Méta : Cette entrée, où je prouve encore une fois
mon super-pouvoir de dire en 5000 mots ce qui tiendrait facilement en
500, est un peu un mélange de calimérisme (bouh hou hou, je suis
nul et le monde est vraiment trop zinjuste
) et de réflexions
disparates (généralement cachées dans les abondantes notes) mais que
j'espère un peu plus intéressantes, sur l'apprentissage de la
conduite. Il est question de mon permis moto, mais beaucoup de ce que
je dis est applicable aussi à quelqu'un qui passerait le permis B (ou,
je suppose, C ou D) : vers la fin, je donne d'ailleurs quelques idées
qui pourraient peut-être resservir à d'autres, sait-on jamais.
Quand je me suis inscrit au permis moto, je me doutais que ce serait sans doute long et difficile, et que j'en baverais : (a) parce que j'avais exactement zéro expérience des deux-roues motorisés, (b) parce que je ne suis plus tout jeune pour commencer, (c) parce que la moto n'est pas réputée pour être particulièrement facile, et (d) parce que je venais d'en baver pour le permis voiture et que les mêmes causes produisent probablement les mêmes effets. Bref, j'étais conscient de cette possibilité, j'étais bien conscient que quand le test psychotechnique complètement bidon mais légalement obligatoire préliminaire à la formation m'a prédit 20–35 heures de formation, ce n'était rien d'autre qu'un test complètement bidon mais légalement obligatoire, et je n'ai pas été surpris de mettre cinq mois (et 87 heures de formation) à obtenir l'épreuve de plateau (= épreuve hors circulation).
En revanche, s'agissant de l'épreuve de circulation (qui est essentiellement la même[#] qu'au permis B, mais sur une moto au lieu d'être dans une voiture) j'avais un espoir raisonnable que ce serait plutôt facile. Au moins une fois assimilés les quelques points de circulation spécifiques à la moto (le véhicule étant plus étroit, on ne se place pas toujours bêtement au centre de sa voie ; on cherche à se dégager autant que possible de toute proximité avec un poids lourd, et surtout à ne pas rester derrière ; en contrepartie, l'exigence de respect des limitations de vitesse est moins strict, surtout quand il s'agit, justement, de se dégager d'une situation possiblement dangereuse), et évidemment, des aspects de maniement du véhicule qui n'ont pas été vus pendant la préparation au plateau (comment gérer un rond-point, prendre un virage avec plus ou moins de visibilité, comment démarrer en côte ou tourner en pente, etc.), mais en tout cas, rien d'insurmontable.
[#] Sauf qu'évidemment l'inspecteur est dans une voiture (conduite par le moniteur-accompagnateur) et donne ses instructions par radio via une oreillette. Il y a d'autres petites différences, mais elles sont mineures (le nombre de de compétences à valider et donc de points de notation n'est pas le même : il n'est pas demandé de manœuvre, et les vérifications techniques ont été traitées lors de l'épreuve de plateau).
Pourquoi penser que ce serait plutôt facile ? D'abord parce que « tout le monde le dit ». Tout le monde, c'est-à-dire plusieurs amis qui ont passé le permis A ou A2 et qui ont tous décrit l'épreuve de circulation comme une sorte de formalité, ou encore des avis variés mais globalement concordants qu'on trouve en ligne (au pif, celui-ci). Ensuite parce que le taux de réussite est (au niveau national en 2017) de 91% pour l'épreuve de circulation contre 64% pour l'épreuve de plateau (pour comparaison, c'est 57% pour le permis voiture ; source ici, tableau page 22 [numérotée 21] du PDF) : une épreuve avec 91% de taux de réussite (même 92% en première présentation) en 2017 ne donne pas l'impression d'être outrageusement sélective[#2]. • Une bonne partie de cette facilité doit venir du fait que beaucoup des candidats au permis A2 dont déjà le permis B, mais même sans ça, si on regarde le taux de réussite au permis A1 (qui est exactement comme le permis A2 mais pour des motos de ≤125cm³ et peut être passé dès 16 ans, ce qui fait que ceux qui le passent n'ont presque jamais un autre permis), il est encore de 80%, suggérant que l'épreuve en elle-même est moins exigeante que le permis voiture ; une raison que j'ai entendu avancer à ce sujet est que les inspecteurs ne sont généralement pas eux-mêmes motards[#3] et s'en foutent un peu (voire, bavardent juste avec le moniteur-accompagnateur), ou simplement qu'ils ne voient pas aussi bien que s'ils étaient assis à côté du candidat et donnent quelque bénéfice du doute au candidat. • Mais bon, le fait est que j'ai obtenu mon permis B (et même si l'apprentissage a été douloureux, je l'ai quand même eu du premier coup et avec quasi le maximum des points), et j'ai fait attention, depuis, à conduire suffisamment pour, au strict minimum, maintenir mon niveau, à ne pas prendre de mauvaise habitude, et à respecter scrupuleusement le Code de la route. (Et mon poussinet trouve qu'effectivement je conduis mieux maintenant qu'il y a un an. Même, je n'écrase pas les piétons, c'est dire ! ) • Et puis, il y a une différence de motivation, qui au moins ne devrait pas nuire[#4] : j'ai passé le permis B plus par nécessité ou obligation sociale, je voyais ça comme une corvée et je ne prends aucun plaisir à conduire une voiture ; alors que je passe le permis A2 largement parce que j'en ai envie, et j'ai pu constater que (quand le temps est propice…) c'est vraiment agréable de rouler en moto. Et comme corollaire de la différence de motivation, une différence d'application (je vais revenir sur la manière dont je m'applique).
[#2] Argument à prendre avec des pincettes, évidemment, puisque les auto-écoles décident quand présenter les candidats… la préparation pourrait être beaucoup plus longue et difficile et donner quand même un taux de réussite meilleur à l'épreuve finale. D'ailleurs, le permis D (bus/car) a effectivement un taux de réussite supérieur au permis B (voiture) et personne ne s'imagine que conduire un bus est plus facile que conduire une voiture (ma belle-mère, qui a ce permis D, confirme d'ailleurs). Mais quand même, l'épreuve de circulation du permis A2 a le plus haut taux de réussite de tous ceux qui sont inscrits dans le tableau auquel je me réfère, ça doit bien traduire quelque chose. • D'autre part, il faut quand même signaler qu'il y a des différences très importantes entre départements : le taux de réussite à l'épreuve de circulation du permis A2 en 2017 avait beau être de 91% au niveau national, il était seulement de 88% pour l'Île-de-France, et de 79% pour Paris (j'aimerais en savoir plus sur les causes de ces disparités).
[#3] Je crois quand même comprendre qu'ils ont eux-mêmes l'obligation de passer le permis A (donc A2 maintenant ?) (cf. cette page ou celle-ci, j'ai la flemme de chercher quelque chose de plus officiel). Ils n'ont d'ailleurs pas l'air d'avoir d'obligation de passer les permis C, D et *E, en revanche : je ne sais pas si ceux qui font passer ces permis-là doivent eux-mêmes l'avoir.
[#4] Ça faisait partie de l'expérience (pas très scientifique) de tester si la motivation joue dans l'aptitude à réussir. Ma conclusion provisoire, c'est que je n'ai pas vraiment l'impression. Du coup, je peux le dire à ceux qui envisagent de passer un permis mais qui voient ça comme une corvée : ce manque de motivation ne vous compliquera probablement pas spécialement la tâche (qui peut être difficile pour d'autres raisons, bien sûr, comme elle l'a été pour moi).
Bref, il y avait un certain nombre de raisons de penser (prudemment !) que ce serait raisonnablement facile, ou au moins que j'aurais fait le plus dur.
Sauf que non, ça n'a pas vraiment l'air parti pour : j'ai l'air d'avoir gagné un nouveau tour pour la case « cancre ». Et là, je commence un petit peu à trouver ça usant[#5] d'accumuler les heures de formation pour patauger dans une médiocrité dont je cherche à identifier la cause. Bon, pour l'instant j'en suis à 14h de conduite (7 leçons de chacune environ 2h de conduite effective[#6]) sans compter la circulation que j'avais déjà faite en allant et en revenant du plateau lors de la préparation à cette épreuve (que j'estime à pas loin de 20h, mais bon, c'est toujours le même trajet) : ce n'est pas encore affolant, surtout que le minimum légal semble[#7] être de 12h, mais c'est surtout parce que mes progrès sont douteux que c'est un peu décourageant.
[#5] J'ai la chance de ne pas avoir de problème côté financier, parce que les heures commencent à chiffrer. Mais juste pour le temps consommé, ce n'est pas négligeable non plus.
[#6] Pour rentabiliser le temps, le mode de fonctionnement des cours de circulation de mon auto-école est qu'on part pendant 3 ou 4 heures à 3 ou 4 élèves à tourner sur 2 motos (avec un changement toutes les heures environ) : donc deux élèves conduisent pendant que l'autre ou les deux autres sont dans la voiture avec le moniteur (et peuvent donc observer et écouter ses commentaires, ce n'est pas du temps complètement perdu). L'avantage est qu'on se fatigue moins que si on conduisait tout le temps et qu'on peut aller plus loin que si les leçons duraient vraiment deux heures. L'inconvénient est qu'il faut vraiment bloquer tout son après-midi ou toute sa matinée.
[#7] J'écris
seulement semble
parce c'est un peu confus : la base juridique
que j'ai trouvée
est l'arrêté
du 24 juin 1992 relatif à la formation à la conduite des motocyclettes
et des motocyclettes légères qui d'après Legifrance est toujours
en vigueur, mais qui ne semble pas avoir été mis à jour pour tenir
compte de la progressivité du permis moto (on ne peut plus passer le
permis A directement, seulement le A2), et par ailleurs je ne sais pas
bien comment interpréter la phrase la durée minimale de la
formation pratique à la conduite de ces véhicules est de vingt heures,
dont huit hors circulation et douze sur une voie ouverte à la
circulation publique
(s'il faut juste comprendre de huit heures
hors circulation et de douze heures en circulation
, pourquoi avoir
précisé le total ? le texte semble dire x≥8
et y≥12 et x+y≥20
du coup je me
demande à quoi sert le dernier).