduction de mon ATER, je ne sais vraiment pas ce que je deviens l'an prochain. Il se présente essentiellement deux problèmes : d'abord, il faut que je justifie que malgré mon agreg je ne pars pas enseigner (si je veux avoir la moindre chance de finir ma thèse un jour ; et, si possible, réussir à éviter l'enseignement sans pour autant perdre la dite agreg) ; ensuite, il faut que je me nourrisse. Dans le pire des cas, pour le premier point je dois pouvoir demander un congé pour études, voire un congé pour convenance personnelle (mais c'est coûteux, parce qu'on n'a le droit de le demander qu'un nombre limité de fois, je crois). Pour le second, je peux peut-être mendier auprès de mes parents et utiliser quelques maigres économies. (Je suis loin d'avoir un train de vie fastueux, je me contente très bien de ce que je gagne actuellement, mais je suis aussi assez peu habitué à devoir regarder de très près ce que je dépense.) Peut-être je peux gagner aussi quelques sous en donnant des khôlles ou en faisant des petits cours ou quelque chose comme ça, mais l'idée ne m'emballe pas trop. (D'autres voix me sussurent que je peux essayer de bosser ponctuellement dans l'informatique ; l'ennui, c'est que ça se serait sans doute beaucoup trop prenant pour finir une thèse. Et de toute façon je ne suis pas sûr de le vouloir.)

Bref, à partir de septembre, je ne sais vraiment pas ce qui va m'arriver. Pour l'instant, je fais l'autruche : j'essaie de ne pas penser au problème dans l'espoir que, comme ça il disparaîtra de lui-même. Mais ça ne marche à aucun titre, et d'ailleurs c'est une des choses qui me tracassent en ce moment (enfin, c'est loin d'être la plus importante, mais je n'ai pas vraiment envie de parler du reste ici).

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(mardi) · Dernier Quartier

Comment piéger un David Madore

Une façon de piéger un David Madore, c'est de lui poser une question de maths qui a l'air parfaitement innocente et qu'il va avoir envie de résoudre rapidement et élégamment, et qui en fait s'avère être un piège redoutable. Je suis capable de passer un temps invraisemblable sur certains problèmes de ce genre : en fait, c'est quasi obsessionnel — je n'arrive plus à penser à autre chose tant que je n'ai pas résolu la question ou que je ne me suis pas convaincu (parfois avec une certaine mauvaise foi, heureusement, sinon je pourrais y rester bloqué indéfiniment) que le problème n'a pas autant d'intérêt que je le pensais.

Un exemple de tel problème qui m'a bien eu il y a quelque temps était celui-ci :

Considérons un polyèdre (convexe, pas forcément régulier). Sur chaque face du polyèdre il y a une fourmi, qui parcourt les arêtes de la face en question (au rythme qu'elle veut, mais de façon continue, bien sûr ; elle a le droit de s'arrêter, de ralentir ou d'accélérer, mais pas de revenir en arrière) toujours en tournant dans le sens trigonométrique (le sens contraire des aiguilles d'une montre). On suppose qu'entre deux instants donnés, chaque fourmi a accompli un nombre entier non nul de tours (autrement dit, chaque fourmi a fait au moins un tour, dans le sens trigonométrique, de la face dont elle parcourt les arêtes, et est revenue à son point de départ, qui est quelconque). Il faut montrer que, pendant ce laps de temps entre les instants considérés, deux fourmis (au moins) se sont croisées.

Cela a l'air parfaitement innocent, mais c'est absolument diabolique. Je me suis torturé pendant des heures sans rien trouver (pourtant, ce n'étaient pas les pistes qui manquaient). Un ami a fini par trouver une démonstration, mais elle est sophistiquée et peu intuitive, et utilise le théorème de l'indice[#] de Hopf. C'est décevant, parce que le problème est compréhensible par ma maman et je voudrais une solution qui le soit aussi. Et c'est décevant parce je n'ai pas trouvé, moi. ☹️ Notons au passage que l'hypothèse que le nombre de tour de chaque fourmi est entier est indispensable.

Mais récemment, on m'a posé un problème qui me semble encore pire : son énoncé n'est peut-être pas aussi élémentaire que celui des fourmis, mais il est extrêmement naturel et semble très joli :

Trouver la dimension maximale (si elle existe, ou même simplement un majorant de la dimension) d'un espace vectoriel de matrices réelles (je veux dire, un sous-espace vectoriel des matrices n×n réelles, pour n non précisé) dans lequel la seule matrice singulière (de déterminant nul) soit la matrice nulle.

Je sèche complètement. Je suis arrivé à la conclusion, et plusieurs autres ayant réfléchi au même problème y sont parvenus indépendamment, que la dimension 8 est possible (consulter n'importe quelle introduction aux octonions pour en savoir plus), mais quant à savoir si c'est ou non le mieux possible… Je ne trouve vraiment rien. Et j'y ai passé déjà un certain nombre d'heures.

C'est dur, les maths !

(Bon, là, on va voir si les lecteurs de mon blog sont des torscheurs. À chaque fois que je parle de quelque chose, il se trouve un commentateur qui connaît parfaitement le sujet pour intervenir avec une expertise impressionnante. Voyons donc si je vais me faire ridiculiser par une résolution en trois lignes de ces deux problèmes ! En vérité, ça me plairait bien.)

[#] Il est certain, au moins, qu'il faut employer quelque part une propriété topologique de la sphère, parce que le résultat n'est pas vrai si le polyèdre a la forme d'un tore, comme on le voit assez facilement. Donc l'hypothèse de genre zéro est cruciale. Ceci étant, il devrait y avoir des façons plus simples de caractériser ce fait que le théorème de l'indice de Hopf.

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(lundi)

Jeux de sons

Nature & Découvertes vend des CD de « sons de la nature » : chants d'oiseaux, bruits de pluie et de vagues, rumeurs d'orages, et ainsi de suite. Je suppose que les gens les achètent comme musique d'ambiance relaxante — en tout cas c'est dans cette idée-là que je m'en suis procuré : je suis trop stressé en ce moment, et comme l'autre jour je passais par un centre commercial qui avait mis comme fond musical des chants d'oiseaux tropicaux et que j'ai trouvé ça très agréable à écouter, j'ai pensé que c'était un investissement valable. Bon, pour l'effet déstressant, je ne sais pas encore, mais en tout cas c'est rigolo à écouter.

J'en ai profité pour expérimenter le Free Lossless Audio Codec. Je n'écoute presque jamais les CD directement, je les encode sur mon ordinateur et je les joue à partir de là, notamment parce qu'un disque dur répond mieux qu'un CD aux commandes de pause, d'avance rapide ou de positionnement, et aussi parce qu'il est fastidieux de charger les CD alors que l'ordinateur peut jouer des playlists d'une multitude de sources. Normalement je choisis le format Ogg Vorbis pour comprimer la musique autour de 150kbps (parfois plus si le CD est de bonne qualité ; en réalité, même à nettement moins que 150kbps et en faisant très attention je n'arrive pas à entendre la moindre différence entre le flux d'origine et le résultat de la compression — et par ailleurs si je force assez le taux de compression pour rendre audibles les artefacts je ne les trouve pas désagréables, mais passons — ceci dit, il y a quelques considérations sur les doubles compressions qui font que le fait de ne pas entendre la différence n'est pas forcément suffisant). Pour ces CD, cependant, je me suis dit que c'était un peu dommage de les faire digérer à un Codec prévu pour comprimer de la musique, alors j'ai utilisé Flac : ça m'oblige à monter à autour de 700kbps (environ la moitié du débit d'un CD), mais en contrepartie on a une compression sans aucune perte (donc aucun artefact). (Soit dit en passant, si Flac marche bien, Ogg Flac, lui, n'est pas encore tout à fait au point, malheureusement.) Un jour il faudra que je trouve un prétexte pour essayer Speex.

À part ça, je me suis aussi acheté un CD par Peter Kater (pianiste) et R. Carlos Nakai (flûtiste amérindien) intitulé Song For Humanity, et ce n'est pas mal du tout.

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(dimanche)

Je hais les ordinateurs

Ce n'est pas comme si j'avais eu des plans particuliers pour ce soir ou pour demain. Mais j'aurais quand même vaguement aimé pouvoir me coucher un moment ou un autre. Sauf que non.

Je viens de découvrir que mkisofs, l'un des programmes qui sert à effectuer la gravure de DVD sous Linux, a un bug très gênant : il remplace aléatoirement certains secteurs de l'image ISO 9660 qu'il produit par des secteurs vides (pleins de 0xffff, pour être précis). Enfin, c'est peut-être mon noyau Linux qui est buggué (peut-être une interaction obscure entre le support SMP — ma machine est un bi-processeur — et la fonction mmap() ?) et qui produit cet effet. Ou peut-être que c'est autre chose encore, je ne sais pas (ceci dit, je ne soupçonne pas trop, pour une fois, une RAM défectueuse) ; mais je m'en fous, le résultat est là : je donne des fichiers valides à mkisofs et il me pond une image ISO 9660 bugguée.

Évidemment, c'était la seule opération de la chaîne de gravage que je n'avais pas vérifiée : je m'assurais soigneusement de l'intégrité des fichiers avant de les mettre dans l'image, je vérifiais soigneusement que l'image gravée est bien celle produite par mkisofs (en recalculant le hash md5), mais je ne contrôlais pas (ou en tout cas pas plus que sur un petit nombre de fichiers) que mkisofs n'avait pas saboté son travail.

Bilan : tous les DVD que j'ai gravés jusqu'à présent doivent avoir autour d'un ou deux fichiers corrompus, je n'ai plus qu'à les mettre à la poubelle. Perte financière d'une trentaine d'euros : mais ça je m'en fous, c'est le temps passé à préparer ces DVD, et qu'il faut complètement refaire, qui m'ennuie, d'autant plus que je vais devoir maintenant être encore beaucoup plus soigneux en produisant les disques, vérifier l'intégrité des fichiers à chaque étape, et quand on le fait, cela prend des heures (calculer le md5 de quatre gigas de données, sur un Pentium II 450, c'est long).

En tout cas, deux conclusions s'imposent : primo, je hais les ordinateurs ; secundo, Linux est un OS de merde écrit par des singes qui tapent au hasard sur des machines à écrire. (Et on peut féliciter la concurrence d'avoir réussi à faire encore pire.)

Et bien sûr, j'en ai pour toute la nuit à vérifier des intégrités de fichiers.

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(dimanche)

Tessera empta est

[Photo d'un dé]Ça ne se voit pas vraiment sur la photo ci-contre, mais le dé en question, que je me suis acheté avant-hier (dans une boutique du boulevard Henri IV), est un géant (pour se faire une idée, il fait un volume d'environ de 40cL). Je me suis dit que ça faisait un objet décoratif amusant. Et un symbole important, aussi : le dé (du destin : je ne suis pas d'accord, moi, que der liebe Gott würfelt nicht) est l'emblème du personnage Ruxor dans La Larme du Destin. Maintenant que j'ai le symbole du hasard, il ne me reste qu'à trouver celui de la nécessité.

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(samedi)

Fragment littéraire gratuit #12 (méta ?)

Deux heures plus tard, David n'a pas ajouté une phrase à son roman. À trois reprises, il en a commencé une mais l'a aussitôt effacée en grimaçant. Il joue avec les fonctions de son éditeur, s'amuse à remplacer “a” par “axa” et “e” par “ike” dans le texte et à lire le résultat à haute voix ; il insère en exergue une citation du Mahābhārata en sanskrit pour vérifier que les caractères indiens seront correctement gérés : l'ordinateur, docile, les affiche sans broncher. Puis l'auteur revient sur son travail déjà accompli, survole les premiers chapitres, hésitant entre l'admiration d'avoir été inspiré pour les produire et la frustration affligée devant la maladresse naïve de son écriture. Melpomène est une peu conciliante maîtresse. Comment les critiques — et les chiffres des ventes — ont-ils bien pu tellement encenser ses Fragments de livres imaginaires ? Comment a-t-on pu lui imposer cette si prestigieuse récompense qui fait désormais de lui la proie des éditeurs ? Sont-ils tous aveugles et incapables de repérer ses si grossiers artifices ?

Exaspéré, il s'éloigne de la console informatique et se rapproche de la baie vitrée qui domine la ville. C'est New York qui s'offre à sa vue, mais à travers elle d'autres villes se pressent à sa mémoire : Paris sans aucun doute, et aussi Londres, Rome, Toronto et San Francisco ; puis Tekir, la cité magique des histoires de son enfance, lieu imaginaire qui semble jouer à se cacher dans le paysage réel. David songe alors avec tristesse qu'il est de son devoir de faire mourir son héros, auquel il est pourtant désormais si attaché. Peut-être, pense-t-il, est-ce l'hésitation devant cette déplaisante mais inévitable besogne qui rend son progrès si fastidieux.

En tout cas, ce n'est pas cette nuit qu'il avancera. Avec un soupir, il se détache de la fenêtre et rejoint la chambre à coucher où son bien-aimé dort déjà depuis longtemps d'un sommeil lourd. David passe tendrement la main dans ces cheveux bouclés — c'est sa façon d'embrasser. Cette présence saura le réconforter.

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(vendredi)

Lectures, et cinéma

Je viens de finir de lire le magnifique Œuvre au noir[#] de Marguerite Yourcenar. J'avais déjà beaucoup aimé les Mémoires d'Hadrien, reconstitution littéraire des pensées du grand empereur romain (parfois très touchante — notamment lorsqu'il évoque son favori Antinoüs — et en tout cas superbement maîtrisée) ; L'Œuvre au noir, qui retrace la vie d'un médecin et alchimiste fictif (mais inspiré de personnages réels, comme Léonard de Vinci, Paracelse, Giordano Bruno ou encore Tommaso Campanella) du milieu du XVIe siècle, Zénon, ainsi que de quelques autres personnages de son entourage, en constitue en quelque sorte le pendant. Ce n'est pas à moi de louer l'écriture et le style parfaits de Yourcenar, mais je me permettrai au moins d'admirer l'habileté de la construction et le travail de documentation de la romancière, dont l'érudition (même dans le domaine scientifique, d'ailleurs) n'est jamais fastidieuse. Son Zénon semble en avance sur son temps, mais il n'est pas exclu que de tels penseurs aient existé.

Changeant complètement de registre, je m'attaque maintenant à un essai, L'Intelligence émotionnelle de Daniel Goleman (Emotional Intelligence: Why it can matter more than IQ ; mais je le lis en traduction française, parce qu'un ami me l'a prêté sous cette forme). Au point où j'en suis, il est encore beaucoup trop tôt pour moi pour en dire du bien ou du mal, mais je pense bien qu'il y aura probablement quelque chose d'intéressant à en tirer (même si je n'aime généralement pas trop la forme des self help books ; et « on » a l'air d'avoir fait de l'intelligence émotionnelle un concept bien commercial — ce qui ne préjuge pas de l'intérêt de la notion à la base).

À part ça, je ne suis pas allé au cinéma depuis une éternité. J'apprends que Pedro Almodóvar sort un nouveau film, La Mauvaise Éducation, que j'irai presque sûrement voir ; je me demande d'après le synopsis s'il n'y a pas une certaine ressemblance à voir avec L'Agneau carnivore d'Agustin Gómez-Arcos, un livre qui m'a beaucoup plu.

Et puis, je ne crois pas que je saurai résister au chant de sirène du casting de la dernière adaptation d'un certain poème d'Homère (comment ça, j'ai un petit faible pour les beaux guerriers grecs musclés ?). J'ai quand même des doutes sur le fait qu'on nous montre des choses intéressantes entre Brad Pitt et Garrett Hedlund, mais sait-on jamais. Bon, si vous voulez savoir la vraie version de l'histoire, lisez le tout à fait génial La Guerre de Troie n'aura pas lieu, incontestablement un de mes livres préférés.

Enfin, un ami aux États-Unis me conseille de guetter la sortie de Saved! en France. Malheureusement, il n'est pas encore sur le planning.

[#] Je m'aperçois d'ailleurs, en greppant dans ce blog que j'ai déjà mentionné ce roman dans une entrée passée. Je ne pensais alors pas spécialement le lire, mais deux mois plus tard un ami — Bertrand — m'a dit qu'il le lisait et qu'il en pensait du bien, alors je l'ai acheté, et il a encore traîné un peu sur les étagères de ma bibliothèque. Étant passé par la case Virginia Woolf, suis-je maintenant destiné à lire Le Bienfaiteur ? Ou cesserai-je là d'avoir les mêmes goûts que Françoise Blanqui ?

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(vendredi)

Non, je ne déprime pas…

Non, je ne déprime pas. Je constate simplement, désabusé et désillusionné, que dans toutes les directions où, encore récemment, il me semblait pouvoir regarder pour trouver de l'espoir ou du réconfort, je ne vois plus rien qui y ressemble. Je ne parle pas de malheurs — je ne pressens pas de catastrophe particulière s'abattant sur moi — il est juste question de morosité et d'absence d'objectif ou d'enjeu motivant.

L'espérance (infondée), c'est comme une drogue : quand on en a on se sent mieux, mais dès qu'elle cesse de prendre effet il faut soit subir le retour à la réalité soit en prendre une nouvelle dose pour remplacer. (Finalement, ne devrais-je pas me mettre à me tirer les cartes ou à croire en Dieu ? Ce sont des façons de se fabriquer de l'espoir, si c'est cela qu'on veut.)

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(jeudi)

Encore de nouveaux jeux de tarot

Mon intérêt pour le jeu de tarot tourne à la collectionnite (j'en ai maintenant sept) ; mais après tout, j'ai une collection impressionnante d'exemplaires de la Bible alors que je suis athée, je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas avoir une collection de tarots divinatoires sans croire à la cartomancie (j'y accorde aussi peu de crédit qu'à l'astrologie, la chiromancie, l'informatique et toutes les autres sciences occultes). Quand bien je n'aurais pas trouvé quelque chose à faire avec, ces cartes sont déjà intéressantes simplement à regarder.

Bref, après notre promenade (et après un petit-déjeuner dans une cour de l'École), Mouton et moi sommes allés à la boutique Jeux Descartes de la rue des Écoles (tiens, il me semblait qu'ils avaient leur propre site Web, autrefois ? je ne retrouve plus ça…) pour augmenter notre liste de jeux. Mouton a choisi le Black Tarot de Luis Royo (je ne l'ai pas regardé de près, mais il est dans le style gothique, vaguement érotique, et il semblait beau), tandis que j'ai préféré le Tarot Art nouveau d'Antonella Castelli (après examen des cartes, c'était un bon choix : il est effectivement bien fait surtout si, comme moi, on aime l'Art nouveau ; et puis, quand on aime bien regarder de beaux garçons, les valets du jeu, ainsi que quelques autres arcanes, ne sont pas mal du tout).

Nous en avons profité pour laisser à la boutique deux-trois exemplaires des règles d'Arcanoïd, l'idée étant qu'il doit y avoir dans cette boutique tout un tas de clients réguliers qui connaissent bien le personnel, qui aiment essayer des jeux de cartes bizarres, et qui pourraient avoir envie d'essayer celui-là. Sait-on jamais. Peut-être en feront-ils du PQ, mais ça ne coûtait rien d'essayer.

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(jeudi)

Promenade nocturne dans Paris

Comme je m'étais réveillé vers 18h, hier, je voulais passer une nuit blanche pour essayer de me remettre en phase avec le Soleil. Je suis parti faire une longue promenade nocturne dans Paris, avec un gentil mouton et un autre (et non moins gentil) garçon, qui nous a menés (partant de l'ENS autour d'une heure du matin) d'abord vers la Bastille, puis vers la mairie du XIe, la place de la République, la gare de l'Est, Barbès-Rochechouart et finalement la butte Montmartre. On a beau être blasé, la vue sur Paris depuis le tertre est vraiment impressionnante, surtout sous la (presque) pleine Lune avec un ciel dégagé ; et il y a vers quatre heures du matin à cet endroit qui domine la ville endormie une quiétude sereine qui est très agréable, et qui contraste tant avec le jour où il regorge de monde.

Nous sommes rentrés en passant par Cadet, le siège de la BNP (dont la façade est assez impressionnante), la rue du Louvre, le pont des Arts, la rue de Seine, l'Odéon (où nous cherchions vainement de mythiques restaurants grecs ouverts toute la nuit). Finalement, nous sommes montés sur les toits de l'ENS pour admirer de là le lever du Soleil.

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(mercredi)

Gros dodo

Quinze heures de sommeil. Comme quoi, ça ne sert à rien de se dire : si j'ignore le monde, peut-être qu'il va me laisser tranquille et s'en aller — le monde est toujours plus patient et plus obstiné, et il est toujours là quand on se réveille.

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(mardi) · Pleine Lune

Production d'énergie et fusion thermonucléaire

J'ai assisté ce midi à la fac d'Orsay à un « café-débat » consacré cette semaine à la fusion contrôlée et notamment au projet ITER. C'était très intéressant parce que d'une part la fusion est quelque chose qui m'intéresse beaucoup, et d'autre part les participants du débat étaient pour l'essentiel des physiciens (et même des gens proches de la physique des plasmas) donc le débat volait plutôt haut, scientifiquement parlant. L'exposant était Yves Pomeau (directeur du laboratoire de physique statistique de l'ENS et membre de l'Académie des sciences).

Je suis assez inquiet quant à l'avenir énergétique de l'humanité. Les énergies fossiles ne dureront pas longtemps (même si les réserves de pétrole ont l'air de s'étendre magiquement à mesure qu'on les consomme, on ne peut pas espérer que cela dure éternellement quand on est en train de consommer en des années ce que le carbonifère a mis des millions d'années à fabriquer). La fission — le nucléaire actuel, donc — me semble encore ce qu'on a de mieux (certes, elle produit des déchets radioactifs, mais finalement ils me semblent nettement moins dangereux écologiquement que la contribution à l'effet de serre des carburants fossiles ; je ne comprends pas pourquoi les écologistes dénigrent à ce point les centrales à fission, qui ne sont certes pas la panacée mais qui me paraissent un moindre mal comparées aux centrales thermiques). Les énergies dites renouvelables ne présentent pour le moment pas le moindre début de commencement d'espoir de pouvoir un jour servir à une échelle non infinitésimale (et il est faux qu'elles sont non polluantes : le photovoltaïque est très polluant à la fabrication des cellules qui, par ailleurs, s'usent rapidement, et les éoliennes dénaturent gravement le paysage et provoquent des nuisances lumineuses et sonores absolument non négligeables). Reste la fusion thermonucléaire contrôlée, ce dont il est question ici, mais dans le meilleur des cas elle ne sera pas disponible avant cinquante ans, et plus probablement cent (les mauvaises langues disent que cela fait cinquante ans que la fusion est pour dans cinquante ans : mais les cinquante ans étaient sous condition de subventions substantielles, qui jusqu'à présent n'ont pas été accordées).

Les scientifiques sont souvent méfiants vis-à-vis d'ITER, précisément parce qu'il coûte cher (quelque chose comme 20G€ — je veux dire vingt milliards d'euros ; ceci dit, ça ne doit pas être si énorme que ça comparé à des dépenses de l'industrie pharmaceutique) et on a peur que cela se fasse au détriment d'autres projets scientifiques. Reste que si c'est l'avenir énergétique de l'humanité qui est en jeu, cela me semble valoir un effort. Un autre problème, en revanche, qui a été souligné lors de ce débat, c'est qu'ITER ne se focalise que sur les difficultés de type « physique des plasmas », à l'exclusion de toutes autres considérations (notamment « physique des matériaux »).

Rappelons que le principe de la fusion thermonucléaire est de produire des plus gros atomes à partir de plus petits, en libérant de l'énergie au cours du processus (alors que la fission casse des atomes lourds en libérant de l'énergie). Les étoiles, le Soleil par exemple, réalisent la fusion de l'hydrogène (dans ce qui s'appelle le cycle de Bethe), mais il est question ici de la fusion d'isotopes de l'hydrogène, le deutérium et le tritium, qui se combinent pour donner un hélium et un neutron. (Telle quelle, la fusion des étoiles n'est pas utilisable comme source d'énergie sur Terre : il s'y produit de l'ordre de grandeur d'une réaction thermonucléaire par seconde et par litre de plasma, ce qui ne représente pas une source d'énergie suffisante pour être utile.) Pour se faire une idée des paramètres opérationnels, le plasma de deutérium et de tritium doit être porté à quelque chose comme 50MK (cinquante millions de degrés) ; dans le cas d'ITER, le tokamak (le tore dans lequel se déroule la fusion, et où le plasma est maintenu par confinement magnétique) a un volume de l'ordre de 1000m³, et il y a quelques kilos de plasma dedans. (J'espère avoir bien retenu ces quelques ordres de grandeur, qui m'ont semblé intéressants, de ce qui a été dit.)

Évidemment, maintenir confinés quelques kilos d'un plasma à cinquante millions de degrés, même dans 1000m³, ce n'est pas la chose la plus facile au monde. Il se produit notamment toutes sortes de problèmes d'instabilité dans le plasma. Rajoutons que les parois ne doivent pas se désagréger car des atomes lourds pollueraient le plasma et nuiraient à l'efficacité de la fusion, et qu'inversement le plasma ne doit surtout pas atteindre les parois (elles sont très fragiles et coûtent une fortune à remplacer). Le confinement magnétique est réalisé par des aimants supraconducteurs qui doivent être maintenus à une température proche du zéro absolu et baignent dans de l'hélium superfluide. Et pour couronner le tout, le tritium est un produit radioactif qui n'existe pas dans la nature, il faut le produire, vraisemblablement en bombardant du lithium avec des neutrons, lesquels sont produits par la réaction elle-même, mais cela signifie que les murs du réacteur doivent être parcourus par du lithium liquide, cela n'arrange pas les choses. Et enfin, il faut récupérer d'une façon ou d'une autre l'énergie produite par le réacteur. Bref, les difficultés ne manquent pas.

Il y en a certaines qu'on pense savoir résoudre, cependant. La stabilisation du plasma est un problème bien étudié, et qui ne devrait pas être insurmontable — c'est essentiellement cela qu'ITER est chargé d'étudier. La réalisation d'électro-aimants supraconducteurs capables de produire le champ confinant, mais aussi de résister mécaniquement aux forces de Lorentz exercées sur eux, devraitre difficile mais résoluble. La production du tritium à partir du lithium n'est pas trop difficile non plus (il y a des mécanismes pour multiplier les neutrons produits par la réaction et les faire absorber par le lithium), paraît-il, même si là des problèmes politiques peuvent se poser (le tritium entre dans la fabrication des armes nucléaires, et les Chinois, par exemple, ne veulent pas que les Japonais en aient — ou quelque chose de ce genre). Apparemment, on sait sans trop de mal capter l'énergie produite par le réacteur (sous forme de rayons X), au moins dans une certaine limite (on a avancé le chiffre de 20MW/m²). Il y a aussi des stratégies pour récupérer l'hélium produit par la réaction, ce genre de choses. D'après l'orateur, le principal problème, pour lequel on n'a encore aucune solution ni même idée de solution, est celui de la dégradation des parois par l'effet de l'impact des neutrons : ceux-ci détruisent les atomes et les transforment essentiellement en hélium, et les micro-bulles d'hélium ainsi formées dans la masse du matériau en altèrent gravement la solidité (or dans le cas d'un réacteur industriel il faudra compter de l'ordre de cinq ans sans remplacer les parois si on veut espérer qu'il soit rentable). Déjà pour les centrales à fission, les problèmes pour trouver les bons matériaux n'ont pas été minces, et les neutrons en question sont autour de cinquante fois moins énergétiques, et nettement moins nombreux, que ceux émis par un réacteur à fusion (qui tournent dans les 15MeV). Ce problème ne se pose pas pour ITER (qui n'aura pas un fonctionnement continu assez long pour observer une dégradation significative des parois), mais il faudra un jour le résoudre si on veut espérer produire effectivement de l'énergie par fusion.

Enfin, il y a la question des déchets. En principe, la fusion est propre, c'est-à-dire nettement plus que la fission : le principal produit radioactif est du tritium, qui est réutilisé par le réacteur lui-même, et l'ensemble des déchets est censé être des atomes légers à durée de vie courte ; le principal produit de la réaction est tout simplement de l'hélium. En pratique, cela est moins sûr, par exemple parce qu'il faudra peut-être utiliser un alliage lithium-plomb pour récupérer les neutrons.

Bref, tout cela est bien inquiétant quant à nos perspectives dans cette direction.

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(lundi)

Les souvenirs effacés

[Page de garde scannée]Je viens de retrouver un agenda qui était le mien pendant l'année scolaire 1994–1995 (quand j'étais en math sup). Je l'ai ouvert en espérant y retrouver quelques souvenirs de cette année-là, mais j'ai vite été déçu : même si j'ai pris le soin de noter chaque jour mon emploi du temps, cela ne me dit pas grand-chose sur ce que j'ai vraiment fait pendant ces journées. Savoir que le samedi 1995-01-28 j'ai eu quatre heures de maths ne m'explique pas vraiment pourquoi, en-dessous, j'ai noté La guerre des étoiles — L'empire contre-attaque. Sur la page de garde (qui précise l'agenda de textes des lycéens et étudiants modernes — wow !), j'avais écrit, en gothique cursif, la phrase par laquelle Mephisto se définit (dans le Faust de Goethe). La date de décès de mon professeur de mathématiques est notée avec sobriété. Pour le reste, ce ne sont que des inscriptions aussi parlantes que Alld: version salle N10. apprendre verbes en ei-ie-ie. traduire dernier § du texte… Autant je suis un peu ému de retrouver cet objet qui a été témoin de ma vie à une époque si reculée, autant je me retrouve déçu de voir qu'il n'en a rien retenu que des choses insignifiantes. Je ne saurai donc pas ce que je faisais il y a tout juste neuf ans autrement que les cours que j'y ai suivis (quatre heures de maths pour le mercredi 1995-05-03, deux heures de physique pour le jeudi 1995-05-04 : comme la vie d'un étudiant de math sup est variée !).

Cela a quelque chose de frustrant, pour un obsédé de la mémoire tel que moi, de ne plus être capable de me rappeler, non tel Funès les moindres détails d'une journée quelconque, mais au moins les faits les plus importants associés à une date précise. Voilà bientôt dix ans, par exemple, que j'aurai passé le baccalauréat (et autour de dix ans, aussi, le concours général des lycées), mais je suis incapable de dire le jour exact (du lieu je me rappelle encore que c'était le lycée Jean-Baptiste Corot à Savigny-sur-Orge).

I've… seen things you people wouldn't believe… Attack ships on fire off the shoulder of Orion… I watched C-beams glitter in the dark near the Tannhäuser Gate… All those… moments will be lost… in time… like… tears… in rain… Time to die.

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(Sunday)

Computers, computers, computers

Another day mostly devoured by the activity of computer hacking. I managed to get MPlayer to play the BBC's RealAudio streams (thanks, Joël), so I'll finally be able to get a daily dose of exposure to correct English. I recompiled the Lizard so my non-breaking spaces now work again; but the developers refuse to incorporate the patch in the official source (see the Bugzilla discussion for more details). I discovered the wonders of Unix ACLs, which are even available under Linux now, and which help mitigate the standard Unix permissions' lack of expressivity.

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(Saturday)

Poor little  !

I forgot to apply the appropriate patch to the Lizard before compiling it three days ago, so it mangles unbreakable spaces. Still don't know how I can get a developer's ear so that my patch will be applied to official builds!

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(Saturday)

CD and DVD longevity

Following a recent discussion with some friends, I have tried to find some accurate information (on the Web or elsewhere) on the stability (longevity) of recordable optical media (CD-R[W] and DVD±R[W]). The bottom line is this: nobody has a clue; it is more or less agreed that under ideal storage conditions (away from dust and humidity, at a mild room temperature, and in complete darkness), most CD's should remain readable for a century (this is a mere order of magnitude, not an accurate assessment), and that when subject to “typical” handling and use (or not-too-careful storage) they only last for a couple of years. This is such a gross estimate, however, that it might just as well be summarized as nobody knows.

Many factors come into account, and the disk can degrade in many ways and in various places. It used to be thought (rightly or not) that the CD-R organic dye, which by definition is highly photosensitive, was the most vulnerable spot, and fruitless debates have been formed over the alleged superiority of the golden (phthalocyanine) dye over the green (cyanine) or blue (metal AZO) ones; but over times, manufacturers have seemingly been able to extend their dyes' life spans by adding various stabilizers. I am told that CD-RW's are more stable than CD-R's in this respect, because the recording layer alloy is not photosensitive: recording is achieved by heating the material either to its melting point (so that it cools down rapidly in an amorphous state) or to an intermediate crystallization point, according as a “pit” or “land” is desired (the amorphous and crystalline phases have different optical properties), and the crystallization point is sufficiently high that one can be confident that the material will not spontaneously return from its metastable amorphous state to stable crystalline state, at room temperature, within a time span of decades. Still, I am not too tempted to advise people to record their important backup data on CD-RW's, because the disk has other weaknesses than just its recording layer (whether optical dye or metallic alloy), and the CD-RW's lower inherent reflectance (even in crystalline state) makes it more vulnerable to certain other degradations (for example, in the substrate). Incidentally, (pressed) CD-ROM's are, of course, not photosensitive at all, but they are also not eternal.

Other possible causes of disk damage include: dust, which is abrasive and can both damage the substrate and penetrate the very thin (and hence easily damageable) protective layer to the reflective part; or water, which is absorbed by various organic compounds (such as the polycarbonate substrate). Or just about any kind of handling, which can slightly deform the disk, or scratch it (the latter being, naturally, the worse one). Ink, of any kind whatsoever, is not recommended (either the pen will scratch the disk, or the ink's solvent will penetrate through the protective layer and might damage the reflective layer): if one needs to label one's disks, one is better advised to take note of the medium's serial number (generally printed on the inner surface) and associate the label with that number, rather than writing it actually on the disk.

This page on CD-R longevity also says a couple of interesting things about the question, and points to a study attempting to measure CD-R longevity, which is somewhat inconclusive but nevertheless interesting. (For example, one learns that errors are much worse if the disk is aged before recording than before: so the moral of that is that one should always record on fresh new disks insofar as possible.)

It would be nice to have access to the number of errors detected and corrected at each level of error correction. (Called C1 and C2 on a CD: see this page about compact disc errors for a summary of how they work. Those who wish to know more on error detection and correction mechanisms are advised to read the ECMA 267 standard for the DVD, which specifies them in detail: although the CD-ROM is an industry proprietary standard, the DVD standard is a freely available ECMA publication, and I believe the error detection and correction systems are actually identical between the two.) I'm not sure whether the drive can be forced to report errors below E32 (uncorrectable after second level of parity) to the operating system, but it would be useful, especially for E22 errors (last correction between E32), which are a sure sign that the disk is just about to become unusable.

Another aspect of longevity, which is too often overlooked, is drive longevity. In my experience, a CD drive in a computer will give definite signs of old age after a couple of years already, and will be mostly unusable after a mere five years. The main culprit here is—without any doubt—dust: I have terrible dust problems in my computers, and fans and CD drives (I have completely abandoned floppy drives a long time ago) are the parts which suffer most from it. The sure sign that a drive is aging is that it frequently finds errors (or sometimes just takes a long time to read, and slows the rotation speed to minimal, because it is trying over and over again) in disks which other drives can read without problem. Given how cheap drives have become nowadays, this isn't so much of a problem now, but someday CD's will have become an obsolete technology, and drives won't be made any more (or they will have been crippled by DRM schemes and whatnots), and one will be easily stuck with gigabytes of data on CD-R's that are still readable in principle, but not in practice for lack of a working drive!

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(samedi)

Un an déjà

Il y a 366 jours, le 2003-05-01, j'écrivais ceci. Je vous fais grâce de ma self-pity ou de considérations vaseuses sur le mythe de l'éternel retour concernant le fait que j'en suis essentiellement au même point.

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