Je dois dire avant toute chose que j'écris cette entrée assez à reculons. Le sujet m'emmerde : or si je tiens un blog c'est quand même pour raconter des choses qui m'amusent, ou au moins que je viens d'apprendre et que je veux noter avant de les oublier, et rien de tout ça n'est le cas ici. Le sujet m'emmerde comme m'emmerdent en général les sujets polémiques mais importants (i.e., politiques), parce qu'il il faut travailler pour en parler sérieusement, et on sait qu'on va se faire attaquer ce qui est toujours déplaisant. Or j'ai déjà suffisamment donné dans l'emmerdement par le fait de démêler les conneries sur le dernier virus à la mode de ces deux dernières années, et c'était vraiment usant de devoir m'engueuler à ce sujet. Le sujet m'emmerde d'autant plus qu'il obsède mon poussinet, et du coup nous nous frittons assez souvent à ce sujet, pas à cause de désaccords de fond mais parce qu'il me fatigue à tout ramener à ça, par exemple à ne juger les programmes politiques que pour leur volet nucléaire, à l'exclusion de toute autre considération. Le sujet m'emmerde aussi parce qu'il y a déjà plein de gens qui ont écrit des choses très bien à ce sujet et qu'il faut donc faire le choix entre redire en moins bien ce qu'ils ont déjà dit ou bien insérer les petites remarques complémentaires que je veux faire dans un tissu de pointeurs qui n'est pas très attirant non plus. Mais bon, ça fait quelque chose comme 14 ans que je promets d'en parler, et au bout d'un moment le sens du devoir doit prendre le dessus. Bref, parlons un peu du nucléaire. Mais comme j'ai écrit cette entrée à reculons, j'ai plusieurs fois perdu le fil de mes pensées, et ça doit se voir au plan assez décousu, aux changements de ton (selon mon humeur quand j'écrivais), et aux nombreuses redites ; j'ai quand même essayé de structurer le titre en ajoutant des petits intitulés (alignés à droite pour ne pas trop couper le fil d'un texte écrit d'un seul tenant), une technique que j'avais déjà utilisée auparavant.
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☛ Quelques liens pour commencer
Avant tout, parmi les choses que je peux signaler sur le sujet qui
sont bien faites (i.e., beaucoup mieux que ce qui va suivre), et qui
ne sont pas trop suspectes d'être partisanes, il y
a cette vidéo destinée au grand public de la toujours
excellente chaîne de
vulgarisation Kurzgesagt
(si vous ne connaissez pas Kurzgesagt, regardez au moins
pour les petits dessins très mignons ; mais ça ne les empêche pas
d'être sérieux et
de citer
leurs sources),
et celle-ci de la très
bonne
vulgarisatrice Sabine
Hossenfelder (sans dessins mignons, mais qui fait aussi l'effort
d'avoir cherché des sources précises, et de les lister, dans la
description de la vidéo sur YouTube). Et bien sûr, une méta-source
utilisée par les deux, et qu'on ferait bien de consulter directement,
est la page
consacrée à l'énergie nucléaire de l'extraordinaire site
OurWorldInData, qui contient tout un tas de chiffres pertinents, entre
la production d'énergie nucléaire dans le monde, et les estimations de
morts causées par différentes formes d'énergie. La section
6.4.2.4 Nuclear Energy
(p. 6-34)
de la partie WG III
(Mitigation of Climate Change) du
sixième rapport d'évaluation d'avril 2022 du GIEC
(oui, la
nomenclature est
compliquée) est également digne d'intérêt.
Ajout () : Je peux mentionner que j'avais déjà écrit un billet sur ce sujet (dont j'avais oublié jusqu'à l'existence, je viens de retomber dessus, et il n'a donc pas été relu pour l'écriture de cette entrée-ci).
☛ Quelques chiffres
Mais la question du nucléaire prend une tournure assez différente et, disons, plus aiguë, en France, qui est le pays du monde produisant la part la plus importante de son énergie (69% de l'énergie électrique, 36% de l'énergie primaire) par ce mode de production, ce qui explique que l'énergie électrique en France soit si faiblement carbonée (68gCO₂/kWh pour la France en 2021, contre 364gCO₂/kWh pour l'Allemagne ou 657gCO₂/kWh pour la Pologne : les pays européens qui font mieux que la France sont les pays disposant d'une abondante énergie hydroélectrique ; source ici). Ce chiffre n'est pas tout (en émissions totales de CO₂ basées sur la consommation, la France fait 6.48tCO₂/hab/an contre 9.88tCO₂/hab/an pour l'Allemagne, c'est plus serré, ce qui nous rappelle que l'électricité n'est pas tout ; source ici), mais il est néanmoins très significatif à une époque où l'objectif écologique prioritaire doit être de diminuer autant que possible nos émissions de gaz à effet de serre, et aussi où la part de l'électricité dans l'ensemble de notre consommation énergétique doit être amenée (en conséquence) à augmenter considérablement. (On ne va pas remplacer les véhicules thermiques par des véhicules électriques sans produire nettement plus d'électricité.) Il est donc inévitable de mentionner immédiatement le fait que le nucléaire nous donne accès à une large quantité d'énergie électrique presque entièrement décarbonée (il y a quelques émissions dues à la construction des centrales et à la production du combustible, mais elles sont comparables aux émissions de l'éolien), et pilotable qui plus est (je vais revenir sur ce point important).
☞ Deux sortes de critiques
Pourquoi, donc, la critique-t-on au point que certains appellent à s'en passer, à plus ou moins long terme ?
Je veux distinguer deux catégories de critiques adressées au nucléaire, parce qu'elles sont de nature assez différente et surtout, avancées à des fins assez différentes. La première catégorie concerne essentiellement les questions de sécurité, et de gestion des déchets radioactifs. La seconde catégorie porte sur des problèmes tels que : la disponibilité du combustible à long terme, le coût économique (du minerai et de la construction des centrales), les délais (de construction), etc. De façon simplifiée, la première catégorie d'objections est mise en avant par des organisations ou des individus qui sont idéologiquement opposés au nucléaire (p.ex., Greenpeace) ; la seconde catégorie par des opposants moins idéologiques (ou par des gens qui ne sont pas du tout opposants, mais simplement reconnaissent qu'il n'y a pas de remède magique aux problèmes de l'énergie).