David Madore's WebLog: Une petite introspection sur mes goûts et intérêts fluctuants, nouveauté et lassitude

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(lundi)

Une petite introspection sur mes goûts et intérêts fluctuants, nouveauté et lassitude

Méta : Je ne suis pas du tout content du billet qui suit, qui part vraiment dans tous les sens et auquel je n'ai pas réussi à trouver un fil conducteur, une cohérence d'ensemble. Je le publie quand même parce que j'y raconte, fût-ce de façon désorganisée, des choses qui me semblent importantes sur moi-même et sur ma vie, rassemblées parce que je sentais confusément qu'il y avait lieu de les rassembler.

J'ai déjà raconté que j'aimais relire le journal que je tiens, notamment à des intervalles d'un an, deux ou trois, pour me donner une appréciation du temps qui passe, mais aussi comme source d'inspiration pour savoir quoi faire de mes journées : si quelque chose m'a plu il y a un an, ce n'est pas forcément une mauvaise idée de recommencer — la période de l'année s'y prêtera sans doute de nouveau, et un an est assez long pour que la répétition ne transforme pas en source d'ennui. Néanmoins, cette relecture est aussi souvent l'occasion de me rendre compte que mes goûts ou intérêts ont changé, que je ne suis pas tout à fait la même personne que l'an dernier, et que même si sur l'intervalle d'une année cette différence est subtile, presque imperceptible, quand je relis des entrées trop vieilles de mon journal, j'en éprouve une sensation de décalage presque gênant : qu'est-ce qui me faisait plaisir ? à quoi est-ce que j'aimais passer mon temps ?

Mes centres d'intérêt ont toujours eu une forte tendance à l'instabilité : qu'il s'agisse d'un sujet intellectuel (par exemple un problème de maths) ou d'une nouvelle façon de passer le temps, je suis capable d'en être pris brutalement de la passion la plus intense, et d'en avoir marre tout aussi soudainement. Cela se manifeste jusque dans certains goûts alimentaires : je me mets à aimer énormément, disons, tel type de biscuits au chocolat ou de feuilletés au fromage, je dois en acheter plein à chaque fois que je fais les courses parce qu'ils disparaissent à toute vitesse, et puis voilà que, souvent du jour au lendemain, j'arrête d'en manger — pas que je n'aime plus, mais cela ne provoque plus la même libération de dopamine. Il en va de même de la musique que j'écoute : j'ai facilement tendance à tomber dans des cycles où j'écoute le même morceau en boucle, encore et encore, jusqu'à m'en donner la nausée : cela dure typiquement quelques jours, puis j'arrête assez soudainement. C'est aussi la raison pour laquelle tant de mes projets demeurent inachevés : je suis pris de passion pour quelque chose, je m'y mets avec acharnement, et, dès qu'il s'agit d'une entreprise qui demande un peu de persévérance, il est probable que mon intérêt retombe, comme un soufflé, avant que l'entreprise soit menée à son terme.

Heureusement, tous mes intérêts ne suivent pas cette trajectoire météorique — ce serait épuisant. J'ai aussi des goûts plus stables dans le temps, même si ce ne sont pas forcément les plus intenses, ce sont peut-être les plus importants pour me définir. Je ne généralement pas capable de prédire moi-même si un goût nouveau me restera, ou sera la passion d'une semaine ou d'un été, ou quelque chose entre les deux. Il y a une certaine tendance à ce que les intérêts les plus intenses, et surtout qui apparaissent le plus rapidement, soient ceux qui disparaissent le plus rapidement, mais ce n'est pas toujours vrai non plus. Si je compare ces goûts qui font une apparition fulgurante puis disparaissent presque complètement à des météores, d'autres reviennent périodiquement, comme des comètes de plus ou moins longue période, d'autres encore fluctuent juste gentiment comme une planète familière. Bon, mes comparaisons sont assez pourries, désolé. Peut-être que j'aurais plutôt dû évoquer des volcans dont l'éruption est parfois très violente et imprévisible ? Ce qui est sûr, c'est qu'aucun de mes intérêts passés n'est totalement éteint : il y a beaucoup de passions que j'ai crues mortes et qui sont revenues de façon inattendue. (Je pourrais par exemple mentionner ma passion pour les trous noirs, qui a été éveillée par la lecture du livre de Jean-Pierre Luminet en 1989, et qui m'a fait des poussées de fièvre occasionnelles, au moins jusqu'à ce qu'en 2011 je réalise enfin ce rêve d'enfant de calculer des vidéos d'animation de chute dans le trou de ver d'un trou noir de Kerr.)

Cette capacité d'un de mes intérêts à renaître de ses cendres (ou à ne jamais s'éteindre) dépend sans doute beaucoup de son potentiel de nouveauté. Je pense que mon intérêt pour les maths ne risque pas de disparaître, parce qu'il y y a toujours de nouvelles choses à apprendre ou à découvrir ; pour un morceau de musique ou un type de biscuits, en revanche, c'est plus vraisemblable (mais même là, si j'en oublie le son ou le goût, ils regagneront une forme de nouveauté qui peut permettre le retour d'intérêt).

A contrario, quand je sens qu'un intérêt me quitte, cela s'accompagne souvent d'une forme de mélancolie, une forme de chagrin d'amour, sans que je sache bien si elle est la conséquence de cette perte d'intérêt, ou sa cause, ou une conséquence d'une cause commune. Je prends une fois de plus de ces biscuits que jusqu'à récemment j'aimais tellement, et ce sont les mêmes biscuits mais ce n'est plus le même plaisir : je me baigne dans la rivière où j'aimais tellement me baigner et je me rends compte que ce n'est pas la même rivière. (Je mentionnais la dopamine un peu plus haut : c'est sans doute de la neurologie à 1 attozorkmid, mais peut-être que c'est un peu l'idée, je cherche à renouveler ce qui hier encore me permettait d'en tirer, et je me retrouve en manque.)

Pourquoi je raconte tout ça, déjà ? Ah oui : je vais parler un petit peu d'un de mes loisirs particuliers, qui est celui de me balader : comment celui-ci a évolué dans le temps, et comment elle est encore en train d'évoluer.

J'ai déjà raconté que, l'été 2020, entre la fin du premier confinement français et le retour des restrictions, j'ai passé plein de temps à parcourir l'Île-de-France. Mais comment ces loisirs se comparent-ils avec ceux que j'avais avant et à l'été qui a suivi (2021) ?

J'ai toujours aimé me balader, mais le sens du mot balade a fluctué.

Quand j'étais enfant puis ado, j'allais souvent me promener avec mon papa. C'était devenu une routine, presque un rituel, après déjeuner, le samedi (je crois que c'était plus le samedi que le dimanche mais je ne suis pas certain, je ne tenais pas de journal à l'époque), nous allions faire une promenade, essentiellement toujours la même, d'Orsay (où nous habitions) nous montions aux Ulis pour aller ensuite au viaduc des Fauvettes, à Chevry, et à la Hacquinière où nous nous arrêtions pour prendre un Schweppes (à cet endroit qui était alors un café-billard) avant de rentrer. (Nous avions une autre balade, presque aussi immuable, les jours où nous allions rendre visite à ma grand-mère maternelle qui habitait Soisy-sous-Montmorency, et là aussi il y avait une pause Schweppes, ici à Montmorency.) Rituel répétitif, donc, mais je suppose que c'était la variété de la conversation avec mon père qui faisait que je ne m'en lassais pas. Mes goûts ont changé en ce qu'une balade tout le temps répétée, comme ça, ne me tente plus. (Aussi, je ne bois plus de Schweppes, je bois du café.)

Plus tard, je me suis mis à me balader à Paris. Ma relation à Paris est intéressante du point de vue de la manière dont mes goûts changent. Petit, je détestais Paris : je trouvais cette ville atrocement sale (bon, ça, dans les années '80, ce n'est pas faux), je me faisais l'idée qu'il faisait toujours moche, j'avais horreur du métro. Je consentais quand même à y aller pour aller au Palais de la Découverte, une autre visite un peu ritualisée que je faisais avec mon père. Mais la ville elle-même ne m'intéressait pas. Je connaissais peut-être même mieux Londres (où mon père m'emmenait de temps en temps, et nous y marchions alors beaucoup) que Paris. Quand j'ai fait ma prépa (1994–1996) au lycée Louis-le-Grand à Paris, mes parents m'avaient trouvé un petit studio rue des Lombards, donc j'habitais Paris et j'étudiais à Paris, et pourtant, j'ai continué à ne rien voir de Paris que les allers-retours entre l'un et l'autre ; et le week-end je rentrais à Orsay (où je continuais à faire mes balades avec mon père). J'ai commencé à apprécier Paris progressivement, à partir de ma 2e année d'ENS (la première, je l'ai passée quasiment tout le temps à l'École, où j'étais interne) ; cela va sans doute de pair avec le fait qu'à partir de 1999 j'ai fréquenté des associations LGBT pour la plupart basées à Paris, et forcément je sortais un peu avec les copains que je m'y suis fait ; en 1998 mes parents m'ont acheté un appartement à Paris (celui que j'ai vendu il y a quelques mois), nous l'avons d'abord prêté à des amis, mais j'ai commencé à l'habiter de plus en plus souvent vers 2000, et à vraiment me sentir parisien. Mais même pendant les années qui ont suivi, je restais toujours un peu dans les mêmes quartiers. (Par exemple, de 2009 à 2013 j'ai passé énormément de temps au Daily Monop' de la rue des Archives, qui était devenu à la fois une cantine, une lieu de travail et un endroit où j'aimais me détendre en regardant les gens passer : j'y apportais mon portable, j'y venais à l'heure du déjeuner, j'y mangeais, et je passais ensuite toute l'après-midi à travailler et à lire.)

Mais à un certain moment que je n'arrive pas à situer exactement parce que c'est venu graduellement, le poussinet et moi nous sommes mis à explorer Paris un peu systématiquement : nous regardions le plan du métro que j'avais accroché au mur, nous choisissions un endroit, et nous allions nous balader par là. Nous avons notamment fait le tour des plus grands parcs parisiens.

Dans un passage d'un extrême à l'autre sans doute assez fréquent avec les basculements de mes goûts, moi qui détestais Paris quand j'étais petit me suis mis à penser à tout ce qu'il y avait au-delà du périphérique comme un grand vide où je n'avais pas l'idée d'aller. Certes j'allais régulièrement à Orsay voir mes parents, mais c'est comme si Paris et le coin autour d'Orsay étaient deux îles au milieu d'un vaste océan, sans aucune continuité entre les deux. Je ne sais pas bien ce qui m'a forcé à regarder un peu au-delà : peut-être le fait que mes beaux-parents ont acheté un appartement à Boulogne : non seulement nous y allions (en métro, donc ça aurait pu devenir une île de plus), mais surtout nous avons commencé à nous balader au parc de Saint-Cloud et au bois de Boulogne, puis sans doute dans un esprit de symétrie au bois de Vincennes, et bientôt (grosso modo vers 2014) nous avons commencé à faire des sorties dans les espaces verts en-dehors de Paris (mais toujours accessibles en transports en commun) : le parc de Sceaux, la Vallée-aux-Loups, le parc de la Courneuve, le parc des Chanteraines.

Donc quand j'ai passé le permis en 2018 et que le poussinet a acheté la tuture pour que je puisse la conduire, nous avons naturellement utilisé celle-ci pour continuer nos explorations des parcs et jardins autour de Paris mais en allant maintenant voir ceux qui sont plus loin ou peu accessibles en transports en commun (Port-Royal-des-Champs, Marly-le-Roi, Vaux-le-Vicomte, Villarceaux, Chantilly, Courances, etc.). Puis mon intérêt s'est porté des jardins vers les forêts, lesquelles semblaient un terrain d'exploration un peu plus inépuisable que les jardins (en tout cas si on quantifie par la surface totale !) et, plus généralement, sur la connaissance de l'Île-de-France et de sa géographie[#], vis-à-vis de laquelle j'étais un peu dans la même ignorance en 2018 que s'agissant de Paris vingt ans plus tôt. (Ce billet de blog et celui-ci sont assez représentatifs de ce basculement.)

[#] Il y a eu les belvédères, aussi. Je n'ai pas fini de voir ceux dont j'avais dressé la liste, mais comme pour les balades diverses dont je parle ci-dessous, il y a un effet de rendements décroissants qui s'installe.

Et en même temps que ça, j'ai de plus en plus cessé de me promener dans Paris. Deux choses sont venues précipiter et accentuer cette évolution : dans le désordre, le covid, ou plutôt les restrictions liées au covid, et la moto.

Le confinement a accru mon intolérance au fait de rester coincé chez moi, et m'a écœuré de mon quartier (c'est-à-dire du minuscule disque de 1km de rayon autour de chez moi où j'étais coincé) ; et quand il a été levé, il a accru mon besoin de vagabonder. Mais il y a eu un autre effet des règles covid : pendant longtemps, le port du masque a été obligatoire même à l'extérieur, dans tout Paris et sa petite couronne (d'ailleurs, à un moment, il a même été obligatoire dans toute l'Île-de-France, mais là c'était tellement absurdement crétin qu'évidemment personne ne respectait ça) ; ce n'est pas tellement que je trouve cette imposition scandaleuse (c'est juste profondément stupide parce que tout le monde savait pertinemment bien que ça ne servait à rien, mais pas non plus comparable à enfermer les gens chez eux), mais c'était pénible (soit qu'on suive la règle et qu'on supporte l'inconfort du masque et de la buée sur les lunettes, soit qu'on ne la suive pas et qu'on risque une amende — et elle n'était pas que théorique, j'ai vu des gens s'en prendre une —, soit encore qu'on fasse le compromis absurde consistant à mettre le masque sur la bouche mais sous le nez et qu'on soit en permanence rappelé de la stupidité de cette situation), suffisamment pénible pour que je n'aie plus du tout envie de me promener à Paris pendant toute cette période. Donc entre septembre 2020 et juin 2021 environ (je ne sais plus exactement de quand à quand il y a eu cette obligation), j'ai totalement arrêté de me promener dans Paris. (Comme par ailleurs les restaurants ont été fermés sur l'essentiel de cette période, j'ai arrêté de faire quoi que ce soit à Paris à part y habiter et faire mes courses alimentaires de base : tous mes loisirs consistaient à sortir au plus vite.) Bon, pour nuancer un peu, j'ai fait quelques balades à vélo (parce que la règle absurde du masque en extérieur avait été limitée aux piétons, ce qui rendait du coup le vélo beaucoup plus attrayant, même pour quelqu'un comme moi qui n'aime pas du tout ça en général et n'a pas de vélo personnel et doit donc se contenter des très mauvais Vélib), et une ou deux de ces balades ont été dans Paris parce que je n'avais pas le temps d'aller plus loin, mais même à vélo j'avais tendance à sortir de Paris, généralement en suivant la vallée de la Bièvre.

Le fait d'avoir une moto m'a poussé à sortir de manière différente. Ce n'est pas juste que j'ai pris goût au moyen de transport : tout d'un coup, j'avais la possibilité de sortir vraiment, seul et par mes propres moyens, et d'aller là où je voulais, pas juste aux endroits desservis par les transports en commun. Certes, j'avais déjà le droit de conduire une voiture, mais la voiture, c'est celle du poussinet, je n'ose pas trop la prendre ; il y a des systèmes de location de voiture (et effectivement j'en ai utilisé), mais ils n'arrêtent pas de changer ou de tomber en panne[#2]. Donc, en mettant ensemble d'un côté l'envie d'explorer plein d'endroits qui n'étaient jusque là pour moi que des points sur une carte et la possibilité de le faire, et d'autre part l'envie (subtilement différente et que je n'arrive pas exactement à expliquer) de passer à moto à tel ou tel endroit que je connaissais déjà[#3], comme si l'endroit allait être différent vu depuis un deux-roues, il n'est pas surprenant que j'aie beaucoup roulé. Mais ça je l'ai déjà raconté dans plein d'entrées passées de ce blog, et je ne reviens pas dessus.

[#2] Je m'étais plaint de tels problèmes ici déjà. J'ai fini par trouver satisfaction chez Share Now, ex-Car2Go, mais en ce moment je ne peux plus l'utiliser, parce qu'ils ont un problème avec ma carte de crédit. Je me suis abonné à Ubeeqo et à Free2Move, que je n'ai pas encore eu l'occasion de tester, mais je n'ai pas de doute qu'ils casseront aussi pour une raison technique crétine.

[#3] Encore un autre genre de choses que j'ai voulu faire quand j'ai eu ce moyen d'explorer l'Île-de-France, c'est traquer la piste de plein de souvenirs vagues, remontant à mon enfance ou adolescence, que j'avais d'un endroit que je ne savais plus situer exactement, et que je cherchais à retrouver.

Maintenant, est-ce que cette envie est présentement en train de me passer ?

J'étais parti sur le principe que ma passion pour la moto retomberait assez vite, et si possible avant que j'aie un accident. (À la base, quand je me suis inscrit pour passer le permis A2, l'idée était que la moto me serve juste de moyen de transport occasionnel mais mon intention était, et peut-être est toujours, de faire l'essentiel de mes trajets domicile↔travail en RER.) Est-ce le cas ?

[Graphe du totaliseur de ma moto en fonction du temps]Ce qui est sûr est que j'ai moins roulé à l'été 2021 qu'à l'été 2020 : pour donner un chiffre, selon le totaliseur de ma moto, j'ai fait 4700km entre mai et août 2020 et seulement 3500km entre mai et août 2021. Ci-contre à gauche, le graphe du totaliseur de ma moto en fonction du temps, où il est clair que le rythme de progression actuel est beaucoup plus lent que l'an dernier.

[Carte de mes balades à moto][Carte de mes balades à moto][Carte de mes balades à moto]La météo y est certainement pour quelque chose, mais l'épuisement de la nouveauté y est aussi pour beaucoup. Comme on le voit sur les cartes ci-contre à droite (à trois échelles différentes ; cliquer pour agrandir), qui représentent les traces GPS de mes balades à moto au cours ces deux années, j'ai un peu fait le tour de tout ce qui était intéressant et facile d'accès depuis chez moi : dans un bon quadrant ouest-sud-ouest de Paris, disons tout ce qui est autour de la forêt de Rambouillet, j'ai parcouru quasiment toutes les routes au moins une fois. (Même les quelques routes qui ne sont pas en bleu sur cette carte, il ne faut pas conclure que je n'y ai jamais été : j'en ai vu certaines en voiture avec le poussinet, et en quelques occasions j'ai oublié d'enregistrer une trace GPS.) C'est sûr que si on dézoome (2e et 3e cartes) on trouve qu'il me reste plein de choses à explorer, mais… c'est loin !

Quand j'ai eu ma moto je me disais que juste refaire par moi-même les trajets que j'avais déjà faits avec l'auto-école serait une source presque inépuisable de divertissement. Puis je me suis dit que peut-être que non, mais que la vallée de Chevreuse serait un terrain de balade bien suffisant. Maintenant je commence à connaître vraiment trop bien tout ce qu'il y a autour de la forêt de Rambouillet, de la plaine de Versailles, et même la vallée de l'Essonne et, dans une certaine mesure, le Gâtinais et le Vexin. (Alors certes, il me reste beaucoup à voir en Brie / Seine-et-Marne, mais c'est un peu des champs à perte de vue, ce n'est pas ce qu'il y a de plus intéressant en Île-de-France.)

Bref, si je veux du nouveau, je dois aller chercher de plus en plus loin, et faire des heures d'autoroute pour faire une petite balade dans un coin que je n'ai pas encore vu, à force, ça devient de moins en moins intéressant : mon endurance a des limites — le plus que j'aie fait en une journée à moto est 250km. Comme je n'aime pas trop voyager au sens de dormir ailleurs que chez moi, et que de toute façon la moto ne me permet pas vraiment de transporter de bagages, ceci met une limite pratique sur mon rayon d'action.

Bref, il est plausible que je sois en train de me lasser, sinon de la moto, au moins des balades à moto en Île-de-France, simplement par effet des rendements décroissants. (Ça ne va a priori pas m'empêcher de changer de moto, justement pour recréer un peu de nouveauté et aussi pour avoir de quoi faire plus confortablement de plus longs trajets — j'ai déjà dit que je lorgnais sur la Yamaha Tracer 9GT ou éventuellement la Kawasaki Versys 1000 — mais ce ne sera certainement pas l'exubérance de l'été 2020.)

[Carte de mes balades en foret][Carte de mes balades en foret]Mais en fait, quelque chose du même genre est peut-être en train de se produire pour les balades à pied en forêt. Les cartes ci-contre à gauche (là aussi, à deux échelles différentes, cliquez pour agrandir) montrent l(a plupart d)es promenades que j'ai faites, généralement avec mon poussinet, depuis un peu moins de deux ans et que j'ai (parfois un peu arbitrairement) classifiés comme balades en forêt : on voit qu'elles sont aussi concentrées dans le même coin facile d'accès pour nous.

Alors certes le terrain à explorer est immense : je pourrais continuer encore bien longtemps avant d'avoir couvert les chemins de la forêt de Rambouillet de traces bleues à pied aussi parfaitement que j'ai couvert les routes à moto, mais là où la nouveauté commence à manquer, ce n'est pas dans le fait que j'aurais vu tous les chemins de la forêt (ce qui ne risque pas d'arriver), mais que j'aurais vu un peu tous les types de paysages que la forêt a à offrir, et ce n'est peut-être pas si déraisonnable. (En fait, la variété des promenades en forêt est plutôt offerte par la variété des saisons — se balader en hiver offre un spectacle d'un charme très différent de l'été — que par la variété des lieux. Il y a bien des différences importantes entre parcelles de feuillus et de conifères, d'arbres plus ou moins jeunes, entre forêts plus ou moins plates ou vallonnées, plus ou moins parcourues de cours d'eau, mais le paramètre qui ressort le plus dans mes souvenirs de balades en forêt, c'est bien la saison.)

Pour tout dire, et comme je le signalais ci-dessus ça a tendance à me le faire quand une passion s'essouffle, ceci m'attriste[#4] un peu. (Ou peut-être juste que je suis en manque de dopamine ?) Ayant considérablement étendu mon horizon de balades depuis Paris intra muros à l'Île-de-France et aux environs raisonnablement accessibles dans un temps pas trop long, j'espérais mettre beaucoup plus de temps que ça à ne serait-ce que commencer à m'en lasser. Peut-être que je dois apprendre à accorder moins de valeur à la nouveauté, ou en tout cas, à la nouveauté du cadre, et retrouver l'état d'esprit dans lequel j'arrivais à me promener avec mon papa quasiment chaque semaine suivant le même chemin.

[#4] Bien sûr, il y a d'autres explications du fait que je sois d'humeur mélancolique en ce moment : l'essentiel de mes joies et de mes inquiétudes de ces derniers 18 mois ont été liés à la covid et aux restrictions liées à elle, mais maintenant qu'on semble enfin pouvoir passer à autre chose, je me rends compte que tous les tracas que j'ai mis de côté pendant ces derniers 18 mois n'ont évidemment pas disparu, et que, par contre, ces derniers 18 mois, eux, ont bien disparu.

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