Vous êtes sur le blog de David Madore, qui, comme le
reste de ce site web, parle de tout et
de n'importe quoi (surtout de n'importe quoi, en fait),
des maths à
la moto et ma vie quotidienne, en passant
par les langues,
la politique,
la philo de comptoir, la géographie, et
beaucoup de râleries sur le fait que les ordinateurs ne marchent pas,
ainsi que d'occasionnels rappels du fait que
je préfère les garçons, et des
petites fictions volontairement fragmentaires que je publie sous le
nom collectif de fragments littéraires
gratuits. • Ce blog eut été bilingue à ses débuts (certaines
entrées étaient en anglais, d'autres en français, et quelques unes
traduites dans les deux langues) ; il est
maintenant presque exclusivement en
français, mais je ne m'interdis pas d'écrire en anglais à
l'occasion. • Pour naviguer, sachez que les entrées sont listées par
ordre chronologique inverse (i.e., la plus récente est en haut).
Cette page-ci rassemble les entrées publiées en
mars 2005 : il y a aussi un tableau par
mois à la fin de cette page, et
un index de toutes les entrées.
Certaines de mes entrées sont rangées dans une ou plusieurs
« catégories » (indiqués à la fin de l'entrée elle-même), mais ce
système de rangement n'est pas très cohérent. Le permalien de chaque
entrée est dans la date, et il est aussi rappelé avant et après le
texte de l'entrée elle-même.
You are on David Madore's blog which, like the rest of this web
site, is about everything and
anything (mostly anything, really),
from math
to motorcycling and my daily life, but
also languages, politics,
amateur(ish) philosophy, geography, lots of
ranting about the fact that computers don't work, occasional reminders
of the fact that I prefer men, and
some voluntarily fragmentary fictions that I publish under the
collective name of gratuitous literary
fragments. • This blog used to be bilingual at its beginning
(some entries were in English, others in French, and a few translated
in both languages); it is now almost
exclusively in French, but I'm not ruling out writing English blog
entries in the future. • To navigate, note that the entries are listed
in reverse chronological order (i.e., the most recent is on top).
This page lists the entries published in
March 2005: there is also a table of months
at the end of this page, and
an index of all entries. Some
entries are classified into one or more “categories” (indicated at the
end of the entry itself), but this organization isn't very coherent.
The permalink of each entry is in its date, and it is also reproduced
before and after the text of the entry itself.
Une petite pensée pour nos chers petits agrégatifs de maths qui
passent leurs épreuves écrites (d'admissibilité) demain et jeudi, de
9h à 15h.
De mon côté, mon mémoire de thèse est maintenant en cours
d'impression. J'ai dû insister auprès du service de reprographie (qui
voulait me faire changer la pagination du début) pour dire que, oui,
vraiment, je sais ce que je veux, les résumés anglais et français
seront à la fois en page 2 et sur la quatrième de couverture : mais il
semble que cette fois c'est bien parti. Et j'ai commencé à
sérieusement préparer mon exposé de soutenance.
Tant que j'y suis à raconter n'importe quoi, voici deux problèmes
de maths qui me distraient ces temps-ci (le genre de problème qui
superficiellement semblait facilement traitable et qui, à bien y
réfléchir, s'avère difficile). Le premier
est le suivant : si an est une suite
énumérant tous les nombres complexes à coordonnées rationnelles qui ne
sont pas dans le disque unité fermé et
cn est une suite de réels strictement
positifs qui décroît suffisamment rapidement, de sorte que la fonction
f(z) = ∑ncn/(z−an)
soit holomorphe sur le disque unité ouvert, montrer qu'elle n'admet
pas de prolongement holomorphe à aucun ouvert (connexe) strictement
plus grand. Le second
est : peut-on caractériser les corps K tels que, si un
polynôme f est scindé (je veux dire, totalement décomposé :
il a toutes ses racines dans K) alors sa dérivée
f′ l'est aussi ?
J'ai le plaisir de vous annoncer que je soutiendrai ma thèse, ayant
pour sujet
“Hypersurfaces cubiques: R-équivalence, équivalence rationnelle, et
approximation faible”
le vendredi 8 avril 2005 à 10h30,
en salle 121–123 (premier étage), bâtiment 425, rue du Doyen Georges
Poitou, campus scientifique d'Orsay (un plan d'accès se trouve sur
<URL: http://www.math.u-psud.fr/plans/index.html >).
La soutenance sera suivie d'un pot en salle du thé (même bâtiment),
auquel vous êtes tous conviés. Il serait souhaitable que ceux qui
pensent venir au pot envoient un courrier à madorepanaudvoilafr
pour que nous puissions nous faire une idée du nombre. D'avance
merci !
J'ai déjà parlé d'un film
où Gaël Morel (pour lequel j'ai notoirement un faible) apparaissait
comme acteur, là, il est réalisateur : j'ai regardé Le Clan
cet après-midi en DVD, et j'ai beaucoup aimé. Je choisis
l'image ci-contre (très tendre) pour l'illustrer, mais ce n'est pas un
film sur l'homosexualité, c'est un portrait de trois frères, Marc,
Christophe et Olivier, de leurs rapports et du monde dans lequel ils
évoluent. Il n'y a pas vraiment d'histoire à raconter, plutôt une
succession de scènes — toutes ne m'ont pas semblé géniales, mais
certaines sont vraiment fortes et l'ensemble est très beau. L'acteur
débutant qui joue Olivier (le jeune frère), Thomas Dumerchez, me
paraît très prometteur. Bref, je conseille.
Quelques informations diverses glanées sur le changement d'heure et
que je trouve amusantes à faire partager.
D'abord, on peut attribuer l'idée de l'heure d'été (ainsi que le
nom anglais daylight saving [time]) à Benjamin Franklin : il a
écrit un essai
humoristique dans le Journal de Paris, en 1784, où il se
plaint que les parisiens se réveillent à midi alors que le Soleil,
lui, est levé dès six heures et, découverte stupéfiante, brille
dès ce moment-là, alors que si on faisait sonner les cloches dès
l'aube pour forcer les gens à se lever les économies en bougies
seraient stupéfiantes. Globalement on trouve sur ce site un certain
nombre d'informations assez intéressantes sur l'heure d'été.
Dans l'Union européenne, actuellement et depuis 1996, l'heure d'été
commence le dernier dimanche de mars et termine le dernier dimanche
d'octobre : cela résulte d'une directive
européenne de 1994, qui a été reconduite pour les années
ultérieures. Auparavant (et depuis 1979 ou quelque chose comme ça),
la fin de l'heure d'été avait lieu le dernier dimanche de septembre
(sauf au Royaume-Uni[#]). J'ai le
souvenir, d'ailleurs, des tracas pénibles causés en 1996 quand ils ont
changé les règles : beaucoup d'ordinateurs ont été décalés d'une heure
pendant l'essentiel du mois d'octobre (c'était mon premier contact
sérieux avec Unix, je venais de rentrer à l'ENS et les
stations Sun étaient toutes à la mauvaise heure). Le changement
d'heure a lieu à une heure du matin temps universel, quel que soit le
fuseau horaire (donc le décalage entre l'heure de Londres est celle de
Paris est constant, il est toujours de une heure).
Aux États-Unis, l'heure d'été dure actuellement du premier dimanche
d'avril au dernier dimanche d'octobre, et tous les changements d'heure
n'ont pas lieu en même temps mais à la même heure dans les différents
fuseaux (c'est encore plus bizarre que ça, d'ailleurs, ils n'ont pas
lieu à la même heure dans un sens et dans l'autre : en avril on saute
de 1h59 à 3h00 alors qu'en octobre on revient en arrière de 1h59 à
1h00 c'est-à-dire une heure plus tôt que dans l'autre sens). Là
aussi, il y a toutes sortes de subtilités historiques mais aussi
géographiques. Les gens qui veulent des détails incroyablement précis
sur tous les changements d'heure de tous les coins du monde peuvent
consulter les fichiers du répertoire timezone/ des
sources de la GNU
libc.
Une question amusante à se poser est celle de l'effet du changement
d'heure sur les gens qui vivent « décalés » comme moi (je me couche
très tard et je me lève très tard aussi). Je me réjouissais que ça me
mettrait plus en phase avec le Soleil, mais un ami a tenu le
raisonnement exactement opposé — il a dit que l'heure d'été le
décale encore plus par rapport à l'heure civile. Autrement dit, la
question est : si on vit « décalé », est-ce d'une quantité fixe par
rapport au Soleil ou par rapport à l'heure civile ? Dans mon cas,
c'est indubitablement par rapport à l'heure civile, je me couche tard
parce que je dîne à une heure normale et que je tiens à faire beaucoup
de choses après le dîner. D'autres sont sans doute décalés parce
qu'ils fuient le Soleil et dans ce cas effectivement l'heure d'été ne
fera qu'aggraver leur cas ; mais pour ma part j'apprécie beaucoup la
lumière et c'est avec grand regret que je constate que je passe une
partie significative de ma vie la nuit (enfin, ce n'est pas vrai,
j'aime aussi bien la nuit, par exemple pour me promener dans des rues
désertes, mais ce n'est qu'occasionnel).
[#] Pour ceux qui veulent tout savoir, à
ce que j'ai compris, au Royaume-Uni, c'était : de 1990 à 1995, du
dernier dimanche de mars au quatrième dimanche d'octobre, de 1981 à
1989, du dernier dimanche de mars au lendemain du quatrième samedi
d'octobre (remarquez la subtile différence, pour 1989 !), et de 1972 à
1980, du lendemain du troisième samedi de mars au lendemain du
quatrième samedi d'octobre. En plus, l'heure à laquelle le changement
se faisait a été modifiée en 1981 : avant, c'était à deux heures du
matin (temps universel) et depuis c'est une heure.
Youpi, le Soleil va se coucher à des heures plus raisonnables, on
va de nouveau avoir de belles et longues soirées… Mais en
attendant, il est fort tard et il faut aller au lit.
(D'accord, je ne parle que de ma thèse en ce moment. Mais bon,
c'est un peu normal, quand même : il faut bien dire que ça m'occupe
pas mal.)
Il n'y a rien de plus fastidieux que les dernières révisions à un
texte. Je n'arrête pas de faire une petite modification, recompiler
l'ensemble, constater que j'en ai une nouvelle à faire, et
recommencer. De temps en temps j'imprime le résultat, comme si je
m'imaginais que ça lui donnerait plus de stabilité (j'attribue un
numéro à la version, je conserve le PDF et je note
scrupuleusement le numéro, la date et le md5 sur la
version imprimée). J'en suis à cinq versions imprimées pour l'instant
(0, 1, 1b, 1c et l'actuelle
version 2)
— heureusement que mon mémoire fait moins de cent pages[#] et que j'imprime en recto-verso.
Et à l'impression définitive, ce sont soixante-dix exemplaires qui
seront tirés (hum, je me suis toujours demandé comment on faisait à
l'époque où les imprimantes laser et les photocopieuses n'existaient
pas).
Enfin bref, je me demande si je ne vais pas expédier dès maintenant
le PDF à la repro, juste pour m'en débarrasser et ne plus
avoir à recompiler ce truc aussi souvent. Tant que ce n'est pas fait,
vous avez le droit de me signaler si vous trouvez des erreurs (de
typo, d'orthographe ou — j'espère que non — de
mathématiques) dedans : ça vous
vaudra à la fois ma reconnaissance pour celui qui m'épargne une erreur
dans la version définitive, et mon agacement à devoir produire une
nouvelle version.
Je crois que je vais devoir tirer un trait sur la couleur : la
repro du département de maths d'Orsay ne fait que du noir et blanc,
c'est dommage pour les jolis dessins
que j'ai mis en page 5. Je pourrais faire des tirages (recto simple)
sur l'imprimante couleur du labo (à l'ENS), mais ce
serait un peu pénible de les apporter pour les faire mettre dans le
mémoire avant reliage. Peut-être ferai-je un transparent vu que, de
toute façon, je n'échappe pas complètement aux transparents (j'en
prévois exactement un, sur le fond, pour synthétiser les calculs de la
partie Non-nullité d'un groupe de Chow, qui seraient
excessivement fastidieux à écrire au tableau).
I spent a good part of the
afternoon creating this image (click to enlarge) of one of
the remarkable inhabitants of the platonic heaven: the Clebsch cubic
surface; specifically, this is the Euclidean form of the latter which
has the greatest possible group of symmetries (24 of the 120
symmetries of the Clebsch cubic are realized as Euclidean
isometries).
Every smooth cubic surface has twenty-seven lines on it (sometimes
poetically known as Solomon's seal; I do not know who coined
the term or whether it is related to the plant Polygonatum
biflorum, which also goes by that name). But in general they
exist only as complex lines and might not all be realized: the number
of real lines can be three, seven, fifteen or twenty-seven, and
on the Clebsch cubic all twenty-seven lines exist in a real sense.
You can only see twenty-four lines in the picture (can you?),
however, because the last three lines are away at infinity.
Furthermore, it is possible for three lines on a cubic surface to
all meet in a single point, in which case the point in question is
known as an Eckardt point (this is a
remarkable feature, and while all cubic surfaces have lines on them,
not all have Eckardt points, even in the complex sens): the Clebsch
cubic surface is unique in that it has ten Eckardt points, and all are
real (on my particular Euclidean realization, four are the vertices of
a regular tetrahedron, two of which can be clearly seen, and six are
at infinity).
Another way to represent a smooth cubic surface (at least one which
has all twenty-seven lines real) is as a set of six points in the
(projective) plane (in general position, that is, such that no three
are aligned and all six do not line on a common conic). It is not
easy to describe precisely the relation between the six marked (or
blown up) points and the cubic surface[#], but it is quite easy to explain
how the twenty-seven exceptional lines are seen: consider the six
marked points, the fifteen lines connecting any two of them, and the
six conics going through five of the marked points — now
6+15+6=27, and they correspond exactly to the exceptional lines on the
cubic surface; and even intersection is preserved if we agree that
intersection at the marked points in the plane is only taken into
account when it is tangential[#2]. Eckardt points are also easily
seen that way: when three lines defined by three pairs of marked
points meet in a common point, that point is an Eckardt point; also
when the conic through five of the six marked points has a tangent at
one of said marked points which goes through the sixth, then that
tangent direction is an Eckardt “point”. Under this
correspondance, the Clebsch cubic is the most remarkable configuration
of six points in the plane, namely, a regular pentagon and its center.
The ten Eckardt points are then obvious.
So one of the answers I might give when asked what my thesis is
about is: six points in the plane.
[#] Each point on the
cubic surface corresponds to a point on the plane and, if it is one of
the six marked points, a line direction throught that point. (This is
what is meant by blowing up: replacing a marked point by the
set of all directions through that point.)
[#2] For example, given
three of the six marked points, the three lines connecting them are
thought not to intersect; however, each of them intersects the two
marked points which it joins. This is in accordance with the idea
that the marked points have been replaced by the set of directions
through them.
Il est très difficile de se rappeler maintenant comment on a pu
vivre ce moment-là, ce qu'était l'atmosphère si particulière de cette
période. Tout était permis, même les espoirs les plus fous, et nous
nous découvrions une liberté inimaginable jusqu'alors. En même temps,
tout était nouveau aussi, nous avancions bravement sur un terrain
inexploré. Nous étions les pères fondateurs, et toutes les portes
nous étaient ouvertes. Il est facile, rétrospectivement, de parler de
folie collective : mais si je mesure par le bonheur que j'ai ressenti
alors, une joie de vivre qui me rappelait mon enfance et que je n'ai
pas égalée depuis, j'en viens à me demander si cette folie n'est pas
préférable à ce qu'on nous propose.
Je viens de produire une nouvelle version de mon mémoire de
thèse (la précédente est
encore disponible pour les gens qui veulent jouer aux sept erreurs).
Une des nouveautés, c'est qu'il y a maintenant des remerciements ;
comme c'est la seule chose que les gens lisent dans une thèse de toute
façon, je vous évite d'avoir à faire l'effort de la récupérer
complètement, et je recopie ici :
Je souhaite tout d'abord remercier ici mon directeur de thèse,
Jean-Louis Colliot-Thélène, pour l'encadrement dont j'ai bénéficié de
sa part tout au long de ce travail de recherche, pour ses explications
toujours claires et son enthousiasme à faire partager sa culture
mathématique, ainsi que pour sa très grande disponibilité et
sa gentillesse. Il a été avec moi d'une patience considérable, au-delà
de celle qu'un doctorant peut légitimement attendre, et je
lui dois bien plus que de m'avoir seulement proposé un sujet.
Ma gratitude va également à Brendan Hassett et Laurent Moret-Bailly,
rapporteurs du manuscrit, qui m'ont permis, par le soin de leur
relecture et la pertinence de leurs remarques, d'en améliorer
substantiellement la clarté. Je remercie aussi Olivier Debarre et
David Harari d'avoir accepté de faire partie du jury.
Il me semble approprié d'exprimer encore ma reconnaissance envers
quelques uns de ceux qui m'ont initié au monde fascinant de la
géométrie algébrique : Luc Illusie et Michel Raynaud notamment,
lorsque je faisais mon DEA, mais aussi Gérard Laumon et Yves Laszlo,
qui m'ont utilement conseillé, et Philippe Gille.
Il serait impossible, en revanche, de mentionner tous ceux, trop
nombreux, avec qui j'ai eu des conversations mathématiques qui m'ont
été précieuses ; mais je pense devoir saluer les contributeurs du
groupe sciences.maths du forum de l'ENS, où j'ai eu des
échanges fort nombreux et fructueux : entre autres avec Joël
Bellaïche, Yves de Cornulier, Fabrice Orgogozo, Hugues Randriam — et
surtout Joël Riou sans lequel beaucoup de questions me seraient
longtemps restées obscures.
Je remercie collectivement le département de mathématiques de
l'Université de Paris-Sud et celui de l'ENS, qui m'ont accueilli dans
des lieux si agréables et si propices à la réflexion mathématique, et
enfin tous ceux qui m'ont prodigué leurs conseils ou leurs
encouragements tout au long de cette thèse : j'espère que ce travail
sera à la hauteur de leurs attentes.
Je fais un peu une indigestion de maths, là, et ce n'est pas le bon moment. Hier, deux
séances du séminaire
Variétés rationnelles consacrées aux variétés de
Severi-Brauer. Ce matin encore deux séances consacrées à la
démonstration de la conjecture de Kato (et je trouve pénibles les
orateurs qui s'adressent à l'assistance en disant vous connaissez
tous la suite exacte de Gysin ou on applique tout simplement la
suite spectrale des poids ou encore la conjecture bien connue
de Milnor-Kato-Saito quand on ne sait pas ce que c'est que la
suite exacte de Gysin, la suite spectrale des poids ou la conjecture
de Milnor-Kato-Saito, encore moins les complexes de poids motiviques
de Gillet-Soulé). Cet après-midi, en préparant mes TD
pour après-demain je me rends compte que je n'ai qu'une idée très
floue de comment on calcule en pratique un groupe de Galois (et
notamment je ne sais pas s'il existe un algorithme effectif qui prend
les coefficients rationnels d'un polynôme sur Q et renvoie le
groupe de Galois). Demain matin, re-séminaire (Bourbaki,
celui-ci), et encore, je n'assisterai qu'à un exposé, mais vu le
programme je devrais moralement aller à tous. Ensuite, il faut encore
que j'apporte quelques corrections à mon manuscrit, que je promets
depuis un moment déjà.
Je craque un peu, mais c'est aussi parce que j'ai les nerfs très
tendus. Ceci dit, c'est une chose que j'admire chez des matheux plus
vieux (mon directeur de thèse notamment) : ils ont l'air d'être
capables d'en faire une quantité illimitée en un intervalle de temps
très court sans jamais faire de pause ou avoir envie de s'aérer les
idées. Moi je sature quand même assez vite.
Ça aura lieu le vendredi 8 avril,
à partir de 10h30, en salle 121–123 du bâtiment 425, à
l'Université de Paris-Sud XI. Du moins, s'il n'y a pas de gag d'ici
là ; je passe cet après-midi déposer la paperasse à la scolarité.
“I'm not sure you could have called me an
‘idealist’, but I certainly upheld some rather strong
principles which I had faith in. I was not always of the greatest
intellectual honesty in defending them, but I followed my instinct and
my sense of morals, and I believed—with the most touching naïveté—that sincerity made up for everything.
Well, times have changed… or rather, I have changed.
I do not think anyone could meddle with politics and maintain the
righteousness of my youthful self, but maturity probably had more to
do with the loss of it than anything. I am not saying—mind
you—that I have done or said anything I should be ashamed of.
At least, not anything that would be ‘morally wrong’ in an
objective sense. But I have had to learn the meaning of
‘compromise’. ‘Concession’.
‘Tact’. The adventurous youth craves not for such virtues
as pragmatism and diplomacy: my elder self has come to respect and use
them. I have become…” Quentin fumbled for a word.
“…mellow. Lenient. Reasonable.” There
was unveiled disgust in his voice.
He paused. Then in a sadder voice, he added: “On occasion, I
can hear the former Quentin speak to me. And in those times, not all
the certainty that I have done the right and sensible thing as best as
I could judge can erase the sentiment that I have betrayed those
values by which I swore.”
Mon directeur de thèse et moi avons rempli les papiers pour la
demande d'autorisation de soutenance
avec seulement quatre noms dans le jury : ces papiers doivent être
signés, avant d'être transmis à la scolarité du troisième cycle pour
avoir l'autorisation finale, par le directeur de thèse, le délégué aux
thèses et le directeur de l'école doctorale ; nous avons obtenu de ces
deux derniers signataires qu'ils donnent leur accord sans que le
dernier nom du jury soit encore marqué, puisqu'on ne sait toujours pas
qui ce sera (on espère avoir la réponse demain ou après-demain au
pire). Mais après avoir rempli sagement tous les papiers pour qu'ils
les signent, on apprend que le modèle de formulaire que j'avais est
vieux de quelque chose comme deux mois et n'est plus valable.
Pourquoi ? Tenez-vous bien, c'est impressionnant : c'est parce qu'il
fait signer le délégué aux thèses et que la présidente de l'université
a décidé que comme cette fonction n'existe pas officiellement elle
refuserait désormais d'apposer sa signature sur un document qui le
mentionne. Mais elle veut tout de même avoir son avis. Du coup, la
nouvelle version du papier comporte deux parties où les mêmes
documents sont inscrits, l'une « officieuse » signée par le délégué
aux thèses (qui s'appelle maintenant conseiller aux thèses) qui
propose une autorisation de soutenance, et l'autre « officielle »
signée par le directeur de thèse, le directeur de l'école doctorale et
enfin, après avoir consulté également l'autre moitié (celle dont
l'existence n'est pas officielle), la présidente de l'université.
Bon, il n'y a pas eu de mal, le délégué conseiller aux
thèses, très gentil et complètement désolé du ridicule de la situation
(il n'y est pour rien, cela vient de la présidence), nous a fourni la
nouvelle version des formulaires, j'ai eu le droit à une petite séance
d'écriture pour recopier deux fois la composition de mon jury (noms,
prénoms, titres et établissements de rattachement) et le sujet de ma
thèse (péniblement long, soit dit en passant), et j'ai eu toutes les
signatures. Mais ça reste d'un niveau de grotesque absolument
hallucinant.
(Je ne suis pas trop au courant des histoires de politique interne
de Paris-Sud XI, mais récemment tous les doyens des UFR
ont démissionné, et je crois vaguement avoir compris qu'au moins une
raison pour cela était que la présidence de l'université était
beaucoup trop directive et ne leur laissait aucune marge de
manœuvre. Normalement ce serait plutôt au doyen de signer
l'autorisation de soutenance, par délégation pour la présidente : et
c'est justement ce que la présidente semble refuser. C'est
pathétique.)
Mes deux rapporteurs ont émis un avis favorable sur mon manuscrit. Le feu est donc vert
pour que je soutienne. Il n'y a « qu'à » rassembler un jury (on a
quatre personnes dedans, à savoir mon directeur de thèse, les deux
rapporteurs et Olivier Debarre qui
sera président, et on cherche un cinquième…), réserver une
salle, préparer le pot, rassembler tout ça dans l'espace et dans le
temps, et avoir quelque chose à dire (gloups). Ça sera probablement
le 5 ou le 8 avril (les seules dates dans l'intersection des
disponibilités des différentes personnes), au matin. Ce qui signifie
aussi que c'est un peu la panique, parce que la date doit être déposée
à la scolarité du troisième cycle de l'Université, avec la composition
complète du jury, un résumé en trente exemplaires (sic), et plein de
signatures, au moins dix-sept jours stricts avant la
soutenance. Soit, en pratique, au plus tard ce vendredi. Moi qui ai
horreur d'être pressé par le temps.
Et par ailleurs, je n'ai pas l'impression que je doive me réjouir
d'avoir bientôt passé cette étape. C'est un cycle de ma vie qui
s'achève, une période qui a été plutôt heureuse, et je ne me félicite
pas de la quitter.
Maintenant que la nouvelle n'a
plus rien de secret, je peux dire de quoi il s'agit : quelqu'un (on ne
sait pas bien d'où ça vient, soit de la direction des écoles soit du
ministère) prévoit la fusion de l'ENS (Ulm) avec l'ENS de Cachan, à un
horizon extrêmement proche (rentrée 2007). On est encore
considérablement dans le flou quant aux modalités de la chose (les
concours et diplômes seraient fusionnés, les départements le seraient
probablement aussi, on ne sait pas dans quelle mesure des déplacements
auraient lieu) ou même quant à l'avancement du projet. Les raisons
invoquées (par la direction) sont principalement la visibilité
internationale, les raisons réelles sont probablement plus d'ordre
financier (l'ENS a de sérieuses difficultés de
trésorerie) — à moins qu'il ne s'agisse d'une pression
ministérielle directe. En même temps, l'actuelle antenne de Ker Lann de
l'ENS de Cachan deviendrait sans doute indépendante sous
le nom d'ENS de Bretagne (ou de Rennes).
Je ne vais pas exposer en détail mes raisons d'être hostile à ce
projet qui, je crois, n'apporte rien sinon des difficultés pratiques
infinies. Je crains avant tout qu'on perde un principe fondamental
qui vaut actuellement à Ulm : qu'un élève entré sur un concours
quelconque est ensuite libre de façonner sa scolarité comme il
l'entend (les négociations de contrat d'études avec la direction des
études sont extrêment souples), et notamment peut choisir sa
discipline comme il l'entend ; je soupçonne précisément que,
s'agissant des maths, comme il y aura nettement plus de places au
concours qu'on peut raisonnablement espérer recruter de mathématiciens
purs, certains soient forcés à s'orienter vers les maths appliquées
même s'ils n'en ont pas la vocation (il est indéniable que de telles
pressions existent actuellement à Cachan, où les maths pures sont
presque inexistantes). (Par ailleurs, toujours concernant les maths,
il me semble clair que fusionner les prépas agreg d'Ulm et de Cachan
serait une grosse perte, parce qu'elles ont des esprits très
différents et remplissent des rôles absolument dissemblables.)
Mais finalement, le plus inquiétant me semble l'esprit du projet,
où on parle beaucoup de relations avec les entreprises et très peu
d'élèves. Inutile de dire que je suis un ardent défenseur de la
recherche pure (qui m'apparaît menacée de tous côtés, et ce projet
peut être une de ces menaces).
À l'ENS même, les avis se forment : certains sont
plutôt pour, ou indifférents, d'autres sont tout à fait contre (voire
très remontés), dans tous les cas pour des raisons qui peuvent être
très diverses (je me sens assez peu de sympathie pour ceux qui
craignent pour la réputation de leur École et pour le prestige du
titre de normalien, encore moins pour ceux qui s'imaginent que les
cachanais puent, mais il va falloir faire cause commune).
On en saura plus prochainement sur les détails qui nous manquent.
Ou du moins, on l'espère.
En tout état de cause, si par hasard certains lecteurs de mon blog
auraient des détails sur la manière dont s'est faite la fusion de
l'ENS (Ulm) et de l'ENSJF (Sèvres) en 1985,
et sur le rôle qu'ont joué Josiane Serre et Georges Poitou, ou sur la
fusion parallèle de Fontenay et de Saint-Cloud, ça m'intéresse. (Ceux
qui sont un peu perdus dans ce que sont les diverses ENS
peuvent par ailleurs lire cette
page.)
Je crois que je n'ai jamais été autant débordé de ma vie. Je dors
à peine six heures par nuit et je n'ai pas une seconde de libre du
matin au soir, et avec ça je n'arrive pas à tout faire. C'est
impressionnant.
J'étais au restaurant ce soir avec des amis (un restaurant indien,
Yugaraj, le seul de Paris à être dans le
Michelin je crois, et je le recommande au passage parce
que, même si c'est un petit peu cher, c'est vraiment délicieux). Nous
payons l'addition en liquide, et on nous rend 1.50€ alors qu'on
aurait dû nous rendre 1.20€. Différence insignifiante, mais ça
m'a complètement fait bugguer :
si on signale qu'il y a trop, c'est chipoter, c'est attirer
l'attention du serveur pour pas grand-chose, il est plausible qu'ils
n'aient simplement pas eu la monnaie pour faire le compte,
si on prend les 0.30€ sans rien dire, je ne trouve pas ça
honnête (c'est une somme négligeable, peut-être, mais je suis
scrupuleux),
si on laisse la différence sur la table, ça laisse croire que
c'est un pourboire, et laisser 0.30€ de pourboire sur une
addition de presque 300€ c'est presque insultant,
et enfin je suis plutôt contre laisser un vrai pourboire (comme le
service est inclus, en France, je ne mets de pourboire que quand le
service a été vraiment exceptionnel et que je considère qu'il
mérite plus que les 15% statutaires ; ici, il était parfaitement
convenable, mais ce n'est pas comme si on nous avait fait une faveur
spéciale[#] ou compliquée).
Bref, je suis resté complètement bloqué. Quelqu'un a table a fini
par me sauver en décidant pour sa part de mettre 5€ de
pourboire.
[#] En fait, quand j'y
pense, ça se justifiait peut-être : nous avions réservé pour six, puis
appelé pour dire que nous étions huit, et en fin de compte nous sommes
arrivés à sept, avec un quart d'heure de retard sur la fourchette
annoncée ; puis un des convives a demandé une addition séparée.
We all knew the blow would come, but it is now official:
as if I hadn't had enough bad news
recently, I now learn that Mozilla [Seamonkey] development (by the Mozilla foundation) is officially
terminated. Well, some
people are gathering to continue development anyway, but I'm
afraid they'll find the task a bit overwhelming.
The official successor to the Mozilla [Seamonkey] Application Suite
is [Mozilla] Firefox, which can be briefly but accurately described as
a version of (the browser part of) Mozilla with a lot of
features—including many useful ones—removed and a slightly
different look (that's something one has to admit: Firefox
looks better than Mozilla). It's not really usable as such,
however: one must add various extensions to Firefox to recover the
functionalities present in Mozilla (most—but not all—of
them are indeed available in such form); however, such extensions are
clumsy to install, do not integrate seamlessly in the browser, and
cause various problems I need not go into (you have to upgrade them
separately, they might have restrictions on which versions they work
with, and they might not work fully well with each other).
Also, Firefox has some user interface limitations; for example:
under Mozilla you can search something in Google by simply entering
the words in the URL bar and choosing Google
search; under Firefox you have to use a different, and visually
obtrusive, form for searching (which clutters up the window and forces
the URL bar to be smaller); another limitation of Firefox
is that its sidebar, contrary to Mozilla's, cannot be folded and
unfolded by a single mouse click, and can display only one sidebar tab
at a time; anyway, these limitations are mostly minor, but irritating.
I could list some more annoyances of Firefox, but to keep it short:
don't try it—if you aren't alreay addicted you probably won't
like it much. Note also that Firefox is just a browser; if you're
looking for the successor to the mail and news agent that used to be
in Mozilla, that's Thunderbird, which I haven't tried using (I suspect
it's pretty much in relation to Mozilla news what Firefox is in
relation to Mozilla browser, although it might be less stable because
it was started more recently and maybe
also—relatively—better because Mozilla news was never
really much good anyway); of course, the annoyance of having to start
two different programs to browse the Web and Usenet is another
grievance one could have, and if you use the Mozilla composer, you're
plain out of luck (unless you count N|vu) but I don't.
The question of what I will do, or what browser I will now
recommend to other people, requires some thought. To tell the truth,
I believe that the might Lizard has been
dead for quite some time already—all they do is fix bugs on
it—and its fiery offspring is not really any much more alive.
Maybe I should try switching to Konqueror instead (but I don't
very much like the way it's sort of tied in with
KDE—and I'm also unsure as to how well it handles
MathML). Other than that, it will depend on how fare
those who attempt to bring a second life to Mozilla [Seamonkey].
Je rentrais chez moi ce soir et en arrivant au boulevard Blanqui
vers trois heures du matin je vois passer sur les voies de métro un
train de service de plusieurs wagons qui avance très lentement en
faisant un bruit de fin du monde. En regardant de plus près, j'ai vu
qu'il portait l'indication train aspirateur. C'est rigolo, je
ne savais pas que ça existait.
This took me a while to figure out, so I might as well post it here
in case it's of use to anyone. Assume you have two network
interfaces, say eth0 and ppp0, with two
totally unrelated IP addresses, say
257.42.0.18 for eth0 (yes, I know, 257 is
impossible, I'm just choosing this to represent a totally arbitrary
address) and 333.64.17.29 for ppp0. You
wish to use one interface for certain connections and the other for
others (there can be plenty of different reasons for that: maybe one
connection is faster but has a stupid firewall so it can't be used
always). Now if you can decide which connection goes where in
function of the destination host('s IP address or
network), then it's easy: just configure your routing tables
appropriately. But what happens if you wish, for example, all
outbound connections to TCP port 80 to go through
eth0 and all others to go through ppp0? We
need a little more work there, and a little magic, but thanks to the
mutant features of the Linux network stack, using
iptables and iproute2, it is possible.
Here's a sample of the command lines that might be useful (just a
guideline, of course: don't ever copy them blindly, please learn about
the programs and understand what each line does), at least if the host
is not a router:
# Ordinary route is via ppp0 (this should probably be done as pppd starts):
route add defaut gw 333.64.17.1 dev ppp0
# Routing table 201 (say) is through eth0 (gateway is 257.42.0.1, say):
ip route add 257.42.0.0/24 dev eth0 scope link src 257.42.0.18 table 201
ip route add default via 257.42.0.1 dev eth0 table 201
# Use routing table 201 for marked packets:
ip rule add fwmark 1 table 201
# Now set up iptable rule to mark packets destined for eth0:
iptables -t mangle -A OUTPUT -p tcp -m tcp --dport 80 -j MARK --set-mark 1
# Lastly, we need to do some self-masquerading:
iptables -t nat -A POSTROUTING -s 333.64.17.29 -o eth0 -j SNAT --to-source 257.42.0.18
The last line probably deserves extra comments, because it is not
at all obvious: it is needed because otherwise an outbound connection
from the local host on port 80 will have local address
333.64.17.29 (as it appears on the ordinary routing
table) whereas it is sent through the eth0 device, and
this can't work (any router down the stream will reject it as not
being meant for this route, or at best the return packets will come
through the wrong interface).
If you're also trying to open listening (server) sockets on the
eth0 interface, you also need something probably like
this:
# Turn off entry route verification on incoming packets:
sysctl -w net.ipv4.conf.eth0.rp_filter=0
# Also mark local packets destined for eth0:
iptables -t mangle -A OUTPUT -s 257.42.0.18 -j MARK --set-mark 1
If your box also acts as a router (through some third interface
eth1, say), then at the very least you need to duplicate
the OUTPUT rules (for the mangle table) as
PREROUTING ones and broaden the source address match on
the rules that have one, but more complicated are probably desirable
(of course, it all depends on what kind of addresses you have on
eth1; I'll leave as an exercise for the interested reader
the case where eth1 has private addresses and you wish to
masquerade on forwarding…).
Hier soir on m'a appris qu'une des idées dans les cartons des Powers That Be était de faire passer la charge
d'enseignement des maîtres de conférences dans les universités
françaises à 384 heures annuelles (contre 192 actuellement, 384 étant
la charge d'un professeur agrégé dans le supérieur), ce qui voudrait
dire en pratique qu'ils ne feraient plus de recherche. De toute
façon, la recherche
fondamentale française (publique — mais la recherche
fondamentale privée ça n'existe pas) a l'air destinée à mourir prochainement
telles que les choses sont parties. Sale temps pour les
mathématiciens purs et, pire encore, algébristes ou apparentés.
Mauvaise nouvelle suivante : le Conseil européen a adopté un texte
favorable aux brevets logiciels dans l'Union, avec une entorse à la
procédure (le lien précédent contient des explications très détaillées
à ce sujet). L'étape suivante de la procédure de codécision est une
deuxième lecture au Parlement, qui ne se fera peut-être même pas (si
elle n'a pas lieu le texte est adopté) où il faudrait un vote à la
majorité absolue des membres pour arrêter la procédure.
Malheureusement, il est peu probable qu'on puisse faire quoi que ce
soit : des lobbys très puissants et très riches veulent absolument que
les brevets logiciels soient ouverts en Europe, au mépris de l'intérêt
de tous les utilisateurs d'ordinateurs, et les pressions exercées sur
toutes les instances dirigeantes européennes sont gigantesques, ainsi
que Michel Rocard l'a exposé dans une
interview au journal Le
Monde (daté du 17 février).
À un niveau plus local, celui de l'ENS, il y a également des
mauvaises nouvelles qui se préparent (venant de l'administration), et
il semble qu'elles soient de taille. On n'en sait pas plus pour le
moment (sauf un petit nombre qui sont dans le secret des dieux et qui
refusent de lâcher le morceau), des choses seront révélées dans une
semaine environ, mais il semble qu'on doive s'attendre au pire. Je
m'abstiendrai de polémiquer plus largement contre l'administration de
l'École sur un site Web qui y est hébergé, mais disons qu'on (élèves,
anciens élèves, enseignants et chercheurs) a eu déjà certaines causes
de mécontentement ces derniers temps.
Pour me remonter le moral, je viens de voir un téléfilm incroyablement déprimant
(Résumé en bref et avec spoilers : ça commence en 1941 dans la France
occupée ; Sarah est juive, elle voit toute sa famille se faire
massacrer presque sous ses yeux, elle se réfugie auprès de son seul
ami, Jean, dont elle est amoureuse, et elle apprend qu'il est
homosexuel ; le frère de Jean, Jacques, par jalousie, fait arrêter son
frère, comptant le faire relâcher immédiatement, mais Jean est accusé
à tort d'avoir eu une relation avec un officier allemand, et déporté ;
ensuite, Sarah voit l'amant de Jean, qui était résistant, se faire
descendre, elle est recueillie par Jacques, plein de remords, qui
l'épouse et lui donne un fils ; mais à la libération Jacques est
accusé de collaboration et de traffic avec l'ennemi, on témoigne que
c'est lui qui a fait arrêter son frère, et il se suicide en prison ;
enfin, à la libération des camps, Jean revient, mais il a été torturé
puis lobotomisé pour tenter de le rééduquer, et il meurt
stupide peu de temps après son retour.) Le genre d'histoire qui vous
remonte le moral et vous redonne la joie de vivre, quoi.
À part ça, je suis assez mécontent du TD que j'ai
donné tout à l'heure (j'ai été très mou, et obscur sur plusieurs
points), j'ai plein de petits changements triviaux mais pénibles à
faire dans ma thèse, et j'ai encore des problèmes informatiques
idiots.
Est-ce que quelqu'un pourrait me donner une bonne nouvelle, pour
changer un peu ? Quelque chose qui remonte le moral ?
Télérama dit énormément de
bien de ce téléfilm
qui passe demain (lundi) soir à 20h55 sur France 2 (par le même
réalisateur que Juste une question
d'amour, qui avait eu un succès immodéré auprès des homos
il y a quelques années) :
En France, en 1942, le destin tragique de trois amis, stigmatisés
par les nazis parce que juifs ou homosexuels. L'étoile jaune et le
triangle rose les précipitent en enfer.
Aujourd'hui j'ai gagné le droit de faire un aller-retour à Orsay
pour ajouter un caractère dans un fichier. J'avais bêtement oublié le
6 en écrivant iface eth0 inet6 static et je
n'avais pas pensé à vérifier la syntaxe (il trouvait deux iface
eth0 inet static et considérait ça comme une erreur fatale) :
du coup le réseau ne démarrait pas du tout, donc impossible de
reprendre la main à distance.
Donald
Knuth, le quasi-mythique auteur de TeX et de The Art
of Computer Programming est venu aujourd'hui donner un exposé à
Paris (allez savoir pourquoi, à l'EHESS), sur le sujet Lattices
of Trees (Treillis d'arbres), exposé qui
constituait, à ce qu'il nous a dit, à la fois le début et la fin de
son book tour pour la sortie du fascicule 2
du volume 4 de TAOCP (le
fascicule 1 n'est pas sorti, mais il nous a expliqué que c'est normal
que le 2 sorte maintenant : le 1 viendra ultérieurement ; par ailleurs
on notera que le fascicule 1
de la nouvelle édition du volume 1, celle qui utilise le
processeur MMIX au lieu du vieux MIX, est
également parue récemment).
Le sujet était intéressant, même s'il n'a pu que l'effleurer et que
ça se limitait un peu à décrire trois treillis qu'il trouve jolis.
Mais je suis tout à fait d'accord, au moins pour ce qui est du
treillis de Tamari (c'est comme ça qu'il l'a appelé), également connu
sous le nom d'associaèdre, un de ces objets mathématiques mystérieux
qui semblent à mes yeux avoir une existence platonique très forte (je
veux dire qu'ils ne sont pas inventés par l'homme, on les découvre) et
une très grande naturalité (en l'occurrence, il s'agit du graphe de
tous les parenthésages sur n objets avec des arêtes
représentant la loi d'associativité, certainement quelque chose de
fondamental pour définir les n-catégories…) ; on
peut lire ce qu'il écrit à ce propos en regardant l'exercice 27,
section 7.2.1.6, du pré-fascicule 4a
du volume 4 de son Œuvre éternelle.
À part ça, je suis déçu par deux choses. D'abord, Knuth ne
ressemble pas à ce à quoi je m'imaginais : enfin, j'avais vu sa tête
en photo, donc je pouvais l'identifier, mais je me faisais l'idée
qu'il devait être tout petit (et un peu gros), alors que c'est un
géant (maigre). Ensuite, je pensais qu'il parlait couramment français
(et allemand, russe, italien, espagnol, chinois, et plein d'autres
langues), parce qu'il n'arrête pas de faire des références à toutes
sortes de langues ; en fait, c'est un bluffeur comme moi et il ne
parle que l'anglais. Il nous a tout de même raconté qu'il a écrit un
livre en français (aux presses de l'université de Montréal), mais
c'est parce que des étudiants ont pris des notes sur des exposés qu'il
a faits et lui ont permis de l'éditer ainsi (il connaissait tout de
même assez de français pour le relire).
« On » a essayé de l'inviter à dîner (comme « on » l'avait fait
pour Hofstadter quand celui-ci était venu donner quelques conférences
à l'X il y a trois ans), mais il était pris. Dommage,
c'était une occasion rare.
Est-ce qu'ils n'ont pas l'impression d'en faire un peu beaucoup ?
Même les voitures de police maintenant portent des autocollants
Paris 2012. Impossible de faire trois pas sans voir ce foutu
logo partout. Le métro en est rempli (dix millions de
tickets de métro en ont été frappés !). L'affichage urbain est
squatté à mort. Bordel, les Parisiens ont compris que leur
ville était candidate aux Jeux Olympiques de 2012, c'est bon, le
message est passé, on a saisi que c'était censé être un acte civique
et citoyen de soutenir cette candidature. Je n'ai aucune idée
de la quantité d'argent qui a été engloutie dans cette campagne de
com' démesurée et je préfère ne pas savoir combien venait de fonds
publics ou (surtout) d'entreprises dont je suis client, mais j'ai
vaguement l'impression que ces sommes auraient pu plus utilement
servir.
Personnellement je m'en fous assez, je suppose que si la ville est
choisie ça sera un désagrément certain (mesures de sécurité
paranoïaques, transports perturbés, ce genre de choses) pour les gens
qui y habiteront à ce moment-là et probablement un gain
d'infrastructures aussi (comme d'un tronçon de tramway) — moi
j'ai du mal à voir aussi loin. Je me demande vaguement à qui
profitera véritablement la manne économique promise de façon aussi
ostensible (les jeux sont une chance pour notre économie, nous
clame-t-on partout). Ce qui me donne vraiment la nausée,
c'est l'unanimité forcée : c'est de l'auto-persuasion à un niveau
rarement atteint (décidément, les slogans avec tous unis
dedans, je digère très mal). Hum, si les gens sont aussi
enthousiastes que la pub le laisse penser, pourquoi faut-il alors
faire encore plus de matraquage ?
Si on estime devoir mobiliser les gens à ce point, et, surtout, si
on y arrive autant qu'on le prétend, est-ce que ça n'aurait pas pu
être pour quelque chose d'un peu plus, euh, je ne sais pas, quelque
chose d'un peu plus grandiose ? L'élan en faveur des victimes du
tsunami asiatique était peut-être critiquable sur certains points
(notamment celui d'oublier toutes les autres victimes de toutes sortes
d'autres fléaux de par le monde) mais au moins il partait d'un
sentiment de solidarité (je veux le croire) authentique.
Le son des pas de Medeme sur le sol d'albâtre emplit l'espace. La
réverbération du moindre frottement prend des proportions gigantesques
lors de ses échos répétés sur des murs parfaitement lisses. Ou est-ce
simplement l'idée de déranger un silence pesant qui amplifie chaque
bruit ? Tout ici est intimidant, jusqu'au fait de marcher. Le palais
semble avoir été construit sur une idée qu'annonce au visiteur chaque
pilier, chaque porte et chaque poutre : Je suis grand, et tu n'es
rien. Je suis la résidence des maîtres du monde, j'ai traversé les
siècles et les siècles : toi tu n'es que poussière — qui ne
mérites pas de toucher mon sol si blanc.
Rien en ces lieux n'est à la mesure de l'homme. La hauteur
inconcevable des plafonds, la largeur du moindre corridor, toujours
flanqué d'une double rangée de colonnes chacune épaisse comme une
muraille indestructible, les seules dimensions titanesques de
l'édifice, ne sont pas l'unique rappel de l'invraisemblable puissance
qui l'habite. Le plan labyrinthique de l'ensemble ne peut avoir
d'autre fin que de surprendre celui qui passe : il ne suffit pas que
chaque salle soit tellement grande, il faut qu'elle débouche sur
d'innombrables autres, il ne suffit pas que les murs montent tellement
haut, il faut aussi qu'ils laissent saillir des balcons et s'étendre
des ponts destinés à accroître la sensation de vertige. Et encore cet
étalage absurde de splendeur et de magnificence n'est-il pas fait dans
la grossièreté du plan qui, cherchant à étonner seulement par la
taille, négligerait l'harmonie générale ou l'équilibre du tout.
L'agencement est même trop parfait, on soupçonne jusqu'au rayon de
soleil qui traverse le cristal du dôme pour frapper le portail
monumental de n'être pas là par hasard tant il serait irrévérencieux
d'imaginer que le savant architecte eût pu en avoir fait
l'économie.
J'avoue avoir été influencé, en écrivant ça, par mes souvenirs de
Saint Pierre de Rome : cette basilique a-t-elle un autre but que de
rappeler la puissance du successeur de celui auquel le Christ est
censé avoir dit, comme il est rappelé sur la base du dôme, en lettres
de deux mètres de haut, tibi dabo claves regni
cælorum ? J'ai également dû penser à la grande mosquée de
Casablanca.