Vous êtes sur le blog de David Madore, qui, comme le
reste de ce site web, parle de tout et
de n'importe quoi (surtout de n'importe quoi, en fait),
des maths à
la moto et ma vie quotidienne, en passant
par les langues,
la politique,
la philo de comptoir, la géographie, et
beaucoup de râleries sur le fait que les ordinateurs ne marchent pas,
ainsi que d'occasionnels rappels du fait que
je préfère les garçons, et des
petites fictions volontairement fragmentaires que je publie sous le
nom collectif de fragments littéraires
gratuits. • Ce blog eut été bilingue à ses débuts (certaines
entrées étaient en anglais, d'autres en français, et quelques unes
traduites dans les deux langues) ; il est
maintenant presque exclusivement en
français, mais je ne m'interdis pas d'écrire en anglais à
l'occasion. • Pour naviguer, sachez que les entrées sont listées par
ordre chronologique inverse (i.e., la plus récente est en haut).
Cette page-ci rassemble les entrées publiées en
février 2016 : il y a aussi un tableau par
mois à la fin de cette page, et
un index de toutes les entrées.
Certaines de mes entrées sont rangées dans une ou plusieurs
« catégories » (indiqués à la fin de l'entrée elle-même), mais ce
système de rangement n'est pas très cohérent. Le permalien de chaque
entrée est dans la date, et il est aussi rappelé avant et après le
texte de l'entrée elle-même.
You are on David Madore's blog which, like the rest of this web
site, is about everything and
anything (mostly anything, really),
from math
to motorcycling and my daily life, but
also languages, politics,
amateur(ish) philosophy, geography, lots of
ranting about the fact that computers don't work, occasional reminders
of the fact that I prefer men, and
some voluntarily fragmentary fictions that I publish under the
collective name of gratuitous literary
fragments. • This blog used to be bilingual at its beginning
(some entries were in English, others in French, and a few translated
in both languages); it is now almost
exclusively in French, but I'm not ruling out writing English blog
entries in the future. • To navigate, note that the entries are listed
in reverse chronological order (i.e., the most recent is on top).
This page lists the entries published in
February 2016: there is also a table of months
at the end of this page, and
an index of all entries. Some
entries are classified into one or more “categories” (indicated at the
end of the entry itself), but this organization isn't very coherent.
The permalink of each entry is in its date, and it is also reproduced
before and after the text of the entry itself.
Ce soir j'ai revu le dessin
animé The Last
Unicorn que j'ai vu quand j'étais petit (je crois que
c'était avec ma classe — j'étais probablement en CM1 ou CM2, en tout
cas à l'école primaire, probablement pas très longtemps après sa
sortie). Entre temps, il y a une dizaine d'années, j'ai lu le livre
dont il est tiré — je l'avais raconté
sur ce blog à l'époque. Aussi bien le livre que le film sont
assez étranges : l'histoire est souvent très enfantine, mais elle n'a
pas la morale simpliste des contes pour enfants, il n'y a pas vraiment
de gentils et de méchants, les motivations des personnages sont
difficiles à comprendre, on ne sait pas s'il faut comprendre le tout
comme une sorte d'allégorie, de récit symbolique ou codé, une poésie
surréaliste, ou encore autre chose, bref, on ne sait pas sur quel pied
danser. Le film lui aussi semble changer sans arrêt d'avis sur le
registre sur lequel il faut le comprendre, et il y a des passages
vraiment bizarres,
dérangeants ou inquiétants. La page que je viens de lier décrit
ainsi le Taureau de Feu du dessin animé : Pure
unadulterated nightmare fuel. This is the kind of thing that makes
your stomach drop and gives an ill-prepared child a lifelong complex.
You simply can't watch this movie and not be scared of The Red Bull.
The Red Bull is fear. De fait, je crois que cette image
m'avait beaucoup impressionné quand j'avais vu ce film, et peut-être
bien que j'en ai fait quelques cauchemars. (En plus, rien que la
traduction française Taureau de Feu, ça fait plus peur que
l'anglais Red Bull, même sans compter que
maintenant Red Bull est un soda.)
Je racontais le mois dernier que
la télécommande de mon téléviseur chinois merdique à deux balles
(i.e., 130€) était tombée en panne, rendant celui-ci essentiellement
inutilisable. À la place, nous avons rapidement acheté une télé un
tout petit peu plus cher (200€) et d'une marque connue (Samsung), en
espérant qu'au moins la télécommande serait plus facile à remplacer en
cas de panne. Précisément, il s'agit d'une Samsung UE19H4000AW,
numéro de modèle qui donne au moins un tout petit plus de réponses
quand on le recherche sur Internet que la Akira LED-B81HU19F dont la
télécommande est morte. À première vue, elle semblait d'un peu
meilleure qualité que la Akira sur pas mal de petits détails : angle
de vue de l'écran moins étroit, possibilité de changer de chaîne sans
avoir à attendre plusieurs secondes que la vidéo s'affiche, affichage
des infos TNT mieux fait, pas de problème d'encodage des
caractères accentués, lecture des
fichiers MKV,
et quelques choses du même genre. J'ai supposé naïvement qu'elle
était capable de faire tout ce que l'ancienne était capable de faire.
Erreur : il y a une arnaque.
Je m'en suis rendu compte ce soir en voulant enregistrer un film.
J'aurais dû essayer dès le début, parce que la fonction
« enregistrement » est parfois incroyablement bien cachée dans le
système d'interface de ce genre de gadgets (sur la précédente, nous
avons mis un temps fou à comprendre comment lancer un enregistrement
programmé à une heure donnée). Mais là, au bout de plusieurs dizaines
de minutes passées à essayer systématiquement tous les boutons
possibles dans tous les contextes possibles, nous avons fini par
nous rendre à l'évidence :
Cette télé ne sait
pas enregistrer.
Je me sens comme si on m'avait vendu une télé noir et blanc parce
que je n'ai pas pensé à vérifier qu'il était bien écrit téléviseur
couleur sur la boîte.
Car franchement, en 2016, vendre un téléviseur TNT
numérique qui n'est pas capable d'enregistrer (alors qu'il a une
prise USB depuis laquelle il est capable de lire
toutes sortes de formats vidéo, et qu'il s'agit là simplement de
recopier, sans réencodage quelconque, le flux numérique qu'il reçoit
de la TNT sur le support USB), c'est du même
niveau que vendre un téléviseur noir et blanc : ce n'est peut-être pas
illégal, mais c'est quand même une arnaque honteuse. Si même ma télé
chinoise à deux balles était capable de le faire, c'est vraiment que
c'est une fonction de base.
Mon poussinet propose que nous prenions un
décodeur TNT externe qui serait capable d'enregistrer ;
mais je n'ai vraiment pas envie d'avoir une télécommande
supplémentaire (surtout que me débarrasser d'une télécommande de trop
était la principale raison pour laquelle j'avais remplacé ma télé
cathodique par une numérique en premier lieu). Je suis prêt à passer
les 200€ aux pertes et profits et racheter une nouvelle télé, mais
maintenant que je suis averti qu'il faut explicitement chercher chaque
fonction dont on peut avoir besoin sous peine de se faire arnaquer, je
me dis que ça va être difficile de trouver un modèle sur lequel je
puisse vérifier chaque point important.
Bref, quelqu'un a-t-il un modèle de télé à recommander ? Il faut
qu'il soit achetable en France, d'une largeur entre environ 40cm et
49.5cm, capable de recevoir et décoder la TNT française,
de lire les formats et codecs vidéo les plus courants sur
support USB, d'enregistrer dessus, y compris lire en même
temps qu'il enregistre (pour pouvoir faire une pause dans une émission
qu'on regarde en direct)… mais il faut sans doute aussi plein d'autres
choses que je ne pense pas à lister ici parce qu'elles me semblent
tellement évidentes (être en couleur, être capable d'afficher les
informations et métainformations fournies par la TNT,
être capable pendant une lecture de faire une pause, une avance d'une
seule frape, une avance rapide, un retour rapide, un saut à un temps
spécifié arbitrairement, que sais-je encore…). Ceci dit, j'ai
l'impression que le critère le plus difficile est celui de la taille,
à cause de tous les beaufs qui font de la taille de leur téléviseur un
concours de bite, ça rend très limitée la sélection des téléviseurs
qui tiennent dans le petit espace que je peux leur accorder.
Une question d'Analyse (moyenner une fonction), et de pourquoi elle m'intéresse
Commençons tout de suite par la question qui m'intéresse (je
précise que je n'en connais pas la réponse), que je vais faire suivre
de commentaires mathématiques, puis
métamathématico-psychologiques :
Soit f une fonction réelle 1-périodique, et L¹ sur une
période (ou, si ça ne suffit pas : mesurable et bornée). Est-il vrai
que pour presque tout x, la moyenne arithmétique
de f(x), f(x+1/n), f(x+2/n), f(x+3/n),
…, f(x−1/n), converge vers
l'intégrale de f (sur une période) ?
Cette question peut se voir comme la suite
d'une question que j'avais proposée en
exercice : si j'appelle
(ℳn(f))(x) la
moyenne dont il est question ci-dessus, je sais montrer un certain
nombre de choses, par exemple
que ℳn(f) tend dans
Lp vers (la fonction constante égale à)
l'intégrale de f si f est
Lp et p<∞, ou qu'il y a
convergence uniforme si f est Riemann-intégrable. Je
signale quelques autres faits apparentés (ainsi qu'une esquisse de
démonstration de ce que je viens de dire)
dans cette
question sur math.stackexchange, où je pose la question recopiée
ci-dessus et je demande aussi s'il y a convergence dans L∞
(lorsque f est L∞). Au moment où j'écris, je
n'ai pas eu de réponse (et la question n'a suscité que très peu
d'intérêt, ouin ).
Mise à jour () :
Comme on me le signale en commentaire, la réponse est non :
même pour f mesurable et bornée (en fait, même pour la
fonction indicatrice d'une partie de ℝ/ℤ), il n'y a pas forcément
convergence presque partout, ni même « quelque part »,
de ℳn(f)
vers f. C'est l'objet de l'article de Walter
Rudin, An
Arithmetic Property of Riemann
Sums, Proc. Amer. Math. Soc. 15 (1964),
321–324. La démonstration de Rudin est courte et a l'air assez jolie
et arithmétique. • Par ailleurs, auparavant, Marcinkiewicz et Zygmund,
dans Mean
values of trigonometrical
polynomials, Fund. Math. 28 (1937),
chapitre II, théorème 3 p. 157, avaient déjà montré que pour la
fonction précise −log(|x|)/√|x| sur [−½,½], prolongée par périodicité,
qui est L¹ sur une période mais non bornée, on n'a convergence nulle
part. • Par ailleurs, ces articles montrent que d'autres que moi ont
pensé que la question était naturelle, et d'autre part, qu'elle
n'était pas triviale. (Le terme qui me manquait pour chercher
était somme de Riemann : je pensais qu'une somme de Riemann
était le cas associé à une subdivision quelconque, pas spécialement
régulière, et qu'on n'allait donc pas trouver grand-chose de plus en
cherchant ce terme que la construction de l'intégrale de Riemann.)
Mais une méta-question que je trouve aussi intéressante, c'est :
pourquoi est-ce que je trouve la question ci-dessus extrêmement
intéressante, importante et naturelle ? (Peut-être que je ne
serai plus de cet avis si j'obtiens la réponse, mais au minimum je la
trouve intéressante au sens où j'ai vraiment envie d'avoir la
réponse.) Ce n'est pas juste que moyenner une fonction comme ça
est une opération qui me semble très naturelle (et assez
élégante) et qu'on a envie de savoir si ça converge vers l'intégrale
voire, si ça donnerait une « définition » de l'intégrale de Lebesgue.
L'Analyse n'est pas un sujet dont je suis un grand fan, mais à partir
du moment où on me présente une « situation » mathématique (ici, le
fait de moyenner une fonction 1-périodique par ses n
translatés par 1/n, et de considérer la limite
quand n→+∞) sur laquelle j'arrive à dire des choses,
j'ai naturellement envie de me poser toutes les questions
« adjacentes » à la situation : si j'ai un résultat de convergence
dans Lp pour p<∞,
j'ai naturellement envie de poser la question de la
convergence L∞ et de la convergence presque partout.
(D'ailleurs, le mystère c'est pourquoi j'ai mis plus d'un an à me
rendre compte que ces questions étaient naturelles et que je
ne savais pas les résoudre !) En plus de cela, il y a toujours un
degré de frustration à penser : bon sang, mais une question aussi
simple et naturelle que ça, je devrais savoir y répondre !,
ou au moins, trouver la réponse dans un livre/article.
J'ai souligné le mot naturel dans le paragraphe précédent,
parce que c'est un aspect psychologique fondamental dans la manière
dont je conçois les mathématiques : il n'y a pas que le fait que les
objets soient élégamment
symétriques et beaux par leur
grandeur qui me motive, il y aussi le caractère naturel
des questions qu'on se pose. Je me considère comme un mathématicien
pur non pas parce que je ferais des choses qui ne servent à rien, mais
parce que ce qui me motive quand je me pose une question de
maths n'est pas qu'elle serve à quelque chose (même à l'intérieur des
mathématiques), mais qu'elle soit naturelle dans le contexte.
Et c'est une qualité que je ne sais pas définir (même si cela a
certainement un rapport avec la simplicité) et dont je me demande à
quel point elle est personnelle, voire complètement illusoire. Un
autre mathématicien sera-t-il convaincu que la question ci-dessus est
intéressante ? Je ne sais pas. (Pas plus que pour les questions de
l'entrée précédente. En revanche,
une question telle
que est-il
vraie que pour toute fonction réelle f il existe une partie
dense à laquelle la restriction de f est continue ?
est probablement « naturelle » si j'en crois les réactions que j'ai
eues.)
Toujours est-il que je n'ai pas le temps d'y réfléchir sérieusement
(et je ne suis pas sûr d'y connaître assez en Analyse pour avoir une
chance sérieuse de savoir résoudre le problème), donc j'essaie
insidieusement de convaincre d'autres gens d'y
faire attention et d'y réfléchir à
ma place. Wir müssen wissen — wir werden
wissen!