J'avais essayé le snowboard l'an dernier en prenant juste une heure de cours (pas franchement un succès : mon poussinet s'était fait mal au poignet et un vautour nous avait tourné autour de la tête). Pas assez pour apprendre vraiment quoi que ce soit mais assez pour se faire une petite idée et décider que ça devrait me plaire. Cette année (après avoir changé d'avis sur le pied à mettre en avant), j'ai été un peu plus persévérant : nous avons repris deux heures de cours le mois dernier à Métabief, et en avons de nouveau fait — par nous-même — ce week-end à Termignon-Val-Cenis (les photos ci-dessus sont géolocalisées pour ceux qui veulent voir précisément où nous étions).
Comme je suis du genre angoissé, j'avais acheté plein de protections : des protège-poignets (à mettre entre les sous-gants et les gants), des protège-genoux et un casque en guise de bonnet (plus le masque de ski, évidemment). Très encombrant : ça me donnait un peu l'impression d'être un casseur de manifestant (cf. photo), mais au moins je me sentais rassuré. Et malgré les remarques ironiques de mon poussinet je ne pense pas que ç'ait été inutile : c'est justement quand on est débutant qu'on en a le plus besoin, et de fait, je suis tombé un nombre incalculable de fois sur les genoux et les poignets, et j'ai fait une fois un vol plané qui a terminé par un beau choc à la tête.
J'ai, donc, surtout commencé par beaucoup tomber. Notamment parce que je n'arrivais pas correctement à tourner vers la gauche.
Il faut dire que le snowboard étant fondamentalement asymétrique (sauf s'il s'agit d'un non-directionnel, c'est-à-dire que les deux bouts peuvent servir d'avant, mais je ne sais pas pourquoi ça a l'air d'être rare), on peut tout à fait ne pas être aussi à l'aise dans un sens que dans l'autre. Faire face à la pente (où on voit naturellement où on va) semble beaucoup plus naturel et confortable que faire dos à la pente (où il faudra regarder par-dessus son épaule). Et comme j'ai choisi finalement de mettre le pied droit à l'avant (« goofy ») — parce que c'est comme ça que je me positionne naturellement pour glisser sur de la glace — quand je fais face à la pente c'est pour descendre un peu vers la droite alors que quand je fais dos à la pente c'est pour descendre un peu vers la gauche (qui est alors, pour moi, la droite). Du coup je suis plus à l'aise sur une piste qui descend en tournant dans le sens des aiguilles d'une montre autour de la montagne (parce que je peux rester face à la pente et déraper gentiment vers la droite) que le contraire.
Évidemment, dès que la piste est un peu autre chose qu'une oblique régulière, il faut alterner entre ces deux positions (face à la pente et dos à la pente), et c'est surtout là que c'est délicat : j'ai assez vite maîtrisé le principe du virage qui passe de « dos à la pente » à « face à la pente » (virage côté dos, ou heelside[#], qui pour moi est vers la droite), mais dans l'autre sens (virage côté face, toeside) je me plantais absolument systématiquement. Et du coup je maudissais les lacets vers la gauche et je me retrouvais souvent comme un idiot au bord droit de la piste, sans savoir quoi faire ensuite. J'ai poussé une quantité de jurons en hurlant qui ont provoqué une certaine hilarité chez les autres skieurs. Ou alors je descendais simplement en dérapage (face à la pente) sans aller ni vers la gauche ni vers la droite, ce qui est un un peu l'équivalent pour le snowboard du chasse-neige du skieur débutant.
Le problème semble être que quand je faisais un virage toeside, ça prenait trop de temps dans la direction de la ligne de pente, je me retrouvais toujours à aller trop vite et je ne savais plus contrôler : soit je fonçais dans le talus soit je dérapais trop et je partais en marche arrière — et la tentation était grande de simplement se pencher en avant jusqu'à tomber sur la piste pour s'arrêter à grand renfort de frottement sur les genoux. À la limite j'arrivais à déraper dos à la pente (vers l'arrière, donc), mais pas me lancer et à contrôler ma vitesse dans cette position.
Et tout d'un coup (après deux heures hier et trois aujourd'hui à me manger des talus et à tomber sur les genoux), j'ai eu un déclic et j'ai « compris le truc ». Mais le plus frustrant, c'est que je ne sais pas ce que j'ai compris exactement, et je ne suis pas capable de le réexpliquer. Tout ce que je sais c'est que mon poussinet a insisté pour que je pratique le dérapage et l'avancée dos à la pente et l'arrêt dans cette position, et j'ai arrêté de foncer dans les talus et j'ai réussi à déraper correctement, et finalement à tourner vers la gauche.
Ce qui est vraiment dommage, c'est qu'à ce point, où enfin je commençais à pouvoir enchaîner des virages sans tomber, et surtout à prendre plaisir à surfer, quand j'ai pu prendre un bout de piste rouge, mes jambes étaient tellement fatiguées (et surtout le muscle fessier de la jambe arrière=gauche), tellement fatiguées de toutes ces pentes descendues à 1km/h en dérapant lentement à force de me crisper, que je n'en pouvais plus, et nous avons dû mettre fin à notre expérience.
Je réessaierai certainement l'an prochain, mais je ne sais pas si je me rappellerai le « truc » que j'ai fini par comprendre ou s'il faudra de nouveau passer des heures à mordre la neige avait de pouvoir contrôler ma trajectoire.
[#] Certains utilisent aussi les termes frontside et backside, mais j'ai l'impression de comprendre qu'il y a une grande confusion à ce sujet, certains les utilisant pour exactement le contraire de ce que d'autres font, donc autant éviter !