Après Vaux-le-Vicomte, Champs-sur-Marne
et Villarceaux, les aventures horticopalatines(?) de Ruxor et du
poussinet à la recherche des
« jardins
remarquables » nous ont menés le week-end dernier
à Chantilly
(en consentant exceptionnellement à
quitter notre pays
d'Île-de-France). Le château est joli à voir de l'extérieur, très
peu notable de l'intérieur, mais le parc est
effectivement remarquable
: il y a des parterres organisés par
Le Nôtre pour un jardin à la française, certes moins magnifique que
celui de Versailles et moins bien conservé que celui de Vaux, et dont
les jeux d'eau restants sont peu impressionnants, mais qui demeure
néanmoins un beau morceau ; mais ce qui fait surtout l'intérêt de ce
parc de Chantilly est une certaine diversité, puisque ce jardin à la
française du XVIIe se fond, côté
ouest, en un jardin à l'anglaise du XIXe,
et côté est, en un « petit parc » boisé très agréable et un « jardin
anglo-chinois » (sic, mais le caractère chinois n'est vraiment pas
évident) du XVIIIe avec un hameau potemkine qui a apparemment inspiré
celui de Marie-Antoinette à Versailles. Le petit parc contient aussi,
un peu caché,
un jeu
de l'oie grandeur nature, que nous n'avons malheureusement pas eu
le temps d'explorer complètement parce que si on veut suivre la
spirale complètement, même sans jouer suivant les règles, c'est
vraiment long.
Ma visite des jardins a malheureusement été en partie gâchée par l'intervention d'un prédateur aérien des humains, sans doute de l'espèce Culex pipiens, en tout cas d'une famille de bestioles qui m'aiment notoirement beaucoup.
Mon poussinet nous avait pris une chambre pour la nuit à l'Auberge du Jeu de paume, labelisé Relais & Châteaux, ce qui n'était sans doute pas une bonne idée parce qu'il est dangereux de prendre goût au luxe.
Mais ce que je regrette surtout à Chantilly est que nous avons réussi à rater le Potager des Princes, un jardin juste à côté du parc du château, lui aussi étiqueté « jardin remarquable », mais auquel nous n'avions pas fait attention parce qu'il est séparé du domaine lui-même même s'il en faisait historiquement partie : les gens qui ont fait le plan du parc affiché partout sont quand même assez salauds de ne pas du tout le faire figurer, même pas avec une légende « autre endroit remarquable » ou quelque chose de ce goût.
⁂
Hier soir nous avons passé la nuit à Provins[#] (à la Demeure des Vieux Bains, beaucoup plus familiale que l'Auberge du Jeu de paume à Chantilly, mais également très confortable). La ville historique ressemble beaucoup à un parc d'animations thème médiéval, ce qui ne me branche pas plus que ça ; elle a comme thème secondaire la rose, ce qui ne me branche pas non plus tant que ça, mais du coup, il y a une roseraie qui, même si on n'est pas passionné par les roses, est un jardin (étiqueté « remarquable », donc) incroyablement manucuré et qui justifie à lui seul qu'on aille visiter Provins, surtout qu'il y a aussi là un salon de thé merveilleusement relaxant. Enfin, tout ça aurait été merveilleusement relaxant s'il n'y avait pas une fois de plus un salaud de culcidé qui voulait profiter du sang de Ruxor comme le Ruxor voulait profiter de son thé à la rose.
Sinon, même si les vieilles pierres moyenâgeuses ne me branchent pas tant que ça, elles ont un intérêt, c'est que les gens à cette époque aimaient bien construire des villes à des endroits d'où on voit loin, et la vue depuis la tour César[#1b] sur la c(h)ampagne alentours n'est pas mal du tout, ainsi que depuis les remparts, d'où nous avons observé un magnifique coucher de soleil hier soir. Dans la foulée, nous nous sommes dits que nous allions aussi regarder les planètes. En fait, l'idée était surtout de voir Mercure, parce que je n'ai jamais réussi à voir Mercure. Grâce aux excellentes applications Sky Map et PlanetDroid, nous savions en principe où était chaque planète (alignement par rapport aux autres astres, élévation en degrés au-dessus de l'horizon, azimut par rapport aux points cardinaux ou par rapport au point de coucher du soleil, magnitude apparente, bref, tout ce qu'on pouvait vouloir savoir), mais malgré ça, nous n'avons réussi à localiser que Vénus (qui se couchait plus tard que le Soleil) et Jupiter (culminant au moment où le Soleil se couchait), et même ça n'a pas été facile ; Mercure, qui était à peu près pile mi-chemin entre Vénus et le Soleil, ainsi que Saturne, en train de se lever, ont résisté à nos tentatives pour les trouver, sans que nous parvinssions à savoir si c'était parce qu'elles se cachaient derrière les nuages ou parce qu'il ne faisait pas encore assez noir pour que la magnitude 0 devienne discernable, surtout avec mes yeux de myope — ou simplement parce que nous étions nuls.
[#] Provins qui, administrativement, est en Île-de-France, même si historiquement elle faisait partie de la Champagne, jusqu'à ce que cette dernière intègre (en partie ?) le domaine royal par la dot apportée par Jeanne de Navarre (et de Champagne) lors de son mariage en 1284 au futur Philippe IV le Bel. Mais j'entends des histoires contradictoires sur le fait que l'actuelle limite entre l'Île-de-France et la Champagne ait un rapport avec cette histoire ancienne ou soit simplement le fruit de hasards administratifs bien plus tardifs. (Y a-t-il eu une différence entre le sort de Provins et celui de Troyes lors de ce mariage ?)
[#1b] (Ajout) Soit dit en passant, la tour en question a un escalier à vis orienté selon la main droite, ce qui met en doute l'idée que les escaliers des ouvrages défensifs étaient toujours orientés selon la main gauche.
⁂
Sinon, ces différentes excursions me donnent l'occasion de continuer d'apprendre à conduire[#2], et d'apprendre toutes sortes de choses que je n'ai pas apprises à l'auto-école soit parce que ce n'était pas le lieu soit parce qu'il n'y avait pas vraiment le temps. Par exemple, comment sortir la tuture du poussinet du garage de notre immeuble, ce qui est assez technique (parce que la tuture est large et que la montée est biscornue). Ou comment profiter d'un match de la coupe du monde de foot où la France joue, parce que les routes deviennent soudainement beaucoup plus vides, ce qui nous a permis de revenir de Provins dans de bonnes conditions (cf. la forme complètement hallucinante à partir de de la courbe noire ci-contre, piquée au site Web Sytadin, comparée aux niveaux « habituels » en couleur : il s'agit du nombre de kilomètres de bouchons en Île-de-France).
[#2] Et d'éprouver la patience du poussinet, qui craint pour sa tuture et se retrouve parfois à me disputer comme le faisait mon moniteur (qui devait craindre aussi pour sa voiture…). Le poussinet, pourtant, me disait que je n'aurais pas dû accepter de me faire tellement disputer à l'auto-école, et que j'aurais dû changer de moniteur.
Plus sérieusement, je n'avais essentiellement pas eu l'occasion en leçon de conduite de pratiquer les routes départementales deux voies qui sont limitées à 90km/h jusqu'à ce soir et 80km/h à partir de demain — mais de toute façon 80km/h pour moi en tant que conducteur novice. Comme je respecte les limitations de vitesse, j'y fais du (80±ε)km/h (au tachymètre, donc plutôt −ε en réalité), ce qui, évidemment, énerve les autres usagers. Comme ce sagouin de conducteur de poids-lourd slovaque immatriculé SA·142DC et SA·338YF (vu la manière dont il s'est comporté, je ne vais pas me priver d'aider Google à indicer sa plaque d'immatriculation) qui m'a collé au cul sur un bout de la D231 parce qu'il trouvait qu'à (80−ε)km/h j'allais vraiment trop lentement, fulminait de ne pas trouver d'occasion de me dépasser, et n'a pas manqué de me le faire bien sentir. Comme il se trouve que le poussinet a une dashcam et que je suis maniaque de la précision, je me fais un plaisir de mettre en ligne ses photos (horodatées et géolocalisées par la dashcam) : en train de me faire un appel de phare alors que je roule à 79km/h, puis réussissant enfin à me doubler, en klaxonnant rageusement (ça ça ne se voit pas sur les images, évidemment), 13′20″ plus tard et 16.4km plus loin (je roule plus lentement sur la dernière photo, mais c'est exprès pour l'aider à me doubler ; et oui, 16.4km en 13′20″ ça fait seulement 73.8km/h de moyenne, mais il y avait des sections limitées à 70 et à 50 et des sens giratoires). En admettant qu'il aurait conduit à 90km/h tout du long, je lui ai fait perdre la durée absolument affolante de 2′24″. Bon, mais sérieusement, est-ce que j'aurais dû trouver moyen de lui permettre le dépassement ? (J'avais envisagé de faire quelques tours inutiles d'un giratoire pour m'en débarrasser, mon poussinet m'a conseillé de continuer en ignorant le camion.)
Peut-être que le Slovaque en question ignorait que la plaque A à l'arrière de ma voiture signifiait que je ne devais pas dépasser 80. Ou peut-être qu'il le savait mais s'en foutait (de toute façon, quand on conduit dans un pays étranger, on doit bien se dire qu'il est possible qu'il y ait des règles qui nous échappent). Ou peut-être qu'il aurait été tout aussi furieux si j'avais fait du 90, en fait.
Tant que j'y suis à parler de voiture et de
vitesses : la boîte de vitesse de la Renault Captur sur laquelle j'ai
pris mes leçons de conduite était échelonnée de manière qu'on utilise
la 1re vitesse typiquement de 0 à 20km/h, la 2e de 20 à 40, la 3e de
40 à 60, la 4e de 60 à 80, et la 5e à partir de 80. D'une part c'est
assez commode à retenir, d'autre part cela va bien avec les
limitations de vitesse françaises qui sont très souvent congrues à 10
modulo 20 (en km/h), c'est-à-dire surtout 30, 50, 70, 90 (et 110 et
130, mais ça c'est hors grille). Mon moniteur m'avait expliqué que
c'était fait exprès, et que l'idée était donc de simplifier la
réflexion : quand c'est limité à 30 on roule en 2e, à 50 en 3e, et à
70 en 4e. Mais le joujou polluant du
poussinet, il a une boîte de vitesses échelonnée très
différemment : Tuture a 6 vitesses, mais ce n'est pas une simple
extension du même schéma, les vitesses pallier sont plus basses, on
peut sans problème rouler à 50 en 4e, par exemple, sans être en
sous-régime, et la première a un rapport extrêmement faible. Mais du
coup ça complique des choses pour moi : on m'a appris à faire
une reprise [en] première
dans toutes sortes de circonstances,
par exemple à chaque fois qu'on arrive par la branche non prolongée à
une intersection en T — or sur la tuture du poussinet, une reprise
première est très difficile à faire ; mon poussinet propose plutôt de
rester en deuxième, quitte à débrayer un peu, mais il y a un risque
plus fort de caler si on ralentit trop. De même, pour les sens
giratoires, on m'a appris à les passer toujours en deuxième, mais sur
la tuture du poussinet, on est facilement en surrégime de la sorte.
Je ne sais pas si c'est parce que Tuture est vieille et que les
rapports ont été restandardisés(?) plus tard, ou si c'est juste des
différences aléatoires entre modèles.
Ah, et tant que j'y suis, je signale une astuce complètement idiote qu'on ne m'a pas donnée à l'auto-école et j'ai vraiment honte du temps incroyable qu'il m'a fallu pour y penser alors qu'elle est complètement évidente :
Un des problèmes que je rencontrais souvent était celui du bon
centrage de la voiture. Mon moniteur m'avertissait souvent de
surveiller mon placement, me disait que j'étais trop à gauche ou trop
à droite. Il m'avait bien donné une demi-astuce : repérer mon
placement à la zone sombre laissée sur la chaussée entre les roues des
nombreuses voitures et qui finit par définir une zone médiane
correcte. Mais comme le conducteur est à gauche du milieu de la
voiture, ce n'est pas évident de savoir si on est bien centré sur la
zone sombre en question. (Il me disait régulièrement : n'oublie pas
que tu dois centrer ta voiture sur la zone sombre : pas toi mais la
voiture ; certes, mais comment est-ce que je repère que la voiture est
bien centrée ?) Parce qu'il manquait la deuxième moitié de cette
astuce, complètement évidente, donc, mais à laquelle je n'ai pensé
qu'après avoir passé le permis. Il s'agit une fois pour toutes, à
l'arrêt, de s'installer au poste de conduite comme on le fait
normalement, et de regarder une ligne tracée sur la chaussée (au
niveau du sol), le long de l'axe médian de la voiture (on peut tracer
cette ligne à la craie, ou demander à quelqu'un de la figurer avec son
bras) : de là où on est assis, on repère le point où cette ligne
intersecte la base du pare-brise et/ou l'avant du capot (dans la
tuture du poussinet, pour la manière dont je m'assieds, ça tombe sur
un angle des essuie-glace, donc c'est facile à repérer, mais bien sûr
il n'est pas nécessaire d'être ultra-précis) ; cela définit la ligne
de visée vers l'axe médian de la voiture, et quand on veut centrer la
voiture, on s'arrange pour faire coller ce point sur l'axe où on veut
la centrer (par exemple, le milieu de la zone sombre de la chaussée).
Certes, il faut penser à faire cette visée quand on change de
véhicule, et chaque conducteur doit la faire pour sa façon de
s'asseoir, et c'est un peu moins pratique quand les essuie-glace sont
en marche, mais globalement, je n'ai plus de problème de centrage
depuis que j'ai repéré et visualisé ce « point de centrage » au lieu
de l'estimer pifométriquement en me disant je suis un peu à gauche,
donc ça doit être par là
.