David Madore's WebLog: Auto-Moto

Vous êtes sur le blog de David Madore, qui, comme le reste de ce site web, parle de tout et de n'importe quoi (surtout de n'importe quoi, en fait), des maths à la moto et ma vie quotidienne, en passant par les langues, la politique, la philo de comptoir, la géographie, et beaucoup de râleries sur le fait que les ordinateurs ne marchent pas, ainsi que d'occasionnels rappels du fait que je préfère les garçons, et des petites fictions volontairement fragmentaires que je publie sous le nom collectif de fragments littéraires gratuits. • Ce blog eut été bilingue à ses débuts (certaines entrées étaient en anglais, d'autres en français, et quelques unes traduites dans les deux langues) ; il est maintenant presque exclusivement en français, mais je ne m'interdis pas d'écrire en anglais à l'occasion. • Pour naviguer, sachez que les entrées sont listées par ordre chronologique inverse (i.e., celle écrite en dernier est en haut). Certaines de mes entrées sont rangées dans une ou plusieurs « catégories » (indiqués à la fin de l'entrée elle-même), mais ce système de rangement n'est pas très cohérent. Cette page-ci rassemble les entrées de la catégorie Auto-Moto : il y a une liste de toutes les catégories à la fin de cette page, et un index de toutes les entrées. Le permalien de chaque entrée est dans la date, et il est aussi rappelé avant et après le texte de l'entrée elle-même.

You are on David Madore's blog which, like the rest of this web site, is about everything and anything (mostly anything, really), from math to motorcycling and my daily life, but also languages, politics, amateur(ish) philosophy, geography, lots of ranting about the fact that computers don't work, occasional reminders of the fact that I prefer men, and some voluntarily fragmentary fictions that I publish under the collective name of gratuitous literary fragments. • This blog used to be bilingual at its beginning (some entries were in English, others in French, and a few translated in both languages); it is now almost exclusively in French, but I'm not ruling out writing English blog entries in the future. • To navigate, note that the entries are listed in reverse chronological order (i.e., the latest written is on top). Some entries are classified into one or more “categories” (indicated at the end of the entry itself), but this organization isn't very coherent. This page lists entries in category Auto-Moto: there is a list of all categories at the end of this page, and an index of all entries. The permalink of each entry is in its date, and it is also reproduced before and after the text of the entry itself.

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(samedi)

Chasse à l'essence et autres divagations

Cela fait longtemps que je n'ai rien publié dans ce blog : pas que je n'aurais pas éventuellement des choses à raconter sur plein de sujets, mais soit ça prend plus de temps que je n'en ai en ce moment (par exemple, j'apprends plein de choses sur les maths constructives, j'aurais certainement matière à continuer cette entrée, mais si je m'y mets ça va me prendre du temps que je voudrais plutôt consacrer à apprendre), soit je me dis que mes réflexions ne sont pas franchement abouties et je me retiens (ou parfois je n'ai pas envie de les pousser plus loin parce qu'elles me dépriment, comme quand je réfléchis à la fin du monde, qui est quelque chose à quoi il est difficile de ne pas penser en ce moment, mais je ne sais pas si j'ai envie de l'étaler par écrit). J'aurais peut-être des trucs à dire sur la gestion des pénuries, un sujet qui promet de devenir de plus en plus pertinent, et je n'exclus pas de le faire, mais bon ce n'est pas vraiment abouti, justement, et c'est déprimant. Cependant, comme le but de mon blog n'est pas seulement de faire profiter l'Univers de mon immense sagacité mais aussi tout bêtement de raconter ma vie, je peux en mettre un peu là-dessus, au moins ça ne prend pas trop de temps vu que je tape vite et que je n'ai pas besoin de réfléchir : râler est certainement la chose que je fais le mieux au monde, et ça a une vertu cathartique certaine. (Il faudrait peut-être aussi que je fasse un peu d'introspection et que je parle de l'espèce de « phobie du manque » dont je souffre, mais ce sera pour une autre fois.)

Donc, pour les personnes qui ne vivent pas en France et ne suivent pas l'actualité française, il y a en ce moment des raffineries qui sont bloquées par un conflit social (essentiellement entre le pétrolier Total et le syndicat CGT), avec pour effet un problème d'approvisionnement du pays en carburants. Je ne vais pas parler du fond, ni sur le conflit ni sur la pénurie, parce que je suis furieusement mal informé. (Je suis parti faire une balade à moto samedi dernier parce que je n'étais même pas au courant, et d'ailleurs j'ai eu de la chance de ne pas me retrouver en panne sèche loin de chez moi.) J'aimerais pouvoir lier vers une page de la Wikipédia francophone appelée quelque chose comme pénurie de carburants d'octobre 2022 en France pour plus d'information, mais, étonnamment, elle ne semble pas exister (pas que l'événement soit d'importance planétaire, mais Wikipédia a des pages sur des choses bien plus anecdotiques). En revanche, ce sur quoi je peux parler, justement, c'est le niveau absolument désastreux de l'information sur le sujet.

Je ne veux pas juste parler des informations générales qui seraient bonnes à savoir pour comprendre un peu le contexte. Quelle proportion des ~11 000 stations essence françaises est en pénurie partielle ou totale ?[#] Comment cette situation diffère-t-il selon le type de carburant recherché et selon l'endroit en France ? Quel est le volume total de carburant vendu par jour en France en temps normal pour chaque type, et comment a-t-il varié ces derniers jours ?[#2] Quel est l'ordre de grandeur de la baisse de fréquentation des routes françaises suite à cette pénurie ? Quelle est la fréquence « normale » typique des ravitaillements d'une station essence, et comment a-t-elle varié ces derniers jours ? Quelle est la fréquence « normale » typique des passages d'une voiture française à la pompe, et comment a-t-elle varié ces derniers jours ? Quel a été l'impact de cette pénurie sur les prix pratiqués à la pompe dans les stations qui sont encore approvisionnées ? Sur le temps d'attente moyen ? Sur le volume vendu par transaction (les gens prennent-ils moins de carburant plus souvent) ? Quelle proportion du carburant vendu en France est raffiné en France ? Quelle proportion l'est par Total ? Quelle proportion est vendue par Total ? Quelle augmentation du prix à la pompe représenterait l'ensemble des revendications salariales de la CGT si Total les acceptait et les répercutait purement comme hausse de prix ? J'ai plein de questions de ce genre auxquelles je n'ai aucune réponse et que je m'attendrais à trouver dans un article Wikipédia pénurie de carburants d'octobre 2022 en France et/ou dans des articles de presse traitant du sujet. (Ce qui m'inquiète plus, à la limite, c'est que je ne suis pas sûr que qui que ce soit ait une idée précise sur tout ça, notamment au gouvernement.)

[#] J'ai entendu un chiffre de l'ordre de 30%, mais dans mon expérience en Île-de-France, il me semble que c'est plutôt autour de 75%.

[#2] Si j'en crois ces statistiques, il se vend environ ~8 mégatonnes de sans-plomb (SP95 et SP98) par an en France, soit de l'ordre de ~30 mégalitres par jour, ce qui, divisé par 11 000 stations, donne une moyenne de ~2500 litres par jour et par station. Mais comme les tailles des cuves varient de façon gigantesque entre quelques milliers de litres et quelques dizaines voire une centaine de milliers de litres, je ne sais pas vraiment quoi en conclure (même si c'est déjà intéressant d'avoir un ordre de grandeur).

Mais à part ces considérations générales de type je veux savoir pour savoir, il y a évidemment aussi une considération pratique autour d'une question bien concrète : quelles stations sont approvisionnées à l'instant t et combien y y a-t-il d'attente ?

Il y a à ma connaissance trois sites web qui prétendent tenter de répondre à la question de savoir quelles stations sont approvisionnées, et les trois sont complètement merdiques pour des raisons différentes : ① www.prix-carburants.gouv.fr qui est un site gouvernemental donnant les prix du jour, mais il n'est mis à jour qu'une fois par jour, justement, et en plus de ça il ne tient pas vraiment la charge quand des dizaines de millions de Français essaient de le consulter en même temps, ② penurie.mon-essence.fr et son application mobile associée Essence&CO (la carte montre les stations qui n'ont pas d'essence, ce qui est à peu près aussi intelligent que si le prix Nobel était annoncé chaque année en faisant la liste des gens qui ne l'ont pas reçu, mais c'est sans doute pour vous pousser à installer l'app mobile, qui est à peu près aussi merdique que le site web), c'est mis à jour plus souvent, mais c'est fait par crowdsourcing et les informations sont souvent très fausses (parfois à tel point que je pense que c'est du vandalisme délibéré), et ③ services.totalenergies.fr/stations qui est géré par le groupe Total et ne montre (donc) que les stations Total, et comme ce sont les plus impactées, forcément, ça va surtout dire qu'ils n'ont rien (de toute façon, je ne comprends même pas bien comment cette carte est censée marcher). Quant à savoir la durée d'attente, on peut toujours rêver (le mieux semble encore de se faire une idée en regardant les bouchons relevés par Google Maps en entrée de la station).

Alors autant je ne jette la pierre à personne concernant la pénurie elle-même, autant je trouve ça hallucinant qu'en deux semaines le gouvernement n'ait toujours pas réussi à faire monter un site web, qui tienne la charge, permettant à chaque station essence de France de remonter en temps réel l'information de si elle a des carburants et lesquels, et d'inciter fortement (voire de rendre obligatoire) la transmission de cette information (éventuellement par l'intermédiaire du groupe pour les stations qui sont affiliées à une chaîne). Et s'ils pouvaient demander des informations sur le temps d'attente typique, ce serait bien aussi.

On est censé vivre dans la société de l'information, mais dès qu'il s'agit de répondre à un besoin concret et urgent, il n'y a plus personne.

Ce n'est pas juste qu'avoir une information précise et fiable serait utile pour plein de gens et leur ferait gagner du temps, mais cela économiserait aussi bien des kilomètres parcourus (donc de l'essence brûlée en pure perte) à essayer une, deux, trois, quatre, cinq stations différentes avant d'en trouver une qui a des stocks (ou peut-être de renoncer au final quand on voit la longueur de la queue). Je vais raconter mes propres aventures à ce sujet.

Alors évidemment, je ne suis pas aidé par le fait que j'ai une moto. Ces choses consomment moins pour 100km qu'une voiture thermique typique, mais comme leur réservoir est aussi beaucoup plus petit, finalement elles ont une autonomie riquiqui (à peu près aussi pourrie qu'une voiture électrique), et c'est encore empiré si on veut garder une réserve pour, justement, avoir de quoi trouver une station essence où faire le plein. (Cf. plus bas pour des remarques concernant les motos électriques.) Je ne suis pas trop à plaindre n'ai pas strictement besoin de la moto pour aller au boulot (c'est juste ~2.5 fois plus lent en transports en commun quand ils marchent bien, à 75min contre 30min), mais il y a des grèves qui se profilent aussi dans les transports en commun (il ne faut pas compter sur la location d'un véhicule électrique, ils ont évidemment tous été pris d'assaut), donc je me suis dit que je voudrais au moins faire un plein pour avoir une moto utilisable en cas de nécessité, surtout qu'on n'a aucune idée de combien de temps cette pénurie va durer (pour l'instant la situation semble empirer de jour en jour). Donc j'ai passé la semaine à guetter un moment où il y aurait du carburant disponible dans une station pas trop merdique d'accès pour moi.

Le problème en ville est que ça tourne rapidement à la pagaille monstre même quand une station a de l'essence : il n'est pas possible de faire une queue trop longue sans bloquer complètement la circulation, il y a des voitures venant de différentes directions qui vont se disputer pour savoir qui doit passer, et on ne sait pas si les deux-roues motorisés doivent faire la même queue que tout le monde ou attendre séparément. Samedi dernier, quand je suis rentré de la balade pendant laquelle j'ai appris l'existence de cette pénurie (j'ai pu prendre du carburant sur l'autoroute sans trop de mal, mais de retour à Paris avec moins d'essence que je n'étais parti, c'était une autre affaire), j'ai voulu aller à une des rares stations approvisionnées dans Paris (quai d'Ivry), et c'était presque une émeute : la circulation était complètement paralysée (y compris pour les bus qui essayaient vaillamment de passer par là), des automobilistes qui attendaient apparemment depuis des heures s'engueulaient avec des livreurs à scooter pour savoir qui devait passer, le gérant de la station service était complètement dépassé par les événements, ça s'insultait, du coup finalement personne ne pouvait se servir, ça n'avançait pas, les gens s'énervaient encore plus, et je suis parti au bout d'une demi-heure quand on a commencé à me menacer parce que je n'avais pas fait la queue autant que les autres.

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(dimanche)

Je me décide enfin à mettre ma CB-500F en vente

Il faut reconnaître que je traînais pas mal des pieds pour m'y mettre, sans doute parce que je pressens que ce sera une activité hautement chronophage, et mon poussinet me disputait régulièrement parce que je paye pour l'assurance d'un véhicule qui ne me sert quasiment plus, mais ça y est, je mets officiellement en vente ma CB-500F achetée il y a une peu moins de trois ans et qui a 16 800km au totaliseur. C'est d'ailleurs peut-être tout un symbole que je le fasse pile trois ans après mon échec à la première présentation de l'épreuve de circulation du permis.

L'annonce est ici. (Page qui a été d'ailleurs pénible à écrire pour comprendre de nouveau comment mettre en place une galerie d'image, surtout qu'il y a une mini vidéo à la fin de la galerie ; je ne sais pas comment les gens normaux font, mais vraiment, je déteste tout ce qui ressemble au webdesign.)

Le prix a été choisi par la méthode hautement scientifique consistant à saisir l'année, le kilométrage et le prix demandé pour toutes les annonces sur La Centrale et Le Bon Coin pour une CB-500 (F ou X, de ≥2013) en Île-de-France, faire la régression linéaire (âge, kilométrage) ↦ prix et prendre la valeur pour (3 ans, 16 800km). Peut-être que j'aurais dû baisser un peu, mais je suis prêt à négocier, et je compte plutôt sur les quelques accessoires pour être un peu attractifs.

Malgré les conseils lus ici et et , je suis assez stressé dans l'idée de laisser un inconnu faire un essai (aussi bien à cause du risque de vol que du risque d'accident, et de toutes les emmerdes qui arriveront dans un cas ou dans l'autre) et par la question de sous quelle forme demander le paiement. J'aimerais donc autant que possible vendre à quelqu'un qui ne soit pas un complet inconnu (je suis d'ailleurs prêt à céder sur le prix pour ça, et comme on l'a vu, je ne suis pas hyper pressé) : l'idéal serait un ami d'ami, mais évidemment, c'est difficile de savoir si j'ai un ami d'ami ou ami d'ami d'ami qui veut acheter une moto. En tout cas, à ce stade, je ne mets pas l'annonce sur Le Bon Coin ou équivalent : en revanche, j'en ai mis quelques copies sur les tableaux d'affichage à Télécom (dans l'espoir que ça puisse intéresser un collègue ou un élève). Si vous connaissez des personnes dans votre entourage que ça peut intéresser, n'hésitez pas à transmettre le lien, que revoici.

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(jeudi)

Quelques réflexions à 1 femtozorkmid sur les transports

Méta : Bon, je me retrouve encore une fois à menacer de finir le mois sans avoir écrit une entrée dans ce blog, ce qui ferait peut-être bugguer mon moteur de blog (sans doute pas, mais je pense que ça lui fera générer une page avec juste le chapeau et le pied de page, et rien entre les deux, et je ne veux pas ça). Le problème est, comme d'habitude, que j'avais commencé à écrire plusieurs entrées de maths que j'ai à chaque fois suspendues pour en écrire une autre, et que j'ai donc empilé les textes commencés et que j'ai un peu la flemme de reprendre. (En plus, j'ai pas mal de cours en ce moment, et quand je n'ai pas cours j'ai plus envie d'en profiter pour me balader plutôt qu'écrire dans ce blog.) Mais comme je veux quand même écrire quelque chose ici et qu'il est hors de question que je reparle de covid et que je ne vais pas non plus parler de l'Ukraine parce que je ne suis pas spécialiste de Tout malgré les apparences, je vais dire quelques mots sur un sujet propre à apporter la paix et la quiétude, à savoir : les transports.

Just kidding. Je ne comprends pas vraiment pourquoi, mais s'il y a un sujet quasiment aussi explosif que la politique — par exemple sur les réseaux sociaux — c'est bien ce qui touche aux transports. Dans doute parce que, que ce soit sur la route ou dans la foule des transports en commun aux heures de pointe, nous avons une occasion unique d'être en situation conflictuelle avec un grand nombre d'autres personnes et donc de les rendre responsables de notre malheur alors que nous sommes plutôt tous ensemble dans la même merde. Il n'y a pas de meilleur moyen de devenir misanthrope ou malthusien ou de se convaincre du fait que l'enfer c'est les autres qui veulent faire le même chemin que d'essayer d'aller de A à B au même moment que des milliers d'autres.

Bizarrement, cette situation, qui devrait conduire à vouloir diversifier autant que possible les modes de transport, a plutôt l'effet inverse. Je veux dire que même les personnes les plus intelligentes ont tendance à tomber dans la mentalité les moyens de transport que j'utilise sont bien et sont indispensables, tous les autres sont inutiles, dangereux, polluants, coûteux ou idiots (à laquelle il faut souvent ajouter et pour les moyens que j'utilise, moi je sais bien m'en servir, le problème vient toujours des autres). Alors que dans la réalité, tous les moyens de transport sont très bien, et d'ailleurs je les utilise tous, sauf évidemment les scooters qui sont la pire engeance inutile, dangereuse, polluante, coûteuse et idiote. 😉

Quelque part, là, il faut que je sorte la blague de la personne qui roule sur l'autoroute en écoutant la radio et entend un flash info spécial avertissant qu'il y a une voiture sur cette autoroute qui roule à contresens. Elle s'exclame : Comment ça, une voiture ? Elles sont toutes à contresens !

Un peu plus sérieusement, il y a évidemment toutes sortes de questions qui interagissent de façon complexe et souvent contradictoire quand il s'agit d'évaluer les modes de transports : le coût individuel, le coût de maintenance des infrastructures, le temps de parcours, la possibilité d'utiliser ce temps pour autre chose (lire, travailler…), la fréquence de disponibilité, la prévisibilité du temps de parcours, la fiabilité, la congestion, les conflits avec les autres usagers, la sécurité pour l'usager, la sécurité pour les tiers, les nuisances et autres externalités pour les tiers (à commencer par la pollution, qui prend elle-même plusieurs dimensions : émissions de CO₂, émissions de particules fines, autres émissions comme l'ozone ou les oxydes d'azote, pollution à la production du véhicule, pollution sonore et lumineuse voire d'autres formes comme les détritus abandonnés), le stress engendré, le confort, le statut social associé au mode de transport, le respect des règles (comme le code de la route), les enjeux sociétaux (voire, moraux) à décider de privilégier tel ou tel mode, ou que sais-je encore. La pandémie nous a fait découvrir de nouvelles dimensions, comme le risque de contaminations ou l'inconfort de devoir porter un masque (qui ont certainement joué sur le report de modes de transport vers d'autres). Les grèves nous rappellent la question sociale délicate de savoir si les transports en commun sont un service essentiel dont on devrait exiger un service minimum. Chacun a sa petite idée sur tout ça, non seulement sur ces différentes dimensions, mais aussi sur leur importance relative. Je ne prétends certainement pas évoquer toutes ces questions, juste ranter sur quelques idées qui me passent par la tête. Mais ce qui est fascinant, c'est à quel point on peut être méprisant des arbitrages des autres (même si évidemment l'accusation d'ignorer les externalités de ses choix est légitime a priori).

Manifestement, si quelqu'un choisit de traverser l'Île-de-France en voiture, quitte à passer des heures dans les embouteillages (et peut-être à payer le prix de plus en plus élevé des carburants fossiles), plutôt que de prendre les transports en commun, ce n'est pas que cette personne ignore l'existence des transports en commun. L'explication la plus simple est peut-être simplement que le temps de trajet en transports en commun est beaucoup plus long : en fait, il est assez déprimant de constater à quel point il est difficile de trouver des trajets où les transports en commun soient meilleurs à la fois que la voiture et que le vélo : à Paris intra muros le vélo est presque toujours plus rapide que le métro, et en banlieue parisienne la voiture est presque toujours plus rapide que le RER, même quand on tient compte de la congestion sur les routes (disons la congestion normale aux heures de pointe). Pour donner un simple exemple, pour aller de chez moi à chez ma mère à Orsay (qui n'habite pourtant pas bien loin de l'arrêt du RER B alors que je suis moi-même sur une ligne de métro qui la croise), le mieux qu'on puisse faire en transports en commun est un poil en-dessous d'une heure, ce qui correspond en voiture à une situation de très gros bouchons en heure de pointe.

Je ne sais pas dans quelle mesure c'est possible de rêver une situation où les transports en commun seraient généralement concurrentiels en temps avec la voiture, mais on peut certainement rêver mieux. J'ai déjà raconté ici à quel point la qualité des transports vers mon bureau est nulle, entre un RER B à bout de souffle à force de sous-investissement chronique dans la maintenance, et un bus qui passe une fois tous les jamais à un arrêt très éloigné de là où passe le RER, qui est tout le temps archi-bondé, et qui dessert un nombre invraisemblable d'arrêts sur un trajet aussi tarabiscoté qu'interminable entre Massy-Palaiseau et mon école. Évidemment, il y a des endroits bien plus mal desservis en transports en commun, mais il fallait quand même une intelligence de génie pour décider de créer un pôle scientifique au milieu de nulle part sur cet endroit totalement inaccessible qu'est le plateau de Saclay — tellement grand et vide, d'ailleurs, que même les transports au sein du pôle scientifique du plateau de Saclay sont extrêmement problématiques si on n'a pas de voiture. (Je compte sur Émilia Robin, dont je fais au passage la pub du travail d'histoire de la région, pour nous expliquer comment on en est arrivé à une telle aberration.) Alors il est vrai qu'on nous promet l'arrivée pour Un Jour™ de la ligne de métro 18 du Grand Paris Express, qui ne doit pas être purement imaginaire parce que des travaux ont vraiment commencé (et contribuent leur part à ce que ce plateau soit un champ de boue permanent), sans doute que ce sera un progrès par rapport à cet épouvantable bus 91·06, mais le problème du RER et, ne l'oublions pas, de l'interconnexion entre le RER et le métro du futur, restera.

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(dimanche)

Comparaison entre deux motos (Honda CB-500F et Yamaha Tracer 9 GT)

J'ai en ce moment (et normalement ce n'est que temporaire) deux motos, puisque j'en acheté une Tracer 9 en octobre (fiche technique ici) après être passé au permis A complet, et que je n'ai pas encore revendu la CB-500F (fiche technique ici) que j'avais achetée après avoir obtenu le permis A2. J'ai fait quelques balades et surtout (vu que la météo ne se prête pas trop aux balades) pas mal d'allers-retours domicile-travail avec la nouvelle (le totaliseur en est à 1760km au moment où j'écris), mais je continue à faire rouler un minimum l'ancienne (16680km au totaliseur) au moins pour ne pas que la batterie se décharge. L'occasion de faire un point sur la différence de ressenti entre elles : outre la différence entre ces modèles précis (qui n'a probablement d'intérêt pour pas grand-monde), ce que je trouve frappant est combien on s'habitue vite à des petites choses qui se fixent dans la « mémoire musculaire ».

La première chose qui me frappe quand je reprends la CB-500F, c'est la différence de position de conduite. Pourtant, la différence de hauteur de selle n'est pas si grande (785mm pour la CB-500F contre 810mm pour la Tracer 9 avec la selle en position basse, si j'en crois les fiches techniques), donc je pense que c'est plutôt la différence de hauteur au guidon qui doit jouer (on est plus penché vers l'avant sur la CB-500F), et qui me donne l'impression de monter sur un vélo. La différence de poids (189kg pour la CB-500F contre 210kg pour la Tracer 9) doit aussi jouer dans cette impression, mais je crois que c'est surtout la hauteur qui l'explique : les 2.5cm de différence sur la selle ne sont peut-être pas beaucoup, mais le fait est que sur la CB-500F, à l'arrêt, je peux poser les deux bottes bien plat au sol, alors que sur la Tracer 9, je touche le sol, certes, mais mon appui n'est pas aussi ferme, et comme la moto est plus lourde je me sens dans un équilibre beaucoup moins stable.

Indiscutablement, la CB-500F est plus maniable. Si je devais faire des trajets en ville (mais justement je n'en fais pas, ou quasiment pas, juste pour aller à la concession), je préférerais celle-ci. (Enfin bon, à ce niveau-là, en fait, je préférerais une électrique équivalente 125cm³, ou un vrai vélo, en fait. Mais je digresse : de toute façon, en ville, je prends essentiellement le métro ou mes pieds.) La CB-500F est plus maniable, mais ce n'est pas pour autant que la Tracer 9 ne l'est pas : j'avais un peu peur que cet aspect soit gênant, mais je n'ai pas été embêté pour tourner un peu serré dans les situations de la vie courante. J'avais aussi peur que les 10cm de largeur de plus (ce qui n'est pas rien !) me dérangent pour faire de l'interfile, mais je n'ai pas vraiment remarqué.

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(dimanche)

Bref, je me suis acheté une nouvelle moto

Je m'étais acheté ma première moto, une Honda CB-500F (modèle 2019), il y a deux ans, presque immédiatement après avoir eu le permis A2 ; maintenant que j'ai été « upgradé » vers le permis A, j'ai décidé d'« upgrader » aussi la moto, et je me suis acheté une Yamaha Tracer 9 GT (modèle 2021, donc) (fiche technique ici). Quelques explications sur pourquoi, pourquoi ce choix, et mon premier ressenti.

Bon, alors d'abord, pour évacuer ça tout de suite, je ne peux pas ne pas avouer qu'il y a un côté impulsif dans cet achat, quelque chose comme j'ai maintenant le droit de conduire une moto plus puissante, donc je vais m'acheter une moto plus puissante. Est-ce que j'avais vraiment besoin d'une moto plus puissante ? Sans doute pas. Et d'autant moins que je respecte les limites de vitesse et que je n'ai quasiment jamais tourné la manette des gaz à fond sur la CB-500 : le seul moment où je ressens vaguement qu'elle atteint ses limites, c'est en allant autour de 110km/h sur l'autoroute et en décidant d'accélérer pour me dégager d'une situation que je n'aime pas, et encore, c'est sans doute parce que je rechigne trop à tomber un rapport (le truc c'est que j'ai l'habitude que, à vitesse plus modérée, la moto ait une capacité à accélérer vraiment énorme, j'oublie qu'elle a quand même des limites, et quand je tombe dessus je suis un peu surpris). Mais sinon, les limites sont ailleurs : dans ce que la réglementation impose, et surtout, dans ce que le conducteur accepte de prendre comme vitesse ou comme accélération. Donc non, je n'ai pas besoin d'une moto plus puissante. Mais j'en ai quand même envie.

C'est peut-être un effet pervers du passage obligatoire par la case A2 : il n'y a rien qui donne plus irrationnellement envie de faire quelque chose que de l'interdire. Ça semble être tellement banal chez les jeunes permis moto, une fois leurs deux ans de A2 passés, soit de se faire débrider leur moto (si elle est rendue compatible A2 par bridage, ce qui n'est pas mon cas) soit de la revendre et d'en acheter une autre, que tout le monde à l'auto-école semblait le considérer comme une évidence. Je me demande, du coup, si ça ne provoque finalement pas l'effet pervers d'inciter à acheter des plus grosses cylindrées. (Je veux dire : si on s'était contenté de me conseiller de ne pas dépasser 35kW au début, je n'aurais possiblement pas ressenti l'envie de les dépasser même après ; mais comme c'était interdit, il est plausible que ça ait joué.)

Bref, je ne peux pas ne pas avouer un côté crise de la quarantaine, voire concours de bite. Mais bon, ça reste raisonnablement raisonnable, si j'ose dire. (Si j'avais vraiment écouté ma bite, j'aurais acheté une sportive de 1000cm³, ce qui aurait été invraisemblablement malpratique en plus d'être complètement con[#].)

[#] Peut-être que cette remarque mériterait une entrée un peu plus longue que juste une note dans celle-ci, et une auto-psychanalyse un peu plus poussée que de blaguer que c'est ma bite qui parle, mais oui, je suis complètement fasciné, ne serait-ce qu'esthétiquement, par les motos sportives de 1000cm³, ce qui est totalement absurde pour plein de raisons, la plus évidente étant que je n'ai absolument aucun intérêt pour la course motocycliste, que je ne tiens pas spécialement à rouler vite, et que les motos sportives sont faites pour ça et uniquement pour ça et sont — de ce que je comprends — invraisemblablement malcommodes pour quoi que ce soit d'autre. (Très difficiles à conduire de façon modérée, inefficaces et même pas tellement coupleuses à bas régime, dangereuses, peu maniables, extrêmement inconfortables, sans aucun espace de stockage, souvent dépourvues de ne serait-ce qu'une jauge à essence.) Donc même si j'aurais peut-être les moyens de m'en acheter une (mais probablement pas de la faire assurer), je ne suis pas fou au point de le faire, mais en même, temps, la certitude d'être un minimum raisonnable en résistant à cette tentation absurde ne me donne pas pour autant de satisfaction. Je continuerai à regarder les Honda CBR-1000RR, les Yamaha YZF-R1, les Suzuki GSX-R 1000R et les Kawasaki Ninja ZX-10R, et les personnes qui les conduisent, avec le même regard de jeune ado empli d'un mélange de fascination, de jalousie et de frustration un rêve inabordable. (Et peut-être encore plus de frustration que, justement, ce n'est pas totalement inabordable comme si je rêvais d'avoir un sous-marin ou un yacht : c'est le fait que je pourrais vaguement m'en payer un de ces engins qui rend si irritant de devoir y renoncer. Ce serait déjà plus raisonnable d'en louer une, mais évidemment, ces machins ne se louent pas parce que personne n'est assez fou pour en louer : il y aurait toujours un con pour la faire tomber le premier jour dans la rampe de son parking.) Et sinon, sur le sujet, l'avis de Ryan de FortNine est excellent (il faut bien attendre la dernière minute).

Si le fait d'acheter une moto plus puissante est assez impulsif, en revanche, le fait d'acheter une nouvelle moto se justifie déjà plus, et le fait d'acheter ce modèle spécifiquement est très raisonnable, parce qu'il n'y a pas que la puissance qui change :

J'avais choisi la CB-500F il y a deux ans simplement parce que c'est ce que j'avais eu à l'auto-école et que toutes les critiques convergeaient sur le fait que c'est une bonne moto pour débuter. (J'ai juste fait ajouter une béquille centrale, que je n'ai d'ailleurs jamais réussi à utiliser, une prise 12V allume-cigare, et des barres pare-carter pour protéger le moteur en cas de chute, et qui ont servi.) Peut-être que la CB-500X (même moteur mais en version plus « trail ») aurait été un meilleur choix, en fait, parce qu'un peu plus polyvalente, mais c'était certainement un choix raisonnable pour commencer. Mais question de puissance mise à part, il y a des choses que la CB-500F n'a pas et que je suis content d'acheter avec la Tracer 9.

D'abord, de la bagagerie : ma CB-500F n'a qu'une toute petite place sous la selle passager, juste de quoi mettre un antivol et un paquet de mouchoirs. Au début, j'ai utilisé un sac à dos (spécial moto, un Dainese D-Mach) : mais, outre que ce n'est certainement pas terrible pour la sécurité en cas de chute, ça devient vite fatigant pour les épaules (et si je prends un passager, il faut que ce soit lui qui le porte). Plus récemment, je suis passé à la sacoche pour réservoir (Givi EA117 Tanklock de 26L), mais ça reste limité et malcommode. Je n'aime pas le look des top-case : une chose qui m'a attiré dans la Tracer 9 ce sont les sacoches latérales ; finalement, pour les raisons que je vais dire, je me suis retrouvé à avoir les sacoches et le top-case, et je dois bien reconnaître que le top-case est bien pratique. Alors bien sûr j'aurais pu faire poser sacoche ou top-case sur la CB, mais je pense que c'est certainement mieux si c'est prévu par le constructeur.

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(lundi)

Une petite introspection sur mes goûts et intérêts fluctuants, nouveauté et lassitude

Méta : Je ne suis pas du tout content du billet qui suit, qui part vraiment dans tous les sens et auquel je n'ai pas réussi à trouver un fil conducteur, une cohérence d'ensemble. Je le publie quand même parce que j'y raconte, fût-ce de façon désorganisée, des choses qui me semblent importantes sur moi-même et sur ma vie, rassemblées parce que je sentais confusément qu'il y avait lieu de les rassembler.

J'ai déjà raconté que j'aimais relire le journal que je tiens, notamment à des intervalles d'un an, deux ou trois, pour me donner une appréciation du temps qui passe, mais aussi comme source d'inspiration pour savoir quoi faire de mes journées : si quelque chose m'a plu il y a un an, ce n'est pas forcément une mauvaise idée de recommencer — la période de l'année s'y prêtera sans doute de nouveau, et un an est assez long pour que la répétition ne transforme pas en source d'ennui. Néanmoins, cette relecture est aussi souvent l'occasion de me rendre compte que mes goûts ou intérêts ont changé, que je ne suis pas tout à fait la même personne que l'an dernier, et que même si sur l'intervalle d'une année cette différence est subtile, presque imperceptible, quand je relis des entrées trop vieilles de mon journal, j'en éprouve une sensation de décalage presque gênant : qu'est-ce qui me faisait plaisir ? à quoi est-ce que j'aimais passer mon temps ?

Mes centres d'intérêt ont toujours eu une forte tendance à l'instabilité : qu'il s'agisse d'un sujet intellectuel (par exemple un problème de maths) ou d'une nouvelle façon de passer le temps, je suis capable d'en être pris brutalement de la passion la plus intense, et d'en avoir marre tout aussi soudainement. Cela se manifeste jusque dans certains goûts alimentaires : je me mets à aimer énormément, disons, tel type de biscuits au chocolat ou de feuilletés au fromage, je dois en acheter plein à chaque fois que je fais les courses parce qu'ils disparaissent à toute vitesse, et puis voilà que, souvent du jour au lendemain, j'arrête d'en manger — pas que je n'aime plus, mais cela ne provoque plus la même libération de dopamine. Il en va de même de la musique que j'écoute : j'ai facilement tendance à tomber dans des cycles où j'écoute le même morceau en boucle, encore et encore, jusqu'à m'en donner la nausée : cela dure typiquement quelques jours, puis j'arrête assez soudainement. C'est aussi la raison pour laquelle tant de mes projets demeurent inachevés : je suis pris de passion pour quelque chose, je m'y mets avec acharnement, et, dès qu'il s'agit d'une entreprise qui demande un peu de persévérance, il est probable que mon intérêt retombe, comme un soufflé, avant que l'entreprise soit menée à son terme.

Heureusement, tous mes intérêts ne suivent pas cette trajectoire météorique — ce serait épuisant. J'ai aussi des goûts plus stables dans le temps, même si ce ne sont pas forcément les plus intenses, ce sont peut-être les plus importants pour me définir. Je ne généralement pas capable de prédire moi-même si un goût nouveau me restera, ou sera la passion d'une semaine ou d'un été, ou quelque chose entre les deux. Il y a une certaine tendance à ce que les intérêts les plus intenses, et surtout qui apparaissent le plus rapidement, soient ceux qui disparaissent le plus rapidement, mais ce n'est pas toujours vrai non plus. Si je compare ces goûts qui font une apparition fulgurante puis disparaissent presque complètement à des météores, d'autres reviennent périodiquement, comme des comètes de plus ou moins longue période, d'autres encore fluctuent juste gentiment comme une planète familière. Bon, mes comparaisons sont assez pourries, désolé. Peut-être que j'aurais plutôt dû évoquer des volcans dont l'éruption est parfois très violente et imprévisible ? Ce qui est sûr, c'est qu'aucun de mes intérêts passés n'est totalement éteint : il y a beaucoup de passions que j'ai crues mortes et qui sont revenues de façon inattendue. (Je pourrais par exemple mentionner ma passion pour les trous noirs, qui a été éveillée par la lecture du livre de Jean-Pierre Luminet en 1989, et qui m'a fait des poussées de fièvre occasionnelles, au moins jusqu'à ce qu'en 2011 je réalise enfin ce rêve d'enfant de calculer des vidéos d'animation de chute dans le trou de ver d'un trou noir de Kerr.)

Cette capacité d'un de mes intérêts à renaître de ses cendres (ou à ne jamais s'éteindre) dépend sans doute beaucoup de son potentiel de nouveauté. Je pense que mon intérêt pour les maths ne risque pas de disparaître, parce qu'il y y a toujours de nouvelles choses à apprendre ou à découvrir ; pour un morceau de musique ou un type de biscuits, en revanche, c'est plus vraisemblable (mais même là, si j'en oublie le son ou le goût, ils regagneront une forme de nouveauté qui peut permettre le retour d'intérêt).

A contrario, quand je sens qu'un intérêt me quitte, cela s'accompagne souvent d'une forme de mélancolie, une forme de chagrin d'amour, sans que je sache bien si elle est la conséquence de cette perte d'intérêt, ou sa cause, ou une conséquence d'une cause commune. Je prends une fois de plus de ces biscuits que jusqu'à récemment j'aimais tellement, et ce sont les mêmes biscuits mais ce n'est plus le même plaisir : je me baigne dans la rivière où j'aimais tellement me baigner et je me rends compte que ce n'est pas la même rivière. (Je mentionnais la dopamine un peu plus haut : c'est sans doute de la neurologie à 1 attozorkmid, mais peut-être que c'est un peu l'idée, je cherche à renouveler ce qui hier encore me permettait d'en tirer, et je me retrouve en manque.)

Pourquoi je raconte tout ça, déjà ? Ah oui : je vais parler un petit peu d'un de mes loisirs particuliers, qui est celui de me balader : comment celui-ci a évolué dans le temps, et comment elle est encore en train d'évoluer.

J'ai déjà raconté que, l'été 2020, entre la fin du premier confinement français et le retour des restrictions, j'ai passé plein de temps à parcourir l'Île-de-France. Mais comment ces loisirs se comparent-ils avec ceux que j'avais avant et à l'été qui a suivi (2021) ?

J'ai toujours aimé me balader, mais le sens du mot balade a fluctué.

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(vendredi)

Petit retour à l'auto-école

Aujourd'hui je suis retourné à l'auto-école (toujours la même, qui a d'ailleurs refait son site web depuis la dernière fois) : il s'agissait de faire ma formation « passerelle » A2→A : je rappelle en une petite digression dans l'encadré suivant de quoi il s'agit, puis je fais un débriefing de l'expérience.

Comme vous pourrez le voir au verso de votre permis si vous en avez un au format carte de crédit, le permis deux-roues européen se divise en quatre niveaux : AM, A1, A2 et A (chacun permettant de conduire strictement plus de véhicules que le précédent) ; nombre qu'on peut éventuellement multiplier par 2 en raison de la distinction entre boîte manuelle (soit en gros, les motos thermiques) et boîte automatique (soit en gros, les scooters ; comme pour la voiture, si on a un permis « boîte automatique » on ne peut conduire que les véhicules à boîte automatique — mais je ne sais pas si cette restriction est standardisée au niveau européen, alors que les catégories AM, A1, A2 et A, elles, le sont indubitablement).

  • Le permis AM (que, comme je vais le dire, quasiment tout le monde a d'une manière ou d'une autre) permet de conduire les deux-roues motorisés de ≤50cm³ (et ≤4kW) et bridées à une vitesse de 45km/h : le langage administratif les appelle cyclomoteurs, mais ce sont soit les vieilles mobylettes[#], soit de petits scooters du type de ceux en location en libre service dans pas mal de villes, soit, beaucoup plus rarement mais ça existe, des « vraies » motos à boîte de vitesse (et qui doivent servir à des ados qui rongent leur frein en attendant d'avoir l'âge de passer à l'étape suivante).
  • Le permis A1 (ou, dans les conditions que je vais dire, le permis B, i.e., le permis voiture) permet de conduire les deux-roues motorisés de ≤125cm³ (et ≤11kW, et ≤0.1kW/kg) : le langage administratif les appelle motocyclettes légères, ce sont le plus souvent des scooters (la plupart des scooters qu'on voit en ville sont de cette catégorie), mais il existe un nombre non négligeable de motos de cette catégorie.
  • Le permis A2 permet de conduire les deux-roues motorisés de ≤35kW (et ≤0.2kW/kg) : le langage administratif les appelle motocyclettes de puissance intermédiaire, ce sont soit des motos soit des « maxi-scooters » (pour ceux qui ne rentrent pas dans la catégorie précédente, bien sûr). Notons qu'un certain nombre de motos n'entrent pas nativement dans cette catégorie mais peuvent être bridées pour y entrer (dans ce cas leur puissance avant bridage ne doit pas dépasser le double).
  • Le permis A permet de conduire tous les deux-roues motorisés homologués sur la route. (Il n'y a quasiment pas de scooters qui ne rentrent pas dans la catégorie précédente.)

[#] Ce genre d'engins, qu'on démarre en pédalant, qu'à mon époque tous les collégiens cools se faisaient offrir quand ils avaient 14 ans, a essentiellement disparu de nos jours.

Je crois que chaque pays décide comme il veut comment il décerne ces permis, l'Union européenne se bornant à définir les catégories (et peut-être des limites d'âge) et les véhicules correspondants.

En France, le permis AM est délivré en même temps à toute personne obtenant n'importe quelle autre catégorie de permis, et son équivalence est aussi donnée (ou il n'est pas demandé, ce qui revient au même) à tous ceux qui sont nés avant 1988 ; pour ceux qui sont nés après, il peut être obtenu dès 14 ans en passant une formation en auto-école ; par ailleurs, ce permis n'a pas de points associés, et ne peut pas être suspendu administrativement. D'où il résulte qu'essentiellement tout le monde l'a, et on a tendance à dire abusivement que les véhicules qui demandent ce permis sont des véhicules qui se conduisent sans permis (c'est le cas des voiturettes « sans permis », que je n'ai pas listées ci-dessus parce que ce ne sont pas des deux-roues, mais qui se conduisent aussi avec le permis AM, qu'utilisent notamment des gens qui ont perdu tous les points de leur permis).

Le permis A1 est un vrai permis moto, dont les épreuves sont d'ailleurs en tout point identiques à celles du A2 (mais sur une moto plus légère), avec l'importante différence qu'il peut être passé dès 16 ans (contre 18 pour le A2). Mais par ailleurs, un détenteur d'un permis B (voiture) peut faire une formation de 7h en auto-école et obtenir une équivalence du permis A1 (ce n'est pas un vrai permis et ce n'est valable qu'en France) permettant de conduire les deux-roues de la catégorie A1 (motocyclettes légères) ; on peut aussi s'en sortir en prouvant qu'on a fait assurer une telle motocyclette avant la mise en place de cette formation. La grande majorité des gens qui conduisent ce type de deux-roues (donc la grande majorité des scooteristes en ville) entrent dans cette catégorie : ils ont un permis B avec une formation complémentaire (ou avec parce qu'ils faisaient ça avant la mise en place de la formation ; voire rien du tout parce qu'ils s'en foutent et sont dans l'illégalité).

Le permis A2 est celui que j'ai eu tellement de mal à obtenir il y a deux-trois ans.

Enfin, le permis A, ne peut plus se passer directement (cela eut été possible : essentiellement tous ceux qui ont passé le permis moto avant 2016 ont un permis A). La seule façon de l'obtenir, maintenant, est de passer le permis A2, attendre deux ans, et passer une formation de 7h en auto-école, dite formation « passerelle » A2→A. L'idée, pas forcément idiote, est d'obliger les motards à « faire leurs armes » sur des motos de cylindrée intermédiaire avant de passer sur des grosses cylindrées (mais soulignons que rien n'oblige à avoir effectivement conduit — ou fait assurer — une moto pendant ces deux ans).

Bref, j'ai passé la formation de 7h pour convertir mon permis A2 en permis A. (J'avais initialement prévu de la passer en juin, mais je me suis fait une tendinite au poignet quelques jours avant, et j'ai négocié pour la reporter. Mais de toute façon, même si on a le droit de la passer jusqu'à trois mois avant, la formation n'a de valeur que deux ans après l'obtention du permis A2, donc dans mon cas, le  ; après quoi il faudra encore attendre quelque chose comme trois à huit semaines pour avoir le bout de plastique[#2].) La formation se découpe en principe en 2h de théorie, 2h de pratique hors-circulation et 3h de pratique en circulation, avec un programme un peu précis ; en fait, les auto-écoles font un peu ce qu'elles veulent : certaines font faire beaucoup d'exercices de maniabilité, certaines font juste une grande balade sur la journée (peut-être même en faisant tourner les élèves sur plusieurs motos différentes pour leur permettre de les découvrir), certaines se contentent d'encaisser le chèque et de faire le minimum.

[#2] Ce qui est assez con c'est que contrairement aux permis B et A2 où on passe une épreuve et où l'attestation de réussite de l'épreuve vaut permis temporaire, là il n'y a pas de permis temporaire, il faut vraiment attendre de recevoir le bout de plastique avec la case A remplie pour pouvoir conduire (ou acheter) une moto nécessitant le permis A.

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(vendredi)

Comment manœuvrer une voiture dans un tunnel : un peu de géométrie

Mon poussinet s'est acheté une nouvelle voiture. Ou plus exactement, a remplacé un joujou, rouge de chez Honda, thermique et bruyant, par un autre joujou, blanc de chez Tesla, électrique et beaucoup moins bruyant et beaucoup plus Internet of Shit ; mais ce n'est pas mon propos ici d'en parler : le point de départ de ce que je veux dire ici, c'est que le nouveau joujou est assez long et large, et que la descente du parking de notre immeuble est compliquée.

Nous avons trois véhicules et trois places de parking (une achetée avec l'appartement et deux louées à des voisins). Ma moto, bizarrement, ne pose aucun problème pour monter et descendre au parking. Pour la Tuture préférée (qui fait censément 1.74m de large, et 4.15m de long dont 2.51m entre les essieux), le poussinet s'en sort bien (le plus souvent sans marche arrière), mais moi je n'ose pas trop essayer, et c'est d'ailleurs mon principal obstacle à circuler en voiture. Et pour le nouveau joujou (qui fait censément 1.85m de large, et 4.69m de long dont 2.83m entre les essieux), c'est beaucoup plus compliqué : à ce stade, à chaque fois que nous voulons entrer ou sortir du parking, je descends de la voiture, je passe devant, et j'indique au poussinet par des signes de main la distance à gauche et à droite (certes, le joujou a plein de capteurs, mais ils sont essentiellement inutiles dans ces circonstances, parce qu'ils passent juste leur temps à faire bip, et ne détectent pas forcément la « bonne » distance) : il arrive à sortir en une seule fois, mais pour rentrer dans le parking il faut trois ou quatre marches arrière (et la question de pourquoi ce n'est pas symétrique est une de celles que je veux discuter ici).

Pourtant, la descente du parking n'est pas si étroite : elle fait 2.67m de large au point le plus resserré que j'aie mesuré ; cette largeur est un peu stupidement grignotée par le fait qu'il y a des garde-corps (je ne sais pas comment les appeler : une sorte de marche ou de micro trottoirs de part et d'autre de la descente, au niveau du sol, large d'environ 15cm et haute d'environ autant), qui réduit l'espace disponible au niveau des roues à 2.38m au point le plus étroit. Mais bien sûr, la descente est courbe : entre la porte côté rue et la base de la rampe, il y a un changement de cap de 90° (on entre perpendiculairement à la rue Simonet, et on finit parallèlement à elle).

Géométriquement, si j'en crois les plans d'architecte de l'immeuble que j'ai récupérés je ne sais plus comment, la forme est très simple (cf. figure ci-contre) : prenez un quart de cercle de rayon 6.50m et un autre de rayon 5.50m dont les centres sont décalés de 1.75m selon chacun des axes du quart de cercle (donc à distance 1.75m×√2 ≈ 2.47m l'un de l'autre), le centre du petit cercle étant évidemment plus éloigné des arcs eux-mêmes que celui du grand cercle, et ensuite prolongez tangentiellement chacune des deux extrémités de chacun des deux arcs. (En notation SVG et en exprimant les distances en mètres : M 0.00 0.00 L 9.37 0.00 A 6.50 6.50 0 0 1 15.87 6.50 L 15.87 18.38 pour le bord extérieur et M 0.00 2.75 L 7.62 2.75 A 5.50 5.50 0 0 1 13.12 8.25 L 13.12 18.38 pour le bord intérieur.) Ceci fait donc une rampe dont la largeur est de (6.50m−5.50m)+1.75m = 2.75m dans ses parties rectilignes, et de (6.50m−5.50m)+1.75m×√2 ≈ 3.47m dans sa partie courbe, à quoi il faut retirer environ 15cm de garde-corps de part et d'autre comme je l'ai expliqué ci-dessus. J'ai fait apparaître sur la figure des rectangles à l'échelle du joujou du poussinet, mais il n'est pas évident de le placer comme je viens de le montrer (cf. plus loin). L'épaisseur des traits sur la figure est de 30cm (le milieu du trait est au niveau du mur lui-même, le bord intérieur correspond à peu près au bord du garde-corps).

Bon, en plus, la rampe est bien sûr en pente (de 14.38% selon le plan d'architecte, l'hélice étant orientée à main gauche : sur le schéma ci-contre, la sortie côté rue est en bas de la figure, la base de la rampe côté parking est à gauche), mais je ne pense pas que ça joue énormément sur le problème géométrique que je vais évoquer. Par ailleurs, la construction de l'immeuble n'a pas respecté précisément les plans d'architecte et les arcs de cercle ont été approchés par des polygones, donc il y a trois ou quatre points anguleux sur le mur extérieur : je ne sais pas bien si ça joue dans l'explication de l'asymétrie ressentie entre montée et descente, je vais y revenir ; la largeur de la rampe, comme je l'ai dit plus haut, n'est, d'après mes mesures, pas tout à fait égale aux 2.75m contractuels de mur à mur, je l'ai déjà noté.

Mes lecteurs savent que j'aime faire des typologies, alors allons-y. Je peux distinguer trois niveaux au problème d'entrer ou sortir la voiture :

  1. La question purement géométrique (entrer ou sortir la voiture, en supposant une connaissance parfaite de ses dimensions, sa position, la forme de la rampe, etc., donc toutes les distances impliquées), que je vais elle-même ci-dessous subdiviser en trois.
  2. La complication supplémentaire que, assis à la place du conducteur, on voit mal ce qu'on fait, on évalue mal les distances, malgré les rétroviseurs et les diverses caméras de la Tesla, en tout cas, plus mal que quelqu'un qui se tient à distance et qui regarde la voiture de l'extérieur.
  3. La complication supplémentaire qu'une voiture n'avance pas exactement comme on veut (je parle du point de vue de la traction : je mets la question du rayon de braquage sur le chapeau géométrique) : ceci ne concerne pas la Tesla, dont le moteur électrique permet d'avancer aussi lentement qu'on veut, presque millimètre par millimètre, aussi bien en montée qu'en descente, mais le problème se pose avec une voiture thermique si on ne veut pas vitrifier l'embrayage en patinant trop longtemps.

Je veux surtout parler ici du (A), même si (B) et (C) sont aussi problématiques en pratique. Maintenant, même si je le simplifie à outrance en traitant la voiture comme un simple rectangle et en ramenant tout le problème dans le plan, ce que je vais faire, le (A) se subdivise lui-même en trois niveaux de difficulté :

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(samedi)

Je fais une (petite) chute à moto et j'essaie d'en tirer des leçons

La semaine dernière () j'ai fait une chute à moto — c'est la première fois que j'ai quoi que ce soit qui ressemble à un accident sauf si on compte une ou deux micro-chutes à l'arrêt[#]. Ça n'a pas été grave (je n'ai rien eu du tout et la moto n'a pas eu grand-chose, cf. ci-dessous) mais ça aurait pu l'être. L'occasion de me demander, donc, quelles leçons je peux en tirer.

[#] Par micro-chutes, je veux dire qu'une fois j'avais oublié de mettre la béquille en commençant à descendre, et une autre fois je me suis arrêté dans une rue trop en pente pour qu'elle puisse retenir la moto : dans les deux cas, la moto a commencé à tomber, je l'ai retenue, pas suffisamment pour l'empêcher de toucher le sol, mais suffisamment pour qu'elle le fasse très doucement et sans aucun dommage.

[Une fraction de seconde avant de glisser][Une fraction de seconde après avoir glissé]Ce qui s'est passé est que j'étais sur une rampe d'accès à la N118 à Orsay (d'où je revenais après avoir rempli une formalité administrative), environ ici, la route était mouillée (il avait plu toute la journée — j'avais pris la moto sur la base de prédictions météo fausses qui ne promettaient que quelques gouttes) donc glissante, la rampe a un rayon de courbure assez serré (34m si j'en crois ce que je mesure sur OpenStreetMap), je suis allé trop vite (40km/h si j'en crois la dashcam), la moto a perdu l'adhérence (apparemment par la roue arrière [ou pas ? cf. ci-dessosus] ; la perte d'adhérence a dû se produire entre les deux images ci-contre à droite), elle a glissé en tombant sur le côté droit et moi j'ai glissé derrière elle, jusqu'à la bande d'arrêt d'urgence (enfin, l'absence de bande d'arrêt d'urgence avant la glissière de sécurité). [J'ai mis la vidéo prise par la dashcam ici sur Twitter.]

Ajout () : J'avais initialement écrit avoir perdu l'adhérence par la roue arrière, parce que c'est l'impression instinctive que j'ai eue (enfin, je n'ai pas eu beaucoup le temps d'analyser, encore moins de réagir : je me suis juste dit merde et j'étais en train de glisser sur le goudron). Mais plusieurs m'ont fait remarquer indépendamment que ça ressemble plus à une perte d'adhérence de la roue avant, beaucoup plus difficilement rattrapable ; et c'est vrai que, sur la vidéo, la moto pivote plutôt vers la gauche après avoir chu vers la droite, ce qui suggère vaguement un mouvement qui aurait été entamé par le fait que la roue avant allait tout droit alors que la roue arrière continuait (au moins brièvement) une trajectoire circulaire. Donc finalement je n'en sais rien !

Heureusement il n'y avait personne derrière moi. D'ailleurs j'ai eu le temps de relever la moto et de me demander quoi faire maintenant, avant que qui que ce soit n'arrive sur la rampe en question (une camionnette, dont le conducteur m'a demandé si j'allais bien). Heureusement aussi que j'avais un pantalon de moto en cuir bien épais, du coup je n'ai pas eu de blessure suite à la glissage sur le goudron (bon, le pantalon n'a lui-même été qu'un peu éraflé, donc je suppose que 40km/h ce n'est pas énorme, mais il est clair que si j'avais été en short j'aurais eu au moins une belle brûlure).

J'ai relevé la moto, donc (heureusement elle n'est pas bien lourde), vérifié qu'elle démarrait et qu'aucun voyant rouge ne s'allumait, je l'ai prise à contresens sur quelques mètres, warnings allumés, pour revenir à Orsay, je me suis arrêté à la première place de parking, j'ai prévenu mon poussinet et ma mère que j'avais fait une chute mais que j'allais bien, puis j'ai inspecté les dégâts : levier de frein avant plié, pédale de frein arrière pareil, rétroviseur droit branlant. Comme je ne voulais pas prendre le risque de rouler dans ces conditions, surtout que j'avais vu de la fumée et que je ne savais pas si le moteur n'avait pas un dommage que je n'identifierais pas, j'ai appelé mon assureur (la MAIF) pour demander un dépannage.

Ça a été plutôt efficace : j'ai appelé l'assureur à 14h50, j'ai été mis en attente plusieurs fois et j'ai eu du mal à déterminer mon adresse parce qu'il n'y avait pas une plaque de rue ni un numéro en vue (et en plus, je m'étais abrité de la pluie à quelques dizaines de mètres de la moto, et j'ai dû faire plusieurs allers-retours pour répondre à des questions), mais finalement, à 15h30, le remorqueur était là. Il a fixé la moto (béquillée) sur son plateau à l'aide de sangles et, après m'avoir fait signer quelques papiers, nous a emmenés à Paris[#2][#2b] à la concession Honda (Alésia Motos, boulevard Brune) où je fais entretenir la bécane.

[#2] J'étais peut-être au-delà de la limite de distance, mais la MAIF a bien voulu me faire le remorquage jusqu'à Paris. Je n'ai pas bien compris si c'était une faveur ou juste parce que c'est là que j'habite.

[#2b] Ajout () : De ce que j'ai compris (de ce que m'a dit mon poussinet), le remorquage ne me sera pas facturé par l'assurance sous forme de malus ou autrement, ça fait partie du contrat d'assistance (que je n'ai, évidemment, pas lu…). Je pensais aussi que le fait de faire appel à elle pour l'assistance m'obligeait à déclarer la chute comme un sinistre sans tiers impliqué (donc compté comme ma responsabilité), donc à leur faire payer les réparations, qui m'auraient alors coûté beaucoup plus cher en malus que ce que j'ai effectivement payé, mais apparemment ce n'est pas le cas.

Le garagiste à qui j'ai confié la moto (à 16h15) n'avait pas l'air bien impressionné, il a l'inspectée rapidement, il m'a dit que la fumée ne voulait certainement rien dire vu le temps, il a tout de suite vu que la fixation du rétroviseur n'était pas cassée mais juste desserrée, et par contre, qu'il faudrait changer le guidon (en plus du levier de frein avant et de la pédale de frein arrière, donc). Je n'ai pas bien compris cette histoire de guidon — il m'a semblé qu'il était juste un peu déplacé et pas abîmé — mais bon, apparemment ça ne coûte pas tant que ça, un guidon de CB-500F. Côté esthétique, j'ai aussi eu des éraflures sur le cache en bout droit du guidon (qui se change de toute façon avec le guidon), le rétroviseur droit, le clignotant droit, et le pot d'échappement, mais je n'ai pas fait remplacer tout ça. Enfin, il y a une pièce de carénage, un bout de plastique qui ne sert pas à grand-chose sauf à faire joli (le garagiste a appelé ça une écope[#3]), qui a été cassée, et là j'ai demandé à la changer, ce qui est peut-être un peu idiot de ma part parce qu'il s'avère que cette petite pièce à la con représente quasiment la moitié du coût total des réparations (d'ailleurs, elle n'est toujours pas changée, elle est en commande). Au total j'en ai eu pour 711€.

[#3] Tiens, tant que j'y suis à parler du français parlé par les garagistes, j'ai remarqué qu'il disait le CB-500F alors que moi, spontanément, je dis la CB-500F (parce que c'est une moto). Peut-être est-ce parce que dans sa tête c'est un roadster (bon, ça ne fait que repousser le problème : pourquoi dit-on un roadster alors que c'est une moto, mais toujours est-il que ça, j'ai l'impression que c'est assez établi). • Ajout () : ce n'est manifestement pas quelque chose d'universel dans le milieu de la moto, parce que cette vidéo faite par des journalistes moto utilise le féminin dans la vidéo elle-même et dans la description (et dans mon souvenir, mes moniteurs d'auto-école disaient aussi la).

(Stupidement, je n'ai pas suivi mes propres conseils et pas eu le bon réflexe de photographier la moto immédiatement après la chute, en la déposant chez le concessionnaire, et en la reprenant.)

J'avais fait poser sur la moto, juste après l'avoir achetée, des pare-carter (des barres fixées autour des parties basses du moteur pour le protéger en cas de chute) : je suppose qu'elles ont évité que j'aie des dommages plus importants.

Moi-même je n'ai rien eu à part un léger bleu à la face intérieure du mollet droit, peut-être que la moto est tombée dessus, je ne sais pas bien. (J'ai aussi eu une mini-tendinite au pouce gauche, mais je ne sais pas si ça a un rapport ; la veille j'avais fait une balade à vélo et j'étais revenu des douleurs dans les mains, je ne sais pas pourquoi mais c'est peut-être lié.) Quelques petites éraflures sur mon pantalon et mon blouson, mais vraiment pas grand-chose.

Bref, plus de peur que de mal, mais en fait, pas beaucoup de peur non plus sur le moment, j'ai surtout ressenti de l'emmerdement.

J'ai récupéré[#4] la moto une semaine plus tard (, donc). Il reste encore à changer la petite pièce de carénage que j'ai payée (très cher) mais pas reçue.

[#4] Soit dit en passant, je ne sais toujours pas le meilleur moyen d'aller entre chez moi et ce concessionnaire quand je n'ai, justement, pas la moto, mais que j'ai quand même mon équipement. Quand je l'ai déposée après la chute, je suis rentré à pied pour me détendre, ce qui était une idée stupide parce qu'il s'est mis à pleuvoir un vrai déluge et que ça prend quand même une grosse demi-heure. Quand je suis revenu la chercher avant-hier, j'y suis allé à Vélib, ce qui a été le trajet en Vélib le plus bizarre que j'aie jamais fait : j'étais équipé comme pour faire de la moto, donc, alors déjà les gens devaient me regarder un peu bizarrement parce que faire du vélo avec casque, gants et bottes de moto ce n'est pas courant, d'autre part j'avais pris un vélo à assistance électrique (ce que je ne fais normalement jamais) parce que sinon j'allais trop transpirer à monter la rue d'Alésia avec un blouson en cuir assez chaud, mais ce vélo était en piteux état, l'assistance s'est coupée plusieurs fois sans prévenir et par ailleurs la roue arrière devait manquer de rotondité et/ou de suspension parce que ça secouait beaucoup. D'autres fois j'ai pris une voiture de location (Share Now, ex Car2go), mais ce n'est vraiment pas terrible vu que la porte d'Orléans est un embouteillage monstre permanent. Et pour ce qui est des transports en commun, outre que je préfère éviter en période de covid, ce n'est pas franchement commode non plus.

Maintenant, quelles leçons dois-je tirer de tout ça ?

Bon, d'abord, que, même si là je m'en tire sans aucun dommage à part un peu de temps et d'argent perdus, la moto c'est dangereux, mais ça je le savais déjà. Outre l'agacement général que j'ai déjà souligné que le moyen de transport qui me procure un réel plaisir soit le plus dangereux de tous (si on exclut des choses vraiment exotiques comme l'hélicoptère), il y a un aspect plus spécifique ici : je n'avais certainement pas l'intention, en passant le permis moto, de m'en servir autant (la moto devait rester un moyen de secours pour aller au bureau, sachant que je comptais plutôt prendre les transports en commun ; et sinon, pour d'autres types de trajets, je comptais plutôt prendre la voiture) ; mais toutes sortes de choses ont fait que j'ai beaucoup plus circulé à moto que ce que j'avais prévu (j'en suis à 11483km au totaliseur) : le fait que je n'ai pas trop envie de prendre les transports en commun en ce moment, le fait que mon poussinet tient tellement à sa voiture (qu'il avait pourtant achetée pour que j'apprenne à conduire) que j'ose à peine y toucher et certainement pas la sortir et entrer dans le garage, et aussi le fait que rouler à moto est une des choses qui me permette de me détendre et par ailleurs un des seuls loisirs qui n'aient pas été fermés ou interdits entre deux périodes de confinement. Tout ça est une façon très subtile de dire que si je me blesse ou tue à moto d'ici quelques mois, ce sera la faute de la réaction au covid, ha, ha, only serious.

Mais plus spécifiquement ?

Aller moins vite dans les virages sur route mouillée, c'est évident. Mais je ne suis pas sûr que ce soit le seul facteur. Petit calcul : si je faisais v=40km/h sur une route dont le rayon de courbure était de r=34m, cela représente une accélération centrifuge (enfin, centripète) de v²/r = 3.6m/s², soit 0.37g, donc je devais être incliné de 20° (parce que tan(20°)≈0.37) ; directement sur l'image de la dashcam, je mesure 23°, ça colle à peu près (la différence vient peut-être de ce que je penche plus la moto que le corps, ce qui est une erreur, cf. ci-dessous). Tout de même, il me semble que normalement, avec de bons pneus (et les miens sont censés l'être), on doit pouvoir incliner nettement plus que ça même sur route mouillée (preuve vidéo à l'appui). Il n'y a d'ailleurs aucune indication de vitesse limite sur cette rampe d'accès à la N118 (ni de panneau signalant un virage dangereux — ce n'est pas normal), et aller à 40km/h, fût-ce par temps de pluie ne semble pas une conduite de casse-cou. Peut-être qu'il y avait une petite flaque d'hydrocarbures que je n'aurais pas vue. Une autre possibilité, signalée par mon poussinet, et qui me semble crédible, est que j'ai commencé à accélérer en sortie de virage (notamment parce que la voie d'insertion est courte après la rampe d'accès) et que j'aurais perdu l'adhérence parce que le pneu était sollicité à la fois par l'accélération latérale due au virage et par l'accélération tangentielle due à la prise de vitesse ; néanmoins, mon accélération tangentielle ne pouvait pas être, si j'en crois les mesures faites par le GPS de la dashcam ou une analyse du son du régime moteur, supérieure à 0.7m/s², ce qui ne change quasiment rien à l'accélération totale (la composante centripète de 3.6m/s² reste largement dominante). Bref, je ne sais pas vraiment précisément ce que j'ai commis comme erreur, ce qui est embêtant s'il s'agit d'essayer d'apprendre à ne pas la reproduire.

L'autre chose, c'est que les réactions instinctives ne sont pas forcément les bonnes. Depuis que j'ai récupéré la moto après cette chute, je remarque que je me sens clairement moins à l'aise pour pencher dans les virages, j'ai une réaction instictive de peur de glisser et tomber. Si ça a pour conséquence de me faire aller moins vite et d'être plus prudent, c'est tout bon ; mais ce n'est pas aussi simple, pour deux raisons. (1) Comme il s'agit d'une réaction instictive, elle porte plutôt sur la trajectoire dans le virage que sur la vitesse en entrée de virage ; i.e., j'approche le virage avec une certaine vitesse qui est choisie avant d'éprouver cette réaction instictive et qui est, je crois, raisonnable, mais ensuite je me mets à avoir peur en tournant, et du coup, soit je freine pendant le virage, ce qui n'est pas bon pour le contrôle de la trajectoire, soit je tourne moins, ce qui risque de me faire prendre trop large, par exemple me déporter vers l'extérieur d'un giratoire. Dans les deux cas, ce n'est pas bien ! (2) En plus de ça, comme il s'agit d'une réaction instictive, mon cerveau l'a plus associée à mon inclinaison qu'à celle de la moto. Or ce qui limite la stabilité, c'est plutôt l'inclinaison des roues sur la chaussée (angle de carrossage)[#4b] ; comme l'angle du centre de gravité moto+motard est imposée par le rapport entre l'accélération centripète et la pesanteur (comme dans les calculs ci-dessus), la bonne façon de minimiser l'angle de carrossage en gardant constant l'angle du centre de gravité est pour le motard de se pencher ou déporter vers l'intérieur du virage (plus le motard penche, moins la moto aura besoin de pencher)[#5], mais justement la réaction instinctive produit l'effet exactement contraire (je suis tombé en penchant, donc penchons moins !). Bref, en ces circonstances, la peur est plutôt mauvaise conseillère : il s'agit pour moi d'être plus prudent, mais de façon raisonnée, pas dictée par une peur instinctive.

[#4b] Ajout () : Il est vrai que, comme on me le fait remarquer en commentaire, ce n'est pas si clair que ça, parce que les efforts seront de toute façon les mêmes. Bon, je n'en sais rien !

[#5] J'avais trouvé, et peut-être lié depuis de blog, une vidéo qui expliquait ça assez bien. On pourrait dire que le comportement « de base » dans un virage est neutre, i.e., le motard penche avec la moto et reste dans le même axe qu'elle. Il peut y avoir des raisons de pencher plus ou de pencher moins : pencher plus ou se déporter (pour que la moto penche moins) permet d'avoir une meilleure stabilité, et c'est ce que font ceux qui font de la piste ; mais pencher moins, au risque que la moto penche plus peut aussi avoir son intérêt si l'adhérence n'est pas un problème : ça permet d'avoir les yeux plus à l'extérieur du virage, donc de voir plus loin (si l'intérieur du virage est bloqué par un obstacle).

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(mercredi)

En souvenir de quelques jours libres et heureux

On me dit, pour me changer les idées, de parler autre chose que de la pandémie. Je vais donc essayer d'évoquer les (159) jours qui se sont écoulés entre le et le . C'est dire quelque chose de la manière dont j'ai ressenti les périodes qui ont précédé et suivi que je repense maintenant à ces cinq mois comme une période presque rayonnante de bonheur alors que j'ai perdu mon papa en plein milieu. J'ai assurément appris quelque chose sur la valeur que j'accorde à la liberté, en l'ayant perdue, puis regagnée, puis perdue de nouveau : je me suis enivré, pendant cet intermède qui prend à présent dans mon souvenir la coloration de ces rêves où l'on imagine qu'on peut voler avant de revenir à la réalité, je me suis enivré des vapeurs dégagées par son flambeau. Et j'ai aussi appris quelque chose sur le bonheur en me rendant compte que je n'avais pas vraiment compris sur le moment combien j'étais heureux : j'ai envie de remonter le temps, pas seulement pour inhaler de nouveau ces vapeurs enivrantes, mais aussi pour me dire à moi-même : cueille cet instant, suce la moelle de la vie, retiens cette sensation pour quand le songe sera fini, car cela ne sera que trop tôt. Voyons si je peux au moins ressusciter pour ce blog la mémoire de ces jours baignés de lumière.

Mon ivresse de liberté a pris différentes formes. Sans doute mon intérêt renouvelé pour la recherche de vues dégagées faisait-elle partie de cette volonté de me dire que je pouvais aller où je voulais, aussi loin que portât mon regard (contrastant avec la moquerie cruelle de la laisse qui me retient maintenant à 1000m de là où j'habite). Beaucoup de mes loisirs habituels (manger au restaurant, faire de la muscu) ont été fermés pendant une partie de cette période, donc je me suis concentré sur ce qui restait : l'exploration de ma région qui m'est chère. J'ai fait beaucoup de promenades dans les bois avec le poussinet (de la forêt de Fontainebleau à celle de Rambouillet en passant par celles de l'Isle-Adam, de Ferrières et de Villefermoy) ; nous avons visité des parcs et jardins[#] que je n'avais pas encore vus, nous avons fait des virées dans des endroits très mignons notamment du côté du Vexin (la Roche-Guyon dans le Val d'Oise, les Andelys et Lyons-la-Forêt dans l'Eure, mais aussi Bonneval en Eure-et-Loir). Mais surtout, j'ai fait travailler mon petit joujou rouge de chez Honda.

[#] Le jardin d'Ambleville, le musée-jardin Bourdelle, et surtout, le jardin du Point du jour [lien Twitter direct] qui est peut-être bien mon préféré de tous ceux que j'ai visités jusqu'à présent. Je continue à mettre à jour cette vieille entrée de blog avec la liste des jardins remarquables que je visite.

C'est un cliché un peu usé de présenter la moto comme un symbole de liberté, mais je n'avais jamais autant ressenti un besoin de, comme on dit en anglais, hit the road. J'ai parcouru 6200km[#2] pendant cette période en me laissant, le plus souvent, simplement rouler où m'envoyait mon inspiration. Il y a certainement que j'avais été frustré, en 2019, de ne pas obtenir mon permis à l'été mais seulement en septembre et de, du coup, rater la possibilité de profiter des beaux jours pour faire des balades. J'en avais fait autant que je pouvais en septembre à novembre 2019[#3], mais les journées raccourcissant et la météo se gâtant avaient rapidement limité mes perspectives, et ma moto ne servait bientôt que pour les allers-retours au bureau (surtout quand une grève m'a empêché de prendre les transports en commun) : je m'étais promis que dès que le beau temps reviendrait je repartirais — et ma frustration de voir l'essentiel du printemps[#4] me passer sous le nez m'a donné encore plus envie de rattraper le temps perdu.

[#2] J'ai d'ailleurs sans doute couru grosso modo autant risque de me tuer à moto entre mai et octobre que le Français moyen n'en avait de mourir de covid entre mars et mai. Peut-être que ça dit quelque chose sur la valeur relative de la vie et de la liberté de profiter de la vie ?

[#3] Je relis régulièrement le journal que je tiens de ma vie, en regardant surtout ce qui se passait il y a un an, il y a deux ans, il y a trois ans — et c'est souvent l'occasion de me rendre compte de contrastes surprenants. Il y a un an, je déménageais dans le nouveau bâtiment de Télécom Paris à Palaiseau que je n'ai, finalement, pas tellement eu l'occasion de fréquenter !, et que j'ai maintenant plutôt envie de revoir. Il y a deux ans, je reprenais péniblement la muscu et les leçons de moto (et la réalisation que ce serait très long pour réussir mon plateau) après une méchante tendinite à l'épaule. Il y a trois ans, c'étaient des leçons de voiture que je prenais, et j'avais là aussi l'impression que je n'arriverais jamais à décrocher ce permis.

[#4] Si je vis un peu moins mal ce second confinement que le premier, ce n'est pas seulement parce que je me sens moins seul à le contester : c'est aussi entre autres parce que les mois de novembre et décembre sont une période que je déteste de toute façon, où j'ai l'impression ne ne jamais faire grand-chose d'autre que d'attendre que les jours commencent enfin à rallonger. Le fait qu'on me vole mes mois de novembre et décembre me fait donc moins mal que quand c'est le printemps qui est parti en fumée.

Bref, j'ai roulé !

Comment communiquer sous forme de mots ce que j'ai ressenti en parcourant ainsi les routes de l'Île-de-France (ou en m'aventurant parfois, timidement, juste un peu au-delà) ? Les souvenirs qui restent dans ma mémoire sont autant de cartes postales que je ne sais pas traduire en français. J'ai toutes sortes d'informations factuelles : des notes dans le journal où je documente ma propre vie, des traces GPS (souvent doubles, d'ailleurs, parce que j'ai celle enregistrée par la dashcam que je sais maintenant extraire de ses vidéos, et celle notée par mon téléphone), des vidéos, même (mais de mauvaise qualité parce que cette dashcam n'est pas terrible, et il me serait extrêmement malcommode d'y accéder via l'accès Internet pas terrible que j'ai ici à Chambéry), mais tout ça passe un peu à côté de la plaque. Raconter ce que j'ai fait comme ça serait aussi ennuyeux que si je racontais mes rêves : l'émerveillement du je pouvais voler ! c'était fabuleux ! ne passe pas bien la barrière de la langue.

Je peux quand même bien évoquer quelques uns de ces moments fugaces.

Ma première envie, lorsque nous avons été libérés mi-mai, a été d'aller voir les vaches des Highlands qui paissent dans un pré entre Saint-Lambert-des-Bois et les ruines de l'abbaye de Port-Royal-des-Champs (un endroit qui m'est très cher parce que chargé de souvenirs de mon enfance ; et comme j'aime énormément les vaches des Highlands, je leur rends régulièrement visite, sûr qu'elles m'accueilleront avec l'indifférence bovine que j'attends d'elles). [Rangée de peupliers]Un peu plus tard, alors que l'engourdissement du confinement se dissipait progressivement, j'ai fait une balade à travers la forêt de Rambouillet et ses endroits incontournables dont je retiens surtout l'image ci-contre, cette rangée de peupliers ensoleillée à Gambais (Yvelines), à laquelle les imperfections de l'optique de mon téléphone ont donné un halo un peu onirique, et qui reste maintenant gravée dans ma mémoire comme une figuration de ces jours dorés. (Le peuplier, dans ses diverses espèces et variantes, est probablement mon arbre préféré. Je ne saurais pas expliquer pourquoi, mais je trouve leur présence particulièrement apaisante.)

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(vendredi)

Sur la réforme 2020 du permis moto, le permis en général, et questions adjacentes

Méta (voire méta-méta) : Oh non, encore une entrée sur la moto ! En fait, pas tellement, puisque cette fois je vais parler des modalités du permis, mais laissez-moi d'abord expliquer pourquoi je tenais à écrire ça.

Méta (donc) : A priori le sujet ne me concerne plus puisque j'ai non seulement obtenu mon permis mais même fini par recevoir le bout de plastique qui l'atteste. Mais puisque, comme le documentateur frénétique que je suis, j'ai fait le boulot de service public, dans des entrées passées (à commencer par celle-ci) de décrire les épreuves comme j'aurais voulu qu'on me les expliquât, je me suis dit que mon devoir de service public s'étendait jusqu'à décrire aussi la réforme qui se profile à l'horizon (et qui a la conséquence irritante pour moi que ce boulot de service public aura été, en fait, assez inutile) : donc j'ai cherché à trouver des informations sur cette réforme (documentées de façon éparse et parfois incohérente entre des sources pas du tout officielles comme des vidéos YouTube), en me disant que j'allais les rassembler en une page écrite et trouvable sur Google avec une recherche comme réforme permis moto 2020 ou réforme permis A2 ou quelque chose comme ça ; et puis là, je suis tombé dans un monde parallèle où cette page existait déjà (alors que j'avais cherché, je vous jure !), et bien sûr c'est FlatFab de moto-securite.fr qui l'a écrite et il vous dit tout sur la réforme du permis A2 en 2020 (dans une page bien écrite et beaucoup plus complète que tout le reste de ce que j'ai trouvé, et dont le principal reproche qu'on peut lui faire est qu'il parle aussi de précédentes réformes donc on risque de croire que ce n'est pas la bonne ou de s'embrouiller). Du coup, cette entrée-ci n'avait plus de raison d'être, mais comme j'avais commencé à l'écrire et à ranter sur des sujets annexes, vous vous doutez bien que ce n'est pas ce qui allait m'arrêter de faire des phrases interminables.

Bref, n'ayant plus vraiment à faire le boulot de décrire cette réforme, je vais surtout évoquer quelques réflexions qu'elle m'inspire.

Mais pour rappeler quand même de quoi il s'agit, la forme actuelle, i.e., avant réforme 2020 (et depuis 2013), du permis A2 français (celui que j'ai obtenu et qui permet, à partir de 18 ans, de conduire des motocyclettes de puissance « intermédiaire » c'est-à-dire essentiellement ≤35kW) est la suivante : il comporte trois épreuves :

  • une épreuve théorique générale (l'ETG ou épreuve de code, j'avais raconté ça ici), commune à tous les permis français (et qu'on est dispensé de repasser si on a obtenu un permis dans les 5 dernières années, le code lui-même étant valable 5 ans) : il s'agit d'un QCM de 40 questions illustrées de photos ou de diapositives, portant sur des points de réglementation, de conduite d'une voiture, ou des questions générales de sécurité, et pour réussir l'épreuve il s'agit d'obtenir au moins 35 questions justes sur 40 ;
  • une épreuve hors-circulation (l'épreuve de plateau, j'avais raconté ça ici), elle-même subdivisée en cinq exercices (où on dispose de deux essais pour les trois du milieu) :
    • déplacement de la moto sans l'aide du moteur (ou poussette) + contrôle de l'état du véhicule (ou vérifications),
    • test de maîtrise à allure réduite (ou [parcours] lent),
    • test de maîtrise à allure plus élevée, partie freinage d'urgence,
    • test de maîtrise à allure plus élevée, partie évitement,
    • interrogation orale (ou fiches) ;
    chacun de ces cinq exercices est noté A, B ou C, sauf le premier qui ne peut être noté que A ou B, le C est éliminatoire, et la réussite de l'épreuve de plateau étant acquise lorsque le candidat obtient au moins deux A et aucun C ; le résultat est connu sur-le-champ ;
  • une épreuve de circulation, sur route (et très semblable à l'épreuve correspondante du permis voiture (B), mais avec un barème un peu différent ; j'avais raconté ça ici), notée sur 27 selon diverses catégories (la plupart pouvant donner lieu aux notes 3, 2, 1, 0 ou E, ce dernier étant éliminatoire) : pour réussir l'épreuve, il s'agit d'obtenir au moins 17/27 sans aucun E éliminatoire ; les résultats sont connus deux jours plus tard, et la date de début de validité du permis est celle de l'épreuve de circulation réussie (même si le plastique est reçu quelques mois plus tard).

Ces trois épreuves doivent être validées successivement : on ne peut se présenter à l'épreuve de plateau qu'une fois le code acquis, et à l'épreuve de circulation qu'une fois le code et le plateau acquis. Le code, une fois acquis, est valable pour une durée de cinq ans ou cinq présentation de chaque type d'épreuve (c'est-à-dire que cinq échecs au plateau ou cinq échecs à la circulation invalident le code qui doit alors être repassé) ; le plateau, lui, est valable pour seulement trois ans mais sans limitation de nombre de passages à l'épreuve de circulation (si on échoue cinq fois, on doit repasser le code, mais le plateau reste valable). [correction () :] Le code, une fois acquis, est valable pour une durée de cinq ans ou cinq présentation des deux types d'épreuves confondues (c'est-à-dire que cinq échecs aux deux épreuves pratiques réunies invalident le code qui doit alors être repassé) ; le plateau, lui, est valable pour seulement trois ans ou cinq présentations de l'épreuve de circulation (mais même si on doit repasser le code avant, le plateau éventuellement acquis reste valable dans ces limites). Je crois comprendre que le contenu de ce paragraphe ne sera pas modifié par la réforme, mais rien n'est certain.

En l'état actuel, le taux de réussite pour le permis A2 est de 64% à l'épreuve de plateau et 91% à l'épreuve de circulation ; pour comparaison, il est de 57% au permis B (chiffres pour 2017, France entière : source ici).

Les points essentiels de la réforme 2020 sont les suivants :

  • l'épreuve de code générale est remplacée par une épreuve de code spéciale moto (ETM : épreuve théorique moto), dont les modalités devraient rester, pour le reste, essentiellement les mêmes (40 questions sous forme de QCM), la différence essentielle étant qu'on posera des questions sur la circulation à moto plutôt qu'au volant d'une voiture, et le contenu recouvrera au moins le contenu des « fiches » d'avant la réforme ;
  • l'épreuve de plateau sera ramenée à un seul exercice, combinant le parcours lent, le freinage d'urgence, le slalom et l'évitement du plateau avant réforme, plus encore quelques demi-tours pour lier tout ça et quelques modifications marginales, en un unique parcours (long et compliqué !) noté en une seule fois ; les « fiches » sont supprimées (remplacées par l'ETM), et la « poussette » les vérifications sont déplacées à l'épreuve de circulation [mise à jour () : finalement, il semble que la poussette soit maintenue au plateau (et simplifiée), alors que les vérifications disparaissent complètement] ;
  • l'épreuve de circulation sera rallongée, de nouveaux éléments seront notés (la poussette et les vérifications, mais aussi la maîtrise de la trajectoire de sécurité dans les virages : le total de points serait probablement porté à 31, avec peut-être l'exigence d'obtenir au moins 23 ou 24 sur 31, tout ça semble encore mal défini) [mise à jour () : finalement, il semble que le total reste de 27, sans élément de notation supplémentaire, mais que le minimum pour réussir soit élevé à 21/27].

Il n'est pas clair quand cette réforme entrera en vigueur : on parlait du 1er janvier 2020, elle a été repoussée au moins au 1er mars, et peut-être au 1er juin [mise à jour () : finalement, il semble que ce soit le 1er mars, l'ETM étant mise en place immédiatement, et les nouvelles épreuves de plateau tout-en-un commençant le 18 mars]. Peut-être que certains des points évoqués ci-dessus seront redéfinis ou modifiés d'ici là, mais les grandes lignes devraient être les mêmes. Des mesures de transition seront probablement mises en place : vraisemblablement, les candidats inscrits avant la mise en place de la réforme auront pendant six mois(?) le droit de se présenter à l'épreuve de plateau avec un code général (ETG) et pas un code spécifique moto (ETM).

Il y a eu des rumeurs d'autres changements, comme le fait que les examinateurs puissent (ou doivent ?) eux-mêmes rouler à moto pour suivre les candidats, mais je suppose que ce sont des idées qui ont été lancées en l'air et qui n'ont abouti à rien.

Pour plus de détails, je renvoie à la page de FlatFab déjà liée ci-dessus, [ajout () :] cette page sur motoblouz.com et cette vidéo YouTube, ainsi que celle-ci qui présente spécifiquement le nouveau parcours plateau. [Voir aussi le fil Twitter qui finit ici.] [Mise à jour () : cette vidéo publiée récemment m'a permis de préciser/corriger certains points évoqués ci-dessus.] [Mise à jour () : encore une vidéo sur le sujet (avec le fondateur de l'auto-école où j'ai passé mon peris), qui précise un certain nombre de choses, et on voit notamment brièvement, à partir de 26′17″, défiler les documents explicatifs de la partie plateau.] [Mise à jour () : encore une vidéo qui défend l'idée que ce nouveau permis n'est pas plus dur.] Ce sont là mes sources principales (plus quelques discussions avec mes moniteurs pendant mes heures de conduite, et quelques autres vidéos YouTube par exemple celle-ci), et on peut se demander quelles sont leurs sources. Un mot à ce sujet :

Ça m'exaspère un peu que l'Administration elle-même soit muette sur cette réforme : même si rien n'est encore officiellement acté (au sens où aucun arrêté n'a été pris pour modifier les modalités de l'épreuve), ça me semble normal d'attendre un minimum de transparence sur les changements à venir. Autrement dit, je trouve qu'on serait en droit d'attendre un dossier officiel sur le site Web de la Sécurité Routière qui explique les modalités de la réforme et les enjeux auxquels elle essaye de se confronter, qui détaille les changements et explique leurs raisons, qui décrive précisément les nouvelles épreuves et le calendrier de leur mise en place, et qui précise les nouvelles consignes de notation. (Y compris, si tout n'est pas encore décidé, en précisant les points qui restent à définir.) Or il n'en est rien : les infos sont communiquées de façon officieuse à des représentants des auto-écoles (et peut-être quelques journalistes spécialisés) dans des réunions qui ne sont pas publiques, et on n'a que des rumeurs qui fuitent sur des forums ou des vidéos YouTube (voire des commentaires de telles vidéos).

Tout ça est vraiment problématique, parce que même si on peut prétendre que la réforme concerne avant tout les auto-écoles, et que les candidats seront de toute façon informés par elles, ce n'est pas vrai :

  • il est en principe possible de passer le permis A2 en candidat libre (faire ça dans les règles doit être sacrément compliqué pour toutes sortes de raisons, entre la difficulté de trouver une assurance, la nécessité de faire acheminer la moto d'examen et de trouver quelqu'un pour conduire le véhicule suiveur, mais c'est possible et des gens le font), et ces candidats libres ont autant que les élèves des auto-écoles le droit d'être tenus informés et de ne pas découvrir soudainement que l'épreuve qu'ils ont préparée n'est plus la bonne ;
  • les futurs inscrits, qui se renseignent parce qu'ils envisagent de passer le permis, ont aussi le droit de savoir à quelle sauce ils seront mangés, surtout pendant une période de transition où il est encore possible de s'inscrire à temps pour passer le permis « ancienne formule » (ou en bénéficiant de mesures transitoires) ;
  • et enfin, la manière dont on forme n'importe quelle catégorie d'usagers de la route est un sujet qui concerne tous les usagers de la route, donc en pratique, tout le monde (par exemple, les cyclistes ont le droit de se sentir concernés par la question de savoir si on enseigne bien aux apprentis motards à ne pas prendre les pistes cyclables ou empiéter sur les sas vélos aux feux rouges, et c'est précisément quelque chose qui devrait être mieux enseigné avec l'introduction d'un code spécial moto).

Bref, même si l'ordre juridique n'impose rien à l'Administration à part publier l'arrêté pertinent, il me semble vraiment souhaitable qu'elle fasse preuve de plus de transparence dans les travaux préparatoires. Je me suis déjà plaint qu'il était vraiment difficile d'obtenir des informations sur la manière dont étaient faites les questions de l'épreuve théorique générale, je vais pouvoir faire les mêmes remarques sur l'épreuve théorique moto quand elle apparaîtra, et sur l'ensemble du processus de décision.

La moindre des choses serait de se demander (et donc, pour l'Administration d'expliquer) pourquoi on fait une telle réforme. La motivation sous-jacente, je suppose, c'est que les chiffres de la sécurité routière concernant les accidents à moto ne sont pas bons, et surtout, baissent beaucoup moins que ceux concernant les accidents en voiture (je n'ai plus la source sous la main, donc je dis ça de mémoire, mais l'idée est là). D'où deux points d'action évidents (là aussi, c'est moi qui interprète) :

  • renforcer l'enseignement théorique avec un code spécial moto (qui mettrait en lumière les spécificités du véhicule plutôt que les enseigner au travers de « fiches » mal aimées),
  • rendre plus importante l'épreuve de circulation par rapport à celle de plateau.

Actuellement (avant réforme), l'épreuve de circulation est largement perçue comme une formalité : avec un taux de réussite au-delà de 90% (ce qui est quand même paradoxal eu égard à l'accidentologie que je viens d'évoquer), elle est considérée comme allant de soi, en tout cas pour les candidats qui ont déjà le permis B ; beaucoup d'auto-écoles (mais ce n'était pas le cas de la mienne) la prennent à la légère et se contentent souvent d'une seule séance de circulation, et même si on cherche des conseils en ligne (texte ou vidéo) sur la préparation du permis moto, il y en a plein sur le plateau et quasiment rien sur la circulation. C'est vraiment le plateau qui est perçu comme la partie difficile et significative du permis moto. (J'en veux pour preuve le nombre de messages que j'ai vus çà et là dont la teneur était quelque chose comme ça y est, j'ai eu mon plateau ! passage de la circulation prévu pour <tel mois>, et ensuite je m'achète <tel modèle de moto>, comme si l'échec à la circulation était à peine imaginable.)

Pourtant, de ce que j'ai compris des causes des accidents à moto, il s'agit beaucoup plus souvent de fautes de circulation (mauvaise prise d'information ou mauvaise anticipation des réactions des autres usagers) que de fautes de maniement du véhicule (et même parmi les fautes de maniement du véhicule, les plus courantes sont des sorties de virage, qui ne concernent pas vraiment un point enseigné sur le plateau). La réforme vise donc, de ce que je comprends, à corriger un peu ce déséquilibre, et on ne peut que l'applaudir : la partie « circulation » du permis A2 deviendra à la fois plus longue et plus difficile que celle du permis B (et il est certainement normal d'être plus exigeant à moto), et ne sera donc plus prise comme de la rigolade, même par ceux qui ont déjà le permis B.

Ceci étant, la réforme de la partie plateau laisse un peu perplexe. L'objectif, là, est de gagner du temps lors des passages sans vraiment alléger l'épreuve ; mais le résultat est un parcours extrêmement compliqué où on doit enchaîner dans le bon ordre un nombre incroyable de tours, demi-tours et autres passages entre des points imposés, et je suis persuadé qu'il y aura beaucoup de recalés pour fautes de parcours. On aura tendance à dire tout de même, le candidat est censé avoir passé au moins une douzaine d'heures de préparation de cet exercice, il peut bien mémoriser sans se tromper un parcours de quelques minutes, fût-il un peu complexe !, mais en fait, entre le dépaysement de se retrouver sur un plateau qu'on ne connaît pas, et le stress de l'examen, les fautes de parcours ne sont pas rares, déjà avec la formule actuelle, alors la formule trois-parcours-en-un qui est proposée risque d'être bien plus que trois fois pire. (Or s'il y a une compétence qu'on n'est pas censé être en train de tester, c'est la mémoire du candidat.) L'autre problème posé par un parcours unique et si compliqué, c'est de savoir comment les auto-écoles vont pouvoir le préparer : il me semble que la configuration standard actuelle (c'est ce que nous avions) est d'avoir en parallèle sur le terrain d'entraînement un plateau configuré pour le parcours lent et un autre pour les parcours rapides, ce qui permet de tourner assez vite (sur le parcours rapide, un seul élève passe en même temps ; sur le lent, on peut en avoir deux en parallèle sans trop de mal) ; avec ce nouveau parcours unique assez long à faire de bout en bout, il sera beaucoup plus difficile de ne pas se marcher sur les pieds (se rouler sur les roues ? enfin, vous me comprenez).

Quant à la réforme de la partie circulation, il faut se demander si les centres d'examens ne seront pas un peu submergés. La théorie est qu'on économise autant de temps sur la partie plateau qu'on en ajoute sur la partie circulation, mais dans la réalité ça ne se passera pas comme ça, les créneaux beaucoup plus longs seront plus compliqués à placer.

Par ailleurs, si cette réforme du permis A2 est certainement bienvenue pour la sécurité de tous, elle exacerbe une certaine contradiction entre la difficulté (accrue) du permis A2 et le fait que :

  • essentiellement aucune formation n'est demandée pour conduire un deux-roues motorisé de ≤125cm³ (motocyclette légère), i.e., l'équivalence du permis A1 : juste deux ans d'ancienneté du permis B et une formation de 7h en auto-école (non validée par un examen) ;
  • de même[#], il n'y a pas, en France, de nouvelle épreuve pour passer du permis A2 (motocyclettes de puissance intermédiaire) au permis A (toutes motos)[#2] : juste deux ans d'ancienneté du permis A2 et une formation de 7h en auto-école (non validée par un examen).

[#] Malgré la similarité formelle entre les deux points qui précèdent, le Club Contexte signale une différence importante, qui est que l'autorisation de conduire une moto de ≤125cm³ avec le permis B + 2 ans d'ancienneté + formation de 7h est une équivalence nationale du permis A1 qui n'est pas une vraie mention A1 sur le permis et n'est pas valable dans les autres pays, tandis que la passerelle vers le permis A qui s'obtient maintenant uniquement (voir la note suivante) avec le permis A2 + 2 ans d'ancienneté + formation de 7h, est, pour sa part, un vrai permis A, valable dans tous les pays qui ont la distinction entre catégories A2 et A, et notamment toute l'Union européenne.

[#2] Jusqu'en 2016 (éclaircissement : je veux dire, juste avant 2016, et en fait, depuis 2013, parce qu'avant c'était encore différent, cf. les commentaires) on pouvait passer directement le permis A si on était âgé d'au moins 24 ans. Depuis 2016, le permis A ne peut s'obtenir que par ce système : 2 ans d'ancienneté du permis A2 et une formation complémentaire (le A2 est donc en pratique une sorte de version probatoire du A même si, comme le signale la note précédente, le A est une vraie mention au permis qui nécessite de refaire le bout de plastique).

S'agissant du premier point, on peut arguer qu'il est un peu bizarre de rendre le permis A2 plus exigeant tout en donnant à tour de bras l'équivalence du permis A1 étant donné que les scooters sont quand même, en ville, ceux qui conduisent le plus mal (j'ai déjà dit tout le mal que je pensais des scooters ? ah oui, je l'ai déjà dit). La réponse d'un de mes moniteurs moto quand je lui ai demandé ce qu'il en pensait a été : oui, mais si on retirait le droit de conduire un scooter avec juste deux ans d'ancienneté du permis B, les gens conduiraient sans permis et ce serait encore pire : c'est un peu déprimant, mais il a sans doute raison.

Une autre incohérence dans le même genre est que les gens qui passent vraiment le permis A1 (c'est-à-dire des jeunes entre 16 et 18 ans, parce qu'au-delà ça n'a aucun intérêt de passer le A1 dont les épreuves sont exactement les mêmes que celles du A2 avec juste une moto de ≤125cm³) doivent repasser… exactement les mêmes épreuves[#3] quand ils passent le permis A2, mais que la même logique ne vaut pas pour passer du A2 au A. Il faudrait savoir : soit ça a un intérêt de revérifier les mêmes compétences sur une moto plus puissante, soit ça n'en a pas ; personnellement, je n'en sais rien, mais il est bizarre que la réponse soit différente pour A1→A2 et A2→A. (Bon, avec cette réforme, les détenteurs récents du permis A1 seront au moins dispensés de repasser l'épreuve théorique moto.)

[#3] Idem, pour passer du permis B1 (quadricycles lourds à moteur) au permis B, on doit tout repasser. Ce qui explique sans doute qu'essentiellement personne ne passe le permis B1 (221 candidats dans toute la France en 2017, soit même pas 0.015% de l'ensemble des candidats du groupe B).

Je ne sais pas, donc, si conduire une moto plus puissante est intrinsèquement plus difficile ou si elles sont juste plus dangereuses parce qu'on est plus tenté de faire des conneries avec. (La seule fois où j'ai eu une moto de 125cm³ entre les jambes, ça ne m'a pas semblé plus facile qu'une 500cm³, plutôt le contraire, même, je n'arrêtais pas de caler en ville et sur l'autoroute je ne me sentais pas du tout rassuré à cause du manque de réserve d'accélération.)

Quoi qu'il en soit, il y aurait une raison naturelle de faire un vrai examen lors du passage du permis A2 au permis A (comme c'est le cas pour ceux qui ont le permis A1 quand ils veulent passer le A), ce serait de vérifier que, deux ans plus tard, les élèves n'ont pas trop oublié les règles de circulation. Un de mes moniteurs moto me disait que, quand il enseigne la formation passerelle A2→A, il constate beaucoup de pertes de bonnes habitudes de circulation acquises deux ans plus tôt. L'idée de mettre un vrai examen à ce moment-là serait donc d'utiliser le changement de catégorie de puissance comme prétexte pour recontrôler les règles de circulation. Certes, moi personnellement ça m'ennuierait bien de devoir re-re-re-passer un permis, et sans doute de découvrir que je dois encore y passer 244 823 040 heures, mais je pense quand même que ce serait une mesure sensée. Mais, en l'état des projets, la réforme annoncée du permis concerne uniquement le A2 et pas la passerelle A2→A qui resterait acquise par une simple formation de 7h après 2 ans de permis A2.

Je me suis plusieurs fois dit que je devais faire le tour des pays européens pour chercher à savoir les modalités de délivrance de leurs permis de conduire (de toutes les catégories) : parce que si les catégories (AM, A1, A2, A, B1, B, C1, C, D1, D, BE, C1E, D1E et DE, regardez les pictogrammes au dos du bout de plastique — et, non, il n'y a pas de B1E et ça me perturbe) sont normalisées au niveau européen, les modalités d'accès à ces catégories ne le sont pas du tout. Malheureusement, c'est assez difficile d'avoir accès à ces informations, surtout si on ne sait pas lire 24 langues différentes. Il y a bien sûr des points communs (presque toujours au moins une épreuve théorique et au moins une épreuve pratique, et, s'agissant de la moto, en fait deux épreuves pratiques, une hors circulation et une en circulation), mais énormément de différences dans les détails. De ce que je comprends, dans la plupart des autres pays européens, on peut passer directement le permis A (comme c'était le cas en France avant 2016), en revanche, si on a déjà le A2, on n'obtient pas le A par une simple formalité ; et, qui sait, il y a peut-être même des pays où le permis B1 a une raison d'être, comment savoir…

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(lundi)

Nouvelles réflexions sur la moto : bilan après sept semaines

J'avais déjà écrit précédemment une entrée de blog avec des réflexions en vrac sur la moto peu après avoir passé l'épreuve « plateau » du permis. Cette entrée-ci est une sorte de continuation de cette dernière, et bien sûr aussi de celle-ci, sept semaines (et 1650km) après m'être acheté mon joujou : je rassemble ici toutes sortes de réflexions plus ou moins indépendantes (et présentées dans un ordre un peu aléatoire qui n'est pas celui dans lequel je les ai écrites) pour pouvoir les retrouver plus aisément mais aussi permettre aux lecteurs de mon blog que mes aventures motocyclistes n'intéressent pas de les ignorer plus facilement.

Table des parties

Bref, j'aime ça

Je radote évidemment en disant ça (mais compte tenu de la longueur de mes entrées de blog et du fait que mes lecteurs ne les apprennent pas forcément par cœur, il n'est pas inutile que je redise certaines choses) : je m'étais mis à la moto en bonne partie pour l'aspect pratique (pour pouvoir aller à Palaiseau de façon efficace ; et aussi pour apprendre à mieux conduire en général), mais je suis tombé dans une sorte de piège en découvrant que j'aimais énormément ça. (Une introspection un peu plus poussée, en acceptant le fait que je regarde les motards avec des étoiles dans les yeux depuis que je suis petit mais que je le refoulais vaguement, m'aurait certainement permis de déceler ce « piège » — mais je ne sais pas si ça me l'aurait évité, au contraire j'en aurais plutôt passé le permis plus tôt.) Faire une balade en moto me permet beaucoup plus efficacement que quoi que ce soit d'autre de me vider la tête (je vais y revenir), et d'éviter de penser à mes soucis du moment. Et dès que je descends de selle, même si je suis fatigué et content d'être rentré, en même temps, je regrette que ce soit déjà fini et j'ai envie de recommencer.

Si je suis complètement convaincu que « j'aime ça »[#], donc, en revanche je ne le suis pas franchement par l'aspect pratique qui était quand même une motivation initiale. En passant le permis moto, j'ai gagné le droit de me mettre en danger avec ce qui promet d'être aussi un gouffre à fric (et en ce moment, je pouvais m'en passer), et je ressens un certain sentiment d'injustice dans le fait que je découvre enfin un moyen de transport qui me plaît vraiment en celui qui est le plus dangereux[#2] et pas franchement le plus écologique non plus ; et en outre, il n'est pas franchement pratique : je gagne à peine de temps par rapport à une voiture parce que je n'ose faire de l'interfile que dans des conditions idéales, et je perds sur plein d'autres plans, par exemple parce que l'équipement est malcommode à se trimbaler, parce que c'est la merde quand il pleut ou qu'il vente ou qu'il fait froid ou qu'il fait chaud ou qu'il fait nuit, et j'en passe. J'ai l'impression que les dieux se rient de moi.

[#] Reste à savoir si ça va durer, même en l'absence de grosse frayeur ou d'accident : mes intérêts sont parfois d'autant plus de courte durée qu'ils sont forts, donc il n'est pas complètement exclu que la moto se retrouve finalement à prendre la poussière.

[#2] Bon, je suppose qu'en cherchant assez on doit pouvoir trouver plus dangereux que la moto, mais c'est certainement quelque chose de passablement exotique (l'hélicoptère, peut-être ?).

Quelques clichés sociologiques à 2 femtozorkmids sur les motos vs scooters

À propos de l'aspect pratique, il faut que je fasse une remarque sur les motos et les scooters.

La sociologie des utilisateurs de deux-roues motorisés m'intéresse maintenant que j'en fais partie (d'ailleurs, on est forcé de s'y intéresser un minimum pour passer le permis, parce que la fiche nº4 en parle un peu, et je suppose que le contenu restera dans l'épreuve théorique spéciale moto). YouTube, dont le talent pour titiller nos addictions est si impressionnant, a commencé, à partir des vidéos que je regardais pour préparer le permis, à me montrer plein de bouts de « motovlogs » (comprendre : blogs vidéos tenus à moto et sur la moto), un format que je trouve pénible parce qu'on passe un temps invraisemblable à dire ce qui tiendrait en quelques lignes d'écrit et qu'en plus ça a généralement peu de rapport avec ce qu'on voit sur la vidéo, mais j'en ai quand même regardé beaucoup parce que je pense avoir à apprendre sur le fond et que l'aspect sociologique m'intéresse aussi (enfin, sociologie de comptoir, entendons-nous : je n'ai pas du tout ici une approche scientifique).

Un phénomène clair et peut-être surprenant vu de l'extérieur est que les populations de motards et de scooteristes sont extrêmement différentes. Évidemment, il y aura toujours une intersection et des exceptions, parce qu'aucune généralité sociologique n'est sans exception, mais grosso modo, on peut faire l'analyse suivante :

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(mardi)

Où je reparle de moto et de vidéo et je me pose des questions copyistes

Le lecteur sait probablement deux choses sur moi.

✱ La première, que je racontais dans la dernière entrée, c'est que je me suis acheté une moto. Je vais éviter d'écrire encore 1729 entrées sur le sujet parce que tout le monde a compris et tout le monde s'en fout, donc tâchons de faire bref (le mot bref étant, pour moi, très relatif).

J'ai pris quelques jours de congés pour profiter de ce qu'il restait d'été et de beau temps et pour commencer à roder la machine. Et je découvre ainsi que j'aime ça encore plus que ce que je pensais. C'est sans doute la découverte grisante de la liberté de me balader où je veux (voire de partir sans savoir au juste où je vais, sans avoir la possibilité d'ouvrir Google Maps et devant donc me fier à mon seul sens de la géographie, ce qui veut dire que je me perds mais ça peut être un plaisir de se perdre), combinée à l'exhilaration de conduire la moto (au sujet de laquelle je renvoie à la note #7b de l'entrée sur le permis, à laquelle j'ai fait plusieurs additions successives et qui aurait peut-être mérité d'être une entrée de blog à elle seule) et la fascination d'un nouveau joujou ; toujours est-il que je suis, au moins pour le moment, complètement addict, et qu'en démontant je n'ai qu'une envie c'est de repartir.

Je suis donc allé un peu au pif, juste pour rouler, dans toutes sortes de directions (enfin, surtout vers le sud et vers l'ouest, parce que c'est quand même plus agréable ; mais je regrette un peu de ne pas vivre en géométrie hyperbolique et de n'avoir qu'un nombre limité de possibilités en la matière, même en faisant une certaine distance). J'ai parcouru 500km pour l'instant (en environ 14h), ce qui n'est pas énorme, mais juste 12 jours après avoir réceptionné le joujou, c'est plus que ce que j'imaginais. Et, à vrai dire, ça m'inquiète un peu, parce qu'en même temps je tiens à me rappeler et à me répéter que c'est quand même dangereux, que tout mon équipement ne vaut pas une carrosserie minable, que même si je roule prudemment je ne suis pas à l'abri des erreurs et encore moins de celles des autres, et que l'impression trompeuse de facilité ne doit pas me faire oublier que je suis débutant. Ce qui est sûr, au moins, c'est que je ne suis pas tenté de rouler vite : ce qui est agréable, c'est entre 30km/h (vitesse à laquelle l'effet gyroscopique se fait sentir) et 90km/h (vitesse à laquelle c'est l'absence de carénage de ma moto qui se fait sentir) ; ni de doubler rageusement les voitures, ce sont plutôt elles qui me doublent rageusement, en fait (et ce n'est pas forcément tellement moins dangereux, malheureusement). Par ailleurs, je connais bien le caractère très cyclique / fluctuant / épisodique de mes intérêts, donc il est fort possible que dans deux mois (et je peux quand même raisonnablement espérer ne pas avoir d'accident pendant ce temps) mon enthousiasme sera retombé : souhaitons quand même qu'il ne soit pas retombé au point que j'aurais acheté une moto pour m'en servir seulement deux mois, mais bon, nous verrons.

Il y a aussi toutes sortes de considérations pratiques qui restent à régler. Ces derniers jours j'ai en gros fait des balades juste en moto, c'est-à-dire en boucle de chez moi à chez moi, avec juste un petit arrêt, peut-être pour déjeuner (par exemple au niveau du centre commercial Parly 2 ; à propos, je recommande le café Marlette de Parly 2, que mon poussinet et moi connaissons de nos visites à Chèvreloup). À part pour une petite virée à Meaux où le poussinet était venu en voiture et moi en moto et où j'avais mis des choses dans le coffre de la voiture — mais ce n'est pas une idée à long terme parce que c'est quand même franchement abusé de prendre deux véhicules capables de transporter 5+2 personnes pour en déplacer 2. J'ai le problème, donc, si je veux m'arrêter pour faire une balade à pied et pas juste pour manger, de savoir quoi faire de mon équipement moto (que je décris à la fin de cette entrée). Je veux bien transporter mon casque à la main, mettre les gants dedans comme si c'était un panier, et garder le blouson sur le dos ; et même les bottes sont finalement beaucoup moins inconfortables pour marcher que ce que j'imaginais ; mais le pantalon, lui, est passablement gênant, et en plus le pantalon dans les bottes fait couic-couic à chaque pas, ça rend fou le poussinet. Je n'ai pas de top-case sur la moto, je n'ai pas vraiment envie d'en faire ajouter un, j'ai peur que le pantalon ne tienne même pas facilement dans un top-case et j'ai aussi peur que ce qu'il y a dans un top-case se fasse très vite voler. Mais je n'ai pas non plus envie de me passer d'un pantalon très sérieux. Quelques problèmes pratiques à résoudre donc, comme aussi le fait qu'entre le moment où je sors de chez moi et le moment où la moto sort du parking il s'écoule pour l'instant largement 20 min parce que j'oublie toujours quelque chose ou en tout cas je mets un temps invraisemblable à penser à tout (et la GoPro n'aide pas, je vais y revenir).

Puisque le but est de ne pas continuer longtemps l'absurdité de la configuration où le poussinet prend la voiture et je le suis en moto, j'ai commencé à essayer de le prendre pour passager. (En revenant de Meaux, nous nous sommes garés dans un bled au milieu de nulle part et nous avons fait un petit tour en moto à vitesse bien modérée pour voir l'effet que ça faisait.) Apparemment c'est moins inconfortable pour lui que ce que je craignais sur une selle minuscule et sans poignée passager pour se tenir (j'ai déjà été passager sur les CB-500F de mon auto-école avec le moniteur comme conducteur, mais ils avaient au moins fait poser des barres pouvant servir de poignées, et même comme ça je trouvais ça très inconfortable, probablement parce que j'essayais de me tenir trop avec les mains et pas assez avec les jambes). Reste que je n'étais moi-même pas terriblement rassuré dès qu'il s'agissait d'accélérer ou de ralentir, ou même de prendre un virage, et je me rendais compte que le moindre changement de vitesse, qui quand je suis tout seul me semble passer comme du beurre, implique une décélération et une accélération que je sens au mouvement du poussinet derrière moi. Mais surtout, je me sentais doublement nerveux d'avoir la responsabilité de mon poussinet en plus de la mienne. Bref, il y a encore du travail à faire. Et il y a aussi la question de l'équipement qui devient encore plus problématique à deux (pour ce petit essai, le poussinet s'est acheté un casque et des gants, a utilisé ses chaussures normales qui sont des chaussures de montagnes protégeant bien la cheville, et pour ce qui est du pantalon et du blouson il a pris ceux, en mesh, que je m'étais achetés pour temps chaud ; heureusement nous avons des tailles suffisamment proches pour pouvoir partager tout sauf peut-être les chaussures).

Ajout : Bilan après quelques semaines de moto dans une entrée ultérieure.

(Sinon, rien à voir, mais puisque j'en suis à faire une sorte de brain dump je ne fais pas de transition : je découvre qu'il existe un service de location de motos à Paris. Peut-être que je devrais essayer au moins une fois, histoire de ne pas conduire que une CB-500F.)

Voilà qui fut « bref »(?). Je passe au deuxième point.

✱ La deuxième chose qu'on sait certainement sur moi, c'est mon obsession pour la préservation de l'information (ou copyisme : j'en parlais par exemple dans cette vieille entrée ; j'en ai reparlé ensuite quantité d'autres fois, mais jamais vraiment remis à plat mes idées — tant pis) ; et que j'aime bien m'amuser à disséquer et analyser l'information que je préserve.

Le problème avec la préservation de l'information, c'est que parfois on a trop d'information pour pouvoir tout stocker, il faut arriver à faire le tri en choisissant intelligemment ce qu'on garde et ce qu'on ne garde pas. Je ne suis pas au niveau du LHC qui produit des données au rythme de ~1Go/s après tri, et plusieurs centaines de fois plus avant tri. Mais voilà, je disais dans l'entrée précédente qu'en même temps que la moto je me suis acheté une GoPro pour filmer quand je conduis, et cela soulève des problèmes graves pour le copyiste que je suis : la GoPro produit des données au rythme fort soutenu de 4Mo/s pour la résolution et le framerate que j'utilise (1920×1080 à 25fps), pourtant modestes par rapport aux capacités du gadget, ce qui fait que j'ai déjà accumulé 192Go en quelques jours, je ne peux pas conserver ce flux d'information tel quel, et honnêtement, on s'en fout de garder une qualité aussi excellente. Mais j'ai quand même envie d'en conserver un « résumé », peut-être autour de quelques pour cent du volume, et la question se pose de savoir quoi et comment (dégrader monstrueusement la qualité ? réduire la résolution au format vignette ? accélérer la vidéo ou diminuer le framerate ? garder une image par seconde voire par minute ? une combinaison de tout ça ? ou au contraire plusieurs résumés distincts par vidéos, par exemple l'un au format vignette et l'autre à résolution maximale mais seulement d'une image sur N ?).

La GoPro, outre l'enregistrement de l'image et du son, stocke aussi dans la vidéo des informations GPS et aussi des mesures d'accéléromètres et de gyroscopes (voir ici pour les détails du format et de ce qui est stocké) : à raison de 200 enregistrements par seconde pour les accéléromètres et gyroscopes, et 18 par seconde pour le GPS, je disais que ce sont de véritables caramels mous pour geek, mais même ces informations-là finissent par peser un peu lourd (bon, c'est ~0.1% de l'ensemble de la vidéo donc ce n'est pas là que je vais vouloir gratter de la place), et surtout, il n'est pas complètement évident de les extraire de la vidéo sans perdre de l'information (les flux vidéo, audio et télémétrie sont synchronisés par le conteneur MP4 et l'horloge principale est celle donnée par le conteneur, ce n'est pas facile de décider comment stocker la télémétrie seule). J'arrive à extraire une trace GPS (au format gpx), mais il y a certainement quelque chose de rigolo à faire avec ces « caramels mous pour geek » que sont les relevés des accéléromètres et gyroscopes, peut-être analyser une trajectoire de virage de façon extrêmement détaillée ou voir quel est l'impact mesuré par les accéléromètres d'un changement de vitesse (ce qui suppose de comparer avec la vidéo pour savoir exactement quand je touche à l'embrayage).

Ajout () : La « simple » opération de modifier ou recomprimer la vidéo sans affecter les autres informations stockées dans le flux par la GoPro n'est pas évidente : voir ce fil Twitter (lire au-dessus et en-dessous) ainsi que cette page qui donne des instructions détaillées mais dont je signale dans le fil Twitter qu'elles ne semblent marcher que pour certaines versions de ffmpeg (la 4.0.2 mais pas la 4.2.1 — il n'est pas clair si c'est un bug, un accident ou une feature).

Je me pose d'ailleurs la question suivante, qui n'est théoriquement pas très difficile, mais comme d'habitude le diable est dans les détails : j'ai une fonction — la position de la GoPro — qui est mesurée 18 fois par seconde par GPS, mais avec une précision variable et parfois très mauvaise, et dont la dérivée seconde est mesurée 200 fois par seconde par les accéléromètres (et gyroscopes puisqu'il faut bien retrouver les directions), avec une précision sans doute plus constante : quelle serait la bonne approche numérique, avec ces diverses données, pour interpoler la position quand elle n'a pas été mesurée ou qu'elle l'a mal été ? et pour approcher la vitesse ? (bizarrement, la GoPro enregistre la grandeur de la vitesse relevée par le GPS, mais pas sa direction : on doit pouvoir y arriver en mettant ensemble des positions successives, la grandeur connue, et l'accélération, mais tout ça n'est pas forcément évident). Bon, pour faire des expériences un peu scientifiques, il faudrait sans doute plutôt accrocher la GoPro à la moto elle-même qu'à son conducteur qui doit avoir tendance à gigoter inutilement.

[Deux vues différentes au même moment]Il y a plein de choses qui sont théoriquement très simples et qui en pratique dont parsemées de petites crotte de ragondin, en fait. À l'occasion d'une de ces balades d'essai où le poussinet prend son joujou et moi le mien, la même suite d'événements a été filmée par deux caméras indépendantes : la dashcam de la voiture, vers l'avant et vers l'arrière mais prenons la vue arrière puisque c'est elle qui voit la moto, et la GoPro que je porte sur un harnais. Je me suis dit que ce serait amusant de faire une vidéo combinée montrant les deux vues en même temps. Synchronisées, donc. En principe ça ne devrait pas être difficile de synchroniser les deux flux vidéos, d'autant que les deux caméras captent l'heure par GPS (la GoPro l'insère comme un flux binaire dans le fichier vidéo, tandis que la dashcam de la voiture l'ajoute sur les images). Mais il y a un million de petites complications qui viennent rendre ce beau projet beaucoup plus compliqué que sur le papier : par exemple, la dashcam coupe sa vidéo en fichiers de 181s, avec 1s de recollement entre deux fichiers consécutifs tandis que la GoPro les coupe en fichiers d'environ 4Go et sans recollement ; les deux, d'ailleurs, n'ont pas le même framerate parce que ce serait trop facile sinon ; la dashcam enregistre certes l'heure renvoyée par une unité GPS, mais elle la reçoit, en fait, une fois par seconde et pas forcément à l'instant exact de la seconde GPS, si bien que cette heure est seulement précise à quelque chose comme 1.5s ou 2s près ; la dashcam, par ailleurs, a été éteinte pendant un certain temps parce que le poussinet a coupé le contact pour mettre de l'essence (ce qui fait qu'un segment vidéo a été raccourci). Au final, pour trouver des bons points de synchronisation, je n'ai pas utilisé le GPS mais des feux qui passaient au vert (vus par la GoPro et la caméra avant de la voiture, que j'espère correctement synchronisée avec la caméra arrière) : j'ai réussi à produire une vidéo correctement synchronisée (à une fraction de seconde près), mais ça n'a pas été sans y passer beaucoup de temps et m'arracher beaucoup de cheveux (surtout avant d'avoir compris cette histoire d'heure reçue seulement une fois par seconde par le GPS de la dashcam de la voiture). Je ne publie pas la vidéo résultante, parce que je doute qu'elle intéresse qui que ce soit à par le poussinet et moi (hum, juste moi en fait), et que YouTube massacre tellement la qualité des vidéos que je lui envoie que ça n'aurait plus aucun intérêt ; mais voici ci-contre un exemple de capture (ça se passe à cet endroit) où normalement les parties haute et basse ont été prises à quelques centièmes de seconde d'intervalle.

Là aussi, le copyiste que je suis se demande s'il conserve la vidéo complète résultant de cette synchronisation, ou seulement quelques images aléatoires, ou juste les informations de synchronisation.

Tout ça m'aura au moins permis d'en apprendre un peu plus sur le fonctionnement du programme ffmpeg et de ne plus avoir peur de faire des successions un peu compliquées de filtres.

(En fait, je vais tâcher de remplacer la GoPro par une dashcam pour moto puisqu'on m'a signalé que ça existait et que ça correspond sans doute mieux à l'usage que je cherche — hors caramels mous, Surtout que le temps pris pour enfiler le harnais portant la GoPro, ou parfois pour me rendre compte que j'ai laissé la carte µSD dans l'ordinateur et que je dois revenir la chercher, jouent beaucoup dans le temps qui s'écoule entre le moment où je décide de partir et le moment où la moto démarre vraiment. Bref, je prendrai une dashcam — la VSYSTO a l'air intéressante — quand j'aurai fait poser une prise 12V sur laquelle la brancher, et en espérant que la fixation et le câblage ne dépassent pas mes capacités très limitées pour le bricolage. Mais je ne vais certainement pas jeter ma GoPro qui pourrait servir à enregistrer toutes sortes d'autres choses, ne serait-ce que des balades à pied. ⁂ Mise à jour : Voir ce bout d'une entrée ultérieure pour la dashcam que j'ai finalement achetée.)

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(vendredi)

Bref, je me suis acheté un joujou à deux roues

[Photo de moi sur la moto][Photo de moi sur la moto]Je disais dans l'avant-dernière entrée (et sur Twitter) que je m'étais acheté une moto, et je faillirais à la hauteur de ma réputation de documentateur (documenteur ?) frénétique si je ne racontais pas ça dans une entrée fleuve en 95 040 sous-parties, donc, c'est parti. Je me suis acheté une Honda CB-500F (modèle 2019, neuve).

Pourquoi une CB-500F ? Et puis tu es con d'avoir acheté neuf, David !

(La fiche technique est là.)

C'est le modèle utilisé par mon auto-école, donc la principale raison c'est que j'en ai maintenant l'habitude, je sais que je le trouve agréable à conduire et il ne va pas me surprendre. Comme j'ai aussi appris en mettant 129h à passer le permis que je n'apprenais pas très vite ce genre de choses, il est peut-être mieux que je ne me déstabilise pas en prenant un modèle différent.

Mais le fait que ce soit un modèle utilisé par mon auto-école comme par beaucoup d'autres signifie aussi que des gens plus compétents que moi jugent que c'est une bonne moto pour débuter, mais aussi raisonnablement fiable. Je sais que beaucoup d'auto-écoles choisissent soit la Yamaha MT-07 soit la Kawasaki Z 650, mais ce sont des motos plus puissantes, qui doivent être bridées pour être rendues conformes aux exigences du permis A2 (≤35kW), et je suis globalement sceptique quant à l'opportunité de prendre un modèle qui a été conçu par des gens très malins pour développer une certaine puissance, et ensuite le brider pour qu'il ne puisse plus produire que les deux tiers de cette puissance (par exemple, je n'y connais rien, mais je suppose que les choix sur la boîte de vitesse, ne serait-ce que l'échelonnage des rapports, sont optimisés en fonction de la puissance du moteur). S'agissant de la MT-07 spécifiquement, j'ai entendu dire que sa nervosité pouvait être difficile à prendre en main pour les novices : le réseau d'auto-écoles CER l'utilise généralement (ils ont une forme de partenariat avec Yamaha), mais la mienne précisément (CER Bobillot) a décidé de ne pas suivre, notamment pour cette raison. La CB-500F, au contraire, est d'origine pile-poil à la puissance permise pour le permis A2 (35kW, donc).

A contrario, j'aurais pu prendre une moto moins puissante[#] : en fait, à l'origine, la raison pour laquelle je passais le permis A2 est que je n'avais pas l'ancienneté nécessaire (à savoir, 2 ans) pour faire le stage court (7h)[#2] donnant le droit de conduire une 125cm³ avec le permis B. Mais la seule fois où mon auto-école m'a mis une 125cm³ entre les pattes pour aller sur le plateau, j'ai eu l'impression qu'elle était tellement à bout de souffle à 90km/h sur l'autoroute que ça ne me rassurait pas du tout. Alors je me suis dit que si les autorités dans leur infinie sagesse avaient choisi de mettre la limite à 35kW (soit la puissance déployée par un moteur d'environ 500cm³) pour le permis A2, c'était certainement une puissance raisonnable, quelle que soit la définition exacte de « raisonnable ». (Plus sérieusement, raisonnable devrait sans doute vouloir dire que la puissance que le conducteur se sent capable de demander et ce que la moto est capable de fournir sont comparables, mais je crois que mon argument se casse la gueule, là.)

Enfin, je n'y connais rien au marché des motos, mais mes lecteurs se douteront bien que j'ai consulté plein d'essais et de comparatifs. Dans les descriptions de la CB-500F, des termes comme comme une bonne moto pour débuter ou un petit roadster sympa et facile à prendre en main ou encore une moto accessible, progressive, rassurante, naturelle, pas surprenante ou qui pardonne reviennent assez souvent pour que je croie que ce n'est pas une coïncidence ni une opération de comm' orchestrée par Honda. Et à la limite, parfois les reproches me convainquaient que bon, si c'est ça ce qu'on trouve à lui reprocher, c'est que ça doit être parfait pour moi. (Au pif, dans cet essai fait par un youtubeur[#3], il dit vers 9′23″ dommage que la sonorité n'est pas plus présente : vraiment on l'entend pas, cette moto, dommage — non mais sérieusement ‽ — et vers 10′40″ ça manque de pêche, ça manque de vivacité, tu vois, ça manque d'explositivitéI think I can live with that. À 11′35″, il consent à trouver un soupçon de nervosité à partir de 7000tr/min, alors moi qui conduis plutôt vers 3500tr/min[#4] à cause de l'influence de la voiture Diesel du poussinet et qui me demande si ça ne hurle pas trop à 5000tr/min, je me dis que j'ai de la marge pour la voir venir, la nervosité.)

Globalement, la synthèse que j'ai retenue des essais que j'ai vus ou lus de la CB-500F serait quelque chose comme :

  • moteur très « linéaire » (whatever that means), manquant de « mordant » et d'« allonge » (whatever that means),
  • bonne tenue même à bas régime,
  • très bonne maniabilité,
  • bon freinage,
  • bons amortisseurs,
  • embrayage très agréable (surtout sur le modèle 2019), boîte de vitesse facile à gérer,
  • consommation plutôt faible (annoncée 3.4L/(100km), les valeurs mesurées en essais varient énormément entre 3 et 4L/(100km)),
  • position de conduite modérée, guidon large,
  • bons rétroviseurs,
  • afficheur numérique clair, mais difficile à lire au soleil à cause des reflets ;
  • moralité : très bonne moto pour débuter.

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(vendredi)

Où je finis quand même par décrocher le permis A2

[Certificat d'examen du permis de conduire]Alors voilà, j'ai quand même fini par l'avoir. J'ai passé l'examen mercredi après-midi et j'ai eu le résultat ce matin (ci-contre), me donnant le droit de conduire une moto[#]. Le feuilleton s'est éternisé et je pense que tout le monde en avait marre, moi le premier (pour ne pas parler du poussinet) : il m'aura fallu 87 heures (pour la partie plateau) plus 42 (pour la partie circulation), soit 129h au total[#2], ou encore 28+21=49 séances, réparties sur tout juste un an (j'ai déposé mon dossier d'inscription le ) ; et un échec[#3]. Je n'ai peut-être pas battu un record, mais je ne dois pas en être loin (les valeurs typiques dans mon auto-école pour la durée de préparation ont l'air d'être autour de 30h pour le plateau et 10h pour la circulation[#4]). Accessoirement, à 45€ la séance, ça commence à chiffrer : en ajoutant le prix un peu exorbitant de l'équipement de protection que je me suis payé, mon compte moto sur GnuCash atteint largement le prix d'une belle moto[#5] alors que je n'en ai pas encore acheté.

[#] Legal fine print: de puissance ≤35kW, et ≤70kW avant un éventuel bridage, et de puissance massique ≤200W/kg.

[#2] Tant que j'y suis, une estimation pifométrique de la distance que j'ai parcourue en moto : pour la préparation au plateau, 23×2×9km ≈ 415km pour les allers-retours, et sur le plateau lui-même, 60h effectives à, au pif, 5km/h de moyenne générale, donc peut-être 300km ; pour les leçons en circulation, 30h effectives à, au pif, 30km/h de moyenne, disons 900km. Allez, à la louche, 1600km en un an : vu sous cet angle, ce n'est pas tant que ça, en fait.

[#3] Allez, encore des chiffres débiles : cette priorité à droite m'aura coûté trois mois et 925€ : ce serait amusant de savoir ce que le public penserait de sanctionner le refus de priorité par trois mois de suspension du permis et 925€ d'amende. 😁 (En vrai, c'est 4 points — ou maintenant 6 pour un piéton — et 135€ d'amende.)

[#4] Estimation très grossière basée sur ce qu'ont dit les moniteurs (qui ne font eux-même visiblement pas de stats) et des discussions avec d'autres élèves. Mais je prends la peine de l'écrire, parce que c'est le genre de chiffres qui pouvaient m'intéresser au moment où je commençais à me documenter — et que je ne trouvais pas.

[#5] Mais bon, c'est toujours moins que 1m² d'immobilier parisien, ce qui remet aussi les choses en perspective.

Il y aurait peut-être à méditer sur pourquoi j'ai eu tellement de mal (même en tenant compte de facteurs handicapants comme mon âge ou le fait que j'avais exactement zéro expérience préalable des deux-roues motorisés, et même en comparaison avec mon permis B qui a déjà été difficile), — mais je n'ai pas vraiment envie maintenant.

Je crois cependant que je ne vais pas continuer avec les permis C, D et *E. (Mais je n'en ai que plus d'admiration pour ceux qui réussissent ces épreuves[#6].)

[#6] Ma belle-maman a le permis D. Et là, il semble que les créneaux de passage sont tellement rares que si on rate l'épreuve, ce n'est pas trois mois qu'on doit attendre pour la repasser mais plutôt un an.

Si je repense à ce qui m'avait initialement poussé à passer le permis moto, j'avais trouvé principalement trois raisons : la curiosité, le défi, et l'idée que préparer et passer un nouveau permis m'aiderait à mieux conduire en général (donc y compris une voiture, un vélo — ou même mes petits petons). Ce dernier point est certainement une réussite (rétrospectivement je me dis un peu que j'ai eu mon permis B dans une pochette surprise, et que les leçons de moto m'ont aidé à améliorer ma gestion de la route au moins autant que les excursions avec la tuture du poussinet ou plus récemment quelques essais de voitures électriques en autopartage) ; et je suppose qu'on peut dire que ma curiosité est assouvie et que le défi a été relevé. Mais ce que je n'avais pas prévu initialement c'est que j'allais vraiment y prendre goût (et que ça devenait donc d'autant plus frustrant de ne pas réussir).

Parce que, franchement, conduire une voiture, je trouve ça juste pénible. C'est utile, mais je ne trouve décidément pas ça agréable[#6b]. Peut-être que c'est lié au fait que j'ai passé le permis B comme une sorte d'obligation. Ou parce que je continue à avoir du mal : je gère encore parfois mal les vitesses par exemple quand il s'agit de rétrograder avant un giratoire, je ne place pas bien mes mains sur le volant quand ça tourne trop, j'ai toujours du mal à visualiser le gabarit quand le passage est un peu étroit, et pour ce qui est des manœuvres c'est vraiment la catastrophe. (Les voitures électriques m'ont un peu réconcilié avec la voiture, quand même, tant il est vrai que le fait de ne pas avoir à penser au risque de caler[#6c] permet de mieux gérer tout le reste.)

Mais rien de tel en moto. L'impression de facilité est peut-être trompeuse (87h de préparation au plateau, quand même…), et peut-être que je dirai autre chose après une chute, ce serait audacieux de ma part que je conduis bien, disons peut-être juste que je conduis moins laborieusement qu'une voiture ; mais, voilà, je ressens ça comme si c'était instinctif. Même le passage des vitesses : j'avais essayé ici d'analyser pourquoi, et c'est un peu confus, mais ce que je perçois, en tout cas, c'est qu'en voiture l'embrayage est une gêne, alors qu'en moto c'est un allié[#6d]. Et pour ce qui est des trajectoires, c'est incompréhensiblement naturel, on a la sensation que la moto va là où on veut qu'elle aille, sans qu'on ait besoin de lui dire. On fait les choses sans réfléchir — et c'est quelqu'un de caricaturalement hyper-analytique qui écrit ça. Je pense que c'est largement cette sensation de « faire corps »[#7] avec la machine (comme si on se déplaçait soi-même[#7b] sur la route) qui rend la moto insidieusement grisante. Bien sûr que c'est une illusion, et bien sûr qu'elle est dangereuse, mais ça n'en est pas moins addictif. Et je suppose que c'est ça qui fait que certains recherchent la vitesse[#8] et/ou se croient invulnérables.

[#6b] Ajout : Pour répondre à une remarque qui m'est faite en commentaire, je ne nie absolument pas que les voitures soient nettement plus confortables que les motos, notez bien (ne serait-ce que quand il pleut, qu'il fait chaud, ou qu'il fait froid !), et incomparablement plus pratiques s'il s'agit de transporter quoi que ce soit. Mais à ce compte-là, je préfère être passager de la voiture et avoir, par exemple, mon poussinet comme chauffeur (lui il aime ça).

[#6c] Ajout () : Parlant de caler : avec la tuture du poussinet (Golf IV diesel), si on cale, il faut couper le contact complètement, attendre environ une seconde, remettre le contact, attendre l'extinction d'un voyant, et tenir la clé de contact en position démarreur pendant le temps nécessaire pour entendre le moteur tourner mais surtout pas trop. C'est certes plus simple que sur une Ford Model T, mais ça reste un peu fastidieux, et un peu traumatisant si on est en train de se faire engueuler par les gens derrière qui s'énervent d'attendre au feu vert à cause du plouc qui a calé en démarrant. Au moins, avec la voiture de l'auto-école, il suffisait de remettre un coup d'embrayage. Avec la Honda CB 500 (la moto sur laquelle j'ai travaillé, donc), en cas de calage, on appuie juste (en débrayant !) sur le bouton du démarreur : c'est tellement rapide à redémarrer que, pendant que je travaillais le parcours lent, au plateau, il m'est arrivé plusieurs fois de : commencer à perdre l'équilibre, vouloir remettre un peu d'embrayage, caler parce que j'en mettais trop, redémarrer le moteur, rembrayer un peu moins fort et ainsi reprendre mon équilibre, tout ça sans poser le pied par terre.

[#6d] Ajout () : Autant le fait d'essayer une voiture électrique est quelque chose que j'ai trouvé sympa, autant je n'ai pas tellement envie d'une moto électrique : passer les vitesses et jouer de l'embrayage est un plaisir, en moto. Si on veut me vendre une moto électrique, qu'on en invente une qui a un changement de vitesse ! (fût-il complètement simulé parce qu'on ne veut pas mettre de pièce mobile inutile).

[#7] Je ne pense pas qu'un conducteur de voiture, camion, car, train aura facilement tendance à dire qu'il « fait corps » avec son engin ; peut-être plus pour les petits avions ; mais c'est plutôt du côté du vélo ou de l'équitation qu'on trouvera quelque chose de ce genre.

[#7b] Ajout () : Je suis d'ailleurs assez d'accord avec ce qu'écrit ici Piece of a Larger Me (et qui tend vers le transhumanisme) : ça fait tout à fait sens de considérer comme faisant partie de soi, au sens mental et non biologique, toutes sortes d'extensions ou d'additions au corps, ou simplement d'accessoires sur lesquels on a un contrôle fort : de la prothèse médicale à un engin qu'on contrôle directement, en passant par nos vêtements ou un éventuel exosquelette (<insérer ici une référence à Evangelion>) ; l'extension que nous donnons à ce moi est avant tout une décision personnelle d'identification ; après tout, il n'y a pas de différence profonde entre le fait que, quand je marche, mon cerveau puisse « décider » de commander (par un influx nerveux) à mes jambes de me porter à tel ou tel endroit, ou que, quand je conduis une voiture ou une moto, mon cerveau puisse « décider » de commander (par l'intermédiaire de mes nerfs, de mes mains sur le volant/guidon, et de l'axe de direction du véhicule) à l'engin de me porter dans telle ou telle direction : dans les deux cas (humain qui marche ou humain+véhicule qui roule), on a affaire à un système complexe et téléonomique (doté d'une volonté et agissant selon elle), ce n'est pas tellement important que dans le cas de l'engin le système soit « détachable ». Donc ça a tout à fait un sens logique, dans l'absolu, de s'identifier, temporairement, à l'ensemble du véhicule et de son conducteur : il se trouve que, psychologiquement, cette identification fonctionne mieux pour une moto que pour une voiture (au moins pour moi, mais comme je le dis à la note précédente et dans les phrases qui suivent, je pense que je suis loin d'être le seul). Peut-être que ceux qui n'ont jamais conduit de moto trouvent assez ridicule (le poussinet a levé les yeux au ciel) le concept que je puisse être l'ensemble conducteur+moto, mais je vous assure que cette impression peut être puissante, et je suis vraiment persuadé que ça joue un rôle important dans l'attractivité de la moto. Une confirmation que j'y vois est dans le texte que je lis ici chez Natacha, auquel je souscris totalement (et qui a été écrit avant cette entrée-ci, mais que, inversement, je n'avais pas lu avant d'écrire cette note, — donc nous sommes arrivés à la même conclusion indépendamment) : La raison principale [du fait que j'aime beaucoup], c'est la relation fusionnelle que j'ai avec la moto, du même type que celle que j'ai avec mes chaussures. Dans les deux cas, c'est un objet artificiel qui s'ajoute à mon corps pour l'améliorer au point d'être assimilé dans celui-ci, et non pas une entité extérieure que je dois utiliser.Surajout : voir aussi ce que dit ce motovloggueur, motorcycling is different from riding a car around in a lot of ways, but one of the best ways that it is different is that you and the bike are one: when you hop aboard a bike, you are essentially becoming a part of it, and nothing gets me going like correctly matching to my motorcycle (et il continue avec des remarques sur l'équipement que je partage aussi). ⁂ Mise à jour : Voir ce bout d'une entrée ultérieure pour une discussion et tentative d'analyse.

[#8] Pour éviter que ça risque trop de m'arriver, je vais prendre une moto plutôt inconfortable à conduire vite. 😉 Sans carénage et sans bulle de protection, la CB 500F devient rapidement fatigante aux vitesses maximales autorisées sur autoroute.

Bref, si d'autres sont tentés d'essayer de se mettre à la moto, je dis : faites attention, c'est un piège, vous risquez d'aimer ça.

Sur le déroulement de l'épreuve elle-même, il n'y a pas grand-chose à raconter : c'était une fois de plus au centre de Gennevilliers, nous n'étions que trois de mon auto-école à passer ce jour-là, deux pour la circulation et un pour le plateau. J'ai demandé à passer en premier, un peu pour exorciser la priorité à droite que j'avais grillée en juin ; mais aussi parce que j'avais un petit peu potassé le début de trajet très probable[#9] : histoire d'avoir une partie un peu connue le temps que le stress retombe et que je ne pense plus qu'à la route.

[#9] À savoir, le même que la fois précédente. J'y suis retourné en voiture (Car2go) entre temps. Évidemment, on peut faire plein de chemins à partir du centre d'examen de Gennevilliers, mais si on se dit que l'inspecteur veut emmener rapidement le candidat à un endroit où il y aura moins de risques d'embouteillages, et veut par ailleurs lui faire prendre l'autoroute, la trajectoire évidente est d'attraper l'A15 en direction de Cergy-Pontoise (mon moniteur a confirmé que c'est ce qui se produit le plus souvent : il s'agit donc d'une sorte d'échauffement, la partie intéressante de l'épreuve se produisant à partir du moment où on arrive sur l'autoroute, voire, qu'on en sort).

Voici une carte Google avec le trajet qu'on m'a fait suivre[#10], long d'environ 10.5km, en 25min (), de Gennevilliers à Sannois (où l'autre candidat à la circulation a pris le relais sur la moto et a ramené celle-ci à Gennevilliers par un trajet évidemment différent). Il n'y a rien de spécialement remarquable : juste un peu d'autoroute au début (mon moniteur nous avait conseillé montrez que vous atteignez rapidement la vitesse limite, et si vous avez l'occasion de faire un dépassement, faite le tout de suite, parce qu'on vous fera sortir vite, donc j'ai suivi ces instructions), quelques giratoires, priorités à droite (ou priorités en face quand on tourne à gauche… ahem…) et une route forestière inattendue à la fin dans un coin que j'imaginais uniquement résidentiel. Un exemplaire (ici) du petit « piège » que les inspecteurs du permis aiment bien, où on ne donne pas d'instruction au candidat à un endroit où il n'y a en fait qu'une direction autorisée et on vérifie s'il met bien son clignotant. Contrairement au jour où j'avais passé le permis B où j'avais relevé toutes sortes de petites erreurs et la fois où j'ai raté la circulation où j'en avais relevé encore plus et moins petites, là je n'ai vraiment pas trouvé grand-chose à me reprocher. Mon moniteur m'a dit à la fin que j'avais très bien conduit, il avait l'air tout content (et peut-être un petit peu surpris…), donc j'étais globalement confiant.

[#10] Encore une fois, j'encourage tous ceux qui ont passé le permis récemment, et qui sont capables de retrouver leur itinéraire exact, de le faire. (C'est d'ailleurs un exercice de mémoire intéressant, il me semble, de suivre des instructions pour naviguer dans un endroit qu'on ne connaît pas, et de chercher ensuite à retrouver — sur une carte et/ou Google Street View — ce qu'on a fait précisément. En l'occurrence, je n'ai eu aucun mal, mais je ne sais pas si ça signifie que j'ai un bon sens de l'orientation ou si c'est juste complètement normal d'y arriver.) Je pense qu'il est intéressant pour les gens qui vont passer le permis d'avoir quelques exemples de parcours réels (pour pouvoir les refaire à pied, en vélo, en scooter, en Google Street View, en voiture/moto s'ils ont déjà cette catégorie de permis, ou que sais-je encore, et avoir une idée du type de difficulté qu'on trouve dans ce coin).

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(mardi)

Le monde vraiment kafkaïen des services d'autopartage, et réflexions autour

Je publie deux entrées aujourd'hui, ce que je fais rarement, parce que là je craque vraiment. Cette entrée fait suite à celle-ci, mais je vais de toute façon refaire le point : j'y racontais que j'avais voulu tester (notamment pour éviter d'utiliser la tuture du poussinet) différents systèmes de location de voitures en libre-service à Paris : Moov'in, Free2Move, Car2go, Ubeeqo et possiblement d'autres (j'avais même commencé un petit tableau récapitulatif), avec un succès mitigé. La situation a considérablement empiré depuis, et ça vaut la peine de raconter, parce que c'est tellement kafkaïen que ça en devient drôle, et je pense qu'il y a une morale à tirer de cette histoire au-delà de la problématique de la location de voitures. (Sautez les items suivants si le détail de mes aventures ne vous intéresse pas et que vous voulez juste la morale de l'histoire.)

  • Le seul que j'ai vraiment pu essayer pour l'instant, c'est Moov'in. L'application Android est épouvantable, mais les voitures ne sont pas mal (c'est ce que je raconte un peu en détails dans l'autre entrée). Seulement, comme j'utilise des cartes de crédit à usage unique (numéros générés en ligne par le site de ma banque), j'ai généré un numéro par location, et au bout de trois l'application ne permet plus d'en ajouter ni d'en supprimer : je ne peux donc plus rien faire. Je pensais qu'un simple appel au service client débloquerait très vite cette situation, mais que non ! J'ai contacté le service client par mail, qui a commencé par ne pas répondre ; après plusieurs relances (et un coup de fil qui m'a dit d'envoyer un mail, ce que j'avais déjà fait), on a fini par me dire que ma demande était transmise au service concerné, et depuis, plus rien, malgré de nouvelles relances. Apparemment, supprimer des cartes de crédit est une opération tellement compliquée qu'en une semaine ils n'y arrivent pas. Donc, bref, je ne peux plus utiliser Moov'in jusqu'à nouvel ordre. [Xref Twitter : ici.]
  • Du côté de Free2Move, c'est un peu plus compliqué, il y a une application agrégatrice de plusieurs services de location (de voitures, scooters, trotinettes, etc. ; y compris les autres services de location dont je parle ici) parmi lesquels Free2Move semble jouer un rôle plus central. J'installe l'application, je photographie mon permis de conduire, l'application me dit que la validation prendra quelques minutes, rien ne se passe, quelques minutes plus tard elle me propose à nouveau de photographier mon permis, bref, une boucle infinie. Le week-end passé, je contacte le service client, qui m'explique que la photo sur mon permis est trop pâle (c'est vrai : je suis vraiment fantomatique, on devine à peine ma silhouette ; pourtant, cette photo a été prise en numérique par un photographe professionnel qui devrait savoir s'y prendre). Admettons, mais j'aurais au moins dû recevoir un message d'erreur m'expliquant la situation. Enfin, le service client valide manuellement le scan de mon permis. Mais plus tard je reçois un autre mail m'informant que je ne remplis pas les conditions d'éligibilité : en effet, Free2Move exige deux/trois ans d'ancienneté sur le permis (c'est-à-dire, de ne pas être en période probatoire). Que du temps perdu, donc. [Xref Twitter : ici, et ].
  • Du côté de Car2go, les choses sont encore différentes : l'application refusait de photographier mon permis, et j'ai compris que c'était parce que mon téléphone était rooté (et ce n'est peut-être même pas volontaire de la part de Car2go, c'est lié à l'utilisation d'un machin appelé Jumio — ceci dit, c'est le même Jumio qui sert à Free2Move et Free2Move n'avait pas ce problème, mais bon). Je me suis acheté un smartphone Android premier prix (un Nokia 1 Plus, c'est d'ailleurs vraiment épouvantable) pour pouvoir essayer quand même : il m'a laissé photographier mon permis, m'a demandé de prendre un selfie (ça a été très compliqué parce qu'il n'était jamais content de la qualité) et a envoyé les données au serveur. Peu après, je reçois un mail m'informant que : Nous avons bien reçu la photo du permis que vous avez soumis le 27.08.2019 17:17 malheureusement des problèmes sont survenus lors de son traitement : Les photos sont de mauvaise qualité ou floues — probablement pour la même raison que chez Free2Move, c'est-à-dire que la photo sur mon permis est extrêmement pâle. Bon, le mail en question laissait un espoir : Si vous ne parvenez pas à valider votre permis de conduire à l'aide de l'appli, envoyez-nous un e-mail <gnagnagna> ; ce que j'ai fait, et on va voir si ça réagit, mais pour l'instant rien, et je commence à ne plus y croire du tout. [Xref Twitter : ici et .]

Bilan : voici les cases qu'il ne faut pas cocher si on veut utiliser ces services d'autopartage, et que j'ai le malheur de cocher toutes :

  • être titulaire d'un permis probatoire (jeune conducteur, hum, je ne sais pas si jeune me décrit bien),
  • avoir une photo trop pâle (ou, je suppose, trop foncée, trop floue, etc.) sur son permis,
  • utiliser des numéros de cartes bancaires à usage unique,
  • avoir un téléphone Android rooté.

Je joue vraiment de malchance de tomber dans tout ça à la fois. Et qu'en même temps la tuture du poussinet n'ait même pas le droit de circuler parce qu'il y a un pic de pollution à Paris (enfin, ça ce n'est pas tellement une coïncidence, c'est surtout pour ça que j'insiste tellement en ce moment).

Maintenant ça peut sembler anecdotique de refuser les gens qui cochent des cases comme ça, mais il me semble que ça révèle, en fait, des problèmes vrais et profonds :

  • Les titulaires des permis probatoires n'ont pas le droit de louer ? Si le but est de diminuer la circulation automobile, d'encourager les gens à ne pas avoir de voiture personnelle, par exemple pour diminuer les émissions de CO₂, ce n'est vraiment pas malin : le moment où les gens vont acheter une voiture, c'est, justement, typiquement, juste après avoir passé leur permis ; donc si on veut les inciter à ne pas en acheter, il faut les fidéliser à ce moment-là. (Les entrepreneurs privés qui font tourner ces services n'ont, bien sûr, rien à faire de telles considérations, mais ce que je dis c'est que les pouvoirs publics, à commencer par la Mairie de Paris, devraient faire pression, avant de leur accorder des facilités sur stationnement en surface, sur le fait qu'ils tiennent compte de ces facteurs.)
  • Le problème avec la photo pâle sur le permis, c'est sûrement anecdotique ? En fait, je suis sûr que non : ça sent plein le nez l'application qui va aussi poser énormément de problèmes avec tous ceux qui ont la peau trop foncée, parce que le truc stupide qui analyse la photo va trouver que ça manque de contraste. Dans mon cas ça manque de contraste pas tellement parce que j'ai la peau très claire mais surtout parce que je n'ai pas eu de chance avec le photographe, ou avec l'Agence nationale des titres sécurisés, ou je ne sais pas comment je me suis retrouvé avec une photo si pâle ; mais je sais qu'il y a plein de gens qui ont des photos de pièces d'identité qui manquent de contraste parce qu'ils ont la peau sombre, et je suis sûr que les développeurs qui ont écrit et testé la vérification des photos par l'application n'ont pas trop dû penser à eux. (Oui, il y a un vrai problème de racisme par technologie interposée dans tout ce qui est reconnaissance faciale ou biométrie.)
  • Les cartes bancaires à usage unique ? D'accord, là je l'ai un petit peu plus cherché, et la faute a l'air partiellement du côté de ma banque Fortuneo (les cartes générées pour « usage unique » devraient pouvoir resservir tant que je reste en-dessous du plafond de paiement ; mais ce qui a l'air de se passer est que Moov'in fait une demande d'autorisation pour la caution, que cette autorisation expire, et que Moov'in essaye d'en faire une deuxième qui échoue parce que Fortuneo ne décompte pas l'expiration de l'autorisation dans le montant tiré de la carte — enfin, quelque chose de ce genre). Mais si on veut éviter tous les désastres de numéros de cartes bancaires qui fuitent en masse suite à des problèmes de sécurité (et les externalités qui vont avec), c'est une attitude vertueuse, et qu'il faut encourager, que de faire usage de numéros à usage unique.
  • Le téléphone rooté ? Là aussi, on peut me « reprocher » de vouloir garder un minimum de propriété et de contrôle sur des objets qui m'appartiennent, comme mon téléphone, plutôt qu'accepter un contrôle total de Google dessus. Mais il y a une problématique annexe : mon téléphone est rooté pas juste parce que je veux qu'il le soit, mais parce que j'utilise une version communautaire d'Android, LineageOS, qui a eu le bon goût de supporter ce téléphone un peu plus longtemps que le constructeur. Là aussi, c'est quelque chose qu'il faudrait encourager, parce que la sécurité est souvent moins pourrie et plus durable chez ces versions communautaires que que chez le constructeur d'origine qui n'a aucun intérêt à gérer le support pour les anciens modèles (cf. ce que je racontais ici) ; or la multiplication des problèmes de sécurité sur les téléphones et autres gadgets en circulation a des externalités énormes pour la société dans son ensemble.

Bref, mon histoire de location de voitures est peut-être anecdotique, mais cette anecdote fait ressortir certains des maux de notre société actuelle qui ne sont pas si anecdotiques que ça.

Je garde un petit espoir que Moov'in finisse par se réveiller et fasse quelque chose avec mes cartes bancaires, et/ou que Car2go accepte de valider à la main mon permis (dont je leur ai envoyé des scans de bonne qualité ainsi que ceux de ma carte d'identité), mais je me demande si je ne vais pas finir par aller (en transports en commun…) chez mes parents pour demander maman, est-ce que je peux emprunter ta voiture pour m'exercer à conduire ?, ce qui est quand même incroyablement ironique alors que mon copain a deux voitures et que j'ai tenté de m'inscrire à trois services de location différents.

Mise à jour : Car2go s'est réveillé et prétend m'avoir inscrit à leur service. Encore faut-il que je vérifie si ça marche effectivement ! • () Ça marche ! J'ai réussi à faire une petite location pour tester le système. Moralité : pour ce qui est de Car2go, il aura suffi de trouver un téléphone non-rooté, photographier le permis avec, prendre douze mille selfies avant que l'application soit contente, attendre un mail qui dit que la photo du permis est floue, écrire au service client pour demander qu'ils le valident manuellement (scans à l'appui), et attendre leur réponse (assez rapide il est vrai).

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(vendredi)

Sur quelques services d'autopartage à Paris

Peu après avoir passé mon permis B, je m'étais inscrit au système d'autopartage Autolib qui proposait des voitures électrique en location libre-service dans toute la proche banlieue de Paris[#]. Même si je n'en ai pas fait énormément usage, et même si les voitures étaient un peu cheap (et souvent sales), j'aimais beaucoup ce système simple et efficace : véhicules nombreux, stationnées dans des stations de recharge disséminées un peu partout, disponibles 24 heures sur 24, sans besoin de smartphone puisque la location et le retour se faisaient sur la borne (mais une application Android permettait de connaître les disponibilités), on pouvait prendre une voiture à n'importe quelle station et la laisser à n'importe quelle autre station, la mise en charge se faisait par les usagers eux-mêmes, bref, tout correspondait assez bien à ce que j'aurais imaginé moi-même. Mais Autolib a cessé d'exister en août 2018 suite à des pertes énormes (je ne sais pas si le système tel qu'il était conçu était intrinsèquement impossible à rendre économiquement viable, ou s'il était juste mal géré[#2]).

[#] Impossible de retrouver, un an après la fermeture du service (c'est terrifiant à quel point le web a la mémoire courte…), une carte de la zone qui étaient desservie par Autolib, mais Wikipédia affirme qu'il y avait 102 communes, et je sais que ça allait au moins jusqu'à Antony.

[#2] Je note cependant que le petit frère lyonnais d'Autolib, lui, existe toujours. Du coup, je suis terriblement jaloux des Lyonnais.

Toujours est-il que, ce service ayant disparu, tout un tas de concurrents sont apparus pour le remplacer : Moov'in, Free2Move, Car2go, Ubeeqo, Communauto — pour ne citer que quelques uns. La loi merveilleuse de la concurrence étant ce qu'elle est, on a remplacé un système plutôt bon (qui était vaguement un service public ou, au moins, appuyé par des pouvoirs publics) par N concurrents tous mauvais. Ne serait-ce que pour la raison évidente suivante : chacun de ces services ne donne accès qu'à environ 1/N des voitures en autopartage. Mais aussi parce que chacun ne s'est déployé que dans Paris intra muros (et peut-être une ou deux communes en périphérie immédiate), ce qui rend l'intérêt de la chose assez nul : pour circuler dans Paris, sauf en pleine nuit, le métro ou le vélo sont le plus efficace, ce n'est que quand on commence à aller en banlieue que la voiture a son intérêt.

Je disais néanmoins dans une entrée récente que je devrais essayer de faire le tour de ces services pour essayer de savoir ce qui est plus ou moins mauvais. J'ai essayé de m'y employer un peu, mais sans grand succès.

D'abord, il faut comprendre un peu la typologie, et déjà je ne suis pas très sûr. Je crois comprendre qu'il y a deux grands types de systèmes d'autopartage : l'autopartage flottant (ou en free-floating), ce qui veut dire que les voitures peuvent être garées n'importe où, on utilise une application pour les trouver, et on peut les rendre n'importe où ; et l'autopartage en boucle, qui ressemble plus à un système de location de voiture traditionnel mais automatisé et prévu pour de plus petites durées : on loue la voiture dans une station et on la rend dans la même station (contrairement à Autolib où on rendait la voiture dans une station quelconque, généralement différente de celle où on l'avait prise). Autolib, donc, était quelque part entre les deux (location en stations, mais retour à une station quelconque, donc flottant entre les stations), mais ce modèle ne semble pas avoir pris graine, probablement à cause de la difficulté à assurer un équilibre entre stations (enfin, ce problème se pose aussi dans le modèle complètement flottant).

L'intérêt de la location en boucle est, à mes yeux, essentiellement nul, même s'il faut dire qu'une partie de cette nullité est déjà couverte par la nullité d'un système qui ne marche de toute façon que sur Paris. Je veux dire, l'intérêt que je voyais à Autolib c'était de pouvoir faire inopinément un trajet autrement qu'en transports en commun (par exemple quand le poussinet et moi allions voir mes beaux-parents à Boulogne, il nous arrivait de rentrer en Autolib parce que les métros se faisaient rares ou que l'un de nous était fatigué ou que nous venions de récupérer quelque chose de pénible à transporter dans le métro) : s'il faut faire une boucle, cet intérêt disparaît — mais s'il faut de toute façon louer la voiture à Paris et la rendre à Paris, le fait de devoir faire une boucle n'est peut-être pas tellement pire, finalement pas (c'est juste merdique, pas deux fois merdique, vous suivez ?).

Le fait qu'il y ait tellement de systèmes concurrents fait qu'il est difficile de s'y retrouver (ou simplement de retenir les noms de ces concurrents), surtout que les FAQ sont mal faites voire introuvables. Je me suis fait un petit aide-mémoire de ce que j'ai retenu (n'hésitez pas à forker et à m'envoyer des merge requests, c'est pour ça que j'ai dumpé sur GitHub).

Le seul que j'ai vraiment testé (au sens où j'ai loué une voiture et circulé avec), c'est Moov'in, donc je vais surtout parler de ça. C'est Ada et Renault qui le proposent, et les voitures en location sont des Zoe (la voiture électrique phare de Renault). Leur site web parle aussi de Twizy (des mini-voitures), j'espérais vaguement pouvoir en essayer comme ça, mais, renseignement pris, en fait, il n'y en a pas en location (en tout cas pas maintenant — je n'ai pas compris si c'est qu'il n'y en a plus, qu'il n'y en a pas encore, ou autre chose). Ils proposent à la fois du free-floating pour la courte durée et de la location en boucle pour les durées plus longues (au moins 4 heures), mais je n'ai testé que le flottant, ne serait-ce que parce que les tarifs et conditions de la location en boucle sont tout bonnement introuvables, ce qui est hallucinant. Bref, le flottant : ça coûte 23.40€/h (ces fourbes donnent un tarif à la minute sous prétexte qu'ils facturent à la minute, mais je trouve ça limite malhonnête : pour que ce soit parlant, il faut donner le tarif à l'heure) ; mais on a la possibilité de mettre la location « en pause » quand on ne conduit pas, ce qui fait tomber son prix à 7.80€/h (l'intérêt étant que si on va en voiture faire une course ou une balade à un endroit hors de Paris, on peut mettre la location en pause pendant que la voiture est garée et c'est un peu moins exorbitant que si on devait payer pour tout l'intervalle — mais encore faut-il que le smartphone capte au moment de mettre en pause, ce qui n'est pas garanti dans un parking souterrain, et que l'application ne plante pas, ce qui n'est pas garanti non plus).

Tout se passe via une application smartphone (je crois que ces services d'autopartage nécessitent tous un smartphone, et c'est un vrai problème d'accessibilité ; pour Autolib on passait par une borne et une carte). Celle de Moov'in est, disons-le franchement, épouvantable : elle plante inopinément, l'ergonomie générale est pourrie, la carte montrant les voitures est très mal faite, on ne peut pas faire de recherche dedans, on ne peut pas gérer les moyens de paiement sans démarrer une location, etc. (Stupidement, Moov'in ne permet pas de faire quoi que ce soit depuis leur site web : tout doit passer par leur application mobile.) Une fois le véhicule trouvé et réservé, la partie location proprement dite est moins mal faite : l'application télécharge une clé depuis le serveur de Moov'in et se connecte à la voiture par Bluetooth (il faut donc activer le Bluetooth sur le téléphone pour commencer et arrêter la location — je n'ai pas vérifié s'il fallait qu'il soit activé en permanence), ça marche correctement et l'ergonomie de cette partie-là est acceptable.

Avant de commencer la location, on fait un petit « état des lieux » en signalant les dommages à la voiture (et en prenant en photo chacun d'entre eux), on en fait un pour terminer la location, et on a la possibilité de prendre des photos de l'état général (sièges avant et arrière, et les quatre coins) en échange de quelques minutes gratuites à la prochaine location. Je trouve ça raisonnablement bien pensé.

Un gag concernant le paiement : l'application n'accepte d'enregistrer que trois numéros de cartes bancaires différents, et semble demander une intervention du service client pour en ajouter au-delà ou même en effacer(!). Comme j'utilise des numéros de cartes à usage unique (mon idée était, pour chaque location, de créer une carte autorisée jusque un peu au-delà du montant de la caution), ceci pose problème : je n'ai pu faire que quatre locations (pour la quatrième j'ai pu réutiliser la troisième carte, Moov'in ayant déjà fait l'autorisation valable une semaine), maintenant il faut que je contacte le service client.

Les voitures ne sont pas très nombreuses, mais j'ai l'impression qu'il y en avait toujours une à moins de 10 minutes de marche de là où j'étais dans Paris quand j'ai eu la curiosité de regarder, donc ce n'est pas si mal. (L'application permet de réserver la voiture pendant 15 minutes le temps de s'y rendre.) J'ai l'impression que les voitures cessent d'être disponibles à une certaine heure la nuit (il est 1h du matin quand j'écris ceci, et l'application prétend que tous les véhicules sont loués), mais évidemment ils ne le disent pas clairement et ne vous disent pas de quand à quand ils opèrent ; en tout cas, c'est un gros défaut par rapport à Autolib, qui fonctionnait toute la nuit (et étant donné que la voiture à Paris est surtout intéressante quand les métros ne tournent pas et qu'il y a peu de circulation, c'est-à-dire, en pleine nuit !). Pour rendre la voiture, on la gare juste sur une place de parking publique (même payante) en surface à Paris et on utilise l'application pour verrouiller le véhicule et terminer la location : cette partie-là est un petit peu plus simple qu'avec Autolib, mais on ne met pas la voiture en charge, du coup Moov'in doit s'occuper de le faire eux-mêmes, c'est un gâchis absurde.

Les voitures elles-mêmes, des Zoe de Renault donc, sont faciles et agréables à conduire[#3], en tout cas pour de petites distances dans un environnement urbain ou péri-urbain. Elles sont confortables, en bon état (en tout cas à ce stade de déploiement du service), et propres. Elles sont raisonnablement équipées (il y a la clim ; il y a une caméra de recul et des capteurs de proximité, ce qui est agréable quand on est aussi nul que moi pour les manœuvres ; il y a un GPS de bord, un TomTom, même s'il faut noter que son ergonomie est à peu près aussi mauvaise que celle de l'application mobile de Moov'in, et même si mon poussinet a réussi à en planter un en un temps record ; il y a un autoradio, même si mon interaction avec l'autoradio a surtout été de chercher comment le couper). Mais franchement, pour un service d'autopartage, je les trouve trop grandes : le format d'Autolib me semblait plus adapté (et peut-être que des voitures deux places le sont encore plus).

[#3] Il faut dire que je n'ai pas l'habitude des automatiques, encore moins des électriques. D'un côté : ouah, pas de risque de caler, pour avancer il suffit d'appuyer sur l'accélérateur, c'est trop bieeeeen… ; de l'autre, comme le moteur a beaucoup de couple à petite vitesse, ne fait essentiellement pas de bruit et qu'on n'a pas de rapports à passer, je trouve qu'on arrive rapidement à se mettre en excès de vitesse si on ne regarde pas en permanence le compteur. Côté direction, la première que j'ai louée m'a semblé un peu molle (voire, floue), peut-être qu'elle avait un problème ou peut-être que c'est une question d'habitude, mais les suivantes m'ont beaucoup plu, au contraire.

Voilà à peu près ce que je peux dire au sujet de Moov'in. Le service Car2go me semblait possiblement plus intéressant (moins cher, voitures plus petites, possibilité de les mettre à recharger sur une borne ex-Autolib), mais mon expérience Car2go s'est très vite arrêtée : l'application refusait de me laisser valider (i.e., photographier) mon permis de conduire, prétextant des raisons techniques (cf. ici). Une petite enquête m'a rapidement permis de comprendre ce qui se passait : elle détecte que mon téléphone est « rooté » (ce qui veut en gros dire que j'ai le contrôle dessus, même si je ne sais pas ce qui est détecté exactement ; toujours est-il que comme j'utilise la version LineageOS d'Android, c'est plus ou moins automatiquement le cas) et refuse de faire cette étape sur un téléphone rooté (j'imagine que le sale petit connard fasciste qui a pris cette décision s'est dit qu'il n'y a que des vilains hackers qui rootent leur téléphone, et que ça leur permettrait de fournir une photo trafiquée de leur permis, ou quelque chose comme ça).

J'ai posé la question de façon faussement naïve au service client Car2go (enfin, au début c'était vraiment naïf parce que je n'avais pas encore compris ce qui pouvait causé le problème, mais ensuite j'ai continué de façon faussement naïve). Le service client a, évidemment, été complètement nul : ils ont commencé par me dire d'essayer la dernière version de l'application (alors que j'avais explicitement dit que c'était le cas) ou d'essayer avec un smartphone différent (alors que j'avais explicitement dit que je n'avais pas d'autre smartphone avec lequel essayer), puis ils m'ont redemandé le message d'erreur exact (alors que je leur avais recopié et envoyé une capture d'écran), puis ils m'ont demandé le modèle de mon téléphone et ma version d'Android (alors que j'avais donné ces informations dans mon premier message), je commence à en avoir un peu marre de parler à des gens qui ne savent pas lire[#4] et comme je ne sais pas s'ils peuvent faire quoi que ce soit au final, je ne sais pas si ça vaut la peine de continuer.

[#4] Situation malheureusement assez typique avec les services clients. C'est tout de même impressionnant le nombre de compagnies qui veulent tellement faire d'économies à ce niveau qu'on en arrive à des dialogues de sourds pareils. (À tel point que les rares exceptions se remarquent : par exemple, j'ai eu affaire au service client du service de vente par correspondance de la marque Quiksilver, et j'étais tout épaté de constater qu'ils lisaient ce que j'écrivais, même les parties entre parenthèses, et que je n'ai pas eu à réexpliquer dix fois quel était le problème.)

Je laisse de côté tout l'embrouillamini éthique sous-jacent (obliger les gens à avoir non seulement un smartphone, mais un smartphone verrouillé, pour pouvoir louer une voiture, est très gravement problématique pour plein de raisons). Il reste à décider ce que je veux faire maintenant :

  • décider que je ne veux pas avoir affaire à une boîte qui veut m'imposer d'avoir un smartphone verrouillé, et tirer un trait dessus,
  • persévérer techniquement (i.e., perdre un temps invraisemblable) pour trouver comment tromper l'application et lui cacher le fait que mon téléphone est rooté (ce qui est forcément possible en théorie, mais sans doute très difficile en pratique surtout que je connais très peu les entrailles d'Android ; la solution clé en main qu'on m'a proposé était d'utiliser un machin appelé Magisk qui sert justement à cacher le fait que des téléphones sont rootés, mais ça n'a pas fonctionné),
  • insister auprès du service client et espérer qu'ils acceptent que je leur envoie mon permis de conduire d'une autre manière (et espérer que l'application fonctionne ensuite pour le reste),
  • emprunter le téléphone non-rooté de quelqu'un d'autre et m'en servir pour franchir cette étape, et espérer que c'est la seule étape qui bloque (le message d'erreur suggère que c'est peut-être la seule partie qui posera problème, mais je ne sais pas s'il faut lui faire confiance),
  • variante de la stratégie précédente : sauvegarder mon Android actuel, remettre un Android non-rooté sur mon téléphone juste pour cette étape, et espérer que ça suffise, puis restaurer la sauvegarde (tout ça prendrait un temps considérable),
  • vendre mon âme au diable et acheter un deuxième smartphone que je ne rooterais pas et qui servirait (uniquement) à ce genre de choses, avec tous les emmerdements que ça implique (devoir non seulement le payer mais aussi transporter deux téléphones avec soi).

Je pourrais demander que feriez-vous à ma place ?, à la limite ce n'est pas tant pour demander conseil mais c'est presque une forme de test de personnalité. 😉

Toujours est-il que, pour l'instant, je ne peux pas utiliser Car2go, ce qui m'agace pas mal parce qu'il semble, au moins de loin, meilleur que Moov'in, ou en tout cas plus proche de mes attentes, si ce n'était cette décision fasciste sur les téléphones autorisés.

Ajout () : Peut-être que ce n'est même pas volontaire de la part de Car2go mais simplement lié au fait qu'ils utilisent un service appelé Jumio qui fait cette vérification — voir ici. • Par ailleurs, pas clair que Free2Move vaille mieux, voir cet autre fil.

Suite : voir cette entrée ultérieure.

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(dimanche)

Où je reçois des avis très différents sur ma conduite

Méta : Je reprends ici quelque chose que j'ai déjà raconté sur Twitter (parce qu'à la réflexion c'était plus à sa place ici, d'autant qu'on m'a déjà fait remarquer que les fils fort long sur Twitter sont déplaisants à lire) ; j'ai juste un peu développé en ajoutant quelques précisions et réflexions (essentiellement dans les notes numérotées, mais j'ai changé un peu la fin). • Par ailleurs, si vous trouvez que le feuilleton Ruxor passe le permis moto est particulièrement chiant surtout qu'il s'est transformé en Ruxor ne passe toujours pas le permis moto (et chouine à ce sujet) et que ça s'eternise : à qui le dites-vous ? <Insérer ici un emoji représentant l'exaspération mêlée de sarcasme.> • Néanmoins, je trouve intellectuellement intéressante la question de savoir quelle serait la variabilité mesurée si on demandait à deux inspecteurs du permis de conduire d'évaluer indépendamment l'un de l'autre (et selon le barème officiel) la performance d'un candidat au permis de conduire, et je me demande si la Sécurité Routière mène de temps en temps de telles expériences : je n'ai aucune réponse à ça, évidemment, mais l'observation que je rapporte ici donne au moins un petit indice sur cette reproductibilité.

Bref, le point de départ, c'est que j'ai fait deux leçons de conduite à moto à deux jours d'intervalle ( et ). Dans des conditions analogues (début d'après-midi, j'avais bien dormi, météo à peu près idéale), dans le même coin (autoroute A4 et ville du côté de Noisy-le-Grand), avec la même binôme, mais avec deux moniteurs différents, que je vais appeler É. et G.. Et qu'ils n'ont… pas tout à fait eu le même avis à mon sujet.

Jeudi, 3 heures[#] avec É. (le moniteur qui m'a présenté à l'examen il y a 5–6 semaines) : aucun problème particulier, le moniteur a dit à la fin qu'il trouvait que j'avais beaucoup progressé, que j'anticipais, que je prenais des initiatives. Il me met sur une liste[#2] d'élèves à contacter pour l'examen en août.

[#] Normalement, en leçon, nous sommes 3 ou 4 élèves à tourner sur 2 motos (c'est-à-dire que deux élèves conduisent pendant que l'autre ou les deux autres sont dans la voiture avec le moniteur, observent et écoutent les commentaires), donc chacun ne fait en circulation que les 2/3 ou 1/2 du temps que dure la leçon. Mais là, exceptionnellement, nous n'étions que 2, donc nous avons roulé 3h (moins le temps de partir et de rentrer).

[#2] Sans me faire de promesse que ce sera le cas (ils ont beaucoup d'élèves à faire passer, les inspecteurs sont moins disponibles en août donc les créneaux peu nombreux) ; mais bon, c'est déjà un progrès par rapport à ces 5 semaines où il ne s'est juste rien passé.

Hier, 1h30 (sur une leçon de 3h) avec G. (moniteur qui ne m'avait encore pas vu en circu parce qu'il fait surtout les séances le samedi et que je ne prends pas ces séances[#3]) : cette fois, je me fais engueuler comme du poisson pourri[#4], d'abord par l'oreillette, puis il nous fait nous arrêter sur un parking, me passe un savon devant les autres élèves : il explique je n'ai aucune anticipation, que ma conduite est carrément dangereuse, et il insiste que je n'aurais pas dû être présenté à l'examen, que je n'ai pas le niveau, que ça ne le surprend pas que j'aie raté. Je détaille plus bas ce qu'il me reproche, mais disons d'ores et déjà qu'il ne s'agit pas d'infractions au Code de la route : c'est, essentiellement, de freiner trop tard et donc trop fort aux intersections.

[#3] Je devais avoir une leçon le jeudi de la semaine d'avant, il y a eu une erreur de l'auto-école qui fait que la séance a dû être reportée, et j'ai accepté que ce soit le samedi après-midi.

[#4] Il est possible que j'aie une intolérance particulière pour le fait de me faire engueuler : peut-être qu'un observateur impartial ne cautionnerait pas l'usage des mots poisson pourri ici. Ce moniteur a tendance à disputer tout le monde sans que ce soit mal intentionné (ce qui ne veut pas dire que c'est acceptable pour autant, mais ne rentrons pas dans ce débat), et les autres élèves de cette séance en ont pris aussi (du genre mais roule, bordel ! on est sur une voie rapide qu'est-ce que tu fous à te traîner comme ça à 60 ?). Mais il n'y a que moi qui ai eu droit à ce sermonnage particulier.

Or, pour autant que je puisse en juger (et ma binôme semblait d'accord), j'ai conduit essentiellement pareil les deux jours. Et il n'y a de toute façon pas de raison de penser que mon niveau aurait autant varié en deux jours. Que ce soit É. ou G. qui ait raison dans son évaluation (ou que la vérité soit quelque part entre les deux), ce n'est pas normal qu'il y ait une telle différence d'appréciation. Des petites différences de jugement, oui, c'est inévitable ; mais un tel grand écart, il y a vraiment un problème.

Sur le coup, évidemment, je n'ai rien dit (au moins tant que la leçon dure, le moniteur a toujours raison, moi je ferme ma gueule et je m'applique à faire ce qu'on me dit) ; après la leçon, tout le monde est pressé de partir (surtout un samedi après-midi ; G. avait bossé 9 heures d'affilée, il en avait marre[#5] et je le comprends ; et il n'y avait plus personne à l'auto-école), je n'allais pas faire un scandale.

[#5] Bien sûr, ça peut expliquer pour partie sa mauvaise humeur générale. Mais les reproches les plus importants qu'il m'a fait sont précis et sensés, ne sortent pas de nulle part, et ne concernent que moi, ce n'est certainement pas simplement la mauvaise humeur qui parlait.

Mais je suis furieux : soit É. a raison et je suis furieux parce que ça fait un prétexte pour ne pas me laisser repasser l'examen (et je n'en avais vraiment pas besoin) ; soit G. a raison et je suis furieux parce qu'au bout de ~30h de leçons de circulation on découvre un problème que les deux autres moniteurs (É. et M.) ne m'avaient pas signalé, en tout cas certainement pas à ce niveau.

Peut-être que É., qui a apparemment plus d'expérience, sait que certains points se corrigent tout seuls… ou est blasé. Peut-être que G. est plus inquiet pour la sécurité de ses élèves ; ou peut-être qu'il était mal luné un samedi après-midi (mais cf. #5 ci-dessus) ; ou peut-être qu'il partait d'un mauvais a priori puisqu'il ne m'avait pas encore vu en circulation et avait juste l'information que j'avais échoué l'examen.

Sur le fond, il a commencé par m'engueuler N fois sur l'opportunité de changements de file sur l'autoroute (que j'ai faits ou qu'au contraire j'aurais dû faire). Un changement de file, c'est un judgment call : on peut toujours en discuter, peut-être que les décisions que G. aurait voulu que je prisse étaient meilleures, je pense quand même que mes choix étaient tout à fait défendables[#6].

[#6] Par exemple, quand il y a une voie qui s'insère depuis la droite, il est généralement bon d'essayer de passer sur la file plus à gauche ; mais si la file sur la gauche est elle-même assez dense, ce n'est pas forcément une si bonne idée. À l'approche un point d'insertion où j'étais déjà sur l'autoroute A4, j'ai regardé deux ou trois fois si je pouvais me décaler vers la gauche, je n'ai pas trouvé d'opportunité qui me satisfaisait, mais G. a estimé que ça ne posait pas de problème, et m'a reproché de ne pas l'avoir fait. L'ironie de l'histoire, c'est qu'alors que G. me distrayait en me disputant à ce sujet, si bien que je re-regardais sur ma gauche, quelqu'un qui voulait s'insérer essayait de me forcer le passage à ma droite, ce qui était exactement ce pourquoi je préférais me concentrer sur ma droite en premier lieu, et du coup G. m'a de nouveau disputé, de ne pas ralentir pour laisser passer le con qui cherchait à me forcer le passage à droite. • Pour prendre un autre exemple, un peu avant, alors que j'étais sur le périph (là les véhicules qui s'insèrent sont prioritaires), j'arrivais à un point d'insertion, j'ai ralenti pour essayer de me caler sur un point où il y avait un intervalle satisfaisant entre deux véhicules de la file qui s'insérait, G. a trouvé que je ralentissais trop et que même si je n'avais pas la priorité j'aurais dû m'imposer un peu plus.

Mais le principal reproche que m'a fait G., c'est de ne pas ralentir assez en amont à l'approche des intersections et giratoires, de ne pas suffisamment étaler ce ralentissement, et de freiner parfois trop fort trop tard. Ça c'est un reproche important et que je ne peux pas prendre à la légère : une collision par l'arrière c'est un accident très grave. Mais pourquoi les autres moniteurs ne me l'ont pas dit, alors ? Ils m'ont signalé un freinage un peu brusque de temps en temps, mais rien de systématique comme G. le prétend, et jamais aux giratoires (où j'ai l'impression d'aller tranquillement). Comment je tranche, moi ?

Pour les intersections avec priorité à droite, je suis tenté de croire G., pour être plus prudent, il faut que je freine plus en amont et plus longuement[#7] pour ne pas risquer de devoir piler et me faire percuter par l'arrière.

[#7] Bien sûr que je freine à l'approche des intersections (et plus ou moins selon que la visibilité est mauvaise) : je ne suis pas cinglé ! Tout est une question de mesure, de quand le faire et combien, pour se donner la capacité de s'arrêter en cas de besoin sans se faire taper par derrière.

Pour les giratoires, je suis beaucoup plus dubitatif. Normalement, je ralentis au frein moteur[#8], assez en avant du giratoire, avec rétrogradage en 2e vers la fin[#9] : ça permet d'avoir de la reprise si je peux passer, et de m'arrêter tranquillement (il me semble !) si je ne peux pas. Mais G. me dit que non, le frein moteur, ça ne suffit pas, il faut impérativement utiliser les freins à disque (au moins arrière), en dosant bien, à l'approche d'un giratoire, parce que si on arrive avec ne serait-ce qu'un filet de gaz, on ne pourra pas s'arrêter à temps si besoin, et parce qu'il faut que le feu stop s'allume pour prévenir les véhicules derrière. (Bon, les choses ont été compliquées par le fait que le contacteur de feu stop du frein arrière de ma moto était mal réglé, il ne s'allumait que quand je freinais vraiment fort, si bien que G. a cru que je ne freinais pas à des moments où je freinais bien du frein arrière. Mais il s'en est rendu compte et ça ne l'a pas empêché de m'engueuler.)

[#8] Très efficace sur la Honda CB-500. Mais peut-être que je subis aussi l'influence du poussinet et de son insistance sur le fait de freiner le moins possible.

[#9] Je pense bien que j'actionne le frein arrière lors du rétrogradage. Mais pas pendant toute l'approche au frein moteur.

Indépendamment de tout ça, l'engueulade limite humiliante n'est pas une technique pédagogique acceptable, et à plus forte raison quand c'est « en public » (devant les autres élèves). Même pour quelqu'un qui a fait quelque chose de très dangereux (sauf s'il est clair qu'il l'a fait sciemment) : il faut lui faire prendre conscience du danger, bien sûr, mais il y a des façons de le faire sans être blessant[#10]. Ce n'est pas juste qu'une engueulade est inutile : c'est même dangereux parce que ça va tourner dans la tête de l'élève plus que la perception des faits, lui faire perdre ses moyens et sa concentration — tout ce qu'il ne faut pas quand on conduit.

[#10] Comme je le disais plus haut, je suis peut-être chatouilleux à ce sujet. Peut-être que les moniteurs d'auto-école ont parfois du mal à comprendre que certains élèves ont plus besoin d'encouragements que d'engueulades. Surtout les moniteurs moto : peut-être qu'ils sont habitués à voir plein de petits jeunes qui n'ont peur de rien, croient tout savoir et veulent rouler des mécaniques — et qu'il s'agit de leur apprendre un peu d'humilité. Ou peut-être qu'ils (les moniteurs moto) flippent à fond de voir un accident se dérouler sous leurs yeux (et que, contrairement aux moniteurs auto, ils ne peuvent pas vraiment contrôler).

En tout cas, je ne sais plus où j'en suis, moi, et je ne sais pas ce que je fais. Mon espoir de repasser l'examen en août après « seulement » 2 mois a l'air de s'envoler (précisons que É. part ou est peut-être déjà parti en vacances, donc je suppose que ce sont les deux autres moniteurs qui vont faire le planning des examens en août), et indépendamment de ça, ma confiance en moi, qui est une des choses que j'ai beaucoup de mal à trouver, en prend un gros coup aussi[#11]. Est-il utile que j'attire l'attention des moniteurs sur cette différence d'évaluation, voire que je leur demande de se mettre d'accord ? Ou est-ce que je me contente de tenir compte comme je peux des principales critiques de G. (en modulant un peu selon les cas qui me semblent plus ou moins pertinents, c'est-à-dire plus sérieusement pour les intersections que pour les giratoires) ? Et comme toujours : à quel point est-ce que je décide que cette auto-école me fait vraiment trop tourner en rond et qu'il faut que j'en cherche une autre (ce qui n'est pas forcément évident non plus et a aussi des inconvénients considérables) ? A priori je suis sur l'idée de claquer la porte si en septembre j'en suis toujours au même point, mais il reste à savoir si je persiste à accumuler des leçons en août.

[#11] Bon, reconnaissons qu'à la fin de la leçon, G. (qui a bien dû voir que je faisais la gueule et que je n'ai essentiellement pas desserré les dents dans la voiture) a quand même dit qu'il pensait que ce ne serait sans doute pas compliqué à corriger.

Ajout () en réponse à des remarques qui m'ont été faites sur Twitter : Je pense que les moniteurs ne se rendent pas compte de l'impact de leurs remarques, surtout qu'ils n'ont pas trop l'habitude des élèves comme moi, âgés, manquant de confiance, et sans expérience des deux-roues. (J'ai déjà reproché au 3e moniteur, M., sa façon de disputer les élèves, dont moi, sur une séance qui s'était mal passée, il a été très correct dans sa réaction, a admis qu'il n'aurait pas dû perdre patience comme ça, et il n'y a plus eu de problème ensuite.) • Mais au-delà de l'effet sur mon ego de remarques ponctuelles, je me sens vraiment à bout de forces : ça fait un an que je suis là-dessus, l'investissement émotionnel, temporel et financier devient vraiment très lourd, et forcément je me demande régulièrement si c'est en vain. Donc qu'à chaque fois que je crois voir de la lumière au bout du tunnel je me prenne une baffe, forcément, ça me fait penser de plus en plus au mythe de Sisyphe. Et croire de moins en moins à « mais si, je touche au but ». (Après avoir obtenu mon plateau, ce qui n'avait déjà pas été sans mal, j'avais espéré passer la circulation en avril, je me suis rendu compte que j'avais plus de mal que je pensais, puis un moniteur a évoqué un passage en mai, puis on m'a fait comprendre que ça ne le ferait pas ; j'ai passé en juin, je me suis ramassé ; j'ai espéré repasser en juillet, le planning était trop plein ; j'ai espéré repasser en août, ça a l'air bien compromis. Si ce n'est pas fait en septembre, ça commence à devenir vraiment compliqué pour moi, l'assurance complémentaire que j'ai prise va expirer, mes finances ne vont pas s'arranger, je vais avoir plein de cours à donner, mon école va déménager — raison de passer le permis pour commencer ; ensuite le permis lui-même va être réformé, il faudra repasser un code spécifique, et l'épreuve de circulation sera rendue plus difficile, etc. Bref, il n'est pas acquis du tout que tout cet investissement ne soit pas en pure perte.) Alors évidemment, dans ces conditions, ça devient très difficile d'aborder les choses avec la sérénité pourtant nécessaire pour apprendre et progresser.

Mise à jour () : Leçon ce matin avec le troisième moniteur, M. : ça s'est plutôt bien passé (il m'a surtout reproché de manquer de rythme). Mais évidemment, les dates d'examen en août sont toutes pleines. ☹️ M. a un peu botté en touche quant à la différence d'appréciation par ses deux collègues É. et G. (ci-dessus) : il dit que j'ai un niveau irrégulier, et que c'est normal. Il n'a pas spécialement remarqué de problème d'allure aux intersections, mais un manque général d'anticipation et de confiance en soi. (OK, ça j'y crois volontiers, mais au bout d'un moment, si je ne fais pas de faute, il faut me présenter : le permis ne signifie pas qu'on conduise parfaitement !, mais qu'on ait le niveau pour progresser seul.) M. revenait de vacances, donc ne pouvait pas commenter sur la répartition des dates d'examen d'août, qui a été faites par É. (qui est parti en vacances) et G. Il a évoqué de possibles dates supplémentaires, mais j'y crois fort peu (on m'a déjà fait ce coup N fois).

Mise à jour : J'ai quand même fini par avoir ce permis.

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(lundi)

De la difficulté à s'entraîner à la conduite avec la voiture du poussinet

Peu après que j'avais passé le permis (voiture — enfin, celui que n'ai pas raté il y a 17 mois parce que je ne comprends pas les priorités à droite, quoi), mon poussinet a acheté une voiture, dans l'idée que je puisse la conduire pour m'entraîner. Mon idée à moi aurait plutôt été d'utiliser le système d'autopartage Autolib, mais le poussinet a insisté qu'il fallait ne pas perdre l'habitude d'utiliser une boîte de vitesses manuelle. Bref, il a acheté Tuture, une Golf IV de 2001, avec 201 000 km au compteur, qui, depuis, nous a beaucoup servi à faire du tourisme en Île-de-France[#] (cf. la liste dans cette entrée — et beaucoup d'autres avant). L'ennui, c'est que le poussinet s'est attaché à cette Tuture, notamment après l'avoir sauvée de la casse où un accident bête aurait dû l'envoyer (raconté dans cette entrée écrite juste après), il s'est pris de la fantaisie de la maintenir dans un état parfait, jusqu'à faire débosseler les petits chocs qu'elle avait pu prendre dans la carrosserie. Disons qu'il la traite un peu comme un collectionneur pourrait traiter une Ford Model T de 1909.

[#] À cause des règles anti-pollution, Tuture n'a, d'ailleurs, plus le droit de circuler à Paris en semaine, mais ça ce n'est pas vraiment un problème pour nous qui la sortons le week-end.

Le résultat, c'est que nous avons une voiture que j'ai peur de conduire parce que je me dis que mon poussinet m'en voudra terriblement (ou en fait, sera surtout tout triste) si je l'abîme ; et le poussinet est tout aussi peu rassuré que moi : c'est stressant pour nous deux et pas du tout agréable.

Ajoutons à ça que je n'aime pas conduire (en tout cas, pas une voiture, mais j'ai assez chouiné dans l'entrée précédente, je n'en ajoute pas), alors que le poussinet, au contraire, adore ça[#2], surtout quand il s'agit de sa Tuture : on devine facilement qu'à chaque fois qu'il s'agit de décider qui doit prendre le volant, nous trouvons tous les deux facilement des excuses[#3] pour oublier le principe que c'est moi qui ai besoin de pratiquer les priorités à droite.

[#2] Le jeu préféré du poussinet est sans doute celui d'avoir la consommation la plus faible possible (du genre 4.1L/(100km) sur un Paris-Rouen) ou sa variante dépasser les 1000km avec un plein (le réservoir fait 55L), en jouant sur une combinaison entre rouler lentement de façon générale, utiliser un rapport élevé pour être à bas régime, freiner le moins possible, ralentir dans les montées.

[#3] En plus des excuses (réelles ou inventées), il y a la complication que Tuture est rangée dans un parking (sous notre immeuble) dont la rampe est vraiment compliquée à monter ou descendre, et je n'ose pas le faire. (Le poussinet lui-même a tapé une fois ou deux. J'ai fait la montée à l'occasion, et c'était vraiment angoissant.) Une discussion avec des voisins a confirmé ce que les nombreuses traces aux murs laissaient penser : en fait, tout le monde tape régulièrement. Il faut croire que tout le monde n'a pas une Tuture qu'il est impératif de garder immaculée !

Et même quand c'est moi qui conduis, j'ai le plus grand mal à obtenir du poussinet qu'il joue à l'inspecteur du permis de conduire, i.e., qu'il se focalise sur la sécurité et le Code de la route et les priorités à droite. À la place, il passe son temps à me disputer sur des aspects de mécanique : que je place mal les mains sur le volant (ça c'est très vrai), que mes passages de vitesse ne sont pas assez fluides (et que je vais user l'embrayage de Tuture), que je n'ai pas immédiatement passé le rapport N+1 alors que le compte-tour dépasse les 2000tr/min (comment il va faire ses 1000km sur un plein dans ces conditions ?), que je rétrograde avant d'avoir assez ralenti (ça donne un petit coup dans le moteur !), que je ne relâche pas tout de suite l'accélérateur alors qu'il y a un feu rouge bien plus loin, que je passe un ralentisseur à plus que 20km/h (risque que ça tape !), que je n'évite pas tous les trous dans la chaussée, etc. Ou carrément à crier parce qu'il a peur que je percute la voiture à gauche, celle (garée) à droite, ou celle (qui freine) devant.

Il est clair que cette façon de me faire sans arrêt disputer, contribue au fait que je n'aime pas conduire. Déjà que ma formation au permis B a été pénible, ça n'arrange pas les choses.

D'autre part, le poussinet est d'avis[#4] que les voitures n'ont rien à foutre dans les villes et que si elles y sont elles devraient être limitées à 30km/h partout sauf sur quelques grands axes spécialement aménagés : donc il déteste rouler en ville et, quand il le fait, il va très lentement ; je suis moi-même assez de cet avis, mais le fait est que l'examen du permis (en tout cas quand on est inscrit en Île-de-France) se passe pour 90% en ville, et qu'on demande au candidat de rouler à la vitesse maximale autorisée sauf raison particulière (je ne veux pas gêner les riverains n'étant pas une raison prise en compte).

[#4] Peut-être influencé par la difficulté d'atteindre une consommation très basse quand on roule en ville.

Nous sommes quand même allés faire un tour hier du côté du lac d'Enghien[#5], histoire que je puisse réviser mes priorités à droite dans le coin (il paraît qu'il y a ça à Gennevilliers…) ; mais pour toutes les raisons listées ci-dessus, je ne suis pas convaincu que ç'ait été très formateur.

[#5] Malheureusement c'était le Barrière Enghien Jazz Festival, ce dont nous n'avions aucune idée : du coup, pour une balade tranquille autour du lac, ce n'était pas forcément le moment idéal. Enfin, peu importe.

Il est hors de question que je m'achète moi-même une voiture[#6] (le poussinet en a déjà deux, Tuture et Joujou qu'il est encore moins question que je conduise, ce qui est déjà une et demie de plus que ce dont nous avons raisonnablement besoin, et je compte m'acheter une moto si j'arrive à obtenir ce 𝣆𝡦𝩁 de permis avant la saint-glinglin de l'année où tous les véhicules à moteur seront interdits — ah zut, j'avais décider de ne plus chouiner). Mon idée initiale d'utiliser Autolib est mise à mal par le fait qu'Autolib n'existe plus. Il existe, cependant, trente-douze remplaçants d'Autolib (j'ai entendu parler, au moins, de Moov'in, Free2Move, Car2Go, Ubeeqo, Drivy, Communauto, et j'en ai certainement oublié ; et je n'ai pas compris si Mobilib était la même chose qu'Ubeeqo ou encore autre chose) : trop pour que j'arrive à m'y retrouver ou que j'aie la patience d'essayer de trouver sur chacun les informations précises qui m'intéressent (notamment sur les conditions d'inscription, les formalités de location, la difficulté à trouver un véhicule et à le garer, l'aire couverte, les prérequis sur le téléphone utilisé pour faire la location, le fonctionnement de l'application en question et les permissions qu'elle demandera sur le téléphone, les conditions de caution, franchise et assurance, les possibilités de paiement et notamment la possibilité d'utiliser des cartes bancaires à usage unique, etc., bref, le genre de choses qu'on ne trouve en général qu'en tout petits caractères). Si quelqu'un a des renseignements généraux (ou des idées d'endroits où en trouver) sur certains d'entre ces services, je suis preneur.

[#6] Je n'ai pas non plus envie d'utiliser un scooter (essentiellement par peur que ça embrouille dangereusement ma mémoire procédurale d'avoir le frein arrière plutôt que l'embrayage à la main gauche). Quant aux motos de <50cm³ (que j'aurais le droit de conduire et qui suffiraient s'il s'agit juste de s'exercer à respecter le Code de la route et les priorités à droite en ville), j'apprends avec une certaine perplexité que ça existe (cf. ce fil Twitter), mais ça coûte essentiellement aussi cher qu'une « vraie » moto et ça ne doit pas se trouver en location. Enfin, les vélos sont dans une catégorie différente (ils ont des pistes ou bandes réservées, des sas dédiés aux feux, etc.).

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(vendredi)

Et maintenant, un peu de chouinage

J'ai commencé à écrire une entrée de maths sur la topologie sans points (la théorie des cadres(?) et locales), je me suis rendu compte pour la 696729600e fois que ce que je pensais pouvoir expédier en peu de lignes s'étend sur un nombre totalement invraisemblable de pages, je commence à trouver le sujet d'autant plus fastidieux que je traîne à écrire ce texte, et je m'énerve sur le fait que je ne finis jamais ce que je commence.

Et là, je me rends compte que je ne finis jamais ce que je commence est peut-être un avertissement que j'aurais dû prendre au sérieux avant de me mettre à prendre des cours de moto. C'est parti pour du chouinage de ma part à ce sujet, donc : si vous n'aimez pas les chouineurs, allez voir ailleurs (mais si vous n'aimez pas les chouineurs, qu'est-ce que vous foutez à lire mon blog, aussi ? allez plutôt sur YouTube, c'est un site de winneurs et d'influenceurs, ça, YouTube, — les blogs c'est ringard et c'est fini).

Où est-ce que j'en étais ? Ah oui, j'ai loupé mon permis parce que je suis nul, mais ça vous le saviez déjà. Je pourrais renvoyer à cette entrée déjà écrite et dire multipliez tout par dix, mais je n'aurais pas le plaisir de chouiner, alors il faut que je tourne les choses différemment.

L'information nouvelle (enfin, pas tellement nouvelle, je m'en doutais, mais j'en ai confirmation), c'est que c'est extraordinairement long de le repasser. Au moins en été. Parce que c'est en été que :

  • le plus de gens se disent qu'ils vont passer le permis moto (ben oui, c'est l'été, il fait beau, il faut en profiter, et ils peuvent prendre quelques jours de congés pour ça, et peut-être en prendre aussi après pour en profiter une fois qu'ils auront le permis et la moto),
  • les moniteurs d'auto-école et les inspecteurs du permis de conduire sont le moins disponibles parce que, surprise, eux aussi prennent des vacances.

Je sentais bien le coup venir et c'est pour ça que moi je m'étais inscrit en octobre. En pensant que j'aurais fini à temps pour l'été. C'est à peu près aussi con que quand je promets d'écrire une entrée de blog sur les octonions en février 2012 alors que j'arrive péniblement à en publier la première partie trois ans plus tard. Soyons réalistes : j'ai pris six ans pour faire ma thèse, j'aurais plutôt dû me demander si j'aurais ce permis avant ma retraite ou avant ma mort (ou avant l'épuisement de mes finances), pas penser que je pourrais l'avoir avant l'été.

Bon mais là l'essentiel du délai ne dépend plus de moi. Il y a trois pipelines à traverser :

  • s'inscrire à de nouvelles leçons (parce que l'auto-école, bien sûr, ne représentera pas un candidat s'il n'a pas pris de nouvelles leçons, même si on ne m'a pas donné un minimum à ce sujet),
  • convaincre les moniteurs qu'on est prêt à être envoyé une nouvelle fois à l'examen,
  • avoir une date d'examen.

Le premier et le troisième sont complètement saturés, le deuxième est incompréhensible. Factuellement, j'ai loupé mon permis le , le moniteur a refusé de me laisser m'inscrire à de nouvelles heures de conduite tant que je n'avais pas la confirmation officielle de cet échec, ce qui nous amène le , et à cette date-là, même en disant que j'étais disponible n'importe quand, la première leçon que je pouvais placer était ce matin, , donc compter trois semaines complètes pour le premier pipeline. Ne sachant pas quoi penser des deux suivants, j'ai placé trois séances de conduite : voulant ce matin en ajouter une, le délai était passé à 24 jours. Concernant le troisième pipeline, l'auto-école a un planning d'examen (sous forme de petites fiches bristol insérées dans un support mural), et il est déjà complètement plein pour le mois de juillet (j'ai cru compter dix journées prévues, avec pour chacune dix « slots » — sachant qu'une présentation plateau coûte un « slot » et une présentation circu en coûte deux) ; un moniteur a dit qu'il demanderait des créneaux supplémentaires en juillet, mais je suppose que toutes les auto-écoles en réclament et que la Sécurité routière ne multiplie pas les petits pains : comptons donc quatre semaines au bas mot pour ce troisième pipeline. Le deuxième est incompréhensible, donc je n'en sais rien (initialement ils m'ont fait attendre environ deux mois avant de me considérer comme prêt à passer l'examen ; j'ose espérer qu'on ne va pas me faire prendre une nouvelle fois autant de leçons, mais franchement, l'évaluation du niveau d'un élève est un signal très bruité et on m'a clairement dit priorité aux premières présentation pour l'examen).

Je précise que je ne raconte tout ça pas uniquement pour le plaisir de chouiner, mais aussi parce que c'est une information que j'aurais bien voulu trouver en ligne, le temps qu'il faut en pratique pour une nouvelle présentation du permis, et c'était vraiment impossible d'avoir le moindre renseignement dans ce sens, alors je fais ma petite mission de renseigner le Grand Oracle Omniscient Gardien du Livre de l'Entendement.

Bref, je suppose que je dois me considérer comme chanceux si j'ai une date dans la première quinzaine d'août. (J'aurais vraiment voulu passer avant mon anniversaire, tant pis.) Et je vais être encore plus stressé la deuxième fois en me disant que si je rate à nouveau j'en ai pour un temps invraisemblable (et qu'il y a une réforme du permis qui vient qui le rendra encore beaucoup plus dur, et qui saturera encore plus les délais de passage, etc., etc.).

Il y a, donc, une partie de moi qui me crie que je n'aurai jamais ce permis et que je suis con de m'obstiner. Que je suis victime d'une sorte de scam. Vous savez, le type d'arnaques (il en existe quantité de variantes) qu'on peut trouver, par exemple, dans une fête foraine[#] : on vous propose de faire un truc qui a l'air facile, mais qui est en fait impossiblement difficile ; ou, de façon plus astucieuse, peut-être que le premier niveau est faisable, ou il y a quelque chose qui vous donne l'illusion d'un progrès, vous persuadant ainsi de mettre toujours plus d'argent pour gagner un lot qui, plus vous mettez d'argent dedans, plus il vous semblera désirable (sophisme de l'escalade d'engagement) et moins vous aurez envie d'arrêter (sophisme des coûts irrécupérables).

[#] À ce sujet, j'avais bien aimé cette vidéo décrivant certains jeux typiques de fêtes foraines et combien ils s'apparentent à des arnaques.

Alors non, je ne pense pas sérieusement que je sois en train de me faire arnaquer au sens où il y aurait quelqu'un de malicieux dans l'histoire (la seule partie possiblement suspecte d'être malicieuse serait l'auto-école mais je ne veux pas me couper sur le rasoir d'Hanlon). Mais je peux être en train de m'auto-arnaquer, en quelque sorte, dans la poursuite d'un but inatteignable (pour moi), et qui semblerait d'autant plus désirable que les efforts mis à l'atteindre augmentent.

J'avais écrit la chose suivante :

Le piège dans lequel je suis tombé en commençant à apprendre à faire de la moto, en fait, c'est que j'ai découvert que j'aimais ça (alors qu'au début c'était un peu juste une expérience pour voir), et que du coup, maintenant j'ai envie d'en faire, et pour ça, il faut que je le passe, ce permis. (En comparaison, pour la voiture, j'ai juste eu confirmation du fait que je n'aimais pas, donc il est sans doute logique que le stress ait été moins important.) D'ailleurs, plus le temps passe et plus je trouve pénible de conduire une voiture, et c'est le contraire pour une moto.

— Mais peut-être que le fait que ça me plaise est, en fait, une rétro-justification de l'investissement que j'ai mis dedans. Ça mérite au moins qu'on se pose la question : pourquoi Sisyphe s'obstine-t-il à pousser son rocher, au juste ? pourquoi ne dit-il pas juste f*ck this! pour partir voir ailleurs si Zeus n'y est pas (ou, s'il ne peut pas partir, au moins rester au pied de son rocher à bouder et à refuser de le pousser). Il paraît qu'il faut imaginer Sisyphe heureux : est-ce que la raison de ce bonheur est la fierté qu'on peut ressentir devant l'obstination absurde consistant à répéter inlassablement la même tentative en se disant je refuse d'abandonner ! (et je ne peux quand même pas abandonner maintenant, après autant d'efforts) ? La question mérite au moins d'être posée.

Bref, je refuse d'abandonner, mais je ne suis pas sûr que ce soit très malin de ma part.

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(mercredi)

Débriefing d'un échec au permis moto

J'écris cette entrée pour me défouler. Mes réactions spontanées quand je suis furieux contre moi-même après un échec sont variées mais toutes contre-productives : me recroqueviller dans mon coin pour bouder que le monde est vraiment trop zinjuste, répéter avec acharnement la chose qui a échoué [lorsque ça a un sens] comme si le monde devait finir par me donner raison, tout abandonner, m'auto-flageller en me traitant de dernier des nuls, voire, chercher à me faire du mal pour me punir, ou au contraire faire comme si rien ne s'était passé et que je n'avais jamais voulu essayer de faire la chose sur laquelle j'ai échoué — ou parfois tout ça successivement dans un ordre varié, voire, simultanément. (Je suppose qu'il y a une correspondance avec les étapes du modèle Kübler-Ross.) Je ne suis pas, ce soir, d'humeur, à essayer de faire mieux qu'une combinaison de ces réactions idiotes, mais écrire une entrée dans mon blog a au moins une vertu cathartique. Avant ça, je suis allé faire un tour à la salle de muscu pour calmer mes nerfs : mauvaise idée, parce que, à jouer au bourrin pour passer ma colère, je ne suis pas passé loin de me faire une nouvelle blessure qui n'aurait certainement pas arrangé mes affaires, ni mon humeur. Au moins, à ranter sur mon blog, je ne risque pas de me faire trop mal, juste de passer pour un guignol mais pour ça the train has long left the station. Mon moniteur, lui, m'a conseillé de me bourrer la gueule [sic], mais je ne bois pas, alors à défaut de rant d'ivrogne je vais faire un rant de sobre. (Le but secondaire est que, en écrivant jusqu'à 4h du matin, je serai assez fatigué pour arriver à dormir malgré l'énervement.)

Bref, on aura compris que je me suis loupé en beauté en passant mon permis. J'aurai les résultats officiellement vendredi matin, mais à moins que l'inspecteur se soit trompé et ait appuyé sur le mauvais bouton sur la tablette, il n'y a aucun doute que je suis recalé. Pour faire bref, j'ai perdu tous mes moyens : j'ai fait une faute éliminatoire, essentiellement un refus de priorité, immédiatement en sortant du centre d'examen (et quand je dis immédiatement en sortant, c'est à 65m de la grille), et ensuite les autres erreurs se sont accumulées.

[Bilan d'échec du permis de conduire]Mise à jour () : L'inspecteur m'a mis la note E (éliminatoire) dans la catégorie appliquer la règlementation et 2 dans toutes les autres catégories (plus 2 points au détail, pour un total de 16/27, mais peu importe). Le commentaire est : Refus de priorité à droite entraînant un danger immédiat. Risque de collision. (je suppose que c'est un texte standardisé).

Pourquoi ? Je ne sais pas. C'est d'autant plus irritant que mes trois dernières leçons s'étaient extrêmement bien passées, mes moniteurs n'avaient essentiellement rien à me reprocher, et pareil pour le chemin jusqu'au centre d'examen (il faut bien que des élèves conduisent les motos à Gennevilliers, et je me suis porté volontaire), qui était pourtant sacrément plus problématique que le petit parcours que l'inspecteur m'a fait faire.

Le stress a dû jouer, je suppose. Ça faisait une semaine que je stressais à l'idée de passer ce permis à tel point que j'en dormais très mal, et les deux derniers jours j'en avais aussi l'estomac complètement noué. Comme je le disais à propos du stress dans l'entrée que j'avais écrite après mon passage du permis B il y a un an et demi, ce stress n'est pas évident à expliquer. Après tout, si on gagne quelque chose en réussissant l'examen du permis (à savoir, le droit de conduire), on ne perd rien en le ratant (sauf des frais de présentation qui, franchement, ne sont pas mon souci) ; mais en fait, cet argument est bidon : le stress à l'idée qu'on pourrait ne pas gagner quelque chose est aussi fort que celui qu'on pourrait perdre quelque chose.

J'ai déjà dû l'écrire, mais le piège dans lequel je suis tombé en commençant à apprendre à faire de la moto, en fait, c'est que j'ai découvert que j'aimais ça (alors qu'au début c'était un peu juste une expérience pour voir), et que du coup, maintenant j'ai envie d'en faire, et pour ça, il faut que je le passe, ce permis. (En comparaison, pour la voiture, j'ai juste eu confirmation du fait que je n'aimais pas, donc il est sans doute logique que le stress ait été moins important.) D'ailleurs, plus le temps passe et plus je trouve pénible de conduire une voiture[#0], et c'est le contraire pour une moto.

[#0] Et je commence à me dire que j'ai trouvé mon permis B dans une pochette surprise, parce que non seulement je préfère mais je pense aussi que je conduis objectivement mieux une moto qu'une voiture (mes trajectoires sont plus précises, ma maîtrise de l'embrayage et du passage des vitesses est incomparablement meilleure, je suis beaucoup plus alerte et attentif à ce qu'il y a derrière…). Une moto étant aussi objectivement plus dangereuse pour son conducteur, il est sans doute normal qu'on en demande plus, mais le fait est que j'aurais commis les mêmes fautes au permis B et sans doute encore d'autres.

Le truc avec le stress, c'est qu'il sera forcément bien pire la fois suivante.

Bon, et en fait il y a vraiment des choses qu'on perd. On perd l'argent qu'on va mettre pour prendre les leçons pour aller quand même jusqu'au bout (au nombre astronomique d'heures où j'en suis je préfère ne vraiment pas réfléchir à combien tout ça m'a coûté). Mais aussi le temps que ça va prendre de le repasser, et je crois comprendre[#] que les auto-écoles traînent particulièrement les pieds pour les nouvelles présentations après un échec parce qu'elles ont très peu de places pour ça (et donc on perd quelque chose après un échec au permis, c'est le droit à être considéré comme « première présentation » du point de vue de l'attribution des places aux auto-écoles). Et accessoirement, on perd la face à avoir échoué à un examen qui a 92% de réussite et que personne ne rate jamais (vous connaissez quelqu'un qui a échoué au permis moto ? non, c'est normal, ça n'arrive jamais). Et à devoir expliquer à tout le monde comment on a pu se planter à une priorité à droite. Bon, tout ça ce ne sont pas forcément des motifs de stress a priori, mais des motifs de colère a posteriori certainement.

[#] Je crois comprendre, parce que, comme personne ne rate ce permis, personne ne parle non plus de ce qui se passe quand on le rate ou des délais pour le repasser. Un point Google-fu en chocolat à celui qui arrivera à trouver un témoignage raisonnablement récent de quelqu'un ayant passé le permis A2, ayant échoué, et qui raconte combien de temps il a dû attendre ensuite pour le représenter : moi, en tout cas, je n'ai rien trouvé de la sorte.

Alors voilà, pour en dire un peu plus sur le fond : nous étions trois candidats de l'auto-école à la circulation ce jour-ci. Nous sommes donc partis à cinq (les trois candidats, le moniteur-accompagnateur et l'inspecteur, un candidat sur la moto à tour de rôle et les autres dans la voiture avec le moniteur qui conduisait et l'inspecteur qui guidait) sur un trajet en boucle, dont j'ai fait la première partie. Le parcours qu'on m'a fait faire est celui-ci, de Gennevilliers à Argenteuil. (Je prends la peine de le mettre en ligne parce que ça m'agace à quel point il est difficile de trouver des exemples de vrais parcours suivis lors des épreuves de circulation du permis : les candidats ne font jamais l'effort de retracer précisément le leur.) Florilège d'erreurs, donc :

  • Juste en sortant du centre d'examen, j'arrive à cette intersection ; j'arrive par le sud, c'est-à-dire par la gauche de cette photo Google Street View, et j'ai pour consigne de tourner vers la gauche, c'est-à-dire vers l'ouest, c'est-à-dire vers le fond de la photo : d'autres voitures arrivent en face (du nord, donc de la droite de la photo) et elles veulent elles aussi tourner à gauche. Notons que le carrefour est « à l'indonésienne » sur la voie principale (est-ouest) : moi et les voitures en question sommes transverses à cette voie, donc nous devons nous tourner autour. (Je me rends compte que les descriptifs des carrefours à l'indonésienne omettent toujours de parler de ce qui se passe quand on vient de la direction transverse.) Je me suis, correctement mis sur la voie la plus à droite (i.e., la plus au nord de l'axe est-ouest, à droite sur la photo et orienté vers le fond), mais ensuite, j'ai trop avancé. (Les deux rues nord-sud ne sont pas coaxiales, ce qui peut expliquer mon erreur.) Je n'ai pas obligé de voiture à s'arrêter, mais je pense qu'elles ont dû modifier leur trajectoire pour passer plus à droite (pour elles). L'inspecteur m'a dit dans l'oreillette : Monsieur, je vous rappelle que quand vous tournez à gauche vous devez céder le passage aux véhicules arrivant en face, ce qui signifie, en fait, vous venez de faire un refus de priorité, c'est éliminatoire. Mais sauf problème de sécurité grave, l'épreuve doit être menée à son terme même en cas de faute éliminatoire.
  • Deux fautes moins graves mais néanmoins significatives immédiatement après. D'abord, l'inspecteur me donne la consigne de suivre Gennevilliers, et quand j'arrive ici, je vois le panneau annonçant Gennevilliers avec une flèche vers la gauche et je mets un clignotant à gauche ; mais en fait, le panneau est pour l'intersection suivante (pour l'endroit même, il aurait été en forme de flèche) ; j'ai coupé mon clignotant, mais c'est une faute de mettre un clignotant à tort. Ensuite, ici je devais prendre à gauche (pour Gennevilliers, donc) et je me suis placé sur la voie tout à gauche plutôt que la voie la plus à droite parmi celles qui autorisent à aller à gauche : ça aussi c'est considéré comme une faute.
  • Ensuite j'ai pris l'autoroute, je crois que je n'ai pas fait de faute particulière à cette occasion. J'ai commencé à faire un dépassement mais je n'ai pas eu le temps avant la sortie et j'y ai renoncé, mais ça ce n'est pas considéré comme une faute.
  • En sortant de l'autoroute (l'inspecteur m'avait demandé de suivre Enghien-les-Bains), j'ai mis mon clignotant à droite pour sortir (ici), puis je l'ai laissé pour une sortie dans la sortie (ici), et j'ai dû le couper environ ici une fois que j'étais sur la voie de droite. Mais en fait, arrivant ici, j'aurais dû laisser, ou remettre, mon clignotant droit, parce que je rejoins l'axe principal en tournant à droite : l'inspecteur m'a dit n'hésitez pas à signaler votre direction, et c'est encore une faute.
  • Ensuite, ici, je me suis arrêté, et sans doute un peu brutalement, pour un piéton, alors qu'il avait un feu piéton rouge (le piéton n'a d'ailleurs pas traversé). Comme le passage piéton était assez loin derrière mon propre feu vert et que ce dernier n'avait pas de passage piéton à son niveau, je n'avais pas fait le lien. (Bizarrement, là, l'inspecteur n'a pas fait de commentaire.)
  • Après un petit tour où je crois ne pas avoir fait de faute, l'inspecteur m'a fait revenir par ici : c'est une priorité à droite, donc je suis prioritaire sur les voitures arrivant de la gauche, mais je me suis arrêté sans m'imposer jusqu'à ce qu'il y ait un trou dans la circulation venant de gauche. (En fait, là je peux faire un reproche à nos moniteurs : ils attirent beaucoup notre attention sur les priorités à droite dans la situation « je circule sur un axe important et il y a une petite rue sur la droite dont il faut se méfier parce qu'elle est prioritaire » mais ne nous ont essentiellement jamais mis dans la situation où on vient, justement, de cette petite rue et où il faut se rappeler qu'on est prioritaire dans un sens et oser s'imposer — en vérifiant qu'on peut le faire et qu'on est bien vu — sur les voitures venant de la gauche.) Là non plus, l'inspecteur n'a pas fait de remarque.
  • Et l'humiliation finale : j'étais arrêté à ce feu, l'inspecteur me dit de tourner à droite à l'intersection, et je mets mon clignotant à droite sans prendre garde au fait qu'il y avait un sens interdit. Bon, là, l'inspecteur n'avait pas le droit de me faire ce coup : les textes sont clairs sur le fait qu'on ne doit pas demander au candidat quelque chose d'interdit (on peut lui demander tourner à droite dès que possible, par exemple, mais pas tournez à droite à l'intersection si c'est interdit) ; je pense que c'était une erreur de direction de sa part, et de fait, rapidement après il a dit continuez tout droit (j'ai coupé mon clignotant et en fait c'était à l'intersection suivante qu'il s'agissait de tourner), mais que ce soit une erreur de l'inspecteur ou une façon (interdite) de me tester, le candidat qui est prêt à tourner dans un sens interdit n'incite pas à la clémence pour ses fautes précédentes.

Je pense que l'inspecteur a décidé d'arrêter les frais et a mis terme à ma partie de l'épreuve plus tôt que prévu : je n'ai pas noté exactement quand j'étais parti, mais ça devait être environ 13h45, et j'ai fini à 14h00 alors que l'épreuve est censée durer 25min de conduite effective, et, de fait, les autres candidats après moi m'ont semblé circuler plus longtemps. (J'étais trop occupé à pleurer dans mon coin pour noter le trajet qu'ils ont fait, c'est bête ; mais je sais qu'on est partis en direction du Plessis-Bouchard et de Saint-Leu-la-Forêt et revenus à la fin par l'A15 et le port de Gennevilliers.)

Une fois de plus, je ne comprends pas la mauvaise réputation qu'ont les inspecteurs du permis de conduire. Celui auquel j'ai eu affaire aujourd'hui (et c'est la troisième personne de cette profession que je vois, donc) était d'un professionnalisme irréprochable (sauf si la consigne de tourner à droite sur un sens interdit était volontairement donnée pour me piéger) ; en tout cas, il a bien respecté la consigne officielle de rester parfaitement neutre dans sa façon de s'adresser aux candidats.

Quant à mon moniteur, il a pour principe de ne pas émettre d'avis sur les examens auxquels il assiste, pour ne pas donner de fausse bonne ou mauvaise nouvelle. Je peux comprendre ça. Ce qui m'agace plus, c'est qu'il pousse le principe à refuser que je m'inscrive à des nouvelles heures de conduite jusqu'à ce que j'aie le résultat officiel de l'examen d'aujourd'hui. (Et j'ai eu beau lui dire que je voulais bien m'engager à faire et à payer ces leçons même dans le cas où je serais inexplicablement reçu, il n'en a pas démordu.)

Bon, au moins ça me laisse l'occasion de me poser la question de savoir si je veux continuer dans cette auto-école ou essayer d'en trouver une autre. (Je n'ai pas spécialement à me plaindre de mon auto-école — les moniteurs me semblent plutôt bons, les motos sont neuves, et elle a l'avantage d'être au bout de ma rue — mais elle est un peu victime de son succès, et du coup les disponibilités pour les cours ou les examens sont toujours problématiques.) Si quelqu'un a des conseils à cet égard, je suis preneur.

PS / Ajout : Pour répondre indirectement à une remarque qu'on m'a faite, bien sûr que je ne suis pas le premier à rater un permis ; c'est déjà plus compliqué d'en trouver qui se font éliminer au bout de 65m ; mais réussir cet exploit après 112 heures de formation, ça demande un degré de nullité sans doute assez concurrentiel.

Mise à jour : J'ai quand même fini par l'avoir.

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(dimanche)

Les cours de conduite commencent à m'user psychologiquement

Méta : Cette entrée, où je prouve encore une fois mon super-pouvoir de dire en 5000 mots ce qui tiendrait facilement en 500, est un peu un mélange de calimérisme (bouh hou hou, je suis nul et le monde est vraiment trop zinjuste) et de réflexions disparates (généralement cachées dans les abondantes notes) mais que j'espère un peu plus intéressantes, sur l'apprentissage de la conduite. Il est question de mon permis moto, mais beaucoup de ce que je dis est applicable aussi à quelqu'un qui passerait le permis B (ou, je suppose, C ou D) : vers la fin, je donne d'ailleurs quelques idées qui pourraient peut-être resservir à d'autres, sait-on jamais.

Quand je me suis inscrit au permis moto, je me doutais que ce serait sans doute long et difficile, et que j'en baverais : (a) parce que j'avais exactement zéro expérience des deux-roues motorisés, (b) parce que je ne suis plus tout jeune pour commencer, (c) parce que la moto n'est pas réputée pour être particulièrement facile, et (d) parce que je venais d'en baver pour le permis voiture et que les mêmes causes produisent probablement les mêmes effets. Bref, j'étais conscient de cette possibilité, j'étais bien conscient que quand le test psychotechnique complètement bidon mais légalement obligatoire préliminaire à la formation m'a prédit 20–35 heures de formation, ce n'était rien d'autre qu'un test complètement bidon mais légalement obligatoire, et je n'ai pas été surpris de mettre cinq mois (et 87 heures de formation) à obtenir l'épreuve de plateau (= épreuve hors circulation).

En revanche, s'agissant de l'épreuve de circulation (qui est essentiellement la même[#] qu'au permis B, mais sur une moto au lieu d'être dans une voiture) j'avais un espoir raisonnable que ce serait plutôt facile. Au moins une fois assimilés les quelques points de circulation spécifiques à la moto (le véhicule étant plus étroit, on ne se place pas toujours bêtement au centre de sa voie ; on cherche à se dégager autant que possible de toute proximité avec un poids lourd, et surtout à ne pas rester derrière ; en contrepartie, l'exigence de respect des limitations de vitesse est moins strict, surtout quand il s'agit, justement, de se dégager d'une situation possiblement dangereuse), et évidemment, des aspects de maniement du véhicule qui n'ont pas été vus pendant la préparation au plateau (comment gérer un rond-point, prendre un virage avec plus ou moins de visibilité, comment démarrer en côte ou tourner en pente, etc.), mais en tout cas, rien d'insurmontable.

[#] Sauf qu'évidemment l'inspecteur est dans une voiture (conduite par le moniteur-accompagnateur) et donne ses instructions par radio via une oreillette. Il y a d'autres petites différences, mais elles sont mineures (le nombre de de compétences à valider et donc de points de notation n'est pas le même : il n'est pas demandé de manœuvre, et les vérifications techniques ont été traitées lors de l'épreuve de plateau).

Pourquoi penser que ce serait plutôt facile ? D'abord parce que « tout le monde le dit ». Tout le monde, c'est-à-dire plusieurs amis qui ont passé le permis A ou A2 et qui ont tous décrit l'épreuve de circulation comme une sorte de formalité, ou encore des avis variés mais globalement concordants qu'on trouve en ligne (au pif, celui-ci). Ensuite parce que le taux de réussite est (au niveau national en 2017) de 91% pour l'épreuve de circulation contre 64% pour l'épreuve de plateau (pour comparaison, c'est 57% pour le permis voiture ; source ici, tableau page 22 [numérotée 21] du PDF) : une épreuve avec 91% de taux de réussite (même 92% en première présentation) en 2017 ne donne pas l'impression d'être outrageusement sélective[#2]. • Une bonne partie de cette facilité doit venir du fait que beaucoup des candidats au permis A2 dont déjà le permis B, mais même sans ça, si on regarde le taux de réussite au permis A1 (qui est exactement comme le permis A2 mais pour des motos de ≤125cm³ et peut être passé dès 16 ans, ce qui fait que ceux qui le passent n'ont presque jamais un autre permis), il est encore de 80%, suggérant que l'épreuve en elle-même est moins exigeante que le permis voiture ; une raison que j'ai entendu avancer à ce sujet est que les inspecteurs ne sont généralement pas eux-mêmes motards[#3] et s'en foutent un peu (voire, bavardent juste avec le moniteur-accompagnateur), ou simplement qu'ils ne voient pas aussi bien que s'ils étaient assis à côté du candidat et donnent quelque bénéfice du doute au candidat. • Mais bon, le fait est que j'ai obtenu mon permis B (et même si l'apprentissage a été douloureux, je l'ai quand même eu du premier coup et avec quasi le maximum des points), et j'ai fait attention, depuis, à conduire suffisamment pour, au strict minimum, maintenir mon niveau, à ne pas prendre de mauvaise habitude, et à respecter scrupuleusement le Code de la route. (Et mon poussinet trouve qu'effectivement je conduis mieux maintenant qu'il y a un an. Même, je n'écrase pas les piétons, c'est dire ! 😉) • Et puis, il y a une différence de motivation, qui au moins ne devrait pas nuire[#4] : j'ai passé le permis B plus par nécessité ou obligation sociale, je voyais ça comme une corvée et je ne prends aucun plaisir à conduire une voiture ; alors que je passe le permis A2 largement parce que j'en ai envie, et j'ai pu constater que (quand le temps est propice…) c'est vraiment agréable de rouler en moto. Et comme corollaire de la différence de motivation, une différence d'application (je vais revenir sur la manière dont je m'applique).

[#2] Argument à prendre avec des pincettes, évidemment, puisque les auto-écoles décident quand présenter les candidats… la préparation pourrait être beaucoup plus longue et difficile et donner quand même un taux de réussite meilleur à l'épreuve finale. D'ailleurs, le permis D (bus/car) a effectivement un taux de réussite supérieur au permis B (voiture) et personne ne s'imagine que conduire un bus est plus facile que conduire une voiture (ma belle-mère, qui a ce permis D, confirme d'ailleurs). Mais quand même, l'épreuve de circulation du permis A2 a le plus haut taux de réussite de tous ceux qui sont inscrits dans le tableau auquel je me réfère, ça doit bien traduire quelque chose. • D'autre part, il faut quand même signaler qu'il y a des différences très importantes entre départements : le taux de réussite à l'épreuve de circulation du permis A2 en 2017 avait beau être de 91% au niveau national, il était seulement de 88% pour l'Île-de-France, et de 79% pour Paris (j'aimerais en savoir plus sur les causes de ces disparités).

[#3] Je crois quand même comprendre qu'ils ont eux-mêmes l'obligation de passer le permis A (donc A2 maintenant ?) (cf. cette page ou celle-ci, j'ai la flemme de chercher quelque chose de plus officiel). Ils n'ont d'ailleurs pas l'air d'avoir d'obligation de passer les permis C, D et *E, en revanche : je ne sais pas si ceux qui font passer ces permis-là doivent eux-mêmes l'avoir.

[#4] Ça faisait partie de l'expérience (pas très scientifique) de tester si la motivation joue dans l'aptitude à réussir. Ma conclusion provisoire, c'est que je n'ai pas vraiment l'impression. Du coup, je peux le dire à ceux qui envisagent de passer un permis mais qui voient ça comme une corvée : ce manque de motivation ne vous compliquera probablement pas spécialement la tâche (qui peut être difficile pour d'autres raisons, bien sûr, comme elle l'a été pour moi).

Bref, il y avait un certain nombre de raisons de penser (prudemment !) que ce serait raisonnablement facile, ou au moins que j'aurais fait le plus dur.

Sauf que non, ça n'a pas vraiment l'air parti pour : j'ai l'air d'avoir gagné un nouveau tour pour la case « cancre ». Et là, je commence un petit peu à trouver ça usant[#5] d'accumuler les heures de formation pour patauger dans une médiocrité dont je cherche à identifier la cause. Bon, pour l'instant j'en suis à 14h de conduite (7 leçons de chacune environ 2h de conduite effective[#6]) sans compter la circulation que j'avais déjà faite en allant et en revenant du plateau lors de la préparation à cette épreuve (que j'estime à pas loin de 20h, mais bon, c'est toujours le même trajet) : ce n'est pas encore affolant, surtout que le minimum légal semble[#7] être de 12h, mais c'est surtout parce que mes progrès sont douteux que c'est un peu décourageant.

[#5] J'ai la chance de ne pas avoir de problème côté financier, parce que les heures commencent à chiffrer. Mais juste pour le temps consommé, ce n'est pas négligeable non plus.

[#6] Pour rentabiliser le temps, le mode de fonctionnement des cours de circulation de mon auto-école est qu'on part pendant 3 ou 4 heures à 3 ou 4 élèves à tourner sur 2 motos (avec un changement toutes les heures environ) : donc deux élèves conduisent pendant que l'autre ou les deux autres sont dans la voiture avec le moniteur (et peuvent donc observer et écouter ses commentaires, ce n'est pas du temps complètement perdu). L'avantage est qu'on se fatigue moins que si on conduisait tout le temps et qu'on peut aller plus loin que si les leçons duraient vraiment deux heures. L'inconvénient est qu'il faut vraiment bloquer tout son après-midi ou toute sa matinée.

[#7] J'écris seulement semble parce c'est un peu confus : la base juridique que j'ai trouvée est l'arrêté du 24 juin 1992 relatif à la formation à la conduite des motocyclettes et des motocyclettes légères qui d'après Legifrance est toujours en vigueur, mais qui ne semble pas avoir été mis à jour pour tenir compte de la progressivité du permis moto (on ne peut plus passer le permis A directement, seulement le A2), et par ailleurs je ne sais pas bien comment interpréter la phrase la durée minimale de la formation pratique à la conduite de ces véhicules est de vingt heures, dont huit hors circulation et douze sur une voie ouverte à la circulation publique (s'il faut juste comprendre de huit heures hors circulation et de douze heures en circulation, pourquoi avoir précisé le total ? le texte semble dire x≥8 et y≥12 et x+y≥20 du coup je me demande à quoi sert le dernier).

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(lundi)

Les gens qui ne savent pas faire la queue m'énervent

Je ne sais pas si c'est le cas dans beaucoup d'autres pays ou si c'est spécifiquement français (voire spécifiquement parisien, mais je me hasarde à généraliser au moins à la France), mais les Français n'arrivent décidément pas à comprendre le concept d'une queue unique (par queue je veux dire file d'attente) :

Ça me semble la seule façon rationnelle d'attendre quand il y a n guichets interchangeables (par exemple, des caisses de supermarché) : plutôt que prendre position à un de ces guichets et risquer d'attendre très longtemps parce que par hasard une personne devant nous prendrait énormément de temps, de mutualiser les risques de délais entre tous les guichets à la fois par la création d'une queue unique.

C'est ce que j'essaye de faire à chaque fois que la disposition des lieux le permet (par exemple, si chacun des guichets sert un client, en me mettant un peu en retrait de façon à montrer que j'attends le premier qui se libérera, et parfois je me mets même ostensiblement à la fin de deux queues à la fois). Et régulièrement, il y a quelqu'un qui cherche à passer devant moi en se mettant ostensiblement devant un guichet précis, ou bien me demande d'un ton comminatoire dans quelle queue je suis, voire m'ordonne de choisir (sur un ton qui suggère qu'il me considère comme une sorte de tricheur), ou quelque chose comme ça. Je comprends que la deuxième personne d'une file unique soit souvent défavorisée par rapport au cas où la première personne serait obligée de s'engager sur tel ou tel guichet où attendre, mais tout de même, cette réticence à créer une queue unique m'afflige.

Et c'est le cas même si ce n'est pas moi qui la crée mais le commerçant qui essaye de l'organiser. La pharmacie que je fréquente au centre commercial Italie 2 essaye de le faire pour les ordonnances, et il y a souvent des gens qui, malgré les petites pancartes, ne comprennent pas ou feignent de ne pas comprendre (même si une réorganisation des lieux a aidé). La Fnac du même centre arrive à forcer les clients à faire une queue unique, mais c'est à grand renfort de barrières et d'écrans qui invitent le client suivant à patienter, puis à se rendre à telle ou telle caisse qui vient de se libérer.

J'en suis notamment désolé quand il s'agit de la queue au self de l'école où je travaille : manifestement, elle a beau être peuplée en bonne partie de scientifiques, personne ne semble arriver à se décider à faire une queue unique.

J'en viens à un type différent de queue : les embouteillages.

Voici la manière dont il faut conduire dans un embouteillage pour essayer de ne pas empirer, voire, de résorber, le problème :

  1. Ne pas changer de file, sauf s'il y a une vraie bonne raison de le faire (essentiellement, si on doit sortir ou si la route bifurque). Notamment, ne pas changer de file sous prétexte que la file d'à côté a l'air de mieux rouler — de toute façon, c'est une illusion.
  2. Essayer de rouler à vitesse constante, sans accélérer ni freiner (cf. ci-dessous).

Le premier point est assez clair. Ce serait déjà bien si les Français arrivaient à comprendre ne serait-ce que celui-ci (de nouveau, je suppose que ce n'est pas spécifiquement français, de ne pas comprendre ça, mais j'ai quand même tendance à penser que les Français comptent un nombre insupportablement élevé de cons qui n'arrêtent pas de changer de file pour gratter un mètre). Le second point est un chouïa plus subtil.

Le problème principal avec les embouteillages est celui des ondes de compression : la manière dont une voiture réagit à la voiture devant elle est une sorte de liaison élastique, et l'ensemble des voitures circulant sur la route est un milieu (ni vraiment solide ni vraiment fluide) dans lequel peuvent circuler des ondes de compression. Il y a évidemment des embouteillages qui sont « vraiment dus à une raison identifiable », par exemple un accident ou des jonctions ou séparations de voies, mais autour d'une certaine densité critique (que je ne connais pas et dont je ne sais pas si elle est bien connue — mais mon but dans cette entrée est de râler, pas de mener une analyse mathématique précise de la circulation automobile, même si c'est assurément passionnant), ces ondes de compression se forment au moindre déclencheur, qui peut être une raison identifiable (à laquelle l'onde persistera) ou un petit hasard (quelqu'un a donné un coup de frein sans raison, celui derrière donne le même coup de frein un peu après, et ainsi de suite). Voir par exemple cette vidéo pour une expérience réelle menée à ce sujet. Généralement (presque toujours ? je ne suis pas sûr), les ondes de compression circulent en sens inverse des voitures elles-mêmes.

Le comportement vertueux, c'est de conduire différemment pour ne pas avoir une liaison élastique (ou au moins, atténuer ses effets) avec la voiture qui précède. Certains préconisent (par exemple ici) de garder une distance égale avec la voiture derrière et la voiture devant (c'est-à-dire de chercher à être à mi-chemin entre elles), mais je propose plutôt ceci : chercher à rouler à vitesse aussi constante que possible — essentiellement, la vitesse moyenne du trafic. Concrètement, il s'agit essentiellement de ne réaccélérer que très progressivement quand on voit les voitures devant soi repartir, quitte à laisser un grand intervalle se creuser, et utiliser cet intervalle comme tampon quand les voitures devant freineront de nouveau : si on parvient à maintenir une vitesse constante, on aura alors absorbé ce freinage et donc fait disparaître l'onde de compression (laquelle sera transformée en oscillations de la taille de l'intervalle qu'on a devant soi, lesquelles ne se propageront pas plus loin). On cherche donc à trouver une vitesse qu'on peut soutenir en permanence, sans accélérer ni freiner (évidemment, la sécurité impose parfois de freiner, mais si c'est le cas c'est qu'on a surévalué la vitesse et on cherchera à la réduire un peu en redémarrant doucement ; si l'intervalle devant devient vraiment démesuré, on fera le contraire). Idéalement, on voudrait ne jamais avoir à toucher à la pédale de frein.

En outre, cette façon de faire permet de diminuer sa consommation de carburant puisqu'on consomme moins (à distance parcourue donnée) à vitesse constante qu'en freinant et accélérant en alternance. (Évidence physique : freiner, c'est dissiper sous forme de chaleur toute l'énergie cinétique que le moteur aura utilisé du carburant à produire.)

Mon poussinet pratique ce comportement avec énormément d'insistance, moi je ne suis pas aussi puriste que lui, mais j'essaye tout de même de suivre cette idée.

Évidemment, quand on conduit de la sorte et qu'un grand intervalle se creuse devant soi, les autres automobilistes s'énervent : ceux derrière vous klaxonnent parce qu'ils ne comprennent pas pourquoi on n'avance pas plus vite, et ceux sur le côté changent souvent de voie (montrant ainsi qu'ils ignorent le premier point ci-dessus) pour s'insérer dans le vide dégagé (natura abhorret vacuum). C'est là que je suis moins puriste que mon poussinet : dans ces conditions, je me laisse influencer et je réduis un peu le trou (surtout que je me dis qu'inciter les automobilistes à déboîter met en danger les motards qui feraient de l'interfile dans cet embouteillage), mais lui continue imperturbablement à la même vitesse, et de fait, même si des gens se jettent sur le trou, cela contribue à fluidifier l'ensemble du trafic.

Malheureusement, très peu de gens semblent comprendre, ou à plus forte raison appliquer, cette stratégie. Il est dommage qu'on ne l'enseigne pas dans les auto-écoles. (J'ai cependant vaguement l'impression que les poids lourds ont tendance à l'appliquer, mais je ne sais dans dans quelle mesure c'est conscient, ou simplement parce qu'ils cherchent pour d'autres raisons à garder constante leur vitesse.) Il me semble qu'il suffirait d'une proportion assez faible d'automobilistes qui la suivent pour améliorer énormément certaines conditions de circulation : donc je me dis qu'une campagne de sensibilisation des pouvoirs publics pourrait avoir un sens.

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(lundi)

À propos des passages piétons

Méta : Je promets que ce blog ne va pas se mettre à ne parler que de questions de voitures/moto et de code de la route, mais, si j'ai une entrée de maths en cours d'écriture (sur la réalisabilité de Kleene), elle s'avère comme d'habitude beaucoup plus longue et coriace à écrire qu'initialement prévu, et par ailleurs je suis toujours un peu noyé par mes enseignements.

Ce qui me donne l'occasion d'écrire cette entrée-ci, c'est que, à deux jours d'intervalle, je me suis fait disputer, lors d'une leçon de circulation à moto, pour m'être arrêté laisser passer un piéton alors que je n'aurais pas dû, et que (le surlendemain, donc) j'ai failli heurter en voiture une personne qui a déboulé sans regarder sur un passage piéton alors que le feu était rouge pour elle et vert pour moi. (Dans les deux cas, donc, il s'agissait d'un passage piéton avec feu, et dans les deux cas le feu était rouge pour le piéton.) Donc, c'est parti pour un petit rant sur les passages piétons.

Posons d'abord la terminologie : il y a deux sortes de passages piétons :

  • ceux qui sont situés à l'endroit d'un feu de signalisation réglant l'intersection et que, faute de meilleur terme, je vais qualifier de passages piétons réglés par feu ;
  • et les autres, que je vais qualifier de passages piétons prioritaires (même si ce terme n'est pas forcément approprié).

Ces deux sortes de passages sont matérialisés par un zébrage noir et blanc alterné. Il est exactement le même dans les deux cas (ce qui est con — je vais y revenir), même s'il y a peut-être des expérimentations locales avec des marquages différents, je n'ai pas bien compris. À cause de ce marquage, on parle de passages zébrés, mais le terme de passages cloutés est encore beaucoup utilisé, reste de l'époque où les passages piétons (tous, ou seulement ceux réglés par feu ?) étaient marqués, au moins dans les endroits pavés comme Paris l'eut été, par des gros clous plantés (pointe en bas, bien sûr !) dans la chaussée.

Les passages piétons prioritaires sont souvent, mais pas toujours, marqués, à l'endroit même du passage, par le panneau d'indication C20a, carré à fond bleu et représentant un piéton traversant à un passage zébré sur triangle blanc. Je crois que ce panneau n'est jamais utilisé pour les passages piétons réglés par feu, mais je n'en suis pas certain non plus. Les passages piétons peuvent aussi être signalés (environ 50m à l'avance en agglomération, 150m hors agglomération) par le panneau de danger A13b, triangulaire à bord rouge, représentant un piéton traversant à un passage zébré sur fond blanc.

Y a-t-il vraiment une différence entre les deux sortes ? C'est une première chose qui n'est pas claire, ça dépend un peu du point de vue.

Pour commencer, que dit le droit ?

  • [Les piétons] sont tenus d'utiliser, lorsqu'il en existe à moins de 50 mètres, les passages prévus à leur intention. (Article R412-37 du Code de la route.)
  • Les feux de signalisation lumineux réglant la traversée des chaussées par les piétons sont verts ou rouges et comportent un pictogramme. […] Lorsque la traversée d'une chaussée est réglée par ces feux, les piétons ne doivent s'engager qu'au feu vert. (Article R412-38 du Code de la route.)
  • Tout conducteur est tenu de céder le passage, au besoin en s'arrêtant, au piéton s'engageant régulièrement dans la traversée d'une chaussée ou manifestant clairement l'intention de le faire ou circulant dans une aire piétonne ou une zone de rencontre. […] Cette contravention donne lieu de plein droit à la réduction de six points du permis de conduire. (Article R415-11 du Code de la route.)
  • Les victimes, hormis les conducteurs de véhicules terrestres à moteur, sont indemnisées des dommages résultant des atteintes à leur personne qu'elles ont subis, sans que puisse leur être opposée leur propre faute à l'exception de leur faute inexcusable si elle a été la cause exclusive de l'accident. (Article 3 de la loi nº85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation. La jurisprudence de la Cour de cassation [Ch. civile 2, 30 juin 2005, 04-10.996] définit la faute inexcusable comme la faute volontaire d'une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience.)

Ce qui est clair, donc, c'est qu'un automobiliste qui heurte un piéton sera automatiquement « en tort » (du point de vue assurance / responsabilité civile), même si ce piéton a traversé au rouge ou hors d'un passage piéton : le piéton aura certes commis une infraction (punie de l'amende prévue pour les contraventions de la première classe, c'est-à-dire… 4€), mais en cas d'accident le piéton sera indemnisé, normalement par l'assureur de l'automobiliste. La seule exception serait en gros le cas d'un piéton qui se jetterait volontairement sous les roues de la voiture (ou, peut-être, choisirait délibérément d'aller faire une promenade nocturne au milieu d'une autoroute, enfin, quelque chose comme ça) ; et encore, même cette exception ne peut pas être invoquée lorsqu[e les victimes] sont âgées de moins de seize ans ou de plus de soixante-dix ans [ou invalides à ≥80%] [article 3 de la loi nº85-677 sus-citée].

En revanche, si je comprends bien le texte de droit, une fois mise de côté cette responsabilité civile, l'automobiliste n'encourt une sanction pénale et administrative, c'est-à-dire une amende (de 135€) et un retrait de (six) points sur son permis, pour refus de priorité, que si le piéton était régulièrement engagé (ou manifestant clairement son intention de s'engager régulièrement), ce qui n'est pas le cas du piéton qui traverse au rouge.

Pour résumer, (ma compréhension des choses est que,) si un automobiliste heurte accidentellement un piéton qui traversait au rouge, l'automobiliste est civilement responsable des dommages, mais n'encourt pas de sanction pénale ou administrative alors que le piéton, lui, encourt une (toute petite) amende. (Le piéton pourrait, par ailleurs, être responsable de dommages à des tierces parties, même si je ne sais pas vraiment quel scénario serait plausible.) Encore une fois, je ne garantis pas d'avoir tout bien compris.

Du coup, y a-t-il une distinction entre passages piétons réglés par un feu et passages piétons prioritaires ? Du point de vue du droit, pas vraiment. C'est juste que le piéton qui s'engage sur un passage piéton que je qualifie de prioritaire est ipso facto régulièrement engagé, donc prioritaire, alors que celui qui s'engage sur un passage piéton réglé par un feu ne l'est pas forcément, cela dépend de la couleur du feu.

Maintenant, qu'apprend-on à l'auto-école et quel comportement est-il attendu à l'examen du permis ?

  • Dès qu'un piéton circule sur la chaussée, on le laisse passer, on le considère comme absolument prioritaire. (On ne se pose pas la question de savoir s'il est régulièrement engagé : le plus important, et c'est heureux, est de ne pas le heurter, et pour ça, si nécessaire, on s'arrête.)
  • En revanche, si un piéton est sur le trottoir et attend manifestement de traverser, il faut considérer plus précisément la situation :
    • s'il est face à un passage piéton prioritaire, on s'arrête pour le laisser passer,
    • s'il est loin de tout passage piéton (route de campagne, typiquement), on s'arrête de même,
    • en revanche, s'il est à un passage piéton réglé par un feu, on ne s'arrête que si le feu piéton est vert.

Évidemment, il y a beaucoup de questions d'appréciation qui ne sont pas parfaitement claires : si quelqu'un se tient face à un passage piéton prioritaire mais qui regarde son smartphone et pas la rue, on peut supposer que c'est pour ne pas traverser immédiatement ; si quelqu'un se dirige d'un pas résolu vers un passage piéton prioritaire, il faut aussi lui céder le passage, sauf à pouvoir passer complètement avant le début de sa traversée — alors qu'une personne qui se dirige vers un passage piéton réglé par un feu, on ne s'arrêtera pas pour la laisser passer si elle a un feu rouge puisqu'on doit supposer qu'elle s'arrêtera au feu ; si un piéton a un pied sur la chaussée, en principe, on s'arrête, mais évidemment il peut arriver que quelqu'un attende au feu rouge en ayant mis le pied sur la chaussée, et dans ce cas il ne faut pas s'arrêter. Bref, il y aura toujours des cas douteux. Espérons que les inspecteurs du permis accordent un certain bénéfice du doute au candidat lorsque celui-ci se trouve dans un de ces cas d'interprétation douteuse.

Ça c'est ce qu'on nous apprend à l'auto-école. Dans la réalité, à Paris au moins, la volonté des automobilistes de s'arrêter aux passages piétons prioritaires est ridiculement mauvaise. Si on se contente d'attendre en ayant l'air de vouloir s'arrêter, il faudra attendre très longtemps avant que quelqu'un daigne s'arrêter (et c'est alors risqué de se lancer, parce que si l'autre sens de circulation met autant de mauvaise volonté à s'arrêter, on peut se retrouver coincé au milieu) ; si on commence vraiment à traverser, les gens s'arrêtent généralement, mais c'est évidemment dangereux : tout un art consiste à s'élancer à un moment où on forcera un automobiliste à freiner mais en gardant quand même une distance de sécurité telle qu'on puisse battre en retraite s'il paraît ne pas vouloir le faire. Globalement, je préfère éviter purement et simplement les passages piétons prioritaires et passer là où il y a des feux. Mais parfois les feux sont en panne (orange clignotant ou tout simplement éteints), et alors c'est la galère, parce qu'en plus, les automobilistes pensent que comme il y a un feu qui les laisse passer, sans doute les piétons ont le rouge (alors qu'en fait le piéton est censé être prioritaire).

Et il y a des endroits comme l'avenue de la Grande Armée où on a un dilemme cornélien : attendre trois plombes à un feu comme ici (ils sont très très longs) ou bien essayer de s'imposer à un passage « prioritaire » comme celui-ci qui doit être un des plus dangereux de Paris parce que les automobilistes foncent et ne s'attendent pas du tout à voir un piéton traverser.

Quand je conduis, je fais un effort énorme pour respecter scrupuleusement ce qu'on m'a appris à l'auto-école (cf. ci-dessus ; pour passer le permis moto il faudra bien que je le respecte, mais c'est de toute façon la moindre des choses de me comporter face aux piétons comme j'attends qu'on se comporte quand je suis moi-même piéton).

Mais étant très préoccupé par l'idée de ne pas refuser la priorité à un passage prioritaire, il m'arrive de faire l'erreur inverse, c'est-à-dire de m'arrêter alors que les piétons ont le feu rouge. Typiquement, je vois des gens qui attendent au passage piéton, je ralentis instinctivement, et le temps que je me rappelle qu'ils ont sans doute un feu piéton et que je cherche celui-ci du regard (il n'est pas toujours évident d'en voir la couleur, surtout qu'il est orienté pour les piétons), j'ai tellement ralenti qu'il y a un risque que les gens pensent que je m'arrête — et du coup je m'arrête vraiment, parce que quelqu'un pourrait traverser. Enfin, quelque chose comme ça.

Ça m'était arrivé plusieurs fois en prenant des leçons de conduite en voiture, et ça m'est arrivé jeudi dernier en moto : je me suis arrêté à un passage piéton et j'ai laissé quelqu'un traverser alors qu'elle avait le feu rouge. Le moniteur m'a dit : à l'examen, ce serait éliminatoire, parce qu'en incitant un piéton à traverser au rouge, tu le mets en danger à cause de la direction de circulation opposée. Je comprends la logique de l'argument, mais quand même, la personne en question était adulte, elle n'était pas obligée de traverser sous prétexte que je m'arrêtais pour elle.

Quand j'ai dit que je n'étais pas certain de la couleur du feu piéton, on m'a répondu que puisque j'avais eu un feu vert, le feu piéton était forcément rouge. Mais ce n'est pas exact : d'une part, le feu peut avoir changé dans le temps ; d'autre part, le feu piéton n'est garanti être rouge que si on a traversé l'intersection tout droit (si on tourne à gauche ou à droite, c'est plutôt le contraire, le feu piéton sera normalement vert), or dès que l'intersection est autre chose que deux routes qui se croisent à angle droit, il peut vraiment y avoir un doute sur la manière dont les feux sont cadencés.

Toujours est-il que, avant-hier, j'ai failli avoir un accident et heurter une piétonne : c'était précisément à , rue des Peupliers à Paris (48.8222°N, 2.3527°E), une piétonne qui faisait son jogging (et avec des écouteurs sur les oreilles) a surgi de derrière des voitures garées à droite et traversé au passage piéton alors qu'elle avait le feu rouge (moi j'avais le vert), sans regarder un seul instant dans ma direction. Heureusement, je n'allais pas plus vite que la vitesse maximale autorisée (30km/h) et j'ai pu piler à temps. Nous avons une dashcam sur la voiture (dans ce cas, ça n'aurait servi à rien en cas d'accident puisque, si je l'avais heurtée, ainsi que je l'explique plus haut, j'étais de toute façon responsable, mais dans ça peut être intéressant dans d'autres situations et pour plein d'autres choses — rejouer des fautes de conduite ou d'itinéraire, enregistrer des choses jolies ou surprenantes croisées en route, etc.), donc j'ai une vidéo : voir ici sur Twitter ou à télécharger ici en meilleure qualité (la dashcam a un capteur GPS mais il n'avait pas encore de positionnement donc je n'ai pas ma vitesse précise ; par ailleurs, l'heure affichée est décalée d'une heure — ou, si on veut, elle est à l'heure d'été). Peut-être que la joggueuse venait d'un pays où on roule à gauche, puisqu'elle semble regarder carrément à droite au moment de traverser ; peut-être aussi qu'elle venait d'un pays où les passages piétons zébrés sont toujours prioritaires (cf. ci-dessous).

Je pense que cela aiderait énormément la lisibilité des passages piétons de les signaler différemment selon qu'ils sont réglés par un feu ou prioritaires. Certains pays font une telle différence au niveau du marquage au sol : voici sur Google Maps un exemple au hasard en Allemagne et un exemple au hasard en Espagne : dans les deux cas, on a, sur la gauche, un passage piéton pointillé réglé par un feu et, sur la droite, un passage piéton zébré prioritaire.

(À vrai dire, je pensais que c'était la France qui faisait exception, mais non, ce sont plutôt l'Allemagne et l'Espagne qui font exception. J'en profite pour mentionner que j'aimerais bien trouver des informations un peu systématiques sur le droit de la route comparé et/ou historique : on trouve des choses éparses en ligne, par exemple ce tableau ou celui-ci qui sont rigolos, mais je n'avais pas réussi à retrouver ne serait-ce que l'origine du panneau de sens interdit.)

Distinguer les marquages présente un certain nombre d'avantages : cela rappelle aux piétons s'ils sont censés pouvoir passer immédiatement ou s'il leur faut attendre un feu (qui n'est pas toujours si évident à voir). Pour les conducteurs qui risqueraient de s'arrêter à tort (comme moi, cf. ci-dessus), cela évite cette confusion. Et inversement, pour les conducteurs qui ont perdu l'habitude de s'arrêter aux passages piétons parce qu'ils sont tellement souvent réglés par des feux, cela attire l'attention sur ceux où il faut céder la priorité.

Ajout () : Je dois quand même reconnaître que distinguer le marquage présente un inconvénient significatif, c'est que le feu peut être en panne (ou laissé en orange clignotant à certaines heures) : dans ce cas, le passage piéton redevient prioritaire (même si c'est dangereux de compter dessus parce que beaucoup d'automobilistes ne le comprennent pas ou choisissent de l'ignorer, cf. ce que j'en disais ci-dessus), et évidemment, le marquage ne peut pas changer pour refléter ce fait. Je ne sais pas ce que dit le droit allemand ou espagnol sur le cas où un feu est en panne.

Ajout () : J'oubliais de dire un mot sur le point suivant, que je comptais pourtant aborder : la pénalité administrative pour non respect de la priorité des piétons a été augmentée, le 17 septembre 2018, de quatre points à six points. Même si je suis tout à fait favorable à l'intention d'obliger les automobilistes à être plus respectueux des passages piétons, je trouve vraiment idiote l'approche consistant à simplement augmenter le nombre de points de pénalité : ce qui importe n'est pas d'augmenter la sévérité des sanctions mais leur fréquence — quatre points de pénalité seraient amplement suffisants s'il y avait effectivement des contrôles, et je pense qu'il est beaucoup plus utile et efficace d'avoir une sanction réellement appliquée qu'une sanction grave mais appliquée de façon très rare.

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(dimanche)

Quelques remarques en vrac sur la moto

Je rassemble dans cette entrée un certain nombre de remarques que je n'avais pas pensé à, ou pas eu le temps de, faire en écrivant celle-ci, et dont l'intérêt est individuellement faible, mais qui méritent peut-être une publication groupée. (L'ordre dans lequel je les rassemble ci-dessous n'est pas l'ordre dans lequel je les ai écrites, ce qui peut expliquer quelques incohérences de style ou de renvois. Le petit jeu d'essayer de trouver un parcours hamiltonien, avec des transitions qui se tiennent, dans un ensemble de sujets qu'on veut évoquer, trouve rapidement ses limites.)

Je commence les leçons de conduite dans environ une semaine — mon auto-école n'avait pas de disponibilités plus tôt à cause des vacances des moniteurs — et j'espère d'ailleurs que ce délai laissera le temps à la météo de s'améliorer. (Ça semble mal parti.)

J'ai eu une chance assez incroyable pendant les très nombreuses heures où j'ai préparé l'épreuve de plateau c'est qu'il n'y a jamais eu de pluie (il y a eu deux jours de neige, mais le problème n'était pas tant la précipitation que celle qui était déjà au sol). Comme quoi l'impression qu'il pleut tout le temps à Paris est singulièrement fausse (en fait, si j'en crois les données climatiques sur Wikipédia, il pleut ≥1mm seulement 30% des jours ; d'ailleurs, de façon amusante, mars est le deuxième mois où il y a le plus de jours de pluie, mais aussi le deuxième mois où il y a le moins de quantité totale de pluie ; j'aimerais des statistiques sur le nombre d'heures, voire de minutes, de pluie). À vrai dire, je ne sais pas si c'est vraiment une chance, parce que du coup je n'ai pas eu l'occasion de tester. Mais au moins, il y a eu des jours où la piste, et la route pour y aller, étaient mouillées.

En revanche, ce qui est sûr, c'est qu'en passant aussi longtemps à préparer l'examen, j'ai au moins pu tester un certain intervalle de températures, avec des maximales à Orly qui sont montées à 26°C vers la mi-octobre et descendues à 1°C fin décembre. Et comme je suis du genre à avoir un intervalle de fonctionnement très étroit (disons que, au repos, en tee-shirt et sans vent, je me plains de crever de froid si la température passe en-dessous de 20°C et de crever de chaud si elle passe au-dessus de 25°C), ce fut l'occasion de tester toutes sortes de choses à mettre sous ma combinaison : sous-combinaisons (version mi-saison(+pantalon) puis hiver(+pantalon)), maillot thermique coupe-vent, tee-shirts et sweat-shirts et bien sûr différents empilements de tout ça.

Ajout () : Puisque j'ai commencé à lister mon équipement dans cette entrée, je dois dire que suite à mon échec à la circulation raconté dans une entrée ultérieure et la nécessité de prendre, du coup, des leçons par temps chaud voire possiblement caniculaire, je me suis acheté un blouson Air Crono 2 et un pantalon Drake Super Air Tex tous les deux en mesh et censés être plus supportables que le cuir par temps chaud — on verra ce que ça donne.

(Je précise que je ne suis pas sponsorisé ni par Dainese ni par le site speedway.fr et je ne leur fais pas non plus de la pub spécialement par plaisir : si je fais les liens vers les produits précis, c'est parce que je me sers de mon blog comme bloc-notes pour pouvoir retrouver ultérieurement les références précises des produits même s'ils perdent mon historique de commandes, ce qui ne manquera sans doute pas d'arriver.)

Mais le plus problématique ont assurément été les gants : j'avais acheté des gants été et je me suis dit (comme j'ai appris que beaucoup d'élèves motocyclistes se disent) que j'achèterais des sous-gants pour quand il fait plus froid : eh bien ça ne marche pas du tout, les sous-gants, c'est presque pire que sans (sans doute parce que ça serre les mains et gêne la circulation). Du coup, j'ai acheté des gants d'hiver, et ça ne m'a quand même pas empêché d'avoir froid aux doigts, mais moins. Il faut dire que j'ai les doigts particulièrement fins et qui, logiquement, refroidissent vite. J'aurais peut-être dû carrément prendre des gants chauffants, mais ces choses ne doivent pas tenir très longtemps.

Mais il y a une nette différence de sensibilité sur les commandes entre les gants d'été (très ajustés) et les gants d'hiver (bien épais). Le passage de l'un à l'autre, puis le retour aux gants d'été quand ça a été possible, n'a pas été complètement sans incidence sur ma capacité à faire les exercices.

Une des choses qu'on apprend en préparant l'épreuve plateau du permis moto, c'est de faire une manœuvre d'évitement, qui est une technique consistant, plutôt que de freiner en urgence, à éviter (comme le nom l'indique…) un obstacle situé devant soi et dans lequel on entrerait sinon en collision : la manœuvre consiste simplement à faire une chicane, disons vers la gauche, pour contourner l'obstacle, en contrebraquant d'abord vers la gauche (pour s'écarter) puis vers la droite (pour reprendre la direction initiale). Comme je le disais, j'ai trouvé ça techniquement plutôt facile, au moins dans les conditions extrêmement contrôlées de l'épreuve de plateau. L'intérêt de l'évitement, c'est que, si les bonnes conditions sont remplies (c'est-à-dire si on ne va pas trop vite, histoire d'avoir la force de contre-braquer, et s'il y a de la place sur le côté pour contourner l'obstacle), il est plus facile et plus sûr (il présente moins de risque de chute) qu'un freinage d'urgence, notamment si on découvre l'obstacle trop tard.

(Même en voiture, d'ailleurs, il peut y avoir des circonstances où la bonne réaction à prendre est d'éviter l'obstacle et pas de piler. Évidemment, ces circonstances sont sans doute plus rares qu'en moto puisque le véhicule est moins agile et le frein moins dangereux.)

Maintenant, la question qui me préoccupe c'est : admettant pour les besoins de la discussion que je sache réaliser un évitement, comment est-ce qu'on pense à en faire un ? Et comment peut-on apprendre à y penser ? Si on découvre un obstacle trop tard, il faut prendre une décision en un laps de temps extrêmement court, et je pense que la réaction instinctive est de se précipiter sur le frein avant (même si ce n'est pas le bon choix), pas d'évaluer si les conditions sont propices à faire plutôt une manœuvre d'évitement. (Pire encore, il y a le risque de s'emmêler les mouvements et d'essayer de freiner en même temps qu'on tente un évitement, ce qui fait qu'on ratera le freinage et l'évitement.) La réponse standard est : c'est largement une question d'expérience, et le fait d'avoir pratiqué la manœuvre sert au moins à assurer que le cerveau l'a bien en tête comme possibilité ; mais je ne trouve pas cette réponse franchement satisfaisante, parce que les circonstances où l'expérience peut venir concernant ce point sont justement celles où il faut l'avoir, et sont, on l'espère, extrêmement rares. I.e., s'il faut se tuer contre l'obstacle pour apprendre à ne pas se tuer contre l'obstacle, on a un problème de bootstrap. J'ai posé la question à un de mes moniteurs, et (sans vraiment apporter de réponse) il m'a raconté qu'en 40 ans de pratique régulière de la moto, il n'avait dû faire une vraie manœuvre d'évitement qu'une seule fois (en découvrant une charrette bloquée au milieu de sa voie, cachée juste après un tournant sur une route de campagne), qu'il l'a faite instinctivement, et que ça l'a sauvé parce qu'il n'aurait pas eu le temps de freiner.

Pour la voiture, je me disais que je devrais peut-être prendre des séances sur simulateur pour être confronté, tout en restant en sécurité, à des circonstances inhabituelles et dangereuses. Malheureusement, même s'il existe des simulateurs de moto à fins pédagogiques (i.e., pas pour l'aspect jeu vidéo), ils sont encore plus confidentiels que les simulateurs de conduite de voiture.

Dans le même registre « mais comment est-ce qu'on apprend ça ? », il y a la conduite avec passager : l'épreuve de plateau comporte un petit bout avec passager, mais c'est dans des conditions un peu ridiculement faciles (il s'agit de faire en gros 35m sans vitesse imposée, c'est-à-dire en pratique aux 8km/h du ralenti moteur en 1re, en faisant une vague diagonale entre des portes et des piquets, sans mettre le pied à terre), et ça se comprend : on ne peut pas risquer la sécurité du moniteur accompagnateur ou d'une tierce personne qui ferait le passager, donc les conditions sont prévues telles qu'un accident est quasiment impossible. (Il faut aussi tenir compte du problème pratique de trouver effectivement quelqu'un pour jouer le passager.)

Comme j'avais tendance à ne pas bien tendre les bras en faisant l'entraînement au freinage d'urgence, mon moniteur m'a fait la remarque que, tout seul, j'y arrivais peut-être quand même, mais que si j'avais un passager derrière qui allait appuyer de tout le poids de son corps sur mon dos, ce serait dangereux pour lui et pour moi si je ne prenais pas l'habitude de tendre les bras.

Mais la même remarque que précédemment concernant le bootstrap s'applique : on va donner le permis moto, et le droit d'embarquer un passager, à des gens qui n'en auront aucune expérience : il doit falloir une certaine confiance en soi pour essayer la première fois !

Comme je l'ai écrit plus haut, je n'ai pas encore commencé les cours de circulation (les paris sont d'ailleurs ouverts pour savoir combien d'heure je devrai en faire), donc pour l'instant je n'ai conduit la moto qu'entre l'auto-école et le plateau d'entraînement à Rungis, en suivant le moniteur (et en passant généralement par l'autoroute A6 ; et peut-être deux ou trois fois par la ville — par exemple une fois parce qu'il y avait un 50cm³ à transporter qui n'a pas le droit de prendre l'autoroute).

Je ne suis certainement pas du genre à prendre des risques inconsidérés : plutôt, au contraire, à me plaindre (et je l'avais déjà écrit ici) que je ne trouve pas ça très rassurant de faire l'interfile sur l'autoroute, en tout cas lorsqu'il faut se glisser entre un camion et un SUV, et que c'est un peu abusé d'en faire parfois alors que la circulation sur les voies normales de circulation est à peine ralentie. (Pour mémoire, les règles officielles sur la circulation interfile des deux-roues sont décrites ici — et elles sont assez raisonnables ; mais pour les trajets vers et depuis le plateau, les moniteurs de l'auto-école, et, du coup, les élèves qui suivent, n'obéissent pas parfaitement au Code de la route : raison aussi pour laquelle je suis content de passer à la partie « circulation », je vais avoir une excuse pour le respecter scrupuleusement.)

Néanmoins, ce peu de conduite que j'ai fait m'a permis de prendre conscience de combien la moto est dangereusement agile et dynamique. Je veux dire que même quand on n'est pas du genre à prendre des risques (cf. ci-dessus), elle donne l'impression (en bonne partie fausse, donc dangereuse) de pouvoir se glisser n'importe où et de pouvoir accélérer pour y arriver. Quand je prends une voie d'insertion avec la voiture, j'attends sagement qu'une place suffisante apparaisse dans la voie sur laquelle je m'insère : en moto, je me rends compte qu'on va facilement être tenté de se dire qu'on peut accélérer un petit coup pour se glisser avant le camion patapouf qu'on a à côté de soi plutôt que d'attendre et de se mettre derrière lui (d'autant qu'il y a des raisons objectives tout à fait sensées de préférer être devant un camion que derrière).

Du coup, je me demande comment se répartit la dangerosité d'une moto (relativement à une voiture) entre différents facteurs et notamment (a) la dangerosité intrinsèque (absence de carrosserie, détectabilité plus difficile par les autres usagers, équilibre précaire sur deux roues, moins bonne visibilité à cause du casque et de l'absence de rétroviseur intérieur, etc.), (b) la dangerosité due à la pratique à laquelle l'engin « encourage » (la tentation de rouler vite, d'accélérer brutalement, de se faufiler, etc.) à laquelle je fais référence ci-dessus, et (c) la dangerosité simplement due à l'attitude ou perception du risque en général du type de gens qui conduisent une moto (je veux dire que les motards, même quand ils utilisent une voiture ou un vélo, se comportent peut-être de façon statistiquement différente).

Au sujet de l'attitude des motocyclistes par rapport au risque (et des points (b) et surtout (c) ci-dessus) : l'interrogation orale du permis moto comporte une fiche (nº4, prise de conscience des risques ; il y en a par exemple une synthèse ici) possiblement intéressante, mais qui évoque, forcément sans référence précise, des études sociologiques qui sont devenues difficiles à trouver du fait même de l'existence de cette fiche (je veux dire que maintenant, quand on cherche quelque chose comme profils motocyclistes perception risques ou quelque chose de ce genre, on tombe surtout sur des synthèses des fiches moto pour le permis, donc ça ne dit pas grand-chose, pas sur les études d'origine ni même des références précises à celles-ci). J'ai donc enquêté un tout petit peu pour trouver des informations plus substantielles, et notamment les sources de cette fiche.

J'ai trouvé notamment une étude de 2009 menée par TNS Sofres pour GEMA Prévention (une fédération d'assurances) intitulée Conducteurs de 2 roues motorisés : profils et attentes (présentation ici) d'où sort manifestement le classement en cinq catégories (passionnés, modérés, transgressifs, stressés et sereins) que la Sécurité routière a reprises pour sa fiche moto nº4 ; mais les éléments présentés publiquement de l'étude sont très sommaires et il ne semble pas que la Sofres ni GEMA ait publié quelque chose de beaucoup plus détaillé. • Sinon, j'ai trouvé une thèse soutenue Lyon 2 en 2010, Conscience du risque et attitudes face aux risques chez les motocyclistes par Aurélie Banet (consultable en ligne), beaucoup plus détaillée, qui présente une typologie différente. • Enfin, le compte-rendu The Motorcycling Community in Europe (rédigé par la FEMA — Fédération des associations motocyclistes européennes — avec le soutien de la Commission européenne) utilise encore une typologie différente (et plus proche de celle de la Sofres : commuters, sport riders, ramblers, travellers), tirée d'une étude (Motorcyclists' Profiles par Banet [la même que ci-dessus], Bellet, Zaidel &al.) publiée dans le rapport SARTRE4 (2012) (un sondage mené à travers l'Union européenne sur les attitudes et comportements des usagers de la route). Les disparités importantes entre pays européens sont à cet égard assez surprenantes. (Voir aussi cette présentation de certains des auteurs.)

Un mot sur les changements de vitesse, maintenant.

Quand je conduis une voiture, c'est-à-dire la voiture du poussinet, qui est à changement de vitesse manuelle parce qu'il voulait que je garde l'habitude de passer les vitesses… eh bien, surprise, j'ai du mal à passer les vitesses (et il me dispute). Plus exactement, j'ai du mal en rétrogradant : je passe le rapport inférieur trop tôt (i.e., trop vite — avant d'avoir suffisamment décéléré), ce qui donne un coup dans l'embrayage et/ou dans le moteur et/ou fait tourner ce dernier trop vite, et mon poussinet me dispute parce que j'abîme sa tuture à laquelle il tient. Les sens giratoires sont les pires, pas pour le sens giratoire lui-même mais pour la décélération avant d'y entrer, que je gère toujours mal. Je n'avais pas ce problème avec la Renault Captur de l'auto-école sur laquelle j'ai appris à conduire, mais la Golf IV du poussinet a des rapports échelonnés différemment (j'en parlais déjà ici), on ne peut pas revenir en 2e à ~40km/h sans que ça hurle (or on m'a appris à être en 2e pour les sens giratoires).

Il y a deux choses qu'on peut faire pour rétrograder : freiner et attendre d'avoir suffisamment ralenti pour pouvoir passer le rapport inférieur en douceur (c'est ce qu'on apprend à l'auto-école), ou au contraire, si on veut rétrograder pour avoir de la reprise, accélérer un petit coup pendant qu'on est embrayé de façon à mettre le moteur au régime qui permet de passer le rapport inférieur sans ralentir le véhicule (voire, pratiquer un double débrayage, c'est-à-dire accélérer au point mort, si le but est de soulager les synchroniseurs de la boîte de vitesse). En théorie on peut faire n'importe quel compromis entre ces deux techniques « freiner et rétrograder » et « rétrograder en donnant un petit coup de gaz » : mais en pratique, un compromis voudra dire qu'il y a un moment où on doit appuyer sur les trois pédales (l'embrayage pour changer de vitesse, le frein pour ralentir, et l'accélérateur pour ajuster le régime moteur), et c'est anatomiquement difficile (technique du talon-pointe) si les pédales sont étroites ou si on n'est pas contorsionniste. Bref, je n'essaye pas ça.

La moto a l'avantage qu'on a l'embrayage à la main gauche, le changement de vitesse au pied gauche, le frein arrière au pied droit et l'accélérateur à la main droite. Donc on peut tout à fait manœuvrer tout ça simultanément. (Et même en freinant de l'avant, ça doit encore être faisable avec moins de contorsion que frein+accélérateur sur une voiture.)

Mais même sans accélérer lors du débrayage, rétrograder en moto est mécaniquement plus facile : l'embrayage est plus souple parce que c'est généralement un embrayage à bain d'huile (alors que les embrayages de voiture sont typiquement des embrayages secs), et pour la même raison, l'embrayage supporte beaucoup mieux qu'on l'utilise pour freiner en rétrogradant ; la transmission étant à chaîne et pas à cardan rigide (en tout cas sur les Honda CB-500 de mon auto-école), permet d'absorber partiellement l'à-coup ; le fait que la moto soit plus légère qu'une voiture (eu égard à la puissance ou au couple du moteur) rend l'opération plus encaissable ; et la boîte de vitesse elle-même, étant séquentielle, est plus rapide et commode à manipuler. En contrepartie, si c'est fait trop violemment, il y a un risque de bloquer la roue arrière (et donc de déraper de celle-ci), que l'ABS n'évite pas contrairement au cas d'usage du frein.

Je ne sais pas si mes explications mécaniques sont correctes (on trouve des affirmations plus ou moins contradictoires en ligne dès qu'on cherche quoi que ce soit concernant la mécanique auto ou moto). Toujours est-il que mon ressenti est que changer les vitesse à moto est plus simple et plus « instinctif » qu'en voiture.

Bon, et sinon, si j'obtiens le permis (ce qui commence à avoir l'air assez probable), il faudra que je décide d'une moto à acheter. Pour la voiture, j'ai laissé faire le poussinet, ce qui est bien pratique (c'est sa tuture, c'est lui qui l'a achetée, qui l'entretient, et qui me dispute quand je passe mal les vitesses), mais le poussinet n'a pas l'intention d'acheter une moto puisqu'il n'a pas le permis (enfin, en fait, il a le permis A1 suite à une sorte d'accident administratif, mais il ne conduit pas avec). Du coup, il va falloir que je me réfléchisse à la question.

Déjà je n'ai qu'une idée floue de la typologie des motos, je me contente de lire des choses en ligne (ici, ou encore — et de constater que manifestement il y a des petites variations dans la cladistique). Mais n'y connaissant rien et n'ayant pas d'exigences compliquées (je ne compte ni faire de course ni de longs trajets, et je fais une taille extrêmement moyenne), je pars du principe que j'ai sans doute intérêt à acheter le même modèle, ou un modèle plutôt proche de, la Honda CB-500F utilisée par mon auto-école, parce que (1) s'ils ont fait ce choix, c'est sans doute un choix raisonnable pour débuter (même si, évidemment, les préoccupations d'une auto-école peuvent être légèrement différente ; disons au moins qu'il est conduisible avec le permis A2 sans nécessiter de bridage), et (2) indépendamment du point précédent, si j'ai appris à conduire sur ce modèle, il y a un intérêt évident à continuer avec et ne pas être dérouté.

Je voudrai certainement l'acheter d'occasion (il y a plein de raisons à ça, cf. par exemple ici). Acheter de particulier à particulier me fait assez peur eu égard aux possibilités de se faire arnaquer, surtout pour quelqu'un comme moi qui n'y connaît quasiment rien en mécanique : je préfère payer un peu plus pour passer par un garage qui ferait ensuite l'entretien — mais ceci ramène le problème au choix d'un garage, qui n'est lui-même pas évident (mais au moins il est plus aisé de trouver des avis en ligne pour se faire une idée du risque d'arnaque).

Mise à jour : Finalement, j'ai acheté une CB-500F neuve.

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(samedi)

Pinaillages sur les limitations de vitesse

En France, les limitations de vitesse par défaut, ou implicites (i.e., valables en l'absence de tout panneau explicite de limitation de vitesse) sont [articles R413-2 et R413-3 du Code de la route] :

  • 130km/h sur les autoroutes,
  • 110km/h sur les routes à deux chaussées séparées par un terre-plein central,
  • 90km/h sur les autres routes comportant au moins deux voies dans un même sens de circulation [toutefois, ce cas ne doit pas rester implicite et doit faire l'objet d'une signalisation explicite],
  • 80km/h sur les autres routes ne comportant qu'une voie dans chaque sens de circulation,
  • 50km/h en agglomération,
  • 30km/h dans les zones 30 et 20km/h dans les zones de rencontre, cf. cette entrée passée.

Un panneau de limitation explicite ne peut, il me semble, qu'abaisser la vitesse en-dessous du défaut listé ci-dessus, exception faite de la possibilité de relever à 70km/h la limitation de vitesse de certaines voies en agglomération. Rappelons par ailleurs que la limitation est explicite est valable jusqu'à la prochaine intersection, sauf lorsque la limitation est faite en même temps qu'un panneau de danger — le plus souvent annonçant un ralentisseur — auquel cas elle est valable à l'endroit de ce danger [bon, ça c'est ce qu'on m'a appris, mais en fait je ne trouve aucune confirmation dans le Code de la route ou dans un document officiel crédible : il faudrait creuser].

Maintenant voici une complication parmi d'autres : en cas de pluie ou d'autres intempéries, mais aussi lorsqu'on est conducteur sur permis probatoire (c'est-à-dire détenteur du permis depuis moins de 3 ans[#] et qui doit se signaler par un disque portant la lettre ‘A’), ou bien en train de suivre des cours de conduite[#2] (et on se signale alors par un panneau auto-école ou un gilet moto-école ou quelque chose comme ça), les vitesses limites implicites de 130km/h, 110km/h et 90km/h sont abaissées respectivement à 110km/h, 100km/h et 80km/h respectivement. Autrement dit, la vitesse maximale sur autoroute quand il pleut est de 110km/h, la vitesse maximale sur les routes à chaussées séparées quand il pleut est de 100km/h, et la vitesse maximale quand il pleut sur les autres routes est de 80km/h (même quand elles comportant deux voies dans un même sens de circulation, donc).

[#] Étant entendu que ce qui compte est la première obtention du permis, pas celle de la catégorie de véhicule qu'on conduit : autrement dit, quelqu'un qui vient d'obtenir le permis moto mais qui a le permis voiture depuis longtemps n'est pas concerné, le fait qu'il conduise une voiture ou une moto est indifférent.

[#2] Même si on est, par ailleurs, titulaire du permis depuis longtemps dans une autre catégorie, cf. la note précédente : en clair, quelqu'un qui a le permis voiture depuis longtemps mais passe le permis moto est concerné pendant qu'il prépare ce dernier mais plus dès qu'il l'aura obtenu. C'est du moins ce que je comprends.

En disant ça, cependant, est-ce que j'ai tout dit ? Non ! Parce que la question se pose de savoir comment cet abaissement des limitations implicites interagit avec une limitation explicite. Par exemple, s'il pleut et que je vois un panneau indiquant une limitation explicite à 110km/h ou à 90km/h, à quelle vitesse puis-je rouler ? La réponse est : 100km/h dans le premier cas, mais dans le second cas, ça dépend si on est sur une autoroute ou route à chaussées séparées (auquel cas le 90km/h explicite reste 90km/h, même en cas de pluie) ou une autre route (auquel cas le 90km/h doit être lu comme 80km/h). C'est un poil subtil, et même les moniteurs d'auto-école peuvent se tromper[#3].

[#3] Je le sais parce qu'il y a un jour où (pour des raisons d'organisation qu'il n'y a aucun intérêt à raconter) mon auto-école a dû m'emmener sur le plateau moto en voiture, c'est-à-dire qu'on m'a collé comme passager à une élève qui passait le permis B, du coup j'ai assisté à un bout de sa leçon, et à un moment le moniteur lui a demandé la vitesse limite, elle ne savait pas parce qu'elle n'avait pas vu le panneau, il lui a dit que le panneau annonçait 90km/h mais que c'était donc 80km/h pour elle — or il s'agissait d'une autoroute, précisément la A6b ici, si bien que le 90km/h veut vraiment dire 90km/h, même en cas de pluie ou pour un apprenti conducteur. Mon moniteur à moi m'avait correctement dit de rouler à 90km/h dans ces circonstances et à 100km/h si je voyais une limitation à 110km/h, mais n'avait pas vraiment expliqué la logique.

Le Code de la route, pour une fois, est clair (ce qui ne veut pas dire qu'il soit simple) : en cas de pluie et dans les autres circonstances que j'ai décrites, la limitation est abaissée à 110km/h sur les autoroutes normalement limitées à 130km/h, à 100km/h sur les sections d'autoroute limitées à une vitesse plus faible ainsi que les voies à chaussées séparées, et à 80km/h sur les autres routes. Donc, sur une autoroute ou voie à chaussées séparées : 130 devient 110, toute valeur de limitation explicite <130 mais ≥100 devient 100, et toute limitation explicite ≤100 reste à la valeur qui est annoncée (notamment 90, ce qui est un cas courant) ; sur une autre route, toute valeur de limitation explicite ≥80 devient 80, mais toute valeur ≤80 reste ce qu'elle est. En tableau :

Type
de route
Panneau de limitation
Absent1301109080706050
Autoroute130→110130→110110→1009080706050
R. chaussées séparées110→100***110→1009080706050
Autre route80******90→8080706050
Agglomération50************706050

Tableau à lire de la façon suivante : en ligne le type de route, en colonne l'éventuelle limitation explicite par panneau, ou bien « absent » s'il n'y a pas de panneau. La valeur indiquée par le tableau est la vitesse limite à appliquée, suivie éventuellement d'une flèche et d'une nouvelle vitesse limite en cas de pluie (ou si on est conducteur sur permis probatoire, etc.) ; trois étoiles indiquent que cette possibilité est censée ne pas exister. La colonne un peu subtile, donc, est celle du 90, où la valeur dépend vraiment du type de route. Par ailleurs, tel que je lis le Code de la route, une limitation à 60km/h en agglomération est censée être impossible, mais ça m'étonnerait que ça n'existe pas quelque part (il faut des limites à la psychorigidité qui consisterait à dire que le maire peut porter la limitation à 70km/h mais pas à 60km/h) ; je ne sais pas bien s'il existe des sections limitées à 120km/h ou à 100km/h.

Je peux justement en profiter pour dire un mot sur ce fétichisme des limitations congrues à 10 modulo 20 (i.e., des multiples de 10 dont le chiffre des dizaines est impair). La logique, d'après mon moniteur du permis B, est que les boîtes de vitesse manuelles prévoient grosso modo l'utilisation de la 1re de 0 à 20km/h, de la 2e de 20km/h à 40km/h, de la 3e de 40km/h à 60km/h, de la 4e de 60km/h à 80km/h, de la 5e de 80km/h à 100km/h, et de la 6e (pour les boîtes qui en ont une) à partir de 100km/h, avec des optima au milieu de ces plages, dont 10km/h pour la 1re (vitesse limite qu'on voit typiquement dans les parkings), 30km/h pour la 2e (vitesse limite pour les zones 30 ou en cas de travaux), 50km/h pour la 3e (vitesse limite en agglomération), 70km/h pour la 4e (vitesse limite de certains grands axes en agglomération), et 90km/h pour la 5e (vitesse limite des routes secondaires jusqu'à récemment). Les voies de décélération sur autoroute sont généralement marquées successivement 90, 70 et 50 (voire 30), ce qui sert indirectement à conseiller des rapports à appliquer à ces endroits.

Voilà le vrai bon argument à souffler aux gilets jaunes pour se plaindre de l'abaissement à 80km/h de la vitesse limite sur les routes secondaires : ça casse toute la logique de ce bel agencement par paliers de 20km/h !

Sauf qu'en fait il existe bien des limitations « exotiques » (autres que 10–20–30–50–70–80–90–110–130 et zones 30), et c'est un petit jeu de les repérer. Voyez par exemple, parmi celles que j'ai notées [liste plusieurs fois étendue après la première publication de cette entrée] :

J'ai le souvenir d'avoir vu un panneau de limitation à 8km/h quelque part [c'était au centre de bus Lebrun, j'ai ajouté dans la liste], un autre à 25km/h, et j'ai vaguement le souvenir de quelques autres chiffres pas multiples de 10. J'ai occasionnellement vu des limitations à 60km/h mais je n'ai pas bien retenu dans quelles circonstances. Les limitations à 80km/h explicites sont souvent là comme rappel de la nouvelle réglementation. Par contre, 100km/h (explicite) ou 120km/h je ne crois pas avoir vu. Si vous avez des exemples intéressants, surtout si on les voit dans Google Street View, n'hésitez pas à me les signaler.

Tiens, encore une petite colle à propos des limitations de vitesse : en voyant un panneau comme celui-ci (limitation explicite à 90 avec un panonceau représentant une voiture — et aussi un panonceau de rappel mais peu importe ici), à quelle vitesse peut-on rouler à moto ? Réponse : 90km/h (le panonceau, qui s'appelle en l'occurrence M4a, fait référence à tous les véhicules dont le poids total autorisé en charge est inférieur à 3.5t, dont les motos, malgré l'apparence du pictogramme).

Encore un petit pinaillage dans le même genre : quelque part sur le réseau autoroutier francilien (je pense que c'était sur l'A86, mais je ne vais pas m'amuser à retrouver l'endroit exact), après une section à une vitesse réduite (peut-être temporairement pour travaux) j'ai vu un panneau marquant une fin de limitation, je ne sais plus si c'était spécifiquement une fin de limitation de vitesse (panneau B33 blanc avec le chiffre en noir et barré de noir) ou une fin générale d'interdiction (panneau B31 blanc barré de noir), mais toujours est-il que la question est : quelle était la limitation de vitesse après ce panneau ? La règle générale voudrait qu'on retombe dans la limitation implicite[#4] qui, sur le réseau autoroutier, est de 130km/h (par beau temps). Sauf qu'aussi près de Paris il n'y a aucune section limitée à 130, donc je pense que c'est vraiment une erreur et qu'il aurait fallu mettre un 110 explicite.

[#4] Les limitations de vitesse ne sont pas une pile : s'il y a une limitation à 110, puis une à 70, puis une fin de limitation à 70, on tombe à la valeur par défaut (qui est 130 sur autoroute), pas au 110 qui était là avant le 70.

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(jeudi)

Je réussis le plateau moto (et je médite sur la manière dont le cerveau apprend)

Cette entrée fait suite à celle-ci et à celle-ci (et sans doute à quelques autres entre temps), mais je résume : je suis inscrit pour passer le permis moto (A2), et ce dernier comporte deux épreuves (sans compter l'épreuve théorique générale = « code », que je n'ai pas besoin de repasser) : l'épreuve hors circulation ou « plateau », et l'épreuve en circulation ou « conduite », qui doivent être validées successivement.

Je viens de passer avec succès l'épreuve de plateau cet après-midi à Gennevilliers. (Pour qu'il n'y ait pas de confusion : ça ne me donne, en soi, le droit à absolument rien, à part à [prendre des cours pour] passer la seconde épreuve.) Il m'aura fallu 87 heures de formation (en 28 séances de généralement trois heures) étalées sur cinq mois : ce n'est sans doute pas un record historique, mais c'est vraiment vraiment mauvais ; ceci étant, comme pour le permis voiture (obtenu au bout de 73 heures), je peux au moins dire que je l'ai eu du premier coup, et avec un score très correct (à savoir, A à toutes les épreuves sauf un B au parcours lent). Je raconte ça plus en détails ci-dessous, mais c'est aussi pour me poser des questions sur la manière dont on apprend, et le temps qu'il faut pour.

Je redis rapidement ce que j'ai déjà expliqué : l'épreuve de plateau du permis moto comporte cinq exercices (qui se déroulent sur un terrain de 130m×6m, le fameux plateau) :

  1. poussette+vérifications ;
  2. parcours lent ;
  3. parcours rapide : freinage d'urgence ;
  4. parcours rapide : slalom+évitement ;
  5. fiches (interrogation orale sur la sécurité).

Chacun de ces exercices est noté A, B ou C (sauf le premier qui ne peut être noté que A ou B) ; pour les 2e, 3e et 4e exercices, le candidat a droit à deux essais sauf en cas de chute de la moto qui est immédiatement éliminatoire. (Et je ne sais toujours pas avec certitude si on retient le meilleur des deux essais ou le deuxième, mais la question ne se pose pas vraiment[#].) La condition pour valider l'épreuve est d'obtenir au moins deux A et aucun C sur l'ensemble des cinq exercices. (Remarquons qu'en pratique, il est très rare d'obtenir un B à l'un ou l'autre exercice du parcours rapide — quasiment toutes les fautes[#2] valent la note C —, ce qui, du coup, rend un peu stupide tout le système de notation : la condition de validation devient simplement de ne pas avoir de C et du coup le premier exercice n'a plus aucune importance ; mais bon, ce n'est pas moi qui ai fait les règles !)

[#] Parce que si on a un C à un exercice on doit de toute façon faire un deuxième essai (et les deux interprétations sont équivalentes), et si on a un B l'intérêt d'en faire un est extrêmement douteux.

[#2] Quasiment la seule possibilité qui vaudrait un B à une épreuve du parcours rapide consiste à poser deux fois un pied à terre lors du demi-tour en bout de piste. Certes, ça peut arriver, mais ce n'est vraiment pas fréquent.

Je décris un petit peu plus les exercices, mais de façon quand même un peu moins verbeuse que la dernière fois, et en ajoutant des commentaires, que je peux maintenant me permettre de faire, sur leur difficulté :

  1. L'exercice de poussette+vérifications consiste d'abord à faire une toute petite manœuvre en poussant la moto, moteur arrêté, à la force des bras (enfin, des jambes), le long d'une courbe, d'abord vers l'avant puis vers l'arrière ; puis à faire (ou indiquer comment on ferait) des vérifications techniques sur l'état de la moto (du genre : vérifier l'état du pneu avant, ou le fonctionnement des clignotants). • La poussette demande un petit peu de force physique, mais en tout état de cause c'est très facile vers l'avant, et un peu moins vers l'arrière (on peut rater la courbe et on n'a le droit de corriger la manœuvre qu'une seule fois). Les vérifications sont faciles puisque c'est du par cœur, mais il est un peu agaçant qu'il y ait un certain flou artistique sur ce qu'on doit dire exactement pour certaines d'entre elles (du style faut-il vérifier que les appels de phare fonctionnent bien quand on demande de vérifier l'éclairage avant ?). En tout état de cause, comme je le dis plus haut, cet exercice est essentiellement sans importance.
  2. Le parcours lent consiste à faire un parcours un peu tarabiscoté entre des cônes et des piquets disposés sur le plateau : une partie est chronométrée (il faut prendre au moins 20s pour parcourir environ 27m, sans poser le pied à terre), il y a un point où on doit s'arrêter au milieu d'un demi-tour, et enfin il y a une partie où on embarque un passager. • L'avis quasi-universel (et qui est aussi le mien) est que c'est l'exercice le plus difficile de l'épreuve (surtout la partie chronométrée) : arriver à suivre un parcours sinueux, en restant en équilibre et en allant aussi lentement que possible demande un véritable entraînement (je vais y revenir), surtout quand il faut y arriver « à froid » ; le demi-tour n'est pas sans difficulté non plus, et le retour avec passager, même s'il est plutôt facile, pose le problème qu'on ne peut pas s'y entraîner si souvent que ça.
  3. Le freinage d'urgence consiste à faire un simple aller-retour en 3e, à atteindre ≥50km/h à un certain point dans le retour et, à partir de ce point (et pas avant !), à freiner de manière à s'arrêter avant une ligne située environ 15.75m plus loin (ou 19.65m plus loin si la piste est humide le jour de l'épreuve). • Cet exercice présentait une difficulté réelle tant que les motos n'étaient pas équipées d'ABS (si on freine trop fort, la roue avant bloque, et on est par terre) ; maintenant, il est beaucoup plus facile : les moniteurs insistent néanmoins sur l'importance d'arriver à le réaliser sans déclencher l'ABS (au moins à la roue avant), et même en ignorant le problème de l'ABS, il reste quelques difficultés (atteindre la vitesse exigée sans pour autant aller trop vite ce qui rendrait l'exercice impossible, ne pas anticiper le freinage, et bien sûr, freiner suffisamment).
  4. Le slalom+évitement consiste aussi à faire un aller-retour en 3e, cette fois-ci en slalomant entre des cônes à l'aller (et en atteignant ≥40km/h à un certain point) et, au retour, à atteindre ≥50km/h puis à effectuer une « manœuvre d'évitement » (en gros, une chicane pour éviter de taper un obstacle devant soi) puis un arrêt de précision dans un rectangle bien défini. • Les avis sur la difficulté de cet exercice varient, personnellement j'ai trouvé que c'était le plus facile (très intuitif et, honnêtement, vraiment rigolo à accomplir grâce à la magie du contre-braquage) : pour les deux exercices du parcours rapide j'avais parfois du mal à stabiliser ma vitesse à la bonne valeur, mais autant pour le freinage d'urgence je ne pouvais pas me permettre d'aller trop vite sous peine de ne pas freiner en l'intervalle alloué, autant pour celui-ci j'arrive sans trop de mal à le faire avec 5km/h voire 10km/h en plus du minimum imposé (aller comme retour).
  5. L'interrogation orale consiste à tirer au hasard une fiche parmi 12 qui évoquent des questions de sécurité à moto, et à en parler (la fiche comporte un titre et un plan sommaire proposé). • Il n'y a pas là de difficulté particulière même s'il y a quand même un certain nombre d'informations à mémoriser.

Il faut préciser une chose importante : l'examen se fait à froid, au sens où même si on prend une leçon de moto le matin même (comme l'auto-école le recommande) pour s'échauffer et/ou si on conduit une moto jusqu'au centre d'examen (en suivant le moniteur qui amène des autres élèves en voiture), le temps de faire les formalités administratives, le temps que l'inspecteur fasse passer en premier les candidats qui font l'épreuve de circulation — et pendant ce temps on ne peut pas toucher à la moto — on est « froid » quand il s'agit de passer. C'est vraiment une part importante de la difficulté de l'épreuve, et en tout cas de celle du parcours lent : je pense que l'exercice serait considérablement plus facile si on avait le droit ne serait-ce qu'à cinq minutes d'échauffement avant de passer. (Après, je ne dis pas que ce serait forcément souhaitable qu'il soit plus facile ! Et je comprends qu'il puisse y avoir des difficultés pratiques insurmontables.)

J'avoue que je commençais à en avoir marre d'enfiler les heures à répéter encore et toujours les mêmes exercices (sur le plateau d'entraînement, on ne s'entraîne que peu à la poussette+vérifs et pas du tout aux fiches, donc c'était essentiellement : parcours lent, freinage d'urgence, slalom+évitement, répété ad lib. pendant toute la séance). Mais c'est relativement intéressant pour ce que ça trahit sur la manière dont le cerveau apprend : il y a, dans cette combinaison d'exercices, des choses qui s'acquièrent de manière consciente et d'autres qui fabriquent des automatismes, et il y a des choses qui viennent progressivement et d'autres qui font « clic » ; et même au sein d'un seul exercice, plusieurs de ces éléments peuvent se mélanger.

Voici notamment quelle a été ma progression sur le parcours lent (sur 87 heures de formation[#3], donc), en me concentrant sur la partie chronométrée :

[#3] En gardant néanmoins à l'esprit que sur 3h de formation, il y a facilement 45min de temps d'aller-retour jusqu'au plateau (temps qui est donc passé à faire de la moto — sauf les toutes premières séances où on est passager —, mais qui prépare plus à l'épreuve de circulation qu'à l'épreuve de plateau), et encore 15min de battement un peu inévitable le temps que tout le monde arrive, qu'on aille prendre les motos, etc. Donc les temps réellement passés à préparer l'épreuve de plateau sont environ 2/3 de ce qui est indiqué (et je pense que je passais, à la louche, la moitié du temps sur le plateau à travailler le parcours lent).

  • Les 26 premières heures, je n'y arrivais pas du tout. (Comme je partais du point où je n'étais monté sur un deux-roues motorisé que comme passager, et encore, seulement une poignée de fois, ce n'est évidemment pas surprenant.)
  • Ensuite, un moniteur qui insistait plus sur l'aspect technique des choses m'a (1) expliqué qu'il ne fallait pas viser une allure constante, mais apprendre à débrayer juste un tout petit peu, quand on sent qu'on perd de l'équilibre, pour regagner cet équilibre, (2) fait travailler en cercle et en huit à allure lente, et (3) donné des instructions précises sur l'endroit où placer mon regard à chaque point du parcours. À partir de là j'ai commencé à arriver de temps en temps à faire chacun des bouts du parcours lent (et notamment la partie chronométrée), puis le parcours tout entier.
  • Entre la 30e et la 50e heures de formation, j'arrivais de temps en temps mais irrégulièrement à faire le parcours lent entier sans faute. Mais mon principal problème était que, si j'y arrivais de mieux en mieux à chaud, à chaque nouvelle séance, les premiers essais (à froid, donc, comme se fait l'examen) étaient presque toujours ratés. Je commençais à avoir l'impression de stagner. (J'avais raconté ce problème ici en insistant sur l'importance de la différence entre y arriver à froid ou à chaud.)
  • Entre la 51e et la 72e heures j'ai commencé à y arriver de plus en plus souvent même à froid. (Il y a cependant eu 7 heures qui ont été plus ou moins perdues parce que le plateau était gelé et qu'on ne pouvait pas s'entraîner dans de bonnes conditions.) C'est aussi vers ce moment-là que j'ai enfin pris l'habitude de serrer correctement la moto entre mes jambes (je veux dire, que c'est devenu naturel au lieu que que je doive y penser consciemment à chaque fois, et du coup que j'oublie bien trop souvent).
  • À partir de la 73e heure je peux dire que j'y arrivais de façon vraiment très régulière et reproductible, même à froid (en mettant, au pire, un pied à terre de temps en temps quand je déroulais mal ma trajectoire — c'est ce qui m'est arrivé à l'examen). Dès lors, mon principal souci a été d'arriver à le faire de plus en plus lentement et d'apprendre à garder l'équilibre dans des circonstances de plus en plus précaires (par exemple en calant exprès le moteur et en vérifiant que j'arrivais à le démarrer avant de perdre l'équilibre).
  • Les moniteurs m'ont proposé une date d'examen au bout de 66 heures, et l'ont confirmée au bout de 75h. Les dernières séances servaient surtout à ne pas perdre l'habitude (et les 9h que j'ai faites cette semaine-ci étaient sans doute excessives).

À la fin, je me demandais un peu mais où est donc la difficulté, en fait ? et je m'amusais à faire des marches aléatoires sur le plateau à 3km/h au compteur juste parce que j'y arrivais (mais bon, en finissant toujours par mettre un pied à terre et moins faire le malin).

Bref, c'est surprenant comme je suis passé, par des déclics et des progrès graduels, de je n'y arrive pas du tout à j'y arrive mais seulement à chaud (et je ne progresse plus) à finalement j'y arrive et je trouve ça facile. J'ai été très lent sur cette progression, mais j'imagine que beaucoup de ceux qui ont fait la même formation ont eu des étapes semblables.

J'imagine vaguement le type de mécanismes neurologiques qui pourraient faire qu'en apprenant quelque chose on ait un déclic qui fait que tout d'un coup « ça marche » (j'avais ressenti quelque chose de ce genre en apprenant à faire du snowboard), je suppose qu'il y a une structure neurologique commandant à un automatisme qui se met en place. Mais ce qui est plus inattendu c'est cette histoire de choses qui marchent à chaud et pas à froid, comme si la structure neurologique était en place mais qu'il fallait que la mémoire à court terme intervienne pour l'activer.

Pour les épreuves du parcours rapide, j'ai eu l'impression qu'il ne s'agissait pas tant d'acquérir des automatismes que de trouver, par une recherche plutôt consciente, la technique avec laquelle on y arrive le plus facilement (et notamment pour atteindre et stabiliser la vitesse). La difficulté était donc de nature assez différente.

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(samedi)

Quelques nouvelles en vrac (chronologie et géographie)

Je peux commencer cette entrée en recopiant presque verbatim quelques passages de celle-ci que j'écrivais il y a à peine plus d'un an :

J'ai déjà dit plusieurs fois sur ce blog que je préférais éviter d'écrire des billets dont le seul contenu est essentiellement de dire je suis toujours vivant (et je n'ai rien d'autre à dire), mais comme cela fait vraiment longtemps que je n'ai rien écrit, je vais quand même faire une exception et signaler que je suis toujours vivant (et je n'ai pas décidé de mettre un terme à ce blog, ni quoi que ce soit de ce genre). Je suis juste encore plus débordé que d'habitude.

Le truc avec le temps c'est qu'il se fragmente mal : on peut facilement se retrouver avec plein de petits bouts de temps libre, mais ces petits bouts sont inutilisables parce que chacun est trop court pour faire quelque chose de productif.

(Et comme quelqu'un me signalait en commentaire de cette entrée-là, il y a des activités qui ne prennent que la moitié de votre temps — à savoir une minute sur deux. J'aime beaucoup la comparaison.)

Le fait que ça arrive à la même période de l'année n'est pas un hasard : je donne des cours à Télécom ParisPloum en première année et en deuxième année, et comme les années sont gérées de façon complètement indépendantes, ces cours ont lieu sur des périodes qui se chevauchent : mes cours en première année touchent à leur fin mais ceux en deuxième année ont déjà commencé. Or à la fin d'un cours il peut y avoir un sujet de contrôle à préparer, et des copies à corriger ; et au début d'un cours il faut réfléchir à la manière de l'organiser[#], chose qu'on aurait dû faire longtemps avant mais pour laquelle on s'y prend évidemment toujours à la dernière minute (je ne prétends pas que ce ne soit pas de ma faute, donc). Et ce n'est pas comme si les autres choses chronophages cessaient pour autant[#2].

[#] Surtout quand, comme c'est le cas de mon cours de géométrie algébrique, enfin, de courbes algébriques, on se demande chaque année comment diable présenter quelque chose de rigoureux mais néanmoins digeste pour des étudiants en école d'ingénieurs qui ne savent pas grand-chose en algèbre (et notamment pas ce qu'est un produit tensoriel) ; par exemple, ni cette approche ni celle-ci n'a été une bonne idée.

[#2] À titre d'exemple, je racontais dans cette entrée que j'avais demandé par erreur ma mutation du régime fonctionnaire au régime général de la Sécurité sociale : j'espérais avoir attrapé l'erreur à temps en envoyant immédiatement une lettre à la CPAM pour les prier d'ignorer cette demande de mutation, mais évidemment, ça n'a pas été le cas, et trois mois plus tard je reçois une lettre de la CPAM me souhaitant la bienvenue chez eux et une lettre de la MGEN m'informant qu'ils se dessaississent de mon cas, donc j'ai de nouveau dû perdre du temps à constituer un dossier à joindre à une nouvelle lettre pour essayer de rétablir la situation.

Écrire une entrée de blog me demande non seulement du temps, mais aussi du temps sous forme contiguë : à chaque fois que je travaille une entrée et que je ne la finis pas, l'agacement de devoir faire des changements de contexte mentaux pour m'y mettre fait que ma motivation à la travailler diminue d'autant — et c'est souvent à cause de ça que des choses que je commence peuvent s'embourber dans les marais de l'inachèvement permanent. J'ai en tête (enfin, en matière de tête, plutôt un fichier memepool.txt) toutes sortes de choses dont je pourrais parler et dont je voudrais parler, mais il est sacrément plus facile d'ajouter des choses à la liste que de les en évacuer : si je commence à écrire une introduction au topos effectif, par exemple (ce qui fait partie des choses dont j'aimerais dire un mot), je sais très bien que mon intention d'écrire un texte court va être un nouvel échec critique… (Ceci dit, je dois avouer que l'entrée précédente sur la logique linéaire a été un chouïa moins interminable que je ne le craignais.)

Twitter est, à cet égard, à double tranchant : d'un côté, il est très difficile d'arriver à commencer un tweet et de ne pas trouver le moyen de le finir (ça m'est quand même arrivé — si, si). De l'autre, en me fournissant un exutoire pour tout ce qui peut se dire en peu de mots, il nourrit ma tendance malheureuse — et dont je n'arrive pas à me défaire — à considérer que je ne peux/dois/sais écrire dans mon blog que des textes longs[#3].

[#3] Prétérition : supposons que je veuille signaler le fait — dont je ne me suis rendu compte que récemment — qu'on peut étiqueter de façon élégamment symétrique les dix points et les dix droites de la configuration de Desargues (c'est-à-dire les dix points et dix droites qui interviennent dans l'énoncé du théorème de Desargues) par les 10 choix de deux éléments parmi {1,2,3,4,5} (un point étant situé sur une droite lorsque les ensembles de cardinal 2 qui les étiquettent sont disjoints). Si je raconte ça sur Twitter, je vais arriver à être succinct et m'en tirer en quelques tweets. Si je raconte ça sur mon blog, je vais me sentir inexplicablement obligé de faire un brain dump de toutes sortes de choses inutiles sur le théorème de Desargues, par exemple qu'il n'est pas valable dans le plan projectif octonionique, ou qu'il est une conséquence du théorème de Pappus mais que le contraire n'est pas vrai ; puis je vais parler des configurations (n3) puisque Desargues fournit un (10₃) et Pappus un (9₃) je vais commencer à dire qu'il y a un (8₃) essentiellement unique mais pas sur n'importe quel corps et un (7₃) idem, puis je vais digresser sur Cremona-Richmond qui est un magnifique (15₃), et là j'en viendrai à parler des droites sur la surface cubique ; et si j'en viens à évoquer le très joli texte de Cremona de 1877 (Teoremi stereometrici dai quagli si deducono le proprietà dell'esagrammo di Pascal, Reale Accademia dei Lincei) dans lequel il explique comment déduire le théorème de l'hexagone de Pascal, qui est une généralisation de celui de Pappus, de la considération judicieuse d'une surface cubique avec un point double ordinaire de type (A₁), et que les 60 points de Kirkman de l'hexagramme mystique forment 6 configurations de Desargues (une par pentade sur les six points de l'hexagone) et comment il faut les étiqueter, je n'en aurai jamais fini ! Rien qu'en écrivant cette prétérition j'en ai dit plus que ce que je pensais, alors imaginez si j'écrivais vraiment une entrée sur le sujet…

Entre autres activités chronophages, j'en suis toujours à essayer d'apprendre à manier une moto. (Peut-être que si j'avais su que ç'allait être aussi long, je n'aurais pas essayé de passer le permis A2, mais maintenant qu'il commence, à force de progrès logarithmiques, à devenir plausible que je puisse éventuellement à terme pouvoir envisager d'imaginer le présenter, autant aller jusqu'au bout.) L'an dernier, donc, j'étais un peu dans le même cas s'agissant d'apprendre à conduire une voiture : ça va bientôt faire un an que j'aurai passé le permis B — j'ai l'impression que ça fait une éternité.

Je me disais justement l'autre jour que le fait d'avoir passé le permis m'a au moins fait progresser sur une chose, c'est ma connaissance de la géographie de l'Île-de-France. Parce que, avant, en bon Parisien-qui-n'a-même-pas-le-permis, mon savoir en la matière s'arrêtait très distinctement au boulevard périphérique : mon poussinet et moi passions nos week-ends à nous promener dans Paris et n'allions que très exceptionnellement nous aventurer dans les contrées barbares qui s'étendent au-delà du pomerium. Bon, comme j'ai grandi à Orsay, je savais quand même situer les communes de la vallée de Chevreuse, mais c'est à peu près tout. Maintenant que le poussinet s'est acheté une voiture et que nous sommes passés résolument dans le club des vilains pollueurs (enfin, le week-end), nos terrains de balade se sont beaucoup élargis et j'ai une idée nettement plus précise de comment s'agencent les communes et les routes de ma région natale.

Il y a un sentiment que j'aime beaucoup (et qui mériterait peut-être à figurer dans le le Dictionary of Obscure Sorrows), c'est le petit déclic mental qui se produit quand je réussis enfin à correctement situer géographiquement un endroit que je connais, par exemple un endroit où je suis souvent allé quand j'étais petit, ou encore quand je me rends compte que tel endroit que je connaissais est à côté de tel autre et que je ne m'en étais pas rendu compte (voir aussi la note #6 ci-dessous). C'est un déclic de clarté un peu semblable à celui que j'aime tellement quand j'ai la réponse à une énigme ou à un problème de maths qui me plaît. Or il y a quantité d'endroits en Île-de-France où je suis passé quand j'étais petit, des trajets que j'ai faits en voiture[#4] avec mes parents, peut-être même à de nombreuses reprises, et que je ne pouvais absolument pas situer, et c'est une grande satisfaction pour moi de pouvoir enfin les situer correctement sur une carte, ou d'aller mettre les pieds à un endroit que je n'avais vu qu'en passant en voiture[#5].

[#4] Quand on va d'Orsay à Paris en voiture, outre qu'il y a principalement deux trajets possibles (via la N118 pour atteindre le pont de Sèvres et l'ouest de Paris ou via la A10+A6 pour rejoindre le sud), il y a aussi toutes sortes d'endroits où il faut faire des choix, c'est-à-dire se placer sur la bonne voie, même si certains de ces choix sont sans importance (par exemple, il y a deux branches de la A6, la A6a et la A6b, mais il y a en fait toutes sortes de moyens de passer de l'une à l'autre). J'avais plus ou moins inconsciemment mémorisé ces choix, mais je comprends enfin maintenant où mènent les différentes branches possibles à chaque endroit, et aussi à quoi ressemblent les endroits que la voie rapide traverse. • TODO : écrire quelque chose sur l'interconnexion entre la A86 et la A6, qui n'est que partielle, et ce qu'il faut faire pour chaque combinaison possible entre une direction d'où on vient et une direction où on veut aller.

[#5] À titre d'exemple, je suis passé plein de fois à cet endroit en voiture avec mes parents (quand nous allions depuis Orsay rendre visite à des amis qui habitaient Sèvres) : à gauche, Bièvres et la vallée du même nom, à droite, la forêt de Verrières. Il y a trois semaines, le poussinet et moi sommes allés nous promener dans la forêt de Verrières, et j'ai pu regarder ce même endroit depuis un autre point de vue — c'était presque une épiphanie géographique.

À cet égard, je regrette, quand j'ai préparé le permis lui-même, de ne pas avoir fait plus attention aux endroits par où je passais pendant les leçons (j'aurais pu, par exemple, mettre mon téléphone en mode enregistrement GPS pour garder trace des trajets). Au début, nous allions le plus souvent au cimetière de Chevilly-Larue, j'ai pu reconstituer de mémoire les trajets aller et retour typiques[#6], et encore, avec quelques hésitations ; j'ai pu retrouver quelques autres endroits qui m'avaient marqué, par exemple ici où il faut penser à clignoter à gauche puisqu'on ne peut pas continuer tout droit (en fait, j'ai beaucoup circulé à l'Haÿ-les-Roses), mais il y a aussi plein d'autres endroits où je suis passé pendant mes leçons de conduite, dont j'ai gardé une mémoire visuelle mais que je ne sais plus replacer sur la carte.

[#6] Même sur ce tout petit trajet, j'ai eu l'occasion, en le reconstituant sur Google Maps, de faire une petite découverte géographique : l'endroit où le trajet aller et le trajet retour se croisent n'est pas, en fait, un vrai croisement, il y a un pont à Arcueil où nous passions au-dessus à l'aller et en-dessous au retour, et je n'avais pas du tout fait le lien entre ces « deux » endroits.

Quand je préparerai l'épreuve de circulation du permis moto (enfin, espérons que ça finisse par arriver !), j'essaierai de penser à enregistrer les trajets par GPS.

Pour revenir à la géographie francilienne, mon poussinet et moi avons entrepris de faire le tour des forêts, histoire de changer un peu des parcs et jardins plus aménagés :

Forêt de Fontainebleau (du côté de la Croix du Calvaire)
Forêt de Meudon
Forêt de Montmorency
Forêt de Compiègne (du côté du belvédère des Beaux Monts) (d'accord, techniquement, ce n'est pas en Île-de-France)
Forêt de Sénart
Domaine et forêt de Marly
Forêt de Saint-Germain-en-Laye
Forêt de Montmorency
Forêt de Rambouillet (du côté des étangs de Hollande)
Forêt des Fausses Reposes
Forêt de Verrières
Forêt de Meudon
Haute Vallée de Chevreuse (du côté de Port-Royal-des-Champs)
Forêt de Fontainebleau (du côté du Mont d'Ussy)
Haute Vallée de Chevreuse (abbaye des Vaux-de-Cernay)
Forêt de la Malmaison

Suite : Voir cette entrée ultérieure pour les visites de forêts ultérieures.

Comme je le disais dans cette entrée passée après avoir visité les forêts de Marly et Louveciennes, j'ai tendance à penser une forêt c'est une forêt, et en Île-de-France elles doivent toutes se ressembler (ou sinon, être aussi variées d'un point à l'autre de la même forêt qu'entre deux forêts de la région), mais en fait non, il y a vraiment des différences, même si je n'arrive pas bien à mettre le doigt dessus, dans les essences représentées (je suis complètement nul en botanique donc je ne saurai pas être plus précis), dans la densité d'arbres, dans le relief, dans le type de sol, etc. — j'aurais pu ajouter : dans le fait que la forêt soit exploitée ou non et dans les coupes qui y ont été faites (et qui jouent sur l'âge des arbres). La forêt de Fontainebleau ne ressemble vraiment pas aux autres dans ma liste ; à l'inverse, il faut admettre que les forêts de Meudon, des Fausses Reposes, de Verrières et de la Malmaison se ressemblent beaucoup, c'est normal, elles sont très proches géographiquement, mais même là il y a des différences ; ceci étant, je les confonds déjà un peu dans ma tête donc je ne pourrais pas faire un petit guide (ça doit aussi dépendre des endroits que nous avons visités, et, de façon cruciale, de la saison où nous sommes passés puisque évidemment on n'a pas la même impression d'une forêt en mai, en octobre ou en février).

Quant à l'abbaye des Vaux-de-Cernay, je mentionne qu'on peut y prendre le brunch dans la salle capitulaire : c'est cher, mais pour un bon repas dans le cadre exceptionnel, je trouve que ça vaut le coup. (Quelques photos ici sur Twitter.)

Sinon, dans un genre nettement moins bucolique que Cernay, la semaine dernière, le poussinet et moi sommes allés jeter un coup d'œil (de l'extérieur !) au poste de transformation électrique de Villejust, sans doute un des plus gros de France (voire d'Europe ?) : il s'agit d'un des postes de transformation de la boucle ceinturant Paris à 400kV (et soutenant une seconde ceinture à 225kV plus proche de la capitale) : si on a comme moi une certaine fascination pour l'électricité de puissance, c'est assez impressionnant à voir — que ce soient les rangées d'isolateurs dans le poste lui-même ou les alignements de câbles qui y conduisent. (Quelques photos ici sur Twitter.) C'est d'ailleurs facile de localiser ce poste sur une carte ou dans la réalité : chercher où convergent un nombre faramineux de lignes à haute tension !

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(jeudi)

Je continue d'apprendre à manier une moto

Pour ceux qui ont raté l'épisode précédent, je vous le résume très succinctement : je me suis inscrit (en septembre) pour passer le permis moto. Pour l'obtenir, je dois passer successivement une épreuve hors circulation (ou plateau), puis une épreuve en circulation (ou conduite) : je ne parle ici que de la première, parce que j'en suis toujours à ce point-là. Cette épreuve est composée de cinq exercices, chacun noté A, B ou C (sauf le premier, qui ne peut pas être noté C) : la condition pour valider l'épreuve est d'obtenir au moins deux A et aucun C sur l'ensemble des cinq exercices[#]. Les 2e, 3e et 4e exercices (respectivement parcours lent, freinage d'urgence et slalom+évitement) sont des parcours à effectuer avec la moto sur un terrain de 130m×6m appelé plateau ; on dispose de deux essais pour y arriver (sauf en cas de chute). Je fais un nouveau petit point sur le sujet parce que je m'ennuie.

[#] Comme je le disais, d'ailleurs, ce système de notation est assez stupide : il y a deux des cinq exercices où il est quasiment impossible d'obtenir la note B (presque toutes les erreurs entraînent la note C). Toute personne ayant un minimum de sens logique doit bien voir que, s'il y a deux exercices où on n'obtient jamais de B, la première condition dans obtenir au moins deux A et aucun C est impliquée par la deuxième, et du coup, la distinction entre A et B disparaît effectivement : mais alors, le premier exercice, qui ne peut entraîner que les notes A et B, n'a plus aucun intérêt !

J'ai maintenant fait 50 heures de formation réparties sur 16 séances et sur un peu plus que 13 semaines (en comptant une interruption pour tendinite). Et, oui, c'est très long. (Je n'ai pas de statistiques précises, et je ne crois pas qu'il y en ait, mais je crois comprendre que, à la louche, la plupart des candidats réussissent l'épreuve après environ la moitié de ce temps.) J'arrive actuellement « souvent » à réussir chacun des différents exercices, — où souvent est à comprendre comme signifiant quelque chose autour de 2 fois sur 3, peut-être un peu plus. Ce qui devrait suffire à passer l'examen[#2][#2b] si la réussite de chaque tentative était une variable aléatoire indépendante des autres avec cette probabilité. L'ennui, c'est que ce n'est pas du tout le cas : à chaque séance, et dans une moindre mesure à chaque fois que je change d'exercice ou qu'on change la disposition du parcours (il y a deux dispositions qui sont miroir l'une de l'autre), je commence par me planter lamentablement environ trois fois avant de retrouver mes marques et d'y arriver ensuite assez reproductiblement.

[#2] [Graphe de p↦(1−(1−p)²)³]Si on a trois exercices à passer et que, pour chaque exercice on a droit à deux essais pour y arriver, la réussite à chaque essai étant indépendante de probabilité p, la probabilité de réussir l'épreuve vaut (1−(1−p)²)³ = 8p3 − 12p4 + 6p5 − p6, fonction dont le graphe est tracé ci-contre (en bleu-vert ; avec la fonction identité en mauve pour comparaison). On peut se rappeler ce que j'avais raconté sur les « amplificateurs de probabilité » (mais celui-ci n'est pas symétrique par rapport à ½) ; ici, il y a un point d'inflection à p = (5−√5)/5 ≈ 0.55, donc on peut dire que l'épreuve vise à sélectionner les candidats qui ont un taux de réussite par essai dans ces eaux-là. Et j'ai tendance à dire que, sur ce plan-là, la procédure n'est pas trop mal faite pour rejeter les mauvais candidats tout en gardant une certaine tolérance pour les erreurs aléatoires.

[#2b] Ajout / éclaircissement : Je devrais préciser (parce que ce n'est sans doute pas clair en lisant mon entrée) que je n'ai pas spécialement de problèmes par ailleurs pour le maniement de la moto en général ; en tout cas, pour la circulation sur trajet vers et depuis le plateau, il me semble que je m'en sors tout à fait correctement. (Ça ne m'empêche pas de trouver ça stressant de se faufiler entre les voitures ou, pire, entre les camions sur l'A6, mais c'est autre chose.) Les difficultés que j'ai concernent vraiment les exercices techniques de l'épreuve plateau, quand je suis à froid.

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(mardi)

Quelques nouvelles en vrac

[Le poussinet devant l'étang de Chèvreloup]Je suis surpris de ne jamais encore avoir parlé dans ce blog de l'arboretum de Versailles-Chèvreloup, qui est pourtant un endroit tout à fait remarquable. Un arboretum, ce n'est pas vraiment un parc d'agrément (sauf celui de la Vallée-aux-Loups — juste à côté de la maison de Chateaubriand —, que j'aime aussi beaucoup, mais qui tient plus du jardin d'agrément que de l'arboretum), mais ce n'est pas non plus une forêt : c'est une sorte de juste milieu entre les deux, et j'aime bien m'y balader en faisant semblant de combler mon ignorance profonde sur les espèces végétales. L'arboretum de Chèvreloup est vraiment très grand (200 hectares) : jusqu'à récemment, seul un quart en était ouvert au public, mais maintenant on peut tout visiter.

Mon poussinet et moi avons visité deux fois (le et le , sachant que l'arboretum n'est ouvert que du 1er avril au 15 novembre), les deux fois il faisait un temps pourri, mais nous avions tout le parc pour nous tout seuls. (Je ne sais pas combien c'est fréquenté en temps « normal », mais là, c'était vraiment désert.) Et nous avons vraiment trouvé ça magnifique. Je recommande donc chaudement. Avec le principal bémol que c'est vraiment merdique d'accès en transports en commun !

En revanche, tant que j'y suis à parler d'arboreta, je ne recommande pas celui de Paris (dans le bois de Vincennes) : il n'a aucun intérêt et sert juste d'espace de pique-nique quand il fait beau. Si on est dans le coin et qu'on aime les beaux jardins, en revanche, il faut visiter ceux de l'école du Breuil, juste en face (dont dépend en fait l'arboretum), et qui sont, eux, impressionnants à voir au printemps ou en été.

[Un chevreau au Potager des Princes à Chantilly]

[Le poulailler du Potager des Princes à Chantilly]

[Le paon albinos du Potager des Princes à Chantilly]

[Les poneys du Potager des Princes à Chantilly]

[Des oies au Potager des Princes à Chantilly]

[Des chèvres naines au des Princes à Chantilly]

[Des cochons nains au Potager des Princes à Chantilly]

[Le jardin potager du Potager des Princes à Chantilly]

Samedi nous sommes allés à Chantilly visiter un petit jardin distinct du parc du château, et que nous avions raté lors de notre précédente visite : le Potager des Princes (autrefois parc de la Faisanderie). C'est plus un parc animalier pour enfants (style ferme pédagogique), et évidemment, en cette saison, c'est plus la faune que la flore qui présentait un intérêt, mais en tout cas, c'est mignon tout plein. Là aussi, le mauvais temps faisait que le poussinet et moi avions le jardin pour nous tout seuls.

Tant que j'y suis à parler de fermes pédagogiques, il y en a un certain nombre qui apparaissent dans Paris (il y a par exemple maintenant des chèvres naines et des moutons d'Ouessan au parc Kellermann), mais si on veut voir des animaux qui ne soient pas nains et qui ne soient pas là juste pour amuser les enfants, il y a la ferme de la Bergerie nationale de Rambouillet qui se visite.

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(mercredi)

Les mystères du contre-braquage d'un deux-roues

Quand on circule avec un deux-roues (vélo, cyclomoteur, moto) à basse vitesse (disons à vitesse infinitésimale), pour tourner, on tourne le guidon dans la direction où on veut aller. Et pour ça, on applique un couple (deux forces opposées sur les deux poignées du guidon) de même sens que la rotation qu'on veut effectuer, faisant pivoter la roue avant dans ce sens. C'est le braquage qu'on pourrait qualifier de « normal ». [Correction () : en fait, ce braquage « normal » est peut-être une simplification abusive, cf. la vidéo liée dans le nouvel ajout plus bas, et notamment le point ① de celle-ci.]

Bon, mais maintenant, quand on applique un couple à une roue en train de tourner autour de son axe, dès lors que le couple n'est pas purement aligné avec la rotation de la roue (i.e., ne tend pas simplement à accélérer ou ralentir cette rotation), il se produit un effet de précession gyroscopique, c'est-à-dire que l'axe de la roue va lui-même subir un mouvement de rotation (précession) ; cette précession se fait à angle droit de ce qu'on imagine intuitivement. Je pourrais essayer de faire des dessins pourris pour le montrer, mais je trouve que cette vidéo est parfaite pour expliquer le phénomène (sans mathématiques), et j'encourage à la regarder. Si vous voulez faire l'expérience vous-mêmes, je conseille le parapluie : faites tourner votre parapluie rapidement autour de son manche (c'est mieux si le pommeau est droit plutôt que courbe, comme ça ce sera un bel axe de rotation), en le tenant au niveau du centre de gravité, et essayez de pousser un peu le pommeau horizontalement : le parapluie s'inclinera vers le haut ou vers le bas.

Sur un deux-roues circulant vers l'avant à vitesse assez élevée, du phénomène de précession gyroscopique résultent deux choses successives :

  • (A) Si j'appuie sur (disons) la partie gauche du guidon (soit en tirant simultanément sur la partie droite, soit en laissant l'axe du guidon produire la force opposée du couple), la roue avant va avoir tendance à pencher vers la gauche sous l'effet de ce couple. Si la roue avant était seule, le mouvement continuerait ensuite en précession de l'axe (comme si on fait rouler une pièce de monnaie et qu'une force l'incline un peu) ; mais la roue avant ne peut pas s'incliner seule, donc le deux-roues penche en bloc vers la gauche.
  • (B) Mais une fois que le deux-roues est penché vers la gauche, la gravité et la réaction du sol constituent un nouveau couple, et l'effet gyroscopique va être, cette fois, de pivoter vers la gauche[#]. Comme la roue avant peut pivoter autour de l'axe (vertical) du guidon tandis que la roue arrière ne peut que tourner autour de son propre axe, la roue avant pivote vers la gauche (donc dans le sens contraire à celui vers lequel on a produit le couple initial), la roue arrière suit la roue avant, et le véhicule dans son ensemble tourne vers la gauche.

[#] En fait, il y a un deuxième effet qui fait qu'un deux-roues a tendance à tourner vers la gauche s'il penche vers la gauche, c'est l'effet de la chasse, c'est-à-dire le fait que l'axe autour duquel la roue avant peut pivoter n'est pas verticale mais oblique (plus avancé à la base qu'au sommet). L'effet gyroscopique et l'effet de chasse sont de même signe, mais j'ignore quelle est leur importance relative dans des circonstances typiques.

On appelle l'ensemble de ce phénomène le contre-braquage[#2] : pour tourner vers la gauche, on pousse (vers l'avant) sur la partie gauche du guidon (ou on tire sur la droite), ce qui est exactement inverse de ce qu'on fait à basse vitesse. Au final, pour faire tourner vers la gauche une moto qui va assez vite, on appuie sur la partie gauche du guidon.

[#2] Du moins, c'est ce que j'appelle contre-braquage dans cette entrée. Il faut noter que, dans ce contexte, le guidon, au final, tourne bien dans le sens dans lequel le deux-roues tourne (certains guides de conduite à moto prétendent que le guidon ne peut pas tourner, mais c'est faux, il s'oriente bien dans le sens du virage : simplement, c'est le sens contraire de celui dans lequel on a poussé, et par ailleurs, cette rotation est faible puisqu'on ne prend pas des virages très serrés à grande vitesse). Certains veulent réserver le terme de contre-braquage pour des cas où le guidon est effectivement tourné dans le sens contraire du sens du virage, mais les circonstances sont assez inhabituelles (il doit y avoir dérapage), donc oublions ça.

Pour plus de précisions ou d'autres descriptions du phénomène, voir cette page (assez orientée pratique) et les vidéos qu'elle contient, cette entrée Wikipédia (beaucoup plus théorique), ou encore cet extrait de l'émission de vulgarisation C'est pas sorcier consacré à la moto.

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(vendredi)

Ruxor passe le permis, lancement de la saison 2 : le permis moto

Vous avez été nombreux à aimer la série Ruxor passe le permis de conduire diffusée en deux parties sur ce blog : (A) L'épreuve théorique générale (entre août 2016 et juillet 2017, incluant des rebondissements comme difficultés administratives imprévues et le mystère de l'origine des questions) et (B) Les leçons de conduite qui durent, qui durent, qui durent (entre août 2017 et février 2018 ; comme cette deuxième partie comptait trop d'épisodes, elle a été coupée au montage). Il y a même eu un spinoff, Le poussinet s'achète une tuture (qui se fait prestement emboutir), mais celui-ci n'a pas eu le succès de la série d'origine.

Les producteurs ont donc décidé de revenir aux fondamentaux avec une deuxième saison de la série Ruxor passe le permis de conduire, intitulée Le permis A2 (ou permis moto).

Bref, je me suis inscrit pour passer le permis moto — et au moment où j'écris j'ai fait 3 séances de 3h de formation.

Hein, quoi ? Mais pourquoi ?

Comme plusieurs personnes ont réagi comme ça, je suppose que c'est une réaction naturelle, mais je suis tenté de demander pourquoi pourquoi ? ? en retour. Je veux dire, je comprends qu'on puisse s'étonner de (l'intérêt de) l'existence même des motos (qui sont vraiment beaucoup plus dangereuses que les voitures, et plus inconfortables de surcroît, pour une consommation à peine plus basse au kilomètre, et dont le seul intérêt semble être de passer les embouteillages), et je ne compte pas essayer de répondre à ça, mais la question semblait plutôt porter sur moi spécifiquement. Par exemple parce que j'ai beaucoup d'aversion au risque, ou bien parce que j'ai galéré pour obtenir le permis voiture et que la conduite d'une moto est certainement plus difficile que celle d'une voiture : je vais revenir sur ces points. Mais je soupçonne aussi que l'expression d'étonnement traduit surtout juste une préconception à mon sujet, à quoi je ne vois pas quoi répondre à part désolé si je ne me colle pas aux préjugés que vous avez sur moi. ☺️

Ceci étant, la question n'est pas infondée, et je peux essayer d'y répondre, même si la réponse ne sera pas forcément meilleure que pas vraiment de raison à part que j'en ai envie.

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(samedi)

Nouvelles balades à Chantilly et Provins, et histoires de voitures

Après Vaux-le-Vicomte, Champs-sur-Marne et Villarceaux, les aventures horticopalatines(?) de Ruxor et du poussinet à la recherche des « jardins remarquables » nous ont menés le week-end dernier à Chantilly (en consentant exceptionnellement à quitter notre pays d'Île-de-France). Le château est joli à voir de l'extérieur, très peu notable de l'intérieur, mais le parc est effectivement remarquable : il y a des parterres organisés par Le Nôtre pour un jardin à la française, certes moins magnifique que celui de Versailles et moins bien conservé que celui de Vaux, et dont les jeux d'eau restants sont peu impressionnants, mais qui demeure néanmoins un beau morceau ; mais ce qui fait surtout l'intérêt de ce parc de Chantilly est une certaine diversité, puisque ce jardin à la française du XVIIe se fond, côté ouest, [L'Île d'Amour du parc de Chantilly]en un jardin à l'anglaise du XIXe, et côté est, en un « petit parc » boisé très agréable et un « jardin anglo-chinois » (sic, mais le caractère chinois n'est vraiment pas évident) du XVIIIe avec un hameau potemkine qui a apparemment inspiré celui de Marie-Antoinette à Versailles. Le petit parc contient aussi, un peu caché, un jeu de l'oie grandeur nature, que nous n'avons malheureusement pas eu le temps d'explorer complètement parce que si on veut suivre la spirale complètement, même sans jouer suivant les règles, c'est vraiment long.

Ma visite des jardins a malheureusement été en partie gâchée par l'intervention d'un prédateur aérien des humains, sans doute de l'espèce Culex pipiens, en tout cas d'une famille de bestioles qui m'aiment notoirement beaucoup.

Mon poussinet nous avait pris une chambre pour la nuit à l'Auberge du Jeu de paume, labelisé Relais & Châteaux, ce qui n'était sans doute pas une bonne idée parce qu'il est dangereux de prendre goût au luxe.

Mais ce que je regrette surtout à Chantilly est que nous avons réussi à rater le Potager des Princes, un jardin juste à côté du parc du château, lui aussi étiqueté « jardin remarquable », mais auquel nous n'avions pas fait attention parce qu'il est séparé du domaine lui-même même s'il en faisait historiquement partie : les gens qui ont fait le plan du parc affiché partout sont quand même assez salauds de ne pas du tout le faire figurer, même pas avec une légende « autre endroit remarquable » ou quelque chose de ce goût.

Hier soir nous avons passé la nuit à Provins[#] (à la Demeure des Vieux Bains, beaucoup plus familiale que l'Auberge du Jeu de paume à Chantilly, mais également très confortable). La ville historique ressemble beaucoup à un parc d'animations thème médiéval, ce qui ne me branche pas plus que ça ; elle a comme thème secondaire la rose, ce qui ne me branche pas non plus tant que ça, mais du coup, il y a [Roses Velasquez dans la roseraie de Provins]une roseraie qui, même si on n'est pas passionné par les roses, est un jardin (étiqueté « remarquable », donc) incroyablement manucuré et qui justifie à lui seul qu'on aille visiter Provins, surtout qu'il y a aussi là un salon de thé merveilleusement relaxant. Enfin, tout ça aurait été merveilleusement relaxant s'il n'y avait pas une fois de plus un salaud de culcidé qui voulait profiter du sang de Ruxor comme le Ruxor voulait profiter de son thé à la rose.

Sinon, même si les vieilles pierres moyenâgeuses ne me branchent pas tant que ça, elles ont un intérêt, c'est que les gens à cette époque aimaient bien construire des villes à des endroits d'où on voit loin, et la vue depuis la tour César[#1b] sur la c(h)ampagne alentours n'est pas mal du tout, ainsi que depuis les remparts, d'où nous avons observé un magnifique coucher de soleil hier soir. Dans la foulée, nous nous sommes dits que nous allions aussi regarder les planètes. En fait, l'idée était surtout de voir Mercure, parce que je n'ai jamais réussi à voir Mercure. Grâce aux excellentes applications Sky Map et PlanetDroid, nous savions en principe où était chaque planète (alignement par rapport aux autres astres, élévation en degrés au-dessus de l'horizon, azimut par rapport aux points cardinaux ou par rapport au point de coucher du soleil, magnitude apparente, bref, tout ce qu'on pouvait vouloir savoir), mais malgré ça, nous n'avons réussi à localiser que Vénus (qui se couchait plus tard que le Soleil) et Jupiter (culminant au moment où le Soleil se couchait), et même ça n'a pas été facile ; Mercure, qui était à peu près pile mi-chemin entre Vénus et le Soleil, ainsi que Saturne, en train de se lever, ont résisté à nos tentatives pour les trouver, sans que nous parvinssions à savoir si c'était parce qu'elles se cachaient derrière les nuages ou parce qu'il ne faisait pas encore assez noir pour que la magnitude 0 devienne discernable, surtout avec mes yeux de myope — ou simplement parce que nous étions nuls.

[#] Provins qui, administrativement, est en Île-de-France, même si historiquement elle faisait partie de la Champagne, jusqu'à ce que cette dernière intègre (en partie ?) le domaine royal par la dot apportée par Jeanne de Navarre (et de Champagne) lors de son mariage en 1284 au futur Philippe IV le Bel. Mais j'entends des histoires contradictoires sur le fait que l'actuelle limite entre l'Île-de-France et la Champagne ait un rapport avec cette histoire ancienne ou soit simplement le fruit de hasards administratifs bien plus tardifs. (Y a-t-il eu une différence entre le sort de Provins et celui de Troyes lors de ce mariage ?)

[#1b] (Ajout) Soit dit en passant, la tour en question a un escalier à vis orienté selon la main droite, ce qui met en doute l'idée que les escaliers des ouvrages défensifs étaient toujours orientés selon la main gauche.

Sinon, ces différentes excursions me donnent l'occasion de continuer d'apprendre à conduire[#2], et d'apprendre toutes sortes de choses que je n'ai pas apprises à l'auto-école soit parce que ce n'était pas le lieu soit parce qu'il n'y avait pas vraiment le temps. Par exemple, comment sortir la tuture du poussinet du garage de notre immeuble, ce qui est assez technique (parce que la tuture est large et que la montée est biscornue). [Courbe bouchons en Île-de-France observé par Sytadin.fr]Ou comment profiter d'un match de la coupe du monde de foot où la France joue, parce que les routes deviennent soudainement beaucoup plus vides, ce qui nous a permis de revenir de Provins dans de bonnes conditions (cf. la forme complètement hallucinante à partir de de la courbe noire ci-contre, piquée au site Web Sytadin, comparée aux niveaux « habituels » en couleur : il s'agit du nombre de kilomètres de bouchons en Île-de-France).

[#2] Et d'éprouver la patience du poussinet, qui craint pour sa tuture et se retrouve parfois à me disputer comme le faisait mon moniteur (qui devait craindre aussi pour sa voiture…). Le poussinet, pourtant, me disait que je n'aurais pas dû accepter de me faire tellement disputer à l'auto-école, et que j'aurais dû changer de moniteur.

[Image enregistrée par la dashcam arrière 2018-06-29T15:41:48+02:00]

[Image enregistrée par la dashcam arrière 2018-06-29T15:55:04+02:00]

[Image enregistrée par la dashcam avant 2018-06-29T15:55:12+02:00]

Plus sérieusement, je n'avais essentiellement pas eu l'occasion en leçon de conduite de pratiquer les routes départementales deux voies qui sont limitées à 90km/h jusqu'à ce soir et 80km/h à partir de demain — mais de toute façon 80km/h pour moi en tant que conducteur novice. Comme je respecte les limitations de vitesse, j'y fais du (80±ε)km/h (au tachymètre, donc plutôt −ε en réalité), ce qui, évidemment, énerve les autres usagers. Comme ce sagouin de conducteur de poids-lourd slovaque immatriculé SA·142DC et SA·338YF (vu la manière dont il s'est comporté, je ne vais pas me priver d'aider Google à indicer sa plaque d'immatriculation) qui m'a collé au cul sur un bout de la D231 parce qu'il trouvait qu'à (80−ε)km/h j'allais vraiment trop lentement, fulminait de ne pas trouver d'occasion de me dépasser, et n'a pas manqué de me le faire bien sentir. Comme il se trouve que le poussinet a une dashcam et que je suis maniaque de la précision, je me fais un plaisir de mettre en ligne ses photos (horodatées et géolocalisées par la dashcam) : en train de me faire un appel de phare alors que je roule à 79km/h, puis réussissant enfin à me doubler, en klaxonnant rageusement (ça ça ne se voit pas sur les images, évidemment), 13′20″ plus tard et 16.4km plus loin (je roule plus lentement sur la dernière photo, mais c'est exprès pour l'aider à me doubler ; et oui, 16.4km en 13′20″ ça fait seulement 73.8km/h de moyenne, mais il y avait des sections limitées à 70 et à 50 et des sens giratoires). En admettant qu'il aurait conduit à 90km/h tout du long, je lui ai fait perdre la durée absolument affolante de 2′24″. Bon, mais sérieusement, est-ce que j'aurais dû trouver moyen de lui permettre le dépassement ? (J'avais envisagé de faire quelques tours inutiles d'un giratoire pour m'en débarrasser, mon poussinet m'a conseillé de continuer en ignorant le camion.)

Peut-être que le Slovaque en question ignorait que la plaque A à l'arrière de ma voiture signifiait que je ne devais pas dépasser 80. Ou peut-être qu'il le savait mais s'en foutait (de toute façon, quand on conduit dans un pays étranger, on doit bien se dire qu'il est possible qu'il y ait des règles qui nous échappent). Ou peut-être qu'il aurait été tout aussi furieux si j'avais fait du 90, en fait.

Tant que j'y suis à parler de voiture et de vitesses : la boîte de vitesse de la Renault Captur sur laquelle j'ai pris mes leçons de conduite était échelonnée de manière qu'on utilise la 1re vitesse typiquement de 0 à 20km/h, la 2e de 20 à 40, la 3e de 40 à 60, la 4e de 60 à 80, et la 5e à partir de 80. D'une part c'est assez commode à retenir, d'autre part cela va bien avec les limitations de vitesse françaises qui sont très souvent congrues à 10 modulo 20 (en km/h), c'est-à-dire surtout 30, 50, 70, 90 (et 110 et 130, mais ça c'est hors grille). Mon moniteur m'avait expliqué que c'était fait exprès, et que l'idée était donc de simplifier la réflexion : quand c'est limité à 30 on roule en 2e, à 50 en 3e, et à 70 en 4e. Mais le joujou polluant du poussinet, il a une boîte de vitesses échelonnée très différemment : Tuture a 6 vitesses, mais ce n'est pas une simple extension du même schéma, les vitesses pallier sont plus basses, on peut sans problème rouler à 50 en 4e, par exemple, sans être en sous-régime, et la première a un rapport extrêmement faible. Mais du coup ça complique des choses pour moi : on m'a appris à faire une reprise [en] première dans toutes sortes de circonstances, par exemple à chaque fois qu'on arrive par la branche non prolongée à une intersection en T — or sur la tuture du poussinet, une reprise première est très difficile à faire ; mon poussinet propose plutôt de rester en deuxième, quitte à débrayer un peu, mais il y a un risque plus fort de caler si on ralentit trop. De même, pour les sens giratoires, on m'a appris à les passer toujours en deuxième, mais sur la tuture du poussinet, on est facilement en surrégime de la sorte. Je ne sais pas si c'est parce que Tuture est vieille et que les rapports ont été restandardisés(?) plus tard, ou si c'est juste des différences aléatoires entre modèles.

Ah, et tant que j'y suis, je signale une astuce complètement idiote qu'on ne m'a pas donnée à l'auto-école et j'ai vraiment honte du temps incroyable qu'il m'a fallu pour y penser alors qu'elle est complètement évidente :

Un des problèmes que je rencontrais souvent était celui du bon centrage de la voiture. Mon moniteur m'avertissait souvent de surveiller mon placement, me disait que j'étais trop à gauche ou trop à droite. Il m'avait bien donné une demi-astuce : repérer mon placement à la zone sombre laissée sur la chaussée entre les roues des nombreuses voitures et qui finit par définir une zone médiane correcte. Mais comme le conducteur est à gauche du milieu de la voiture, ce n'est pas évident de savoir si on est bien centré sur la zone sombre en question. (Il me disait régulièrement : n'oublie pas que tu dois centrer ta voiture sur la zone sombre : pas toi mais la voiture ; certes, mais comment est-ce que je repère que la voiture est bien centrée ?) Parce qu'il manquait la deuxième moitié de cette astuce, complètement évidente, donc, mais à laquelle je n'ai pensé qu'après avoir passé le permis. Il s'agit une fois pour toutes, à l'arrêt, de s'installer au poste de conduite comme on le fait normalement, et de regarder une ligne tracée sur la chaussée (au niveau du sol), le long de l'axe médian de la voiture (on peut tracer cette ligne à la craie, ou demander à quelqu'un de la figurer avec son bras) : de là où on est assis, on repère le point où cette ligne intersecte la base du pare-brise et/ou l'avant du capot (dans la tuture du poussinet, pour la manière dont je m'assieds, ça tombe sur un angle des essuie-glace, donc c'est facile à repérer, mais bien sûr il n'est pas nécessaire d'être ultra-précis) ; cela définit la ligne de visée vers l'axe médian de la voiture, et quand on veut centrer la voiture, on s'arrange pour faire coller ce point sur l'axe où on veut la centrer (par exemple, le milieu de la zone sombre de la chaussée). Certes, il faut penser à faire cette visée quand on change de véhicule, et chaque conducteur doit la faire pour sa façon de s'asseoir, et c'est un peu moins pratique quand les essuie-glace sont en marche, mais globalement, je n'ai plus de problème de centrage depuis que j'ai repéré et visualisé ce « point de centrage » au lieu de l'estimer pifométriquement en me disant je suis un peu à gauche, donc ça doit être par là.

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(lundi)

La voiture et la poisse

Il y a un mois, mon poussinet a fait l'acquisition d'un joujou bruyant pour polluer l'air, également connu sous le nom de voiture : puisque j'ai récemment obtenu le droit de jouer avec ces choses-là, il a voulu que nous en ayons une, histoire qu'il puisse me forcer à conduire régulièrement. Et comme l'idée est notamment que je ne perde pas l'habitude de cet exercice un petit peu absurde (mais qui impressionne parfois les Américains) consistant à jouer du pied gauche et de la boîte de vitesse, il s'agit d'une voiture à boîte manuelle (ce qui exclut toute forme d'électrique ou d'hybride). Une Volkswagen Golf IV — diesel parce qu'il faut bien assumer la pollution maximale — 1.9L TDI 130ch — c'est à peu près aussi cryptique que la numérotation des processeurs Intel — tout juste assez récente pour avoir le droit de rouler dans Paris. Avec quelque chose comme 200000km au compteur (tiens, j'ai vraiment du mal à écrire 200Mm). Et d'ailleurs immatriculée, je n'ai pas bien compris pourquoi, à la Réunion.

L'idée de mon poussinet était d'acheter à peu près la voiture la moins chère possible (qui ait le droit de circuler à Paris) pour que ce ne soit pas trop grave si je la bousille. Vous voyez qu'il a confiance en ma capacité à conduire, le poussinet. Mais comme nous vivions très bien sans voiture, c'est vraiment à peu près la seule raison d'en acheter une. La copine d'un de ses collègues vendait justement ça, alors il s'est précipité sur la bonne affaire ; et comme les bonnes affaires sont rares, et que ce qui est rare est cher, il a accepté de monter le prix jusqu'à environ 3k€. Je plaisante, mais c'est un peu l'idée : il a vu la voiture, décidé qu'elle était vraiment bien et que c'était mieux d'acheter à quelqu'un qu'on connaît, et qu'à 2.5k€ c'était très raisonnable, mais quelqu'un d'autre était sur le coup, et c'est ainsi que le prix a augmenté.

La voiture était en bon état, mais pas parfait pour autant. La batterie était faiblarde, donc mon poussinet l'a fait changer ; et il en a profité pour faire changer les plaquettes de frein et les soufflets de joints de Cardan. Ce qui a encore un peu gonflé la facture. Le poussinet a fait quelques éraflures à la carosserie en rentrant et sortant la voiture du parking situé sous notre immeuble et dont la descente est très étroite et compliquée, et il envisageait de l'apporter chez le carrossier. Et moi j'ai commencé à me moquer du concept de voiture achetée pour que je puisse la bousiller mais qui passe son temps au garage et se fait bichonner.

La voiture étant, après le gosse, la pire pompe à fric qui soit, ç'aurait peut-être été mieux de notre part de rester sans l'un ni l'autre. Bref.

[La voiture intacte]Samedi (avant-hier), enfin, Tuture était (presque !) comme neuve, et nous sortons avec, presque pour la première fois, aller nous balader du côté de Marly et de la forêt de Louveciennes. Je me suis garé sur l'accotement de la route de Marly (derrière une file de voitures qui avaient fait de même et, je précise, à une distance tout à fait raisonnable de celle qui était devant). J'ai même fait une photo du poussinet tout fier de son joujou polluant. Nous nous sommes promenés quelques heures, avons profité du beau temps de cette première vraie journée de printemps, avons répondu au passage à un sondage de militantes LREM sur lesquelles nous sommes tombés à la gare de Bougival et avons pris un goûter au salon de thé Au Vieux Marly. Et quand nous sommes revenus à l'endroit où nous avions laissé Tuture, qui nous attendait maintenant toute seule, nous avons remarqué un reflet bizarre sur le capot et constaté, en nous approchant, que celui-ci était enfoncé. [La voiture enfoncée]

Et ce n'est pas tout : une fois rentrés nous avons constaté que le liquide de refroidissement fuyait (certes très peu), et que le radiateur était plié : comme le capot et le pare-chocs, il faudra le changer. Il semble qu'il faille changer, en outre, la façade de l'optique gauche et un échangeur d'eau, ou quelque chose comme ça. (Mise à jour : l'optique gauche n'est pas à changer, finalement, mais la clim, elle, fuit, ce qui fait encore plus de réparations.) En fait, le coût de faire réparer Tuture dépasse le prix qu'elle vaut.

Et bien sûr, Tuture n'était assurée qu'aux tiers. (Dans l'absolu, c'est une décision plutôt rationnelle : si on a les moyens de s'assurer soi-même, et vu le prix de la voiture mon poussinet a sans problème les moyens, il vaut mieux le faire, parce que l'assurance, elle, ajoute ses frais de fonctionnement par rapport à toute estimation de l'espérance des coûts. On l'a quand même dans les dents.) Et bien sûr, le sagouin qui l'a amochée ainsi n'a pas pris la peine de laisser sa carte de visite. (Je me rends compte à cette occasion que les gens que je fréquente sont des gens bien parce que j'ai plusieurs amis qui, ayant provoqué des dommages dans des circonstances analogues, ont laissé un mot sous l'essuie-glace de la voiture endommagée pour faire régler les dommages par leur assurance.) Et à Marly-le-Roi, ce n'était probablement pas quelqu'un qui risquait d'être ruiné par la hausse de sa prime d'assurance. Mon poussinet a porté plainte pour délit de fuite, mais évidemment les chances de retrouver le sagouin sont nulles ; je n'avais pas eu, notamment, la bonne idée de photographier aussi la voiture devant nous, et nous n'avons pas de dashcam.

Peut-être que le plus raisonnable aurait été d'envoyer Tuture à la casse. Mais j'ai fait remarquer à mon poussinet que s'il avait été prêt une fois à payer ∼3.5k€ (prix d'achat plus premières réparations) pour avoir son joujou en bon état, les circonstances n'ayant, finalement, pas changé, cela avait un sens de dépenser de nouveau cette somme pour avoir le joujou en bon état. (Voir, à ce sujet, cette entrée passée, et notamment sa note #2, où je raconte un raisonnement du même genre que j'avais tenu autrefois au sujet d'un livre que j'ai acheté et perdu le jour même où je l'avais acheté. Certes, un livre est moins cher qu'une voiture, mais fondamentalement, ça ne change rien : on aurait pu voler ∼3.5k€ à mon poussinet, ça ne changeait rien au fait qu'il décide ou non d'être prêt à dépenser cette somme pour avoir une voiture de ce type.)

En fait, ce n'est vraiment pas une question d'argent ni de rationalité. Ç'aurait été tout simplement trop rageant d'envoyer Tuture à la casse après quasiment sa première journée d'utilisation, et je ne dis pas ça juste parce que je me suis mis à l'appeler Tuture comme si le joujou polluant était mignon ni parce que le poussinet trouve qu'elle est agréable à conduire. Je veux dire « rageant » à la manière de ces histoires de gens qui recueillent un petit oiseau blessé, le soignent patiemment, et le relâchent dans la nature juste pour le voir se faire dévorer immédiatement par un oiseau de proie. (J'ai vu passer des vidéos de ce genre, probablement fausses, enfin je n'en sais rien, mais ça n'a aucune importance, ce qui importe est que ce genre de situation fait vraiment rager.) Mon poussinet était vraiment très contrarié par l'idée que Tuture ne soit pas réparable, ou que les réparations coûtent si cher qu'il soit impensable de faire autre chose que la mettre à la casse.

Bon, reste que moi, de mon côté, je me demande si je vais vraiment oser la conduire à nouveau, parce que si je l'envoie à la casse, mon poussinet risque de craquer complètement. Et en tout cas j'ai sans doute bien fait de prendre un abonnement Autolib pour les jours où Tuture est au garage (sauf qu'en fait, le lendemain même — c'est-à-dire hier — Autolib était en rade).

Mise à jour () : Le poussinet a reçu une lettre d'un assureur l'informant que son véhicule était impliqué dans un accident le jour en question, et lui demandant sa vision des faits. Du coup, il a déclaré le sinistre à notre propre assureur et va faire expertiser Tuture (qui, entre temps, a déjà été réparée…). Il y a donc peut-être moyen de récupérer un dédommagement, au prix d'une certaine quantité de paperasse et de temps perdu en coups de fil. En espérant, quand même, que ce n'est pas un coup tordu pour essayer de nous faire porter une part de responsabilité dans l'histoire !

Mise à jour () : Au final, nous avons été remboursés (et échappé au classement véhicule économiquement irréparable, générateur de toutes sortes de soucis).

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(samedi)

J'obtiens le permis (et je me demande si je sais conduire)

Le titre dit tout, mais je vais raconter l'histoire de mon permis en long, en large, et en menus détails (en fait ça n'intéresse personne, mais j'écris surtout tout ça pour moi-même pour m'en souvenir plus tard).

(Edit  : ajout et remaniement de quelques passages, surtout dans la première partie, que je ne crois pas utile de signaler spécifiquement.)

Fin de la formation

J'étais inscrit à l'auto-école CER Bobillot (ils méritent bien que je leur fasse un peu de pub) : je les ai choisis parce qu'ils sont à même pas cinq minutes à pied de chez moi, mais je peux les recommander indépendamment de ça, administrativement ils ont toujours été corrects et efficaces, ils lisent et répondent rapidement à leur mail, ils ont géré correctement tout l'aspect administratif (le problème que j'avais eu de ce côté-là n'était absolument pas de leur faute, et ils m'ont correctement renseigné). Au niveau équipement, ils ont un simulateur moderne (que je n'ai que très peu utilisé, mais ça m'a quand même aidé à me rassurer au début), et les voitures sont dans un état impeccable. De ce que j'ai vu, la disponibilité des moniteurs est bonne, leur ponctualité est irréprochable. Au niveau de leur compétence, je n'ai rien à redire : on sent qu'ils connaissent bien les endroits où aller pour pratiquer, et les difficultés de tel ou tel centre d'examen, par exemple. Les explications théoriques et pratiques qu'on m'a données étaient toujours claires. Mon principal reproche pédagogique concerne le manque de patience face à mes erreurs (très) répétées, comme je vais le décrire ci-dessous.

Je reprends maintenant l'histoire où je l'avais laissée (j'en étais à 20h de conduite quand j'ai écrit cette entrée-là). J'ai continué à prendre des leçons de conduite, et ça a duré longtemps… longtemps. Au total j'ai fait 73 heures (ce qui, à 58€ l'heure, commence à revenir un peu cher, d'ailleurs, mais c'est surtout le temps consommé qui me posait problème), entre le et le , toujours par paquets de deux heures, presque toujours avec le même moniteur. (C'est dire si je connais bien, maintenant, ces lieux enchantés que sont Cachan, Chevilly-Larue, Orly, mais aussi Vélizy et Maisons-Alfort.) Et cette expérience de l'apprentissage de la conduite n'était pas franchement plaisante quand je devais lutter contre mes propres blocages.

Je disais dans l'entrée précédente que mes trois gros problèmes étaient l'inobservation (généralement due à une concentration focalisée sur le mauvais problème), l'indécision, et la panique inopportune. Les choses se sont un peu améliorées avec le temps : l'indécision s'est largement résorbée (mais parfois je suis tombé dans l'excès inverse), la panique a pris des formes moins aiguës, mais l'inobservation continue vraiment à me poser problème. Jusqu'à la fin, et je veux vraiment dire la fin, c'est-à-dire à la leçon qui consistait à emmener la voiture de l'auto-école au lieu de passage du permis, mon moniteur m'a engueulé parce que mes trajectoires étaient mauvaises parce que je ne faisais pas attention aux bonnes choses (je déviais ou je risquais de rouler dans un trou…). Et à chaque fois que je bugguais, et à plus forte raison si je me faisais engueuler, je tombais dans le cycle vicieux des erreurs. (Je restais régulièrement bloqué sur mais pourquoi j'ai fait ça ? ; or en conduisant, il faut penser au présent et à l'avenir, pas au passé.)

Bref, même s'il y avait pas mal de moments où tout allait très bien, j'ai eu des leçons ou des bouts de leçons qui se passaient vraiment très mal, et ce jusqu'à la fin. J'ai l'impression que mon moniteur était vraiment désemparé face à mon irrégularité. (J'ai déjà raconté que la formation était divisée en quatre grands chapitres, en gros 1 la mécanique, 2 la circulation urbaine normale, 3 la circulation plus compliquée et les autoroutes, et 4 du pipo, voyez l'entrée liée ci-dessus pour les intitulés réels ; mon moniteur a validé la partie 1 le au bout de 26 heures de conduite, et la partie 2, à confirmer, le après 60 heures… et il n'a jamais validé les parties 3 et 4. Bon, je ne sais pas ce que cette validation signifie pour eux au juste, mais toujours est-il qu'il n'avait pas l'air super convaincu de mon niveau.) Plus d'une fois il a tenu des propos du style si tu n'arrives pas à comprendre ça, je ne peux vraiment rien pour toi.

Il a quand même décidé, après une leçon qui s'était très bien déroulée malgré des conditions difficiles (nuit, circulation dense), de me présenter à l'examen sous réserve que je prenne encore une dizaine d'heures supplémentaires avant (finalement je n'en ai pas eu autant parce que la neige a forcé l'auto-école a annuler une leçon, le ). Mais même pas une demi-heure avant l'examen, pendant la dernière leçon d'une heure qui est plutôt destinée à « chauffer » le candidat et à le mettre en confiance en circulant dans le coin où aura lieu l'épreuve, il m'a deux fois pilé la voiture et passé un savon parce que je ne prenais pas suffisamment de marge pour m'écarter d'une voiture mal garée à droite. (Et ce genre de savon de dernière minute, limite humiliant, avec pour témoins les deux autres candidats à l'examen le même jour que je transportais comme passagers, ce n'est vraiment pas un truc pour mettre en confiance. L'une de ces deux candidats m'a d'ailleurs dit qu'elle avait été un peu choquée par l'attitude du moniteur à ce moment.)

Il y a des choses qui ne sont évidentes qu'a posteriori. J'aurais sans doute dû demander à changer de moniteur, pour avoir quelqu'un qui m'engueule moins. (Et en fait, lui-même aurait sans doute dû me le conseiller, plutôt que rester sur des formules comme je ne peux vraiment rien pour toi, et surtout, se rendre compte que m'engueuler était contre-productif.) D'un autre côté, il avait aussi des qualités que j'appréciais : non seulement je me sentais vraiment en sécurité et en confiance dans sa maîtrise du véhicule (j'ai eu plusieurs fois l'occasion de constater sa capacité à rattraper des erreurs graves de ma part), mais par ailleurs il me faisait partager ses observations, toujours très pertinente, sur les autres usagers de la route (tu as remarqué combien celui-là était agressif ?, celui-là il est pressé mais pas méchant, celle-là elle est complètement dans sa bulle) ; et j'espère, même si je n'en suis pas complètement persuadé, que ça m'a un peu aidé à combattre mon super-pouvoir d'inobservation. Mais une je me rends compte surtout maintenant que c'est fini à quel point cette formation m'a pesé, usé et stressé (les engueulades n'y sont pas pour rien, mais ça aussi c'est quelque chose que je ne perçois clairement qu'après coup).

Ceci étant, je ne veux surtout pas jeter la pierre à mon moniteur. D'abord parce que je comprends que ça soit difficile de gérer quelqu'un qui fait des erreurs répétées et parfois vraiment dangereuses. (Et en tant qu'enseignant je sympathise avec la difficulté de faire passer un message à un élève qui « ne veut pas » comprendre.) Mais aussi parce que, à un certain niveau, c'est le résultat qui compte, et il vaut indubitablement mieux se faire engueuler en leçon que d'avoir un accident après. Simplement, dans mon cas, je pense que c'était quand même contre-productif.

Le fait d'avoir fait un grand nombre d'heures, en tout cas, n'est pas en soi une mauvaise chose. (Je l'avais clairement dit au début : j'assume que ça puisse durer longtemps.) S'il m'a fallu beaucoup de temps pour surmonter très partiellement mes super-pouvoirs d'inobservation, d'indécision et de panique, en revanche, pendant ce temps, j'ai pu beaucoup améliorer ma pratique de la mécanique, et c'est au moins vrai que passer les vitesses, revenir au patinage, ou autres éléments de ce genre, ne me posent plus aucun problème.

Le stress

C'est quelque chose de vraiment bizarre. Fondamentalement je m'en foutais pas mal de passer le permis : je l'ai fait un peu sur la pression de mon entourage (mon poussinet, ma maman…), un peu parce que me sentant vieillir je me disais que si j'attendais plus longtemps je n'y arriverais vraiment jamais, un peu parce que mon école va déménager à Saclay dans 1½ ans, mais bon, aucune raison impérative, et je ne peux pas dire que ma motivation crevait le plafond. J'ai procrastiné assez longtemps pour présenter le code ; et quand j'ai finalement passé cet examen théorique, je n'étais absolument pas stressé, ni pour l'examen lui-même ni pour les résultats (alors que ce n'était pas du tout évident que je l'aurais vu le caractère très mystérieux des questions et mes résultats aléatoires sur les sites de préparation).

Et là, pour l'épreuve pratique, j'ai passé toute la semaine à angoisser comme un fou (et j'ai de nouveau stressé pour les résultats). Merci au passage à l'hydroxyzine pour m'avoir permis de dormir quand même, et au propranolol pour m'avoir évité les crises de tachycardie. Mais pourquoi ? Je sais que je suis d'un naturel hyper anxieux, mais c'est un peu mystérieux, quand même, que ça me mette dans un état de panique de passer un truc dont, fondamentalement, j'ai l'impression de me foutre pas mal. J'ai plusieurs hypothèses mais aucune n'est vraiment satisfaisante : notamment, le trac à l'idée que quelqu'un que je ne connais pas voie mes erreurs (et que je sois possiblement humilié), mais ça m'explique pas l'angoisse au moment des résultats ; ou la peur des coûts irrécupérables (sous la forme : maintenant que j'ai souffert pour passer ce permis, je n'ai pas envie que ça soit en vain).

C'est d'autant plus idiot que c'est un examen particulièrement facile à repasser (pour un examen universitaire il faut généralement attendre l'année suivante, là c'est possible sous un délai assez court, quelques mois dans le pire cas), les frais sont négligeables, et il n'y a pas de limite sur le nombre de passages (au bout de cinq échecs on doit repasser le code, mais cette partie-là est tellement facile à repasser, et pour le coup il n'y a aucune limite, que c'est presque insignifiant). Mais j'étais peut-être victime du méta-stress (i.e. : je stresse tellement cette fois-ci, je n'ai pas envie d'échouer et de devoir recommencer, ce qui me ferait stresser à nouveau) ; ou peut-être que le fait que je passe à un endroit notoirement « facile » (cf. ci-dessous) me rendait d'autant plus anxieux de ne pas gâcher cette chance.

Généralités sur l'examen

Pour ceux qui n'ont pas passé le permis, en France, et encore, récemment, voici une description détaillé du déroulement de l'épreuve pratique (pour le permis B) :

L'auto-école du candidat fournit la voiture à doubles commandes (donc celle sur laquelle on a appris à conduire, heureusement) ; l'inspecteur (officiellement appelé expert) prend place siège passager avant (avec les doubles commandes), le moniteur accompagnateur s'asseoit à l'arrière et prendra lui-même des notes (mais ne doit, évidemment, pas dire un mot). L'inspecteur commence par vérifier l'identité du candidat et contrôler le dossier administratif (notamment l'attestation de réussite au code, qu'il a déjà), puis il rappelle les consignes générales de l'épreuve. Il est censé procéder à un test de vue en demandant de lire une plaque d'immatriculation à une vingtaine(?) de mètres, mais souvent il omet cette formalité et je n'y ai pas eu droit. L'épreuve dure officiellement 32 minutes, dont 7 minutes de vérifications et questions, et 25 minutes de conduite effective : en fait, cette durée est très approximative, mais elle explique les heures bizarres comme 14h02.

L'inspecteur donne des instructions comme à gauche, à droite, tout droit, ou bien suivez Trouducul-du-Monde ; s'il ne dit rien, c'est soit que c'est tout droit, soit que la réglementation ne laisse qu'une seule possibilité (et ça fait partie de l'épreuve de le détecter assez tôt et de clignoter si nécessaire) ; il peut aussi dire quelque chose comme tournez à droite dès que possible (ce qui suggère que la première à droite sera peut-être interdite, mais pas forcément) ; en revanche, il ne donnera pas d'instruction contredisant explicitement la réglementation. L'épreuve doit autant que possible faire intervenir différents types de conditions (circulation urbaine d'une part, routes hors agglomération ou autoroutes de l'autre). Au moins une partie de l'épreuve est une « conduite autonome », c'est-à-dire que l'inspecteur aura donné des instructions comme suivez Machin, puis Truc, et il faut lire les panneaux de direction (mais il n'est évidemment pas demandé de faire plus que ça : on n'est pas censé connaître le coin, ni lire une carte, ni manipuler un GPS).

À un moment de son choix, l'inspecteur demande une manœuvre faisant intervenir une marche arrière : simple marche arrière en ligne droite, marche arrière en courbe, demi-tour, ou le plus souvent rangement en bataille ou en créneau. (Réussir cette manœuvre n'est pas obligatoire, mais ce qui est surtout vérifié est la sécurité : bien contrôler qu'on ne gêne personne, et ne pas heurter violemment le trottoir, notamment.) À un moment de son choix, mais généralement juste après la manœuvre consistant à se garer, l'inspecteur pose trois questions : celles-ci sont déterminées, selon une table connue à l'avance, par les deux derniers chiffres du totaliseur kilométrique à ce moment-là (cela joue le rôle de générateur aléatoire) ; la première question est une « vérification » intérieure (du genre : allumez le(s) feu(x) de brouillard arrière et montrez le voyant correspondant — c'est ce que j'ai eu) ou extérieure (du genre : contrôlez l'état, la propreté et le fonctionnement des feux de route), la deuxième est une question en rapport avec ce qui vient d'être contrôlé (du genre : peut-on utiliser les feux de brouillard arrière par forte pluie ?), et la troisième est une question de premiers secours (comme quels sont les signes d'un arrêt cardiaque ?). C'est un petit changement fait en 2018 (et dont je suis donc un des tout premiers à bénéficier) : auparavant, il y avait une vérification intérieure et une vérification extérieure, et la liste était nettement plus longue.

À la fin de l'épreuve (il faudra de nouveau se garer, mais l'inspecteur demandera alors généralement un stationnement en marche avant, censément plus facile), l'inspecteur rend sa pièce d'identité au candidat et passe au candidat suivant. Dans mon cas, nous étions trois candidats de la même auto-école à passer successivement avec cet inspecteur (je suis passé en premier), les candidats qui ne passaient pas attendaient donc sur le parking que celui qui passe revienne (heureusement qu'il ne pleuvait que très peu !), et tout le monde partait du même point : je ne sais pas si c'est universel ou si certains font des parcours en boucle où un candidat fait la première moitié de la boucle et un autre fait la deuxième moitié.

Les résultats sont communiqués deux jours plus tard. Jusqu'à récemment c'était par courrier, mais maintenant (que les inspecteurs ont une tablette avec eux pour évaluer les candidats) c'est un PDF qu'on obtient en ligne. Je n'y croyais pas, mais le site Web est correct : quand on passe le jeudi, on obtient bien le résultat le samedi matin (à cinq heures du matin il n'y était pas, à dix heures et demi il y était). S'il est favorable, ce PDF (imprimé !) de certificat d'examen tient lieu de permis de conduire provisoire, et donne le droit de conduire, jusqu'à réception du titre définitif (dans les quatre mois).

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(mercredi)

Je continue à apprendre à conduire (et me découvre des super-pouvoirs)

Je continue à prendre des leçons de conduite, et, franchement, ça ne se passe pas bien.

Par rapport à mon précédent post (et 10 heures de conduite plus tard, c'est-à-dire 20h au total, le minimum légalement exigible mais ça ne signifie rien), la difficulté a un peu changé, mais je ne suis pas pour autant persuadé qu'elle soit franchement moindre. Je me sens moins débordé par l'aspect purement mécanique, c'est-à-dire quand il s'agit de démarrer (y compris en côte), passer les vitesses (dans les deux sens) et m'arrêter ; ce qui ne veut pas dire que je ne fasse pas parfois très mal les choses (comme trop freiner ou pas assez), mais enfin, quelque chose est assurément rentré. Cependant, le fait que ces difficultés se lèvent révèle, par contraste, que d'autres sont plus profondes. (Et suggère aussi que la stratégie consistant à dire finalement, tant pis pour cet art foncièrement idiot d'apprendre à passer les vitesses : je vais passer le permis sur une automatique n'est peut-être pas opportune, même si je garde cette possibilité dans un coin de l'esprit.) Par exemple, mon moniteur observe toujours régulièrement que je me place mal ou que je me dévie, notamment parce que j'ai le regard trop court, parce que je fixe des choses que je veux éviter au lieu de fixer l'endroit où je veux aller. Mais bon, ça c'est sans doute corrigeable, et s'agissant du placement, vu le nombre d'autres usagers mal placés qu'il me signale (et qui ont, il faut croire, réussi à obtenir leur permis…), je ne suis pas le seul à avoir du mal : il faut dire que le marquage est particulièrement merdique autour de Paris, avec un nombre de voies parfois tout à fait incertain ou qui n'arrête pas de changer.

En revanche, d'autres difficultés sont probablement plus particulières à moi, et semblent consterner mon moniteur. (Il me sert des remarques du genre un gamin de huit ans sur son vélo arrive à faire ça : si tu ne t'en sors pas, je ne peux vraiment rien pour toi — et même si je comprends l'idée d'engueuler lors des erreurs pour qu'elles « rentrent » bien, je ne suis pas complètement convaincu de la pertinence pédagogique de ce genre de formulation.) À cette occasion, je me découvre trois super-pouvoirs fort nuisibles quand il s'agit de conduire :

  1. L'inobservation : j'avais déjà mentionné mon talent pour ne pas voir les choses qui sont juste sous mon nez (ou plutôt, comme le souligne la citation de Sherlock Holmes que je ne reproduis pas, pour ne pas observer les choses que je vois). De façon générale, je comprends très bien le mécanisme : je me concentre sur une aspect de ce que je vois (sur une difficulté présente, à venir, ou même passée), et je ne perçois plus le reste. C'est l'astuce la plus utilisée par les magiciens de spectacle, c'est le sujet d'une célèbre expérience de psychologie ; c'est aussi une des raisons pour lesquelles je suis épouvantablement nul aux échecs (du genre : je me concentre tellement fort sur la pièce adverse qui menace ma dame que je ne vois pas le pion qui menace mon cavalier). Mais quand j'arrive à ne plus voir un feu rouge alors qu'il n'y a rien d'autre à voir dans le coin, on peut vraiment se poser des questions. En tout état de cause, je me demande comment on peut s'affranchir d'un super-pouvoir aussi puissant en un petit nombre de dizaine d'heures de leçons.
  2. L'indécision : c'est une surréaction à l'auto-analyse du point précédent : je sais que je suis capable de rater les choses les plus « évidentes », donc j'ai toujours peur de ne pas avoir vu quelque chose. D'où une tendance à rouler trop lentement, que mon moniteur décrit comme carrément dangereuse parce qu'elle donne des signaux contradictoires (il veut se garer ?) ou parce qu'il faut vraiment y aller (pour dépasser un obstacle bloquant une voie d'une rue à deux voies, par exemple, il ne s'agit pas de ralentir).
  3. La panique inopportune : conséquence des deux points précédents, et déclenchée par la moindre petite erreur (par exemple, de manipulation mécanique), avec pour conséquence que je perds tous mes moyens et que je ne sais plus du tout ce que je fais.

Mon moniteur se plaint surtout de mon incohérence, qui est une conséquence de ce qui précède : rouler lentement quand il n'y a pas de raison à cause du point (2), ou trop vite parce que je n'ai pas remarqué quelque chose à cause du point (1), ou faire n'importe quoi à cause du (3).

(Je peux sans doute ajouter la suranalyse dans mes super-pouvoirs.)

Je ne sais pas non plus où j'en suis dans la formation. Mon livret d'apprentissage, édité par les Éditions Nationales du Permis de Conduire, est divisé en quatre grands chapitres (1 Maîtriser le maniement du véhicule dans un trafic faible ou nul, 2 Appréhender la route et circuler dans des conditions normales, 3 Circuler dans des conditions difficiles et partager la route avec les autres usagers, et 4 Pratiquer une conduite autonome, sûre et économique), eux-mêmes divisés en 9+7+9+7 compétences respectivement (1A à 1I, 2A à 2G, 3A à 3I et 4A à 4G ; par exemple : 1E = je sais doser l'accélération et le freinage à diverses allures et 2F = je sais franchir les carrefours à sens giratoire et les ronds-points et 3E = je sais m'insérer sur une voie rapide, y circuler et en sortir). Certaines compétences sont à leur tour divisées en sous-compétences : il y a 14+10+10+7 items au total, présentés sous forme de cases à cocher. Mon moniteur fait un trait dans une case quand la (sous-)compétence a été abordée, une croix quand elle a été enseignée, mais il a aussi parlé de noircir la case si la notion a été assimilée (ou quelque chose comme ça), et alors il n'a pas l'air de considérer que j'aie assimilé quoi que ce soit : pour l'instant, il a fait des croix dans 12 des 14 cases du chapitre 1 (et des traits dans les deux autres), rien de plus. Selon la manière dont on extrapole, ça laisse prévoir un nombre d'heures de formation élevé ou carrément délirant. Mais bon, tous les items ne se valent pas : le chapitre 4 a l'air complètement pipo ou vraiment facile (lire une carte routière, je pense que ça ne me pose pas trop de problème), mon moniteur semble suggérer que les chapitres 2 et 3 seront difficiles, mais je ne sais pas vraiment comment il compte les enseigner (2D = je sais tourner à droite et à gauche en agglomération, par exemple : on devinera aisément que j'ai déjà tourné à doite et à gauche !). Et évidemment, l'auto-école a intérêt à vendre le plus d'heures de formation possible (à la fois pour empocher l'argent et pour pouvoir déclarer un bon taux de réussite en première présentation).

Personnellement, ce qui me pose problème, ce n'est pas tant le prix des leçons que la difficulté à les placer dans la semaine (pour l'instant ça va, je n'ai pas de cours à donner, mais à partir de novembre ça deviendra beaucoup plus compliqué), et le stress engendré (que ce soit à me demander comment je peux avoir fait telle ou telle connerie, ou à me faire engueuler, ce n'est pas franchement plaisant, sans même parler du risque d'accident).

Ajout : pour la conclusion de mes aventures de permis de conduire, c'est .

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(vendredi)

Ruxor apprend (péniblement) à conduire

Ayant obtenu le code le mois dernier, je profite du fait que je n'ai pas de cours à donner pour quelque temps pour prendre des cours de conduite. Je ne peux pas dire, après 10 heures de leçons (plus 3 heures sur simulateur) que je sois franchement enthousiasmé par l'expérience. Ni le moniteur par mes progrès : La formation sera longue…

Il trouve notamment que je suis trop crispé sur le volant, ce qu'il interprète comme une forme de peur. Je ne dis pas qu'il ait tout à fait tort (la voiture individuelle est certainement un moyen de transport passablement dangereux, mais enfin, je suis déjà monté dans les voitures de gens conduisant plutôt dangereusement, je n'étais pas recroquevillé de terreur, il n'y a pas de raison que je n'arrive pas, à terme, à être plus prudent qu'eux, et en tout cas, pour l'instant, je suis avec quelqu'un qui est bon pour rattraper les erreurs[#]) ; mais ce que je ressens surtout, c'est l'impression d'être débordé par les choses qui demandent mon attention en même temps, ne serait-ce que le nombre d'étapes pour faire des choses aussi débiles que démarrer ou s'arrêter (sans caler[#2]…) sur une voiture à conduite manuelle.

Ce n'est pas que ce soit difficile, mais j'ai un peu l'impression de jouer à un jeu comme Jacques a dit : du genre avant de prononcer une phrase qui commence par une consonne, vous devez lever le bras droit, à chaque fois que vous utilisez le mot le vous devez claquer des doigts, et tous les sept mots exactement vous devez taper du pied : ceci étant, racontez-moi vos vacances (mais pourquoi allez-vous si lentement ?) — oui, merci, je crois que j'ai compris et retenu les règles (celles auxquelles j'ai eu droit pour l'instant, du moins), mais avant d'en faire un automatisme, avant de me les approprier[#3], comme dit mon moniteur, il me faudra effectivement du temps. Je comprends pourquoi ce n'est pas une bonne idée d'attendre 40+ ans pour ça. Et je comprends aussi pourquoi les Américains n'aiment pas les boîtes de vitesse manuelles et les embrayages. Sans même parler des règles de la circulation à respecter en même temps, et de tous les gens à surveiller autour : je suis très mauvais pour le multitâche, et si je perds le fil, j'ai tendance à ne plus du tout savoir où j'en suis et à faire vraiment n'importe quoi, ce qui est une très mauvaise idée en voiture.

Le simulateur devrait permettre d'acquérir ces automatismes par la répétition d'exercices faciles. Mais le simulateur ne sanctionne pas certaines mauvaises pratiques (il ne vérifie pas qu'on tient le volant correctement, qu'on garde le pied sur le frein à l'arrêt, ce genre de choses), et mon moniteur n'a pas l'air convaincu par son utilité.

Bon, après, mon moniteur a aussi l'air de penser que le seul vrai permis de conduire est celui qu'on obtient à Paris (où la route n'arrête pas de changer de direction et de largeur, où les gens arrivent dans tous les sens, où il y a tellement d'inspecteurs à l'examen qu'on ne peut pas bachoter selon les habitudes de chacun, etc.) ; en tout cas, il n'a pas l'air de penser grand bien de celui qu'on obtient en des plus petites villes en France ni dans certains autres pays.

(Je n'attends pas non plus avec impatience la voiture qui se conduit toute seule : vu le niveau désastreux de la sécurité informatique en général, elle sera certainement moins dangereuse qu'une voiture conduite par un humain… jusqu'au jour où un pirate russe prendra le contrôle de 100000 voitures simultanément dans le monde et les enverra toutes foncer n'importe où, et en comparaison les guignols de terroristes qui font peur à faire ça un par un ils paraîtront bien anodins. L'avenir ne m'enthousiasme donc pas trop.)

En attendant, ce qui est sûr, c'est que je connais maintenant très bien le parking du cimetière de Chevilly-Larue pour en avoir fait plein de fois le tour (et il a l'air très populaire auprès des auto-écoles, vu que nous n'étions pas les seuls).

Ajout : pour la suite de mes aventures de permis de conduire, c'est ici et .

[#] Ce qui m'amène d'ailleurs à me demander comment on forme les moniteurs d'auto-école : est-ce qu'ils ont des leçons pratiques où un méta-moniteur s'asseoit à la place de l'élève (i.e., du conducteur) et fait volontairement des erreurs de débutant pour vérifier que le moniteur arrive à les rattraper à temps ? Et du coup, comment forme-t-on les méta-moniteurs (et ainsi de suite, comme le fameux problème de la construction des grues de chantier) ? Que de questions sans réponse !

[#2] Mon problème à ce stade, ce n'est pas tellement que je cale, c'est plutôt que je suis tellement précautionneux lorsque je relâche l'embrayage pour ne pas caler en démarrant que le chauffeur derrière moi s'énerve et me double dangereusement.

[#3] Déjà, juste la façon dont on me dit que je dois manier le volant dans les tournants importants (genre, à angle droit) ne me semble pas du tout naturelle : à part qu'il ne faut pas que je sois crispé, on m'apprend qu'il faut chevaucher les mains, moi je trouverais beaucoup naturel de les faire glisser — rien que ça, ça me mobilise de l'espace mental pour rien.

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(vendredi)

Épreuve théorique de code de la route : suite et fin

J'avais raconté il y a presque un an que j'avais entrepris de passer le permis de conduire — à commencer par l'épreuve théorique générale (a.k.a., « code »). J'ai passée cette épreuve seulement mardi (spoiler : avec succès) : j'avais choisi pour m'inscrire une période où j'avais le temps de m'en occuper, mais mon dossier a été administrativement bloqué pendant si longtemps que cette période faste s'était finie quand les problèmes ont été résolus, et ce n'est donc tout récemment que j'ai pu m'y remettre, d'où énormément de temps perdu. (Ce n'était pas que passer l'épreuve de code elle-même soit long ou compliqué, mais c'est inutile et sans doute une mauvaise idée de le faire avant d'avoir le temps de pouvoir commencer à prendre des leçons de conduite.)

Entre temps, j'ai pu apprendre un certain nombre de bizarreries du code de la route français (j'en ai signalé ici au passage et ici). J'ai aussi pu expérimenter avec plusieurs jeux de question d'entraînement.

Pour le contexte, je rappelle les modalités de l'épreuve : 40 questions à choix multiples, accompagnées d'images fixes ou, pour 4 questions parmi les 40, d'une courte vidéo ; la réponse est un sous-ensemble de {A,B,C,D} qui n'est ni l'ensemble vide ni l'ensemble de tous les choix listés ; on dispose pour répondre de 20 secondes par question, et il faut obtenir au moins 35/40 pour valider.

Mon auto-école proposait des tests d'entraînement sur place avec des questions Codes Rousseau, j'ai aussi acheté un des livres de cet éditeur qui me donnaît accès à un site Web de test (très mal fait, en Flash, et pas mis à jour des dernières réformes), mais l'auto-école me fournissait par ailleurs un accès à un site appelé Prép@code qui avait déjà il y a un an une vieille version (appelons-la v0 dans la suite) et une nouvelle (disons v1), et depuis qui en a créé une troisième (v2). La moralité, c'est que tous ces systèmes d'entraînement sont assez mauvais. Je ne veux pas juste dire que les questions sont mauvaises — j'avais donné quelques exemples tirés du Prép@code v1 l'an dernier — mais aussi qu'ils ne sont pas non plus très représentatifs des questions du vrai examen. Pour preuve, ils sont assez mal corrélés les uns avec les autres : j'ai commencé à me préparer sur Prép@code v1, il ne m'a pas fallu longtemps pour dépasser régulièrement 35/40, puis quand j'ai été confronté aux questions des Codes Rousseau, je les ai trouvées beaucoup plus dures ; puis la version v2 de Prép@code est sortie, mon score a chuté de façon vertigineuse, parce qu'ils avaient remplacé plein de questions auxquelles je commençais à être habitué (Prép@code v1, par exemple, était bourré de questions sur les catégories de sièges pour petits enfants) par d'autres questions encore plus mal rédigées, byzantines et parfois contradictoires. (Il y avait d'ailleurs des questions tellement bizarres que ça ne peut être qu'une erreur technique : par exemple quand le petit texte censé expliquer la réponse dit exactement le contraire de ce que le système accepte comme réponse correcte, ou quand ils échangent une image censée illustrer la question avec celle censée illustrer la réponse. Je pense qu'ils ont voulu sortir leur site v2 tellement à la hâte qu'ils l'ont bâclé. Ceci dit, pour ce qui est de la forme, l'interface des versions v1 et v2 était plutôt bien faite.)

Ce n'est pas tellement la faute des éditeurs de questions d'entraînement. Le problème vient de l'opacité de l'examen, que j'ai dénoncée et que je continue à dénoncer : au lieu d'avoir une banque de questions vraiment importantes (disons de l'ordre de 30 000 questions), et qui pourrait donc être complètement publique, sur laquelle tout le monde pourrait s'entraîner (et qui pourraient faire l'objet de retours publics), il n'y a qu'un nombre relativement restreint de questions possibles à l'examen officiel (1000, peut-être même moins si certaines ont été écartées), donc elles doivent être secrètes, et je suppose que les éditeurs de sites de préparation travaillent sur la base de fuites ou de leur propre intuition. (Ceci pose aussi la question de l'avantage qu'obtient l'éditeur qui a remporté le marché — je vais dire plus bas qui c'est — car même s'il n'a pas le droit d'utiliser telles quelles les questions officielles dans ses préparations, et même s'il n'a pas le droit de faire de publicité autour de ce fait, il dispose d'un savoir-faire qui le met en position préférentielle.)

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(lundi)

Aires piétonnes et zones de rencontre

Les règles routières françaises (je dis règles pour être un peu plus large que Code de la route) connaissent trois types de zones de circulation « apaisée » : l'aire piétonne, la zone de rencontre et la zone 30.

[Panneau B54 (aire piétonne)]L'aire piétonne (signalée par le panneau B54, reproduit ci-contre à gauche) est interdite aux véhicules à moteur, mais il peut y avoir des exceptions (riverains, transports en commun, taxis pour desserte locale, livraisons, etc.) ; elle peut être interdite même aux vélos, mais ce n'est normalement pas le cas. Les piétons sont prioritaires sur tous les véhicules (tramways exceptés), et tous les véhicules doivent circuler au pas, même les vélos. Les piétons ne sont évidemment pas tenus de circuler sur les trottoirs (qui, d'ailleurs, n'existent généralement pas).

[Panneau B52 (zone de rencontre)]La zone de rencontre (signalée par le panneau B52 ci-contre et généralement renforcée par un marquage semblable au panneau sur la chaussée) est une apparition plus récente (juillet 2008) : contrairement à l'aire piétonne, les véhicules ont le droit d'y pénétrer normalement ; mais les piétons sont tout de même prioritaires sur tous (tramways exceptés) et la vitesse est limitée à 20km/h, même pour les vélos. Comme dans l'aire piétonne, les piétons ne sont pas tenus de circuler sur les trottoirs, ils peuvent emprunter la chaussée, que ce soit pour la traverser (y compris hors des passages prévus à cet effet) ou pour y circuler. (En revanche, les piétons, comme les voitures, ne doivent pas stationner sur la chaussée, c'est-à-dire rester immobiles au milieu de la route, ce qui se comprend bien par la nécessité de ne pas bloquer la circulation.) Par ailleurs, il y a normalement des doubles-sens cyclables.

[Panneau B30 (zone 30)]La zone 30 est simplement une zone dans laquelle la vitesse est limitée à 30km/h (comme c'est une limitation par zone, elle s'applique jusqu'à un panneau de fin de zone plutôt que jusqu'à la prochaine intersection). Il y a normalement des doubles-sens cyclables.

Les détails sur ces différentes zones, ainsi que leurs intentions, sont précisés dans ce document de la Sécurité routière (Certu Zones de circulation apaisée fiche nº2, août 2009 ; pas mal fait, à part que les images sont pixellisées à une résolution ridiculement basse). On y apprend par exemple les principales raisons pouvant amener à définir une zone de rencontre : rues résidentielles de desserte locale à rendre plus conviviales, quartiers historiques à protéger sans les piétonniser complètement, espaces publics et lieux de correspondances où doivent cohabiter piétons et véhicules, interruption d'une zone piétonne pour laisser passer les véhicules, rues commerçantes où on cherche à concilier fréquentation piétonne et circulation possible, rues trop étroites pour disposer d'un trottoir, zones conflictuelles au sein d'une zone 30 où on souhaite donner la priorité aux piétons.

Je me plains souvent de toutes sortes de choses, mais là, globalement, je trouve que ces trois catégories sont plutôt bien pensées, et que la zone de rencontre est un compromis plutôt raisonnable sur le principe : laisser les voitures circuler, mais à vitesse très réduite, et surtout, en rendant aux piétons l'accès à l'ensemble de la chaussée. (Je dis rendre, parce que les voitures ont conquis cet espace au détriment des piétons : à ce sujet, cet article ou celui-ci, qui racontent l'histoire de la chose aux États-Unis et du concept de jaywalking, sont assez intéressants.)

Le concept de zone de rencontre est apparu, si je comprends bien, aux Pays-Bas comme zone résidentielle (actuellement signalée par ce panneau), puis véritablement en Suisse en 2002 (où les zones de rencontre sont figurées par ce panneau), et en Belgique l'année suivante. D'autres pays ont adopté le concept depuis (l'Autriche semble avoir des Begegnungszonen à 20km/h et d'autres à 30km/h ; voici un article sur des essais dans ce sens aux États-Unis).

Sinon, en France, à côté des aires piétonnes et zones de rencontre, il existe aussi un machin appelé les voies vertes (signalées par le panneau C115), datant aussi de 2008. Les voies vertes sont réservées aux piétons et véhicules non motorisés. La différence avec l'aire piétonne est un peu byzantine, mais un point de différence est que les cyclistes ne sont pas tenus de rouler au pas sur une voie verte, alors que dans une aire piétonne, en principe, si (enfin, si les cyclistes respectaient quoi que ce soit du Code de la route…) ; je pense qu'il y a aussi une différence dans la logique d'affectation en ce que la voie verte est une voie de circulation, tandis que l'aire piétonne est une zone, m'enfin, tout ça est un peu confus. Je ne sais pas si c'était vraiment indispensable d'inventer un nouveau truc pour ça.

Mon propre quartier (la Butte-aux-Cailles) est classé zone de rencontre en temps normal, et le dimanche dans la journée il est maintenant même transformé en aire piétonne (il y a des barrages). La logique est une combinaison de certaines raisons évoquées plus haut pour définir une zone de rencontre : c'est un quartier historiquement intéressant (et d'ailleurs touristiquement intéressant : il y a de plus en plus de gens qui y viennent pour photographier les œuvres de street art qu'on y trouve, il y a maintenant même des visites guidées des rues) formé de rues pavées avec un caractère de petit village à la fois résidentiel et commerçant, il y a beaucoup de flâneurs dans les rues, surtout aux heures d'ouverture des nombreux restaurants et bars, il y a aussi des enfants qui peuvent déboucher à n'importe quel endroit, et certaines rues sont trop étroites pour avoir un vrai trottoir. La classification en zone de rencontre est donc éminemment logique.

Sauf que vous vous devinez bien de ce qui se passe : comme le feu orange, tout ça n'est absolument pas respecté.

La limitation de vitesse à 20km/h est une vaste blague : déjà, si les gens consentent à descendre à 30km/h, c'est un peu miraculeux, mais 20km/h, on ne voit jamais. (Il y a beaucoup d'automobilistes qui traversent pour éviter des encombrements sur des axes voisins, généralement ils sont de mauvaise humeur, ça s'entend très bien à leur manière de rentrer dans le quartier en accélérant, tout contents de quitter la rue du Moulin des Prés embouteillée.)

Quant au fait que les piétons ont le droit de circuler sur la chaussée, vous imaginez bien ce qui se passe si quelqu'un commence à faire ça (ce qui n'est pas forcément pour emmerder les voitures : il y a des trottoirs qui n'en sont vraiment pas) : on se fait klaxonner dessus, crier de se pousser, par des gens sûrs d'être dans leur droit. (Les trottoirs c'est pas pour les chiens !) Les surveillants des écoles primaires ou maternelles du quartier, que je croise parfois accompagnant des groupes d'enfants allant d'un endroit à un autre, ne s'y trompent d'ailleurs pas : ils font marcher les écoliers bien sur le trottoir et traverser aux passages piétons — alors qu'en principe une zone de rencontre n'a besoin ni de l'un ni de l'autre.

Pour défendre un peu les automobilistes, il faut reconnaître deux choses :

D'abord, l'indication de zone de rencontre est facile à rater. Les panneaux à l'entrée ne sont pas très visibles, certains sont mal orientés (j'ai essayé de les remettre à la main, mais c'est trop difficile). Il n'y a aucun panneau de rappel. (Moi j'en mettrais à chaque intersection, mais je me demande s'il n'y a pas une règle de droit interne complètement stupide qui dit qu'on ne peut pas rappeler un panneau de zone : en tout cas, je n'ai jamais vu ça.) Le marquage au sol est rare, lui aussi peu visible, souvent effacé. Et la zone n'a pas vraiment les caractéristiques qu'on pourrait attendre d'une zone de rencontre, comme justement l'absence de trottoirs bien délimités et de passages piétons. À ce sujet, je tire de cet autre document de la Sécurité routière (Certu, fiche technique La zone de rencontre, novembre 2008) la remarque suivante : La signalisation ne suffit souvent pas pour la lisibilité et à la crédibilité d'une zone réglementée. C'est pourquoi il est prévu que des aménagements complètent la signalisation, cette notion est incluse dans la notion d'aménagement cohérent.

Ensuite, personne ne sait ce que c'est qu'une zone de rencontre. Ceux qui ont passé le permis il y a plus de 10 ans n'ont jamais été interrogés sur ces nouveautés, et la Sécurité routière n'a pas fait de publicité sur les médias quand les panneaux ont été introduits (je sais que nul n'est censé ignorer la loi, mézenfin, on a le droit de les aider…). Certes, le panneau est assez clair et bien pensé, on peut deviner ce qu'il veut dire, en tout cas il est évident que la vitesse est limitée à 20km/h, mais je pense que ça ne suffit pas.

Il y a aussi le fait que le terme zone de rencontre n'est pas terrible. Une aire piétonne, on comprend tout de suite. Une zone 30, ça se comprend aussi. Mais une zone de rencontre, kézako ? On pense que c'est un synonyme de point de rendez-vous ou quelque chose de ce genre. Peut-être que zone semi-piétonne ou zone piétonne mixte aurait été moins obscur.

J'ai commencé une fois à vouloir expliquer le concept à un livreur qui m'avait engueulé parce que je marchais sur la route (je voulais éviter des échafaudages d'où tombent régulièrement des choses pas très propres) : je lui ai parlé de zone de rencontre, il n'avait visiblement jamais entendu le terme, je lui ai dit que la vitesse était limitée à 20km/h, il m'a prétendu que je ne pouvais pas savoir s'il faisait plus (comme j'ai l'esprit de l'escalier, je n'ai pas pensé à lui expliquer que s'il avait fait toute la longueur de la rue dans le temps où moi, marchant normalement, j'en avais parcouru le quart, il ne pouvait certainement pas avoir circulé à moins que 20km/h), je lui ai dit que les piétons avaient priorité et pouvaient circuler partout, il m'a demandé comment il était censé passer, je lui aurais répondu qu'il pouvait demander gentiment ou bien patienter quelques mètres que je tourne et que par rapport à 20km/h de toute façon je ne le ralentissais pas tant que ça, mais globalement il était évident qu'il me prenait pour un affabulateur complet qui avait sorti de mon chapeau des règles inexistantes (ce qui est faux) ou du moins inappliquées (ce qui, malheureusement, est juste). Que faire ? Je n'allais pas passer la journée à le retenir par plaisir pervers de lui faire la leçon et au risque de me faire écraser, il est passé en me maudissant.

J'ai peur, aussi, que la piétonnisation du quartier le dimanche n'augmente encore la confusion : que les automobilistes se disent, puisqu'on n'est pas dimanche, aucune règle particulière ne s'applique — et pensent que les panneaux « zone de rencontre » concernent cette piétonnisation.

Bref, je trouve tout ça très bien en théorie, mais en pratique, je ne sais pas ce qu'on peut faire. Peut-être qu'une première étape serait d'informer les riverains, leur rappeler ce qu'est une zone de rencontre et quelles sont les règles (et signaler clairement la différence avec la piétonnisation du dimanche), à la fois pour ceux qui circulent en voiture, et aussi pour les piétons (si plus de gens ont conscience qu'ils peuvent marcher sur la chaussée et y sont prioritaires, cela changera certainement la dynamique).

(À une certaine époque au moins, un adjoint d'un maire d'arrondissement de Paris lisait ce blog. Je ne sais pas si c'est toujours le cas, mais je peux lancer des gros hint, hint à tout hasard.)

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(mardi)

Une râlerie sur la signalisation routière (l'A86 et la N186)

Voici ce que je crois avoir compris :

  • L'A86 est une autoroute qui fait grosso modo le tour de Paris. Son trajet reprend au moins en partie celui d'une (non-auto-)route préexistante, la N186.
  • Sur certains tronçons, l'A86 et la N186 et ne suivent pas exactement le même parcours ; sur certains tronçons, seule existe soit l'une soit l'autre. Voilà où les choses deviennent problématique.
  • Il existe des segments relativement courts où, sans doute pour des raisons de place ou je ne sais quelle autre contrainte, on n'avait probablement pas les moyens de faire remplir à la route les exigences techniques nécessaires pour lui donner les caractéristiques d'une autoroute. (Là, c'est moi qui devine. Je suppose qu'il y a des règles très précises pour pouvoir être une autoroute.)
  • Personne n'a le pouvoir de faire une dérogation à ces règles (c'est-à-dire arrêter quelque chose comme bien que la route ne réponde pas à toutes les exigences normalement demandées d'une autoroute, elle sera néanmoins classée comme telle afin d'éviter de changer inutilement de catégorie sur un segment très court). Ou si quelqu'un avait ce pouvoir, il était en vacances ce jour-là ou n'a pas reçu le mail. Du coup, sur ces segments, il s'agit bien d'une route nationale et pas d'une autoroute.
  • Il existe aussi des règles crétines qui imposent qu'une autoroute ait un numéro en Axyz et une nationale en Nxyz et on ne peut pas décider de donner à une route nationale un numéro en Axyz quand bien même ce serait bien pratique pour éviter de changer inutilement de numéro sur un segment très court. (Autrement dit, la catégorie de la route pour les besoins des règles de conduite et/ou d'administration doit coïncider avec sa catégorie pour les besoins de la terminologie, même si le contraire serait bien pratique.) Ou alors, de nouveau, la personne qui a le pouvoir d'autoriser une dérogation n'a pas pu intervenir parce qu'elle était à la piscine.
  • Du coup, on se retrouve avec des bouts de route où tout le monde imaginerait être toujours sur l'autoroute mais non, pouf, l'A86 cesse d'exister pour devenir N186 et réapparaît juste un peu plus loin.
  • L'emplacement exact de ces différents bouts n'a même pas l'air clair : apparemment, Google Maps n'a pas reçu l'information « pour des raisons de psychorigidité incontournable, ce tout petit bout n'est plus l'A86 mais la N186 » (elle est étiquetée A86 partout), et OpenStreetMap n'a pas l'air super au courant non plus ; pire, s'il y a des indications sur la route elle-même, elles sont très discrètes. Je pense notamment à la transition qui a lieu quelque part par ici : à l'est, vers Choisy-le-Roi, c'est clairement l'A86, au niveau de Rungis c'est clairement la N186, mais j'ai eu beau passer plein de temps sur Google Street View à faire le parcours dans les deux sens en cherchant une indication de où la transition a lieu, sans succès.
  • Bref, apparemment, il est indispensable que chaque petit bout s'appelle A86 ou N186 selon la catégorie exacte applicable au petit bout, mais personne ne pense prévenir les automobilistes « attention, pour des raisons de psychorigidité incontournable, la route sur laquelle vous êtes va présentement changer de nom ».
  • Personne non plus n'a eu l'idée brillante de se dire que peut-être on pourrait mettre une indication accessoire sur les panneaux de direction, genre =A86 ou même simplement vers A86, ou quoi que ce soit qui informe les gens pas au courant que les indications A86 et N186 peuvent être plus ou moins synonymes.

Bilan de tout ça : le poussinet et moi, ignorant toutes ces subtilités, étions dans une Autolib (en train d'essayer d'aller à Châtenay-Malabry), croyant suivre l'A86 parce que c'est ce que Google Maps/Navigation nous indiquait, et voilà que nous arrivons devant ce panneau pour lequel l'indication suivre l'A86 n'aidait pas vraiment à choisir entre la N186 vers Antony, Versailles et Fresnes, l'A6 (A10) vers Bordeaux, Nantes, Lyon, Évry et Palaiseau, ou l'A6 vers Paris. Stupidement, nous nous sommes retrouvés sur l'A6a retournant vers Paris, et celle-ci n'a aucune sortie avant le périphérique (il faut admettre qu'on aurait dû choisir la nationale même sans savoir si c'était la bonne, parce qu'a priori ça offre beaucoup plus de possibilités de changer de direction — mais le temps disponible pour faire le choix était très court et rien n'était indiqué à l'avance). Remarquez au passage que ce panneau montre qu'il est possible d'écrire A6 (A10), donc on ne comprend pas pourquoi il ne serait pas possible d'écrire N186 (A86). Et si on avait suivi le bon chemin, on serait bien tombé sur l'A86 (comme le témoigne ce panneau juste un peu après) sans que rien ne permette de savoir comment elle est apparue.

Est-ce que c'est moi qui suis un râleur invétéré ou est-ce qu'on se fout carrément de la gueule du monde, là ? Tout le monde se moque des spécifications techniques détaillée d'une autoroute : s'il y a une règle qui impose que la route sur laquelle on circule change brutalement de nom parce qu'il lui manque je ne sais quoi du cahier des charges, c'est cette règle stupide qu'il faut changer, pas le nom de la route !

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(samedi)

Râlerie sur le feu orange à Paris

Avertissement : Le seul but de cette entrée est pour moi de faire mon râleur.

Parmi les choses que je déteste particulièrement chez les Parisiens (enfin, je crois que c'est particulièrement parisien ; je n'ai pas fait tellement attention à la manière dont on conduit dans le reste de la France), il y a la manie de griller les feux oranges[#][#2].

Le contraste entre la théorie et la réalité est impressionnant. À l'examen de code, on vous montre des photos avec un feu vert et on vous demande quoi faire, et il faut répondre je ralentis, parce que le feu pourrait passer à l'orange. Dans la réalité, les parisiens sont convaincus que le feu orange a la signification : attention, ce feu va bientôt passer au rouge : accélérez maintenant, pour le traverser quand il est encore temps. Mais quelle bande de connards !

Je l'avais remarqué depuis longtemps, mais il y a quelques jours je me suis dit que j'allais regarder plus systématiquement, à chaque fois que je vois un feu passer à l'orange, quelles voitures s'arrêtent et lesquelles non. Et pour l'instant, je n'ai pas vu un seul cas de quelqu'un qui se soit arrêté à l'orange et qui n'y ait pas été contraint par une nécessité évidente (par exemple, une intersection bouchée ou un piéton qui s'engage dangereusement). Je ne me rendais pas compte à quel point le phénomène était répandu !

Bien sûr, si les gens accélèrent pour passer à l'orange, on comprend bien que le début du rouge est tout aussi régulièrement grillé. Les gens essayent quand même vaguement de s'arrêter au rouge, i.e., ils traitent celui-ci à peu près comme ils devraient traiter l'orange. Mais il y en a quand même beaucoup qui grillent carrément le rouge. Et même parfois, qui démarrent au rouge : le cas le plus fréquent que je constate, ce sont les gens qui n'ont pas pu « bénéficier » du vert, par exemple parce que l'intersection était bouchée ou parce que la voiture de devant a tardé à démarrer ou quelque chose comme ça ; apparemment, ces gens estiment que comme ils sont restés assez longtemps arrêtés au feu, et notamment arrêtés au vert, ça « paie d'avance » (je suppose que c'est quelque chose comme ça qui leur traverse l'esprit) le fait de griller le rouge.

Le Parisien, il vaut mieux l'avoir en journal.

Je ne sais pas pourquoi on n'installe pas plus systématiquement des caméras sur les feux afin de verbaliser les gens qui passent à l'orange (plus plein de caméras factices) : même si l'amende n'est qu'entre 22€ et 150€ pour l'orange (contre 90€ à 750€ pour le rouge), le tiroir-caisse devrait se remplir assez vite. [Précision : Je parle évidemment de ceux qui passent à l'orange de façon abusive, c'est-à-dire la grande majorité des gens, pas des véhicules dont, selon l'expression de l'article R412-31 du Code de la route, le conducteur ne peut plus arrêter son véhicule dans des conditions de sécurité suffisantes.] D'un autre côté, la première réforme à faire serait aussi de changer complètement la programmation de tous les feux de circulation à Paris, par exemple pour qu'un piéton puisse aller d'un point A à un point B en les respectant et sans perdre plus de la moitié de son temps à poireauter inutilement. Je parlerai de tout ça une autre fois où je me sentirai l'envie de râler[#3].

[#] J'ai commencé par écrire les feux orange, et puis merde, il est grand temps d'envoyer paître cette règle complètement crétine et illogique du français selon laquelle les adjectifs de couleurs sont invariables lorsque gnagnagna et gnagnagna ou gnagnagna et gnagnagna (sauf gnagnagna et gnagnagna). Donc : des feux rouges, oranges et verts.

[#2] L'autorité administrative les qualifie de jaunes : elle ne doit pas avoir la même perception des couleurs que moi et que la plupart des gens. Je me demande, d'ailleurs, pourquoi on n'utilise pas le jaune comme couleur du milieu.

[#3] Je pense par exemple aux feux antisynchronisés de façon absurde, ce qui fait qu'on est obligé de perdre son temps au milieu quel que soit le moment où on arrive (alors qu'il aurait suffi de laisser un petit recouvrement entre les deux périodes de vert piéton). Ou bien aux boutons appuyez pour traverser : pourquoi ces boutons ne font pas instantanément passer le feu à l'orange pour les voitures s'il est resté suffisamment longtemps au vert et/ou si le radar détecte qu'il n'y a pas de voiture à proximité ? À la place, ces boutons sont un placébo ou imposent une attente minimale absurde.

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(mardi)

Vieux dossiers : ce n'était pas une blague

Je voudrais vraiment bien parler d'autre chose que de permis de conduire, mais il semble que je vienne d'en prendre pour trois mois de plus. Résumé des épisodes précédents : pour s'inscrire au permis de conduire, si on a déjà été inscrit par le passé, il faut obligatoirement fournir à l'Administration une copie du dossier antérieur (pourquoi ? mystère, c'est sans doute une règle gratuitement vexatoire). Or j'ai bien été inscrit dans une auto-école (à Orsay) il y a 15–20 ans. L'auto-école (à Paris) où j'ai voulu m'inscrire mi-juillet me dit : ça va poser problème, il faut essayer de remettre la main sur ce dossier. J'envoie ma maman essayer de récupérer mon ancien dossier à l'auto-école d'Orsay. Celle-ci lui répond que non, si longtemps après, ce n'est pas possible, tout a disparu, mais de toute façon mon dossier n'est jamais arrivé à la préfecture donc ils n'en ont aucune connaissance et il n'y a pas de problème. Du coup, rassuré, j'ai fait mon inscription (début août), en affirmant ne pas avoir de dossier antérieur, à l'auto-école à Paris. Laquelle transmet le dossier à la préfecture. Et voilà que ce matin ils m'appellent pour me dire que le dossier leur est revenu avec la mention : fournir le vieux dossier de 1997. Comme quoi apparemment il en existe bien une trace (et ce n'est pas une erreur, parce que l'année colle, donc ça doit effectivement être moi).

La procédure dans ce cas est de faire une demande de duplicatum. L'absurdité de la chose est vraiment confondante : on doit demander à l'Administration un dossier qu'ils ont pour le leur transmettre. Et apparemment il leur fois trois mois pour retrouver le dossier. Là aussi, l'absurdité est impressionnante : ils sont capables de voir immédiatement, pour bloquer l'inscription, qu'un ancien dossier existe, mais il leur faut trois mois pour retrouver effectivement ce dossier (et vous le renvoyer pour que vous le leur re-renvoyiez). Kafka apprécierait.

Et encore, ça c'est si les choses se passent bien. Parce que j'imagine parfaitement le scénario suivant (pour l'instant fictif, mais je ne parierais pas sur le fait qu'il le reste) : je demande le duplicatum et on m'affirme que le dossier n'existe pas — rien n'oblige l'Administration a être cohérente avec elle-même — et je me retrouverais alors avec une partie de l'Administration qui affirme que le dossier existe et qui me le demande, et une autre qui affirme qu'il n'existe pas ou plus, et aucun moyen de m'inscrire. Peut-être qu'il existe encore des solutions dans ce cas (faire un recours gracieux, saisir le défenseur des droits, saisir les tribunaux administratifs), mais ils sont compliqués et lents : ce n'est plus en mois mais en années qu'on compterait alors le délai.

Après tout, il doit y avoir très peu de cas comme moi de gens qui se sont inscrits au permis il et qui se réveillent vingt ans après pour refaire une inscription : il se peut très bien que les anciens dossiers (avant informatisation) aient été entièrement perdus sauf les numéros montrant qu'ils existent, ou quelque chose comme ça. Donc si cela conduit à des situations absurdes, presque personne ne s'en sera rendu compte. Il ne faut jamais être dans des cas bizarres.

Bref, je ne sais pas si je finirai par l'avoir, ce permis. Certes, j'ai maintenant pleeeein de temps pour apprendre par cœur toutes les questions stupides et aussi pour enquêter sur leur provenance ; mais dans trois mois je serai trop occupé par mon travail pour pouvoir penser au permis de conduire, donc il faudra sans doute que ça attende l'été prochain, et encore, s'il n'y a pas un nouveau contretemps d'ici là !

Ajout : pour la suite de mes aventures de permis de conduire, c'est ici, et à partir de pour la partie pratique.

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(samedi)

Le mystère de la provenance des questions de code de la route reste intact

Promis, je ne parlerai pas de permis de conduire jusqu'à la fin des temps. Mais la densité des questions stupides, et mon énervement qui va avec (que je voudrais bien savoir contre qui diriger !) m'amène à me poser de plus en plus la méta-question suivante : par qui au juste, et comment sont choisies les questions de l'épreuve théorique générale (a.k.a. « code ») de l'examen du permis de conduire ? Et combien y en a-t-il ?

Je n'ai pas la réponse. Et c'est vraiment bizarre : une proportion très importante de la population française passe le permis, mais personne n'a l'air de se demander, ou encore moins de savoir, comment cette épreuve est organisée au juste. (Alors que si on cherche à savoir un peu précisément comment sont élaborés, disons, les sujets du bac, on trouve facilement plein d'informations. Mais pour le permis, toute recherche sur le Web fait juste tomber sur des sites et applis proposant de le réviser.) Je crois ne pas être trop incompétent pour mener des enquêtes en ligne, mais là, je n'ai trouvé aucune piste. Personne n'en parle, personne ne sait. Et du coup, c'est un mystère que j'aimerais éclaircir, ne serait-ce que par principe.

Entre autres choses que je voudrais savoir :

  • Combien existe-t-il de questions en tout et pour tout — i.e., quelle est la taille totale de la banque de questions parmi laquelle sont choisies les 40 qui tombent à une séance donnée ?
  • Est-ce que cette banque est publiquement connue ? Officiellement accessible quelque part ?
  • Existe-t-il au moins un programme officiel ? Une liste de choses qui doivent être connues ?
  • Qui, concrètement, rédige les questions ? Qui invente les chiffres complètement pipo qu'on doit connaître pour passer cette épreuve (du genre : le champ visuel du conducteur dans un véhicule circulant à 130km/h est d'environ 30° — chiffre manifestement surgi d'un grand pipotron et je me demande bien de qui) ? Qui prend les photos ?
  • Quel est le rapport exact entre les questions posées à l'examen et celles des différentes séries d'entraînement proposées par des éditeurs privés (Codes Rousseau, Prép@code, Éditions nationales du Permis de conduire, etc. — je ne comprends d'ailleurs pas bien combien il y en a, ou comment ils sont reliés les uns aux autres) ?

J'ai essayé de tracer les références sur Legifrance en partant du Code de la route, je ne suis tombé sur rien (voici un exemple de texte qui ne dit rien : il est extrêmement précis sur les modalités d'organisation de l'épreuve mais ne dit rien sur les questions ou leur nature). Un communiqué comme celui que j'ai déjà cité ne donne aucun détail, juste un petit échantillon minable de questions.

J'ai envisagé plusieurs hypothèses :

  • Hypothèse 1 : Il existe une banque officielle de ~104 questions, pondue par l'Administration, et communiquée aux éditeurs des séries d'entraînement (et peut-être à tout le monde qui le demande, mais connaissant l'Administration française, probablement sous un format merdique au possible). Les éditeurs en question rédigent juste des exégèses des réponses et mettent en place un système interactif, mais ce n'est pas eux qui inventent les questions (ou alors juste un petit nombre pour varier un peu et peut-être rendre la chose plus dur afin d'avoir une marge sur ce qui se passera à l'examen).
  • Hypothèse 2 : La banque officielle est secrète (à l'exception d'un tout petit échantillon). Les éditeurs de séries d'entraînement essaient de la parodier comme ils le peuvent à partir des fuites qu'ils ont (ce que les candidats leurs font remonter), peut-être en les rendant volontairement un poil plus dures.
  • Hypothèse 3 : En fait, ce sont les éditeurs privés qui rédigent les questions. Chacun fabrique ses séries d'entraînement, et met de côté un sous-ensemble des questions (ou un ensemble disjoint dans le même genre ?) versées à la banque officielle. (Mais ceci laisse encore plein de questions en suspens : comment le choix est fait, quel est le nombre total de questions et le nombre fourni par chaque éditeur, et sur la base de quel programme officiel les questions sont rédigées.)

J'ai accès à un site Web Prép@code via mon auto-école, mais sur place celle-ci propose des séries d'entraînement éditées par Codes Rousseau (qui a l'air d'être une très vénérable institution !). Ces séries me semblent un peu différentes, et en tout cas disjointes l'une de l'autre : ceci invaliderait l'hypothèse 1.

J'ai posé la question (enfin, un sous-ensemble des questions ci-dessus) au formateur de mon auto-école : soit il n'a pas bien compris ma question (je crois que beaucoup de gens ont du mal à concevoir qu'on puisse vouloir savoir ce genre de choses par curiosité intellectuelle), soit je n'ai pas bien compris sa réponse, mais j'ai l'impression qu'il suggérait plutôt l'hypothèse 3 (en fait, je n'avais même pas pensé initialement à l'hypothèse 3, d'ailleurs je me sens un peu con ; mais ça reste une hypothèse, parce que je ne suis pas sûr qu'il n'y ait pas eu un malentendu entre lui et moi). Et même si c'est l'hypothèse 3 qui est la bonne, comme je disais, ça laisse un tas de choses ouvertes : est-ce que les éditeurs écrivent ce qu'ils veulent dans les questions ? sur la base de quel cahier de charges ? est-ce qu'ils se relisent les uns les autres ? comment est-ce que l'Administration contrôle tout ce procédé ? Et où est-il écrit officiellement qu'il y a quarante questions, que les réponses se choisissent parmi les sous-ensembles de {A,B,C,D} et qu'il doit toujours y avoir au moins une réponse juste et une réponse fausse ?

Je pourrais essayer de trouver un interlocuteur au ministère de l'Intérieur (au moins j'ai l'adresse : délégation à la sécurité et à la circulation routières, sous-direction de l'éducation routière et du permis de conduire, bureau du permis de conduire ; j'aaaaime ce genre d'organigramme). Mais j'ai peur, outre qu'il soit peu probable d'obtenir une réponse en août, que la question soit encore impossible à poser de manière à être compris par un non-geek.

Mise à jour () : Mon poussinet me fait remarquer que la production des questions a fait l'objet d'un marché public dont l'offre est parue au BOAMP ici (avis 15-23943 du 18 février 2015, Production de 1000 questions pour l'épreuve théorique générale de l'examen du permis de conduire — je ne sais pas pourquoi c'est localisé à la Défense). Ceci conforte donc l'hypothèse 3 ci-dessus (les questions seraient produites par des éditeurs privés en réponse à cette offre). Mais pour en savoir plus, il faut mettre la main sur le cahier des charges de l'offre en question. Or le site www.marches-publics.gouv.fr ne semble donner les détails que des offres en cours (ou alors je n'ai pas compris comment le faire fonctionner).

Mise à jour : L'hypothèse 2 est la plus proche de la réalité : la banque de questions comporte 1000 questions, et est tenue secrète ; elle a été réalisée par EDISER suite à un marché public passé par l'Administration (cf. le paragraphe ci-dessus), et facturée 42k€ ; les éditeurs de séries d'entraînement se renseignent comme ils peuvent sur le contenu des vraies questions officielles (et je les soupçonne de prévoir exprès légèrement plus dur). Cf. cette entrée ultérieure pour quelques autres précisions.

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(mardi)

Quelques questions débiles ou mal foutues au code de la route

(Complément à l'entrée de vendredi. Je compléterai certainement cette liste au fur et à mesure. Il ne s'agit pas uniquement de questions où j'ai mal répondu lors de mes tests — parfois j'ai deviné correctement mais je trouve quand même la question merdique, parfois j'ai répondu au pif et j'ai eu raison — mais des questions que je trouve particulièrement idiotes, mal posées, ou vicieuses.)

Questions merdiques sur le fond

  • La photo montre un passage à niveau. Le panneau lumineux fermé est allumé. Il n'y a personne sur la route. La question demande si le panneau annonce l'arrivée d'un train (évidemment oui), et demande aussi si des véhicules peuvent être arrêtés sur la chaussée. On voit très bien sur la photo qu'il n'y en a pas, et qu'il n'y a aucun moyen qu'ils se matérialisent. Pourtant, d'après le site sur lequel je m'entraîne, il faut quand même répondre oui (=des véhicules peuvent être arrêtés sur la chaussée) : pas d'explication particulière n'est fournie à ce sujet.
  • La photo montre un panneau annonçant une aire piétonne. En-dessous, un autre panneau, rectangulaire (et peut-être pas très règlementaire) sur lequel est symbolisé le panneau circulation interdite (B0) avec l'indication textuelle interdit sauf livraisons de 7h à 19h véhicules autorisés limités à 7.5t (l'endroit exact est ici, et la photo de Google street view montre les deux panneaux dont je parle). La question demande si dans cette rue il est possible de circuler à pied, en vélo, en rollers, en voiture. Il n'y a pas de doute que les piétons et les rollers ont le droit de passer, et les voitures non (enfin, sauf livraison, mais on n'est pas censé faire ce genre d'hypothèse). Le doute porte sur les vélos : dans une zone piétonne en général, la réponse est oui, mais le panneau d'en bas portant la symbolisation du panneau B0 qui exclut aussi les vélos, j'ai conclu que non ; pourtant, le corrigé du site sur lequel je m'entraîne prétend que oui (ils ignorent purement et simplement ce deuxième panneau).
  • La photo montre une route en pente montante (dans le sens où on regarde) avec un obstacle à droite qui empêche de passer à deux simultanément. Exactement le cas où on ne sait pas quelle règle s'applique entre priorité à la voiture montante et celui qui est du côté de l'obstacle doit céder le passage. Et la question demande, justement, si on est prioritaire. Apparemment il faut deviner que la pente n'est pas assez forte (ou est-ce parce qu'on est en agglomération ? l'article R414-3 du Code de la route commence par lorsque sur les routes de montagne et sur les routes à forte déclivité le croisement se révèle difficile — je ne sais pas si une rue en agglomération constitue une route au sens du langage administratif).
  • La photo montre qu'on est sur la voie du milieu d'une autoroute 2×3 voies. Devant se trouve un autocar (toujours sur la voie centrale), dont le cligotant gauche est allumé. Sur la voie de droite, des poids lourds. La voie de gauche est libre. La question demande quelque chose comme : je peux dépasser par la voie de gauche. La prudence demande de répondre non (l'autocar a le clignotant gauche allumé, peut-être va-t-il s'insérer sur la voie de gauche). Réponse attendue : oui, selon la logique que l'autocar n'a pas le droit de circuler sur la voie de gauche, il est donc en train de finir de se mettre sur la voie centrale, pas de commencer à passer sur la voie de gauche, donc il n'y a pas d'objection à le doubler par la gauche. C'est vraiment stupide, parce que (A) ça fait l'hypothèse que tout le monde obéit au Code de la route, chose manifestement fausse non seulement dans la réalité mais aussi dans plusieurs autres questions du même examen, et (B) dans la vraie vie, contrairement à une photo fixe, on aurait bien vu ce que faisait l'autocar juste avant (est-il en train de finir de passer sur la voie centrale ou veut-il se mettre plus à gauche), et enfin (C) quand bien même il vient de la voie de droite, ça ne coûte pas cher d'attendre quelques secondes qu'il ait éteint son clignotant gauche pour être sûr.
  • Dans une première question, la photo montre quelqu'un en train de manger un sandwich et de boire de l'eau au volant ; la question demande si ce comportement entraîne : une mauvaise prise en compte d'indice (réponse A), une augmentation du temps de réaction (réponse B), une difficulté d'accès aux commandes (réponse C), une mauvaise maîtrise de la trajectoire (réponse D) — il fallait répondre A, C et D (mauvaise prise en compte d'indice parce qu'on est occupé à regarder ce qu'on mange, mauvais accès aux commandes parce qu'on a les mains occupées, et mauvaise maîtrise de la trajectoire parce qu'on tient mal le volant ; moi j'aurais répondu tout à la fois, mais il y a toujours au moins une réponse fausse, donc j'ai écarté B et c'était correct). Seulement, une question dans une série ultérieure montre quelqu'un en train d'allumer une cigarette au volant et demande, entre autres choses, si cela augmente le temps de réaction — cette fois, la réponse attendue était oui. Pourquoi diable est-ce qu'allumer une cigarette aurait plus d'effet sur le temps de réaction que manger un sandwich ?
  • Je suis fatigué, mais j'ai un rendez-vous important : je circule plus lentement (réponse A), je fais une pause (réponse B), je circule plus vite (réponse C) : la réponse attendue était évidemment (B) je fais une pause, et il est évident que la (C) est fausse. Mais fallait-il aussi choisir la (A) ? Apparemment pas — mais c'est vraiment une question de boule de cristal à ce niveau-là.

Questions merdiques sur la forme ou la logique

  • La sécurité enfant empêche les passagers arrière de sortir du véhicule (oui/non) : il faut avoir une boule de cristal bien réglée pour deviner si on doit répondre oui (elle bloque l'ouverture de la portière par l'intérieur) ou non (l'ouverture reste possible par l'extérieur). Apparemment la réponse attendue était oui.
  • La photo montre une voie de stockage permettant de faire un virage à gauche « à l'indonésienne ». On est dans une position où il est clair qu'on doit avancer un peu, céder le passage à un camion qui vient en face, puis tourner. Mais la question est formulée ainsi : je tourne à gauche immédiatement (oui réponse A, non réponse B), je m'arrête sur la seconde flèche pour céder le passage (oui réponse C, non réponse D). La seconde flèche en question, si on devine bien qu'elles sont numérotées dans le sens dans lequel on avance, est celle qui pointe dans la direction inverse (concerne les véhicules venant d'en face). Il faut donc répondre B (non je ne tourne pas immédiatement, j'avance un peu) et D (non je ne m'arrête pas pour la seconde flèche, c'est trop loin), ce qui fait qu'au final on n'a même pas explicité le fait qu'on cédait le passage !
  • Les questions du genre : je passe avant la voiture fuchsia (oui réponse A, non réponse B), après la voiture aigue-marine (oui réponse C, non réponse D) (les noms des couleurs sont de moi !), où il faut tourner trois fois son cerveau dans son crâne pour bien noter que la première partie de la question utilise la préposition avant mais que la seconde partie utilise la préposition après et est donc inversée.
  • Je passe avant le camion (oui/non), avant le véhicule blanc (oui/non) : très bien, sauf qu'il y a deux véhicules blancs sur la photo ! Certes, l'un est en train de s'éloigner et n'est probablement pas visé par la question, mais ça reste vraiment confusant.
  • La photo montre qu'on est stationné, et une voiture arrivant dans la voie où on veut s'engager empêche qu'on quitte le stationnement immédiatement. La question est formulée ainsi (de mémoire) : J'actionne le clignotant avant de quitter le stationnement (oui/non) — il faut répondre non, parce qu'on ne peut pas quitter le stationnement maintenant (et on ne doit pas mettre le clignotant pour signaler une intention, seulement une action). C'est vraiment pervers, parce que j'actionnerai le clignotant avant de quitter le stationnement, juste pas maintenant. (Je n'étais pas le seul à trouver cette question outrageusement stupide et illogique : il y a eu un concert de protestations chez les autres préparationnaires de mon auto-école.)
  • Dans la question je commets un délit si je roule avec une quantité d'alcool dans le sang au moins égale à (0.3g/L réponse A ; 0.5g/L réponse B ; 0.8g/L réponse C ; 1.2g/L réponse D), il faut répondre C et seulement C. Alors que dans la question titulaire d'un permis probatoire, je dois effectuer un stage de sensibilisation à la sécurité routière si je perds (1 points réponse A ; 2 points réponse B ; 3 points réponse C ; 6 points réponse D), là il faut répondre C et D. Franchement, quelle logique pourrie !
  • Je passe après le piéton nº2 : il faut répondre non s'il y a un piéton nº3 qui vient après. Autrement dit, il faut implicitement comprendre après comme juste après et pas plus tard que. De qui se moque-t-on ?

Questions merdiques par la connaissance demandée

  • Les signes annonciateurs de fatigue sont — suivi de quatre symptômes tous également plausibles. Non mais franchement, tous ces symptômes méritaient raisonnablement qu'on s'arrête pour faire une pause, quelle connerie que de demander lesquels sont annonciateurs de fatigue au sens où je-ne-sais-pas-qui l'a décidé !
  • Il est nécessaire de connaître les catégories de sièges pour enfants et les poids entre lesquels on peut les utiliser. Franchement, dans le genre de connaissance complètement inutile, celle-ci emporte le pompon : toute personne raisonnable confronté à la question de l'adéquation d'un siège à un enfant va simplement consulter Internet au moment utile ; faire apprendre ces chiffres à tous ceux qui passent le permis est d'une idiotie indescriptible.
  • Il est nécessaire de savoir que le contrôle technique doit être effectué au plus 6 mois avant la vente d'un véhicule : apparemment on ne peut pas se contenter de savoir que c'est un certain nombre de mois — ils sont assez pervers pour poser la question de savoir si c'est 8 mois (et il s'agit donc de répondre non dans ce cas). Quel intérêt de faire mémoriser des détails idiots pareils ?
  • Il est nécessaire de savoir qu'un gilet haute visibilité permet d'être vu la nuit à environ 160m (chiffre certainement complètement pipo et sorti du chapeau de quelqu'un).
  • Il est nécessaire de savoir que l'AFU (Aide au Freinage d'Urgence) accentue le freinage tandis que l'ABS est un système d'antiblocage — et ne pas les traiter comme synonymes même si, dans la pratique, et peut-être même par obligation, ces deux systèmes sont toujours couplés !

Divers

  • Apparemment les carrefours à sens giratoire (tels qu'annoncés par le panneau AB25) ont toujours un cedez le passage à l'entrée (matérialisé hors agglomération par un panneau AB3a), jamais un stop [instruction interministérielle sur la signalisation routière, 3e partie, notamment article 42-10]. Je ne sais pas, moi, ça ne me semblait pas spécialement idiot a priori qu'on puisse avoir un stop en entrée de carrefour à sens giratoire dans des circonstances un peu spéciales. Était-ce vraiment utile de faire apprendre un truc pareil ? Pourtant, je suis tombé sur une question qui me demande, après le panneau annonçant un sens giratoire, quel panneau je vais rencontrer ensuite, et qui proposait entre autres choses le panneau cédez le passage et le panneau stop.

Ajout : pour la suite de mes aventures de permis de conduire, c'est ici, , et à partir de pour la partie pratique.

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(vendredi)

Gro-Tsen prépare le permis de conduire : (1) l'épreuve théorique

Pour toutes sortes de raisons, je me suis enfin inscrit pour passer le permis, à la veille de mon 40e anniversaire. (Raisons telles que : déménagement prévu dans quelques années de mon école à Saclay où les transports en commun sont merdiques ; pression insidieuse de mon poussinet et de ma maman et deals bizarres passés avec eux ; et une vague inquiétude que ça risque d'être long et compliqué et que si je ne fais pas maintenant je ne le ferai jamais.) Le fait d'avoir une auto-école à 150m de chez moi aide sans doute un peu à surmonter ma flemme, d'ailleurs. Comme je l'ai raconté récemment, j'ai eu un petit contretemps initial, qui n'en était en fait pas un (finalement je n'ai jamais eu de dossier, donc j'ai juste perdu deux semaines pour rien à confirmer ce fait), mais j'ai réussi à passer l'épreuve 0, celle de l'inscription. (On ne rigole pas, à l'agreg de maths, c'est l'épreuve où le plus de normaliens échouent.) En fait non, suite ici.

L'examen du permis de conduire proprement dit, en France, se compose de deux parties : (1) l'épreuve théorique générale (que tout le monde appelle le code, mais une partie de la théorie consiste justement à connaître le jargon de l'Administration que personne n'utilise à part elle), et (2) l'épreuve pratique de conduite. Pour préparer l'épreuve théorique, on s'entraîne comme on peut (livres, sites Internet, cours à l'auto-école, examens blancs), je vais y revenir.

Pour s'entraîner à l'épreuve pratique, il faut suivre un certain nombre d'heures de formation, au minimum 20, dont le nombre prévisionnel est déterminé par une évaluation psychomotrice préalable qui, dans mon cas, a pris la forme d'une succession de petits jeux sur ordinateur (dont certains ressemblaient un peu aux idées surgies de mon cerveau diabolique) pour mesurer des choses comme la mémoire à court terme, le temps de réaction, le champ de vision, la capacité d'évaluation des temps, distances et vitesses, la concentration, la capacité à multitâcher, etc. Dans mon cas, l'Ordinateur a décidé, dans son immense sagesse, que j'avais besoin de 25–30 heures de formation. Ou peut-être que ça c'est après que j'ai insisté sur le fait qu'à 40 ans on n'acquiert peut-être pas des habitudes aussi vite qu'à 20, je ne sais pas. On verra, de toute façon, pour l'instant, il s'agit pour moi de passer le « code ».

L'épreuve théorique générale, donc, prend la forme (je raconte ça pour mes lecteurs qui n'ont pas passé le permis en France, ou l'ont passé il y a très longtemps) d'un questionnaire à choix multiple de 40 questions où il faut répondre juste à au moins 35 d'entre elles. Chacune de ces questions se présente comme une photo ou plus rarement une courte vidéo, typiquement prise depuis l'habitacle d'une voiture, et sur laquelle on demande des choses comme la signalisation m'autorise à dépasser : oui réponse A, non réponse B ; je dépasse : oui réponse C, non réponse D et on doit choisir un sous-ensemble de {A,B,C,D} (qui, méta-information très utile, ne peut jamais être ni l'ensemble vide ni l'ensemble plein, ce qui laisse 14 possibilités au maximum) ; parfois, seul un sous-ensemble des lettres est utilisé (ces questions-là sont donc combinatoirement plus faciles). Matériellement, on entre la réponse sur un boîtier spécialisé.

Les questions peuvent porter sur le Code de la route, bien sûr (i.e., la réglementation sur la signalisation, règles de priorité, etc.), mais aussi sur la sécurité, quelques aspects de mécanique et de règlementation générale (assurances, infractions), le bon sens, et même maintenant la protection de l'environnement (comme l'« écoconduite »). Enfin, ça c'est le principe. Parce qu'en réalité, les questions portent surtout sur la logique tordue et le langage merdique utilisés par les auteurs de la question.

Je pourrais donner quantité d'exemples de la formulation absolument épouvantable utilisée dans ces questions, mais ça deviendrait vite lassant [ajout : voir cependant cette entrée ultérieure]. Il y a des choses qui se défendent : après tout, conduire une voiture est un exercice d'attention, donc le fait de poser parfois les questions de façon affirmative (la signalisation me permet de dépasser (oui/non)) et parfois de façon négative (la signalisation m'interdit de dépasser (oui/non)), cela peut se justifier. Le fait d'utiliser un vocabulaire administratif se justifie peut-être aussi (dans le français de la vie réelle, tout le monde dit doubler, mais il est sans doute normal d'obliger à connaître le terme administratif effectuer un dépassement).

Mais parfois les questions jouent au logicien (par exemple : je peux circuler à : 50km/h réponse A, 90km/h réponse B, 110km/h réponse C, 130km/h réponse D — il faut choisir la vitesse maximale et aussi les vitesses en-dessous parce qu'on a le droit de rouler plus lentement que la vitesse maximale, même si ce n'est évidemment pas comme ça que le non-logicien comprendrait la question à quelle vitesse ai-je le droit de rouler ?) ; et parfois les questions ne jouent pas au logicien (par exemple : titulaire d'un permis probatoire, je suis en infraction à partir de 0.5g d'alcool par litre de sang réponse A, 0.2g d'alcool par litre de sang réponse B — là il ne faut pas répondre à la fois A et B, même si le fait d'être en infraction à partir de 0.2g/L implique logiquement de l'être aussi à partir de 0.5g/L). De même, à une question demandant si on cède la priorité aux véhicules venant par la droite, il faut apparemment répondre non s'il ne peut pas y avoir de véhicule venant par la droite. Comment savoir quelles questions jouent au logicien et quelles questions ne le font pas ? Eh bien il faut l'apprendre à travers des tonnes d'exemples, ce qui, on l'admettra, est d'une utilité fort douteuse pour la conduite d'un véhicule à moteur.

À part les questions de logiciens, il y a aussi un usage fort douteux des modalités. Sur le principe, je suis content qu'ils distinguent je dois et je peux (il y a des questions où la réponse correcte est bien de dire non à je dois et oui à je peux, ce qui est très bien), mais c'est souvent incohérent. Les notions d'obligation légale (réglementaire) et d'impératif de sécurité sont parfois distinguées, parfois non. Quand la question est je dépasse (oui/non), il faut appremment comprendre je peux dépasser (selon le règlement et la sécurité). Une distinction byzantine est faite entre un panneau indiquant un X et un panneau indiquant un risque de X (par exemple, ce panneau, apparemment, signale un bouchon et pas un risque de bouchon : non mais franchement, à quoi rime cette différence ? ; et cet autre panneau signale une zone de danger lié au vent, et on a faux si on répond qu'il signale un vent fort — là ils ont décidé de jouer aux logiciens ou en tout cas, aux jésuites).

Parfois, aussi, ce ne sont pas les gens qui rédigent les questions qui sont des jésuites, ce sont les règles de circulation elles-mêmes qui sont franchement bizarres. Il existe, par exemple, une obligation de circuler sur la voie de droite même sur une autoroute ou route à chaussées séparées où, en tout cas, plusieurs voies sont affectées au même sens de circulation. Autrement dit, les voies situées plus à gauche doivent servir uniquement au dépassement (la question de savoir à quelle fréquence il faut se rabattre sur la voie de droite pour pouvoir prétendre qu'on fait bien des dépassements et pas une circulation sur la voie de gauche étant laissée en exercice au lecteur), ou en cas de circulation dense. Ceci vient apparemment d'une lecture complètement bouledecristalesque (vitrorbiculaire ? hyalosphérique ?) d'un alinéa de l'article R412-9 du Code de la route : Sous réserve des dispositions des quatrième et cinquième alinéas du présent article [qui concernent les cycles], le fait, pour tout conducteur, de ne pas maintenir, en marche normale, son véhicule près du bord droit de la chaussée est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe [soit 35€]. Franchement, cette phrase ne veut absolument rien dire (et semble contredire l'exsitence de bandes d'arrêt d'urgence, de voies pour véhicules lents, etc.). Il est aussi clair que cette règle est encore bien moins respectée que l'obligation de s'arrêter aux feux orange à Paris, et j'aimerais savoir combien d'amendes ont été infligées à ce titre sur les denières 10 années dans toute la France, c'est dommage que le ministère de l'Intérieur ne fournisse pas ce genre de statistiques en OpenData. Toujours est-il que pour passer le code, il faut non seulement connaître cette règle, mais même penser à l'appliquer dans des cas vicieux où ils essaient de distraire votre attention en ajoutant des raisons objectivement raisonnables pour rester sur une voie de gauche. Admettons que c'est pour le moins vicieux !

Bref, la seule possibilité est de ne pas chercher à comprendre la logique ou la cohérence, de considérer l'épreuve comme un exercice complètement déconnecté de toute réalité et d'apprendre bêtement et par cœur toutes les situations possibles. C'est dommage, parce que ce n'était certainement pas le but recherché. C'est d'autant plus dommage que les questions qui pourraient être intelligentes sont généralement d'une simplicité déconcertante. (Et souvent résolubles en prenant simplement la réponse qui maximise la prudence : par exemple, une question qui demande si on regarde à gauche (oui/non) et à droite (oui/non) peut être résolue sans même regarder l'image — ce qui est passablement ironique — en répondant oui et oui, parce qu'ils ne vont quand même pas poser une question pour vérifier que vous avez compris que vous n'avez pas besoin de regarder dans un certain sens ; de toute façon, même sur un sens unique, il peut y avoir des vélos à contresens ou des gens qui reculent.)

Comme j'ai une certaine capacité à mémoriser les conneries inutiles (déjà quand j'étais tout petit, une collègue de mon père m'avait qualifié de source inépuisable de renseignements complètement inutiles), je pense que je vais finir par atteindre une probabilité de répondre juste qui dépasse les 90% par question permettant — si je calcule bien ma loi de Bernoulli — de passer le test avec probabilité de près de 80%. Je me demande quand même si je suis vraiment obligé de mémoriser, par exemple, le fait que les pneus à crampon sont autorisés uniquement entre le samedi précédant le 11 novembre et le dernier dimanche de mars (ce n'est pas une blague !). Déjà que la quantité de choses relatives à l'alcool, alors que je ne bois pas, me gonfle prodigieusement. (Ceci dit, c'est amusant, le dernier livre que j'ai lu aux toilettes avant d'y mettre mon précis de code de la route était un livre de biochimie humaine, et j'en avais justement retenu que le catabolisme de l'alcool par le foie a une cinétique d'ordre 0 — c'est-à-dire un rythme d'élimination constant, d'environ 0.15g/L/h — parce que ce qui limite est la quantité de NAD⁺ disponible pour oxyder l'éthanol.)

J'avais bien sûr déjà appris une certaine quantité de conneries inutiles lors de ma tentative avortée pour passer le code il y a 15–20 ans. Mais ils en ont ajouté plein dans l'intervalle. Il y a bien dû en avoir qui ont disparu, aussi, mais je n'ai trouvé qu'un seul exemple. Autrefois, il y avait un panneau (A21) avertissant d'un débouché possible de cyclistes et une variante de ce panneau (A21b, symétrique gauche-droit du précédent) avertissant d'un débouché possible de cyclistes venant spécifiquement de la gauche — donc, parmi les conneries inutiles à retenir, il y avait le fait que si on voyait le premier panneau il fallait répondre que les cyclistes pouvaient venir de droite ou de gauche alors que si on voyait le second les cyclistes pouvaient venir uniquement de gauche. Apparemment, ce panneau complètement saugrenu (et qui n'existait que pour les cyclistes, pas pour les piétons, cavaliers, animaux et autres trucs bizarres dont les panneaux peuvent vous avertir du risque de présence) n'existe plus, maintenant le cycliste est toujours représenté venant de la droite. (Je serais curieux de savoir l'histoire de cette micro-réforme et qui au ministère des transports a pris une décision aussi importante. Dans le même genre, si j'en crois ce site routes.wikia.com qui a l'air délicieusement geek, on a supprimé en 1992 la version temporaire — de fond orange : AK1(a–d) et AK3(a–b) — des panneaux de danger A1(ad) et A3(ab) annonçant des virages ou un rétrecissement de la chaussée spécifiquement par la gauche ou par la droite.) Bref, ça fait toujours ça de moins à retenir : quel dommage que je l'aie déjà retenu !

Sinon, j'aimerais bien savoir plus précisément comment est défini l'ensemble des questions possibles à l'examen. Est-ce qu'il y a une liste complète de toutes les questions possibles ? Publiquement connue ? Connue des auto-écoles ? Les questions utilisées pour la préparation du test font-elles partie de cette liste complète ou sont-elles simplement inspirées d'elle ? C'est un peu confus.

J'arrive peut-être au mauvais moment : il y a quelques mois, plein de nouvelles questions ont été ajoutées à l'épreuve de code. Ça a été un désastre, et le taux de réussite est passé du jour au lendemain (le 3 mai) de 70% à 17% (on doit pouvoir en déduire quelque chose sur le nombre total de question, d'ailleurs, si le fait d'en ajouter 1000 nouvelles suffit à provoquer cette baisse : quelque chose comme 12000 questions au total ?). Une semaine plus tard, les plus difficiles parmi ces nouvelles questions ont été retirées « provisoirement », et le taux de réussite est remonté. Mais la situation est, du coup, assez confuse, et je ne sais pas ce que provisoirement veut dire, ni si les questions difficiles retirées font parties des questions présentées par le site en ligne sur lequel je m'entraîne.

En effet, mon inscription à l'auto-école me donne accès à un site Web (Prép@code, je ne donne pas le lien parce que de toute façon il n'y a rien d'intéressant sans codes d'accès) pour pouvoir faire des tests depuis chez moi, ce qui est quand même nettement mieux qu'il y a 15–20 ans où je devais prendre mes petits petons pour aller à l'auto-école (et elle n'était pas à 150m). En fait, il y a deux sites différents, quasiment indépendants, sous le même nom (c'est très confus : la page d'accueil les appelle séries sur la réglementation et séries de préparation à l'EXAMEN), l'un en Flash et visiblement assez vieux, et l'autre en HTML5 et globalement mieux foutu ; le site « nouveau » (préparation à l'EXAMEN) est divisé en rubriques thématiques (dispositions légales en matière de circulation routière, le conducteur, la route, les autres usagers, réglementation générale, secours, précautions, mécanique, sécurité, et environnement) qui semblent justement avoir été introduites dans le cadre de cette réforme en mai dernier. Du coup, je ne sais pas bien.

Tiens, je découvre qu'on peut acheter en ligne des panneaux de signalisation. Ils ont même le panneau B9e (accès interdit aux charrettes à bras — je veux voir la question de code portant dessus) qui est tellement rare que ni routes.wikia.com ni code-route.org n'a réussi à en trouver un dans la vie réelle à photographier.

Ajout : pour la suite de mes aventures de permis de conduire, c'est ici, , , et à partir de pour la partie pratique.

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