Je vais faire des efforts démesurés pour écrire quelque chose de pas trop interminable, parce que ça fait quelque chose comme cinq billets de blog que j'essaye d'écrire ce mois-ci, qui gonflent un peu hors de proportion, et qui (me) gonflent, si bien que je les mets de côté sans rien publier[#]. Mais j'ai quand même divers trucs à raconter. Imaginez donc ce billet comme autant de petits billets à peu près indépendants mis bout à bout.
[#] Je recopie quand même ci-dessous quelques passages initialement écrits pour ces billets, ce qui peut expliquer quelques incohérences (par exemple entre une prétérition où je dis ne pas vouloir parler de quelque chose et une note où j'en parle).
(À toutes fins utiles, chaque symbole ‘❡’ ci-dessous est d'ailleurs un permalien vers le bout de billet qui suit.)
☙ ❡ ❧
La principale info que je voulais mettre ici, c'est que j'ai un compte sur Bluesky. (Ce n'est pas exactement nouveau, je l'ai créé en octobre 2023, mais disons que j'ai sérieusement commencé à écrire des choses dessus et à avoir des vrais échanges sur ce réseau.) J'ai aussi ajouté récemment à ce site une page d'archive de mes skeets (:= posts sur Bluesky) comme il y avait déjà (et continue à y avoir) une page d'archive de mes tweets : la possibilité pour moi de créer et maintenir[#2] une telle archive est une condition que je considère comme très importante à l'utilisation d'un réseau social.
[#2] En l'occurrence je la (les) mets à jour de façon semi-automatisée entre 1 et 3 fois par semaine environ. Pour Bluesky ce serait facile de rendre le processus totalement automatique, mais je préfère faire des petites vérifications avant de publier la mise à jour. Pour Twitter, c'est devenu beaucoup plus pénible depuis que Musk a coupé toutes les API publiques : je m'en sors quand même en recherchant mes propres tweets dans le navigateur, en faisant sauvegarder les données reçues par Firefox, et en passant ça dans un script Perl très moche que j'ai écrit. Si le processus devient encore plus pénible, alors j'arrêterai complètement d'écrire sur Twitter parce qu'il ne faut pas trop tirer sur ma motivation à prêcher en enfer.
Si vous ne savez pas ce que c'est que ce Bluesky, disons qu'on peut
le définir rapidement
(Wikipédia vous en dira
plus) comme Twitter sans Elon Musk
. Et il est devenu une
destination assez standard pour les gens (y compris un bon nombre de
comptes « institutionnels ») qui souhaitent quitter Twitter
(enfin, 𝕏
comme absolument personne ne dit à part son
propriétaire), soit par rejet dudit milliardaire, soit parce qu'ils
estiment que l'ambiance y devient irrespirable, soit les deux, mais
qui veulent quand même garder une interface très semblable à ce qui
était celle de Twitter (au moins du Twitter d'avant que Musk en
récupère le contrôle). D'ailleurs, si vous venez de Twitter et que
vous créez un compte sur Bluesky vous ne serez pas du tout dépaysé
tellement les deux se
ressemblent[#3]. (Cette
ressemblance de surface cache néanmoins des différences profondes, par
exemple le fait que Bluesky
est open source et
construit sur un protocole ouvert,
cherchant à éviter la centralisation ; mais ça, la plupart des
utilisateurs n'en ont rien à faire. Une autre différence concrète,
c'est que je peux faire des liens vers des fils que j'ai écrits sur
Bluesky, et tout le monde pourra les lire même sans compte Bluesky,
alors que sur Twitter ce n'est plus le cas depuis que Musk a décidé de
tout casser.)
[#3] J'avais commencé à
écrire une liste des petites différences entre Bluesky et Twitter (qui
pourrait servir d'aide à la migration), mais c'est quand même un peu
fastidieux.
Signalons quand
même celle-ci qui est potentiellement importante : contrairement à
Twitter, sur Bluesky les likes
n'ont essentiellement aucun
effet sur la visibilité d'un post — si vous voulez le partager avec
d'autres, il faut le reposter. (C'est
d'ailleurs possiblement
un problème.)
Ajout () : J'aurais dû ajouter que la ressemblance entre Bluesky et Twitter, ou du moins le Twitter pré-Musk, n'est pas que dans l'interface, mais aussi dans la population et le contenu des discussions. Certains craignent ou espèrent trouver des différences importantes à ce niveau, par exemple dans l'orientation politique, mais je pense que c'est à la fois faux et naïf (cf. ce que je dis plus bas dans la comparaison avec le Masque de la mort rouge).
Du coup, si vous voulez lire les petites conneries que j'écris et qui sont trop courtes pour former un billet de blog, je vous encourage à me suivre sur Bluesky (plutôt que sur Twitter, donc).
❖
Le problème avec ce genre d'annonce, c'est que c'est difficile de la faire sans fournir quelques explications complémentaires, et si je commence à entrer dedans, forcément le billet de blog gonfle en taille.
Par exemple, il y a deux ans j'avais parlé de Mastodon (enfin, le Fediverse), qui peut aussi servir de destination aux gens qui veulent quitter Twitter, soit parce qu'ils n'aiment pas Elon Musk soit parce qu'ils n'aiment pas la centralisation de Twitter. Et de fait, je m'étais ouvert un compte de test sur Mastodon. Comme il y aura forcément des gens pour me le rappeler — et pas forcément de façon aimable je devine — ceci appelle naturellement une discussion sur le rapport entre les deux. (Quelle est la différence entre Bluesky et Mastodon ? Et pourquoi parlé-je de mon compte sur l'un et pas sur l'autre ?) Et le problème avec une telle discussion c'est que, comme souvent en informatique quand il y a deux solutions concurrentes pour un même problème, elle peut vite devenir acrimonieuse, chaque « camp » reprochant à l'autre (avec une certaine justesse) de ne pas remplir tel ou tel critère jugé essentiel — ici, pour constituer un vrai réseau social de microblogging distribué. Or j'ai d'autant moins envie de me laisser engluer dans une telle discussion que j'ai un avis assez mitigé sur les deux, mais qui est, forcément, assez long à expliquer.
Disons de façon très résumée que Mastodon et Bluesky cherchent tous les deux à résoudre des problèmes de centralisation de Twitter, mais pas tout à fait les mêmes (Mastodon partage le réseau, alors que Bluesky partage les rôles), et chacun a des avantages très sérieux (sur l'autre, et certainement sur Twitter) mais aussi des inconvénients, et que donc votre préférence dépendra de votre fonction d'utilité[#4]. Mais heureusement, il n'y a pas de raison que l'un ou l'autre puisse évoluer pour régler leurs inconvénients, ou qu'on ne puisse pas les rendre interopérables pour avoir tous les avantages[#5]. Pour une version un tout petit peu plus longue de ces explications, vous pouvez lire ce fil que j'ai écrit sur Bluesky à ce sujet (et/ou regarder cette vidéo très bien faite, que j'y mentionne à la fin, sur la comparaison entre les deux protocoles). Pour les non-informaticiens, disons aussi et surtout que si Bluesky ressemble presque comme deux gouttes d'eau à Twitter au niveau de l'interface, ce n'est pas du tout le cas de Mastodon (et le manque de certaines fonctionnalités en freine certainement beaucoup l'adoption).
[#4] Ce qui n'empêchera pas certains de pontifier que l'un est objectivement meilleur que l'autre, et ils auront tort, exactement comme les gens qui essayent de vous convaincre d'utiliser leur langage de programmation préféré sont des pénibles.
[#5] Il y a quelques
idées intéressantes ici. Une démarche apparentée
mais différente est celle de
l'initiative Free
Our Feeds
visant à créer un écosystème vraiment décentralisé
autour du protocole AT utilisé par Bluesky, sans
pour autant tomber dans les erreurs de conception de ActivityPub (qui
lie inextricablement les utilisateurs et les messages à un
serveur).
‣ Concrètement, je n'exclus pas de chercher à
bricoler un moyen de publier sur Mastodon aussi (ou de faire un pont
entre mon compte Bluesky et Mastodon), mais ce qui est sûr c'est que
je me suis convaincu que la seule façon acceptable à mes yeux serait
de lancer mon propre serveur Mastodon ; or pour l'instant je n'ai pas
le temps d'y mettre (surtout si mes
machines n'arrêtent pas de mourir et que ça fait encore du boulot
à remettre en place à chaque fois que ça se produit !). Le
compte @gro_tsen_test@mastodon.sdf.org
que j'ai créé pour tester est essentiellement inutilisable : en même
pas deux ans, le serveur a déjà perdu des messages que j'ai postés,
sans que je les aie effacés, et je ne sais pas pourquoi (par
exemple, il
y avait ici un message, en réponse
à celui-ci,
qui, fort ironiquement, disait qu'on pouvait considérer comme très
important qu'un espace d'échanges garde quand même une mémoire pérenne
des échanges passés). Mais je suis en train de digresser, et je me
suis promis de ne pas le faire, donc j'arrête de parler de Mastodon,
ce n'est pas le sujet ici.
Une autre question sur laquelle on risque de m'interpeler, c'est de
savoir pourquoi je n'ai pas fermé mon compte Twitter, et pourquoi je
continue même à poster dessus (a priori essentiellement les
mêmes choses que sur Bluesky). Là aussi, ceci amène à une discussion
assez compliquée, mais je ne sais pas si j'ai la patience ou le temps
de l'avoir. Disons que je ne vais certainement pas fermer mon compte
parce que je déteste profondément
l'idée de casser des liens ou d'effacer du
contenu[#6] du Web. Mais
décider de continuer à poster dessus est un calcul plus compliqué
notamment pour savoir quelle est la meilleure façon de rendre visible
le message venez voir ailleurs
, et si l'opposition est plus
efficace de l'intérieur ou de l'extérieur. Je ne m'interdis
certainement pas de changer d'avis ultérieurement, et je ne l'exclus
pas du tout. Je note cependant au moins avec une certaine
satisfaction que quasiment tous les gens que je suivais sur Twitter en
sont partis (beaucoup sur Bluesky, certains sur Mastodon, certains
nulle part), ce qui m'évite de perdre trop de temps dessus.
[#6] Il faut, par ailleurs, être bien naïf pour s'imaginer qu'en fermant le compte ou en effaçant ses messages on les effacerait vraiment des disques durs de Twitter, ou qu'on empêcherait, disons, l'entraînement d'IA avec le texte de ces messages (même si c'est illégal, Musk n'est certainement pas du genre à s'arrêter à ça).
Ajout () : Comme visiblement certains ne comprennent que la question puisse même se poser, je donne quand même un élément d'explication : je pense qu'il faut se défaire de l'idée que Musk est propriétaire de Twitter. Il est (par la logique du capitalisme) propriétaire des serveurs, et de la marque, et il a beaucoup de pouvoirs, mais il n'est pas propriétaire de la communauté qui lui préexistait, pas plus que Donald Trump n'est propriétaire des États-Unis malgré les pouvoirs quasi dictatoriaux qu'il y a maintenant. Pour autant, je comprends parfaitement les gens qui font le choix de fuir (et même, dans une certaine mesure, je les encourage, et c'est un peu le sens de la présence de les y encourager).
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