J'ai une branche de mes lunettes qui s'est cassée récemment, du coup je suis passé chez l'ophtalmo et l'opticien pour m'en faire refaire une paire, qui est aussi ma première paire de progressifs. L'occasion de raconter un peu les différentes manières dont je vois mal, et mon hésitation quant à la meilleure façon de me faire faire des lunettes.
Il faut savoir que je suis très myope, et de plus, assez différemment myope des deux yeux, et en plus de ça je deviens presbyte (je n'arrête pas d'augmenter la taille des polices sur mobile, ou plutôt, de pester contre le fait que ce n'est pas facile à augmenter, contre les sites web ou documents imprimés en petits caractères). Pour donner une idée, l'ordonnance de lunettes qu'on m'a établie la semaine dernière et que je viens de récupérer est la suivante :
- OD −9.75 (−1.25 @ 125°) add 0.75
- OS −6.75 (−1.00 @ 20°) add 0.75
J'ouvre un encadré pour expliquer comment interpréter ces nombres,
mais si vous voulez juste la version abrégée, −9.75
à l'œil
droit signifie extrêmement myope
, −6.75
à l'œil gauche
signifie très myope
, les −1.25
et −1.00
signifient modérément astigmate
et add 0.75
(indication
commandant des verres progressifs) signifie début de
presbytie
.
D'abord, OD
et OS
, mis
respectivement pour oculus dexter
et oculus sinister
(même si les ophtalmos
français écrivent normalement œil droit
et œil gauche
explicitement) font référence à l'œil droit et à l'œil gauche du
patient. Chaque œil est suivi d'indications de corrections à
apporter : un nombre en cas de myopie, trois en cas d'astigmatie, plus
éventuellement une correction additionnelle en cas de presbytie (il y
a aussi des corrections prismatiques qui peuvent être données pour les
cas de strabisme, mais je ne me suis pas renseigné à leur sujet).
Le premier nombre, ou correction sphérique, est la vergence de la
lentille correctrice à apporter, mesurée en dioptries (une dioptrie
est l'inverse d'un mètre, et fait référence à l'inverse de la distance
focale), le signe ‘−’ désignant une lentille divergente (correction de
la myopie) et le signe ‘+’ à une lentille convergente (correction de
l'hypermétropie). S'il n'y a pas d'astigmatie (la vergence est la
même dans toutes les directions), on ne donne que ce nombre : −9.75
signifie donc mettre une lentille divergente de 9.75 dioptries
,
ce qui suggère (dans l'approximation où les lentilles seraient toutes
au même point, ce qui est faux) que le punctum
remotum de l'œil, c'est-à-dire le point où il focalise sans effort
(en relâchant autant que possible le cristallin), est à (1/9.75)m ≈
10cm (donc en clair, déjà avec la myopie, mon œil droit ne voit net
qu'en-deçà d'une distance de 10cm).
L'astigmatie est corrigée, pour faire simple, par une correction cylindrique qui s'ajoute à la correction sphérique. Cette correction cylindrique est précisée par les deux nombres suivants, entre parenthèses : l'un est la vergence non-nulle de la lentille cylindrique et l'autre est l'angle de l'axe du cylindre ; je vais préciser comment il faut les décoder.
La lentille désignée par une correction sphérique+cylindrique a
deux vergences principales, selon deux axes perpendiculaires, donc.
La vergence selon l'axe donné par le troisième nombre (l'angle, dont
je vais expliquer ci-dessous comment il s'interprète) est donnée par
le premier nombre (la partie sphérique seule) ; le second
nombre est la vergence supplémentaire à ajouter (algébriquement)
selon l'axe perpendiculaire à l'angle indiqué. Par exemple,
dans le cas de mon œil droit, −9.75 (−1.25 @ 125°)
est à
comprendre comme désignant une correction de −9.75 dioptries selon
l'axe d'angle 125°, et −9.75−1.25 = −11.00 dioptries (c'est énorme)
selon l'axe qui lui est perpendiculaire (d'angle 35°). Cette
convention peut sembler illogique (on donne une vergence
supplémentaire et un angle, mais la vergence supplémentaire est
justement à ajouter à l'angle orthogonal à celui qui est donné), mais
la logique est que la correction peut être vue comme donnée par une
lentille sphérique dont la vergence est le premier terme, additionnée
d'une lentille cylindrique dont la vergence non nulle est le second
terme et dont l'axe de rotation (i.e., l'axe selon lequel
elle a une vergence nulle, justement) est donné par le
troisième terme : donc −9.75 (−1.25 @ 125°)
peut se comprendre
comme prenez une lentille sphérique de vergence −9.75 dioptries, et
ajoutez-y une lentille cylindrique de vergence −1.25 dioptries sur
l'axe perpendiculaire, et dont l'axe de rotation est orienté à
125°
.
Quant à l'angle, il est mesuré, en degrés, selon la convention que 90° fait référence à l'axe vertical pointant vers le haut, et 0° à l'axe horizontal pointant vers la droite du médecin c'est-à-dire la gauche du patient (c'est-à-dire OD→OS) tandis que 180° fait référence à l'axe horizontal pointant vers la gauche du médecin c'est-à-dire la droite du patient (c'est-à-dire OS→OD) ; bien sûr, les axes ne sont pas orientés (les lentilles sont à symétrie centrale), mais l'intérêt de le formuler comme je viens de le dire est que du coup il est clair que 45° fait référence à un axe diagonal dont la partie supérieure pointe vers la gauche du patient tandis que 135° fait référence à un axe diagonal dont la partie supérieure pointe vers la droite du patient.
Bref, mon −9.75 (−1.25 @ 125°)
à l'œil droit signifie qu'on
doit appliquer une correction de −9.75 dioptries selon un axe passant
très grossièrement par le milieu de mon menton et le centre de mon œil
droit, et de −11.00 dioptries selon un axe passant très grossièrement
par le milieu de mon arcade sourcilière et le centre de mon œil droit.
Noter que quand parle d'un axe, cela fait référence, en fait, au plan
optique passant engendré cet axe et par l'axe de vision si je regarde
tout droit (l'idée est que, dans chaque tel plan, on se ramène à de
l'optique en deux dimensions avec une vergence unique).
S'il s'agit de voir un trait fin, il faut plutôt considérer le plan perpendiculaire au trait (puisque le but est de focaliser la section du trait, qui est un point dans ce plan) : donc, si je crois ces chiffres, si je regarde de l'œil droit un trait orienté selon un signe ‘/’ (slash) sur l'écran (dont il est plausible qu'il soit selon l'angle 125°) je devrais le mettre à (1/(9.75+1.25))m ≈ 9cm pour le voir net, alors que si je regarde de l'œil droit un trait orienté selon un ‘\’ (backslash) sur l'écran (ou plutôt un backslash un peu aplati pour faire un angle de 35° avec l'horizontale, peut-être plus genre ‘∖’), je devrais le mettre à (1/9.75)m ≈ 10cm. J'ai expérimenté avec un fil à coudre, en essayant de savoir si mon punctum remotum est plus loin quand le fil est tourné comme un ‘\’ aplati que comme un ‘/’, et c'est possible, mais ce n'est pas assez significatif pour que je puisse en avoir le cœur net.
Première partie : passage chez l'ophtalmo.
Avoir un rendez-vous chez un ophtalmo est toujours un peu
compliqué. En France ailleurs qu'à Paris il faut souvent attendre six
mois, voire un an, voire plus, pour avoir un rendez-vous. À Paris la
situation est meilleure, au moins si on est prêt à payer plus cher (et
donc à ne pas forcément être complètement remboursé), mais on aura
souvent affaire à un cabinet à la chaîne
. Le précédent
ophtalmo que je voyais
(Dr. Pierre Ellies)
était de ce genre : rendez-vous sous un mois, certes, et le cabinet
est très moderne et super équipé, mais on est ensuite traité à la
chaîne : on attend une première fois (longtemps) pour passer cinq
minutes entre les mains d'un assistant qui vous met sur trois machines
successives (une qui mesure la correction à apporter, une qui mesure
la tension oculaire, et une qui fait une photo de la rétine), puis on
attend une deuxième fois (longtemps) pour passer cinq minutes entre
les mains d'un optométriste qui vous fait lire les lettres et précise
la correction, puis on attend une troisième fois (longtemps) pour
passer enfin cinq minutes devant le médecin. Alors je ne dis pas que
le médecin n'est pas sérieux : quand il me fait un fond d'œil je n'ai
pas l'impression qu'il bâcle le travail, quand il a voulu vérifier mon
décollement du vitré (parce que j'ai vu plusieurs fois des nuages de
mouches noires) il m'a fait une tomographie en cohérence optique et
m'a revu pour interpréter les résultats ; mais il n'a pas une seconde
pour discuter, par exemple, de si la correction est confortable.
À cause de mes lunettes cassées (et comme la paire de rechange me faisait mal au nez), je voulais un rendez-vous rapide, et si possible avec un médecin avec qui je puisse discuter au moins cinq minutes de l'opportunité d'avoir des verres progressifs. Je suis allé voir une ophtalmo recommandée par un ami sur Twitter, Dr. Geneviève Ettner, et l'impression était très différente : rendez-vous rapide et un peu de temps pour discuter, la combinaison est rare. (Mais j'ai éventuellement des petits reproches de nature un peu différente à signaler, que je vais faire au fur et à mesure ci-dessous.)
Quand les ophtalmos mesurent la correction à apporter à une
personne qui se présente pour une paire de lunettes, ils la font
normalement d'abord passer sur une machine (autoréfractomètre) qui
fait ça automatiquement, pour avoir une première idée : cela
fonctionne en projetant une image infrarouge sur la rétine de la
(personne) patiente pendant qu'on lui demande de regarder une image
(typiquement une montgolfière) incitant à accommoder à l'infini. Je
ne sais pas à quel point ces machines sont précises ; je sais au moins
qu'il est possible de tricher dessus : quand j'ai passé la visite
médicale pour le service national (les trois jours
, qui ne
duraient déjà plus trois jours), à un moment où on ne savait pas
encore que le service national serait supprimé, comme je voulais être
certain d'être exempté à cause de ma myopie (j'étais juste à la
limite), je me suis forcé à accommoder aussi près que possible,
l'opérateur s'est rendu compte que la machine avait du mal à faire la
mesure et a recommencé plusieurs fois, mais au final j'ai bien gagné
une dioptrie par rapport à ma valeur naturelle.
Il peut aussi être bon d'apporter à l'ophtalmo l'ordonnance précédente, surtout si on n'est pas déjà patiente de ce praticien, parce qu'ils n'ont pas tous l'appareil pour mesurer la correction d'une paire déjà existante. (Dans mon cas, c'était : OD −9.00 (−1.00 @ 125°) / OS −6.25 (−0.75 @ 40°) ; ordonnance établie il y a trois ans.)
Ensuite, la patiente passe sur un phoroptère, plus ou moins
automatisé, qui permet de tester différentes corrections : lentilles
sphériques diverses, et lentilles cylindriques additionnelles qu'on
peut tourner jusqu'à trouver la correction adaptée, en faisant lire
des lettres majuscules projetées sur un écran assez loin. Une
difficulté est que, tant que la patiente a encore un pouvoir
d'accommodation, elle va s'en servir pour compenser si on met une
lentille divergente trop forte, donc pour les myopes il s'agit de
trouver la lentille divergente minimale qui donne la vue
optimale (on vise normalement une acuïté de 10/10 sur chaque œil,
définie comme la capacité à lire des caractères d'un certain angle
standardisé). Comme c'est un peu délicat à évaluer, une astuce,
appelée méthode du duochrome rouge/vert, consiste à utiliser des
lettres sur fond rouge et vert et de demander lesquelles sont plus
nettes : l'idée est que, comme le rouge est moins réfracté que le vert
par le cristallin, l'image nette rouge se fait plus en arrière sur la
rétine que l'image nette verte, donc un œil myope verra plus nets les
caractères sur fond rouge, tandis qu'un œil hypermétrope, ou myope
surcorrigé, verra plus nets les caractères sur fond vert, donc on
considère que la correction est bonne quand les deux semblent aussi
nets ; mais, honnêtement, j'ai toujours beaucoup de mal à savoir quel
côté est le plus net. Une autre difficulté est que la correction de
l'astigmatie n'est que très approximative : le praticien peut tourner
la lentille cylindrique en demandant c'est mieux comme ça ?
, ce
n'est jamais flagrant.
Une chose qui n'est pas assez soulignée est que, pour une correction très importante comme la mienne, la moindre petite variation de la position des lunettes sur le nez (qu'il s'agisse du phoroptère chez l'ophtalmo, ou des lunettes finalement commandées) va faire une énorme différence de correction. Même avec des lunettes parfaitement adaptées à ma vue, il suffit qu'elles tombent un tout petit peu sur mon nez (parce que je transpire facilement) et, hop, je redeviens bien myope. C'est une des raisons pour lesquelles toutes sortes de techniques qu'on donne pour éviter la formation de buée lorsqu'on porte un masque chirurgical ne sont pas adaptées pour moi : si je repositionne ne serait-ce qu'un tout petit peu mes lunettes sur mon nez, soit elles s'éloignent et je deviens trop myope, soit elle se décentrent verticalement et c'est encore pire.
Une autre chose à souligner, c'est qu'une correction excellente de jour, c'est-à-dire dans des conditions de bonne luminosité, peut devenir ridiculement mauvaise de nuit. Je ne parle pas ici de problème de vision en faible lumière (sensibilité de la rétine), mais d'aberrations optiques liées à l'ouverture de la pupille : les corrections apportées par les lunettes se calculent dans l'approximation de l'optique linéaire, qui ne marche pas si mal avec une pupille bien fermée (i.e., dans un environnement bien lumineux), mais dès qu'il fait un peu sombre, la pupille s'ouvre et l'approximation linéaire vole en éclats. J'ai l'impression que les ophtalmos n'ont pas bien conscience de ce phénomène : ils m'annoncent fièrement qu'avec la correction qu'ils me prescrivent je monte à une acuité visuelle de 12/10 avec les deux yeux, ce qui est très honorable, mais en réalité, dès qu'il fait un petit peu sombre, je vois tout flou (pourtant j'ai une bonne sensibilité à la lumière : mais c'est une question complètement différente la netteté). Dr. Ettner m'a fait faire le test de vue dans un cabinet qui était loin d'être sombre (et elle ne m'avait pas mis de gouttes provoquant une mydriase), je ne trouve pas ça terrible.
Tous les ophtalmos que j'ai consultés jusqu'à présent, quand je
faisais part de mon inquiétude quant à ma myopie, ont une réaction
d'indifférence : ça se corrige très bien
(comme je le disais,
il paraît qu'avec correction j'ai 10/10 à chaque œil, 12/10 avec les
deux), donc ce n'est pas un problème
. C'est faire abstraction,
comme je viens de le dire, de l'extrême difficulté à bien positionner
les lunettes pour une myopie aussi énorme, et aussi des effets de
diaphragme dès qu'il fait un petit peu sombre. Mais ce qui m'inquiète
aussi, c'est que cette myopie ne cesse de croître : je pensais qu'elle
allait se stabiliser avec le temps, mais je continue de gagner (ou de
perdre, ou je ne sais pas comment dire) environ 1 dioptrie tous les
4 ans. Si j'extrapole en espérant vivre 90 ans, cela me fait
atteindre des myopies proprement gigantesques. Alors on hausse les
épaules en me disant que ça ne veut rien dire, que peut-être mon
ordonnance précédente ne me corrigeait pas complètement, mais à force
que cette progression se continue d'année en année, ce n'est plus
vraiment très plausible de sortir cet argument.
Cela signifie notamment que je ne peux pas espérer un traitement au laser (la myopie doit être stabilisée avant). De toute façon, le Dr. Ellies m'a dit qu'à son avis j'avais la cornée trop fine pour que ce soit raisonnable de l'envisager dans mon cas.
Je m'inquiète aussi de ce que cette myopie très importante, et croissante peut signifier quant à la courbure de mon œil. Là aussi, les ophtalmos se veulent plutôt rassurants : il faut surveiller avec des examens de fond d'œil réguliers, mais tant que je ne vois pas d'éclair (qui devrait m'amener à consulter en extrême urgence), je n'ai pas spécialement à m'inquiéter. Mais bon, je suis à un âge où le corps vitré doit être en train de se décoller, et je ne peux pas ne pas être un peu préoccupé par le risque qu'il emporte un bout de la rétine avec lui. Toujours est-il que Dr. Ettner, la semaine dernière, n'a pas voulu me faire de fond d'œil dans l'immédiat à cause du covid (alors que, bon, je suis vacciné et elle aussi, et bien sûr je portais un masque tout au long de la consultation).
Dernière préoccupation inévitable à mon âge, enfin, la presbytie. Les personnes seulement un peu myopes compensent souvent leur presbytie en retirant simplement leurs lunettes : cela marche bien si on a deux ou trois dioptries de myopie ; mais quand on en a dix ou onze, comme moi, enlever les lunettes pour voir de près implique de regarder ridiculement près. Comme en plus j'ai une myopie assez différente des deux yeux, je ne regarde que d'un œil (je ne sais pas bien pourquoi, j'ai choisi le droit). Donc on me voit souvent retirer mes lunettes, fermer l'œil gauche, et tenir mon téléphone à 10cm de mon œil pour lire des petits caractères.
Dr. Ettner m'a donné une fiche standardisée à lire (avec un texte écrit en caractères de différentes tailles), j'arrivais à lire sans trop de mal les caractères les plus petits, elle en a conclu que ma presbytie n'était pas franchement gênante, et si elle m'a quand même prescrit des progressifs, elle n'avait pas l'air de penser qu'ils étaient indispensables à ce stade. Mais je pense qu'une partie du problème est qu'ayant pris l'habitude de lire de près avec l'œil droit j'accommode plus facilement de l'œil droit que du gauche, ou quelque chose comme ça. En tout cas j'avais beaucoup plus de mal à lire son texte avec l'œil gauche qu'avec le droit. Et c'était dans de bonnes conditions de luminosité : là aussi, je pense que l'ouverture de la pupille joue beaucoup. En tout état de cause, comme la nouvelle ordonnance ajoute en gros une dioptrie de correction (divergente) à chaque œil par rapport à la précédence, ce n'est pas un luxe de faire des progressifs à +0.75 pour compenser un peu. (Et ça peut être bien de commencer à s'habituer aux progressifs par une variation modérée ; il semble que +0.75 soit la plus faible correction additionnelle admise.)
Je me demande cependant, pour la lecture sur ordinateur, à quoi je passe énormément de temps, s'il vaut mieux porter des lunettes corrigeant complètement la myopie, qui forcent le cristallin à accommoder, quitte à ce que ce soit fatigant, ou des lunettes corrigeant un peu moins, qui permettent au cristallin de ne pas avoir à accommoder, quitte à ce qu'il perde l'habitude d'accommoder (est-ce que ceci fait sens ?). Les progressifs n'aideront pas vraiment ici, parce qu'on regarde un écran avec la même position des yeux qu'on regarde à l'infini.
Seconde partie : passage chez l'opticien.
Ayant une ordonnance pour une paire de lunettes, il faut encore la faire faire.
Longtemps j'ai acheté mes lunettes en ligne. Je suppose que tous les liens de l'entrée que je viens de lier sont maintenant cassés (ce serait trop déprimant de vérifier), en tout cas, le site Optical4Less d'opticiens hong-kongais chez qui je me fournissais a cessé d'exister. (J'ignore si ça a un rapport avec la pandémie et/ou la manière dont la Chine a repris de force le contrôle de Hong-Kong.) Sans doute les lunettes fabriquées à Hong-Kong sont-elles de moins bonne qualité (personnellement je n'ai pas trop vu de différence), mais elles sont aussi environ dix fois, si ce n'est trente fois, moins chères que celles qu'on achètera en France. Ceci me permett(er)ait, par exemple, d'avoir des verres ultra-amincis pour un tarif acceptable pour mon portefeuille, ou d'acheter deux ou trois paires, par exemple une en verre minéral et une en polycarbonate, et avoir ainsi le choix selon l'humeur ou l'activité du jour, ou simplement la tranquillité d'esprit de savoir que j'ai une paire de rechange si ma paire casse (et ça m'a servi tout récemment, donc, même si j'ai eu un peu de mal à retrouver la bonne paire parmi la dizaine qui traînaient chez moi). Je me suis aussi parfois permis de modifier un peu la correction prescrite par l'ophtalmo : par exemple, je peux imaginer me faire faire moi-même une paire pour voir de près et une pour voir de loin si je n'aime pas les progressifs ou si je veux changer de temps en temps, ou n'importe quelle autre raison. Alors qu'au tarif pratiqué par les opticiens français, je peux me payer le luxe d'une paire, et c'est tout, et encore, c'est parce que ma mutuelle m'en rembourse la moitié.
Cette fois-ci j'ai décidé de passer par un opticien français, à savoir le centre opticien mutualiste de la MGEN, qui pratique des tarifs un peu moins prohibitifs que ceux qu'on trouve ailleurs. Ça reste très très cher par rapport aux opticiens de Hong-Kong : 592€ pour la paire (72€ pour la monture et 260€ par verre), dont 300€ sont remboursés par la mutuelle. À ce sujet, je note que si la mutuelle me rembourse une fraction significative du prix (et j'aurais pu insister pour avoir une paire intégralement remboursée), la sécu, elle, ne rembourse rien : 0.09€ (ce n'est pas une blague !), ce qui est un peu une honte vu que, pour quelqu'un d'aussi myope que moi, ne pas avoir de lunettes signifie que je ne peux même pas lire les caractères les plus gros sur l'échelle de Monoyer (c'est-à-dire que j'ai en-dessous de 0/20) : ce n'est pas comme si c'était un simple élément de confort.
Quoi qu'il en soit, je n'exclus pas de me payer aussi une ou deux paires achetées en ligne, comme paire de secours, ou pour avoir des verres non-progressifs, ou quelque chose comme ça. (On m'a conseillé d'essayer Polette, à défaut de trouver un nouvel opticien hong-kongais : je n'ai pas encore regardé leurs prix.)
Un des problèmes avec la commande de lunettes en ligne, c'est qu'il faut au moins connaître sa distance pupillaire. Normalement les ophtalmos devraient l'indiquer sur l'ordonnance. Dans la pratique, les praticiens français ne la mesurent pas et donc ne l'écrivent pas (alors que c'est dans la loi !). Quand je l'ai demandée à Dr. Ellies, il y a quelques années, il m'a dit que l'appareil qui avait mesuré ma vue devait en principe la donner mais a avoué qu'il ne trouvait pas le chiffre dans la sortie de l'appareil ; quant à Dr. Ettner, elle m'a fait la morale sur le fait qu'il ne fallait pas commander des lunettes en ligne comme une vulgaire paire de chaussettes. Heureusement, l'opticien qui me l'a mesurée au centre mutualiste m'a donné la valeur qu'il a obtenue (et c'était la même valeur que j'avais mesurée moi-même avec un miroir et un feutre : 65mm).
Alors peut-être que les opticiens font un travail concernant le centrage du verre qui ne sera pas fait en commandant en ligne (l'opticien du centre mutualiste a fait des marques et les a mesurées), et sans doute comprennent-ils mieux que moi quelles montures seront adaptées et lesquelles ne le seront pas. J'avoue que je suis toujours un peu perplexe à ce sujet : ils ont des présentoirs avec des dizaines de montures chacun, des centaines en tout, ils vous regardent, réfléchissent très soigneusement, et en choisissent une toute petite poignée selon des critères qui m'échappent à peu près complètement. Quand j'achetais en ligne chez Optical4Less, je choisissais vaguement la nature et la couleur du modèle, et des dimensions proches de la monture précédente, et ça ne m'a pas posé de problème particulier. Là, chez l'opticien mutualiste, j'ai essayé une petite poignée de montures, mais comme de toute façon je ne vois rien en les essayant (normal : je n'ai pas mes lunettes !), je me suis retrouvé avec une paire très moche.
Une autre chose avec laquelle je me suis retrouvé (sur l'insistance
polie de l'ophtalmo et de l'opticien) et dont je ne suis pas très
content, c'est des verres avec traitement anti lumière bleue
.
Ça a
l'air assez
bidon ; en soi ça ne me gêne pas forcément, vu que c'était au même
prix, mais j'aurais peut-être plus intérêt à avoir des lunettes pour
écran, avec des verres non progressifs mais sous-corrigeant ma myopie
(je peux utiliser mon ancienne paire pour ça), qui soient anti lumière
bleue, tandis que mes lunettes pour extérieur, elles, n'auraient pas
ce filtre. Toujours est-il que ce qui est pénible est que ça fait des
reflets bleus qui sont gênants en cas de lumière par l'arrière : si
j'avais su ça j'aurais insisté pour ne pas avoir ce truc.
Bon, au final, c'est comme pour mon téléphone : le truc précédent ayant cassé, j'ai dû payer environ 300€ pour avoir quelque chose qui me donne moins de satisfaction. <emoji-shrug>
Suite : ici.