David Madore's WebLog: 2017-03

Vous êtes sur le blog de David Madore, qui, comme le reste de ce site web, parle de tout et de n'importe quoi (surtout de n'importe quoi, en fait), des maths à la moto et ma vie quotidienne, en passant par les langues, la politique, la philo de comptoir, la géographie, et beaucoup de râleries sur le fait que les ordinateurs ne marchent pas, ainsi que d'occasionnels rappels du fait que je préfère les garçons, et des petites fictions volontairement fragmentaires que je publie sous le nom collectif de fragments littéraires gratuits. • Ce blog eut été bilingue à ses débuts (certaines entrées étaient en anglais, d'autres en français, et quelques unes traduites dans les deux langues) ; il est maintenant presque exclusivement en français, mais je ne m'interdis pas d'écrire en anglais à l'occasion. • Pour naviguer, sachez que les entrées sont listées par ordre chronologique inverse (i.e., la plus récente est en haut). Cette page-ci rassemble les entrées publiées en mars 2017 : il y a aussi un tableau par mois à la fin de cette page, et un index de toutes les entrées. Certaines de mes entrées sont rangées dans une ou plusieurs « catégories » (indiqués à la fin de l'entrée elle-même), mais ce système de rangement n'est pas très cohérent. Le permalien de chaque entrée est dans la date, et il est aussi rappelé avant et après le texte de l'entrée elle-même.

You are on David Madore's blog which, like the rest of this web site, is about everything and anything (mostly anything, really), from math to motorcycling and my daily life, but also languages, politics, amateur(ish) philosophy, geography, lots of ranting about the fact that computers don't work, occasional reminders of the fact that I prefer men, and some voluntarily fragmentary fictions that I publish under the collective name of gratuitous literary fragments. • This blog used to be bilingual at its beginning (some entries were in English, others in French, and a few translated in both languages); it is now almost exclusively in French, but I'm not ruling out writing English blog entries in the future. • To navigate, note that the entries are listed in reverse chronological order (i.e., the most recent is on top). This page lists the entries published in March 2017: there is also a table of months at the end of this page, and an index of all entries. Some entries are classified into one or more “categories” (indicated at the end of the entry itself), but this organization isn't very coherent. The permalink of each entry is in its date, and it is also reproduced before and after the text of the entry itself.

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Entries published in March 2017 / Entrées publiées en mars 2017:

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(vendredi)

Rhume et aphtes

J'ai plutôt eu moins de rhumes ces dernières années qu'il y a plus longtemps où c'était carrément une blague récurrente sur ce blog, mais là j'en ai quand même attrapé un gros, qui est tout juste en train de finir, mais qui m'aura empêché de bien profiter des premières journées de temps vraiment printanier à Paris.

Or il y a un truc qui, chez moi, a presque toujours accompagné les rhumes : c'est qu'à peu près au moment où le rhume finit, j'ai des aphtes qui apparaissent dans la bouche. Ça n'a pas l'air d'être un truc médicalement très documenté, en tout cas, Internet n'a pas l'air de répertorier de documentation au sujet d'une telle corrélation.

(Je remarque en passant que l'anglais n'a pas vraiment de mot pour aphte. Wikipédia parle juste de mouth ulcer ; le mot aphtha semble exister [avec une ‘h’ de plus en anglais qu'en français comme beaucoup d'autres bout de mots venant d'un phi-thêta grec, par exemple ophtalmo- en français contre ophthalmo- en anglais], mais n'est quasiment pas utilisé ; on trouve aussi canker sore, qui est furieusement imprécis. Je trouve ce genre de situation vraiment agaçante. Vous saviez que l'anglais n'a pas non plus de bon terme pour dire peluche ?)

Je peux évidemment imaginer plein de raisons qui expliqueraient ou participeraient à une telle corrélation :

  • Une attaque directe par le virus du rhume de la muqueuse de la bouche. (Après tout, s'il peut donner des maux de gorge très localisés — et ça m'arrive, quoique plutôt en début de rhume — je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas causer des aphtes.)
  • Une infection bactérienne secondaire. (Ça ne collerait pas trop avec le fait que, généralement, ces aphtes disparaissent tout seuls en un jour ou deux.)
  • Le fait que, ayant le nez bouché, je me retrouve souvent à dormir une nuit ou deux en respirant par la bouche, ce qui assèche celle-ci.
  • Le fait que, pour fluidifier la charge de mon nez et/ou de mes bronches, je prends parfois de l'acétylcystéine, qui comme mucolytique peut avoir tendance à causer des ulcères ou des inflammations des muqueuses. Explication séduisante, sauf que ma tendance à avoir des aphtes après les rhumes est beaucoup plus ancienne que mon utilisation d'acétylcystéine.
  • Effet secondaire d'un autre médicament ? Bon, je ne prends pas grand-chose, en fait.
  • Pur effet nocébo, par habitude du fait que les rhumes me causent des aphtes ?

Je ne suis pas médecin, ces hypothèses sont peut-être stupides.

Toujours est-il que ce coup-ci j'ai attrapé un aphte vraiment très pénible, sur la joue gauche juste en face des dernières molaires supérieures ; et que contrairement à l'habitude, il n'a pas l'air de vouloir partir rapidement (ça fait maintenant quatre jours qu'il est installé). Normalement mes aphtes partent presque magiquement quand je mets du pyralvex (autre truc dont on ne sait pas bien pourquoi ça marche, d'ailleurs : c'est de l'acide salicylique et de la rhubarbe), mais là, rien n'y fait.

Et du coup, j'ai le plus grand mal à manger. L'aphte lui-même n'est pas trop douloureux quand je ne fais rien, mais dès que je mâche, il me lance un peu comme une rage de dents. C'est fou comme il suffit d'un tout petit rien pour me gâcher quelque chose que je prends normalement beaucoup de plaisir à faire (bien manger).

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(samedi)

Exposé pour Math en Jeans : bilan

Dans les commentaires de l'entrée précédente (dont ceci est la suite logique et chronologique), j'avais reçu, de façon intéressante, deux conseils à peu près contradictoires (tous les deux anonymes, et signés ama et ama2) : le premier me recommandait de n'en faire que le minimum (c'est-à-dire expliquer la stratégie gagnante du jeu de nim, sans la démontrer, et peut-être présenter un jeu équivalent), sinon l'assistance serait perdue ; le second me recommandait de ne pas me limiter à la simple explication du fait que la stratégie gagnante du nim consiste à jouer de façon à annuler le XOR du nombre de bâtonnets sur chaque ligne, sinon mon exposé n'aurait aucun intérêt, l'intérêt étant dans ce qui vient après (le lien avec les codes correcteurs, par exemple).

J'ai bien peur que les deux commentaires contradictoires aient été tous les deux justes : c'est-à-dire que l'exercice était impossible pour commencer, du moins si l'exercice était de présenter quelque chose d'un peu profond, sans me contenter d'un vague survol « impressionniste » et sans pour autant perdre une bonne partie du public. (Impossible au moins sur ce sujet, mais je pense que le problème aurait été le même avec n'importe quel sujet.) C'est un peu déprimant pour ce qui est de la difficulté de la vulgarisation, mais je ne vois pas vraiment d'autre conclusion possible.

J'ai fait mon exposé en suivant en gros les conseils du commentateur ama, c'est-à-dire que j'ai préféré prendre mon temps pour éviter de perdre les gens, j'ai quand même fait la démonstration que j'avais prévue, et du coup dans mes planches j'ai pu exposer en gros les pages 1–14,16,20–22 en une heure (enfin, plutôt 55′, parce qu'il y a eu des problèmes d'organisation qui ont retardé le démarrage plus que la fin). Mais je suis aussi d'accord avec ama2 pour dire que, du coup, ce que j'ai exposé a un intérêt faible : si le contenu de ce que j'ai raconté se résume à la seule phrase la stratégie gagnante du nim consiste à jouer de façon à annuler le XOR du nombre de bâtonnets sur chaque ligne, une heure pour expliquer 21 mots, c'est un débit signal/temps peu impressionnant, même si on y ajoute la preuve de cette affirmation et l'équivalence du nim avec deux ou trois déguisements vraiment minces de celui-ci. Le jeu de nim peut avoir un intérêt limité dans une cour de récré[#], mais on s'en lasse rapidement. J'aurais certainement dû me débrouiller pour ménager au moins un petit peu de temps pour évoquer le code de Hamming pour justifier l'intérêt de présenter tout ça, qui plus est dans une école spécialisée en télécoms. Mais comme ce que j'ai raconté était difficilement compressible sans perdre une partie de l'assistance… le problème semble insoluble.

C'est quelque chose de toujours frustrant quand on aime faire de la vulgarisation : tout met toujours beaucoup plus de temps à raconter ce que qu'on imagine (les habitués de ce blog le savent au nombre d'entrées interminables où je me plains que je pensais avoir trois phrases à raconter sur X et que ces trois phrases sont devenus trente pages). Et encore, je me suis retenu très fort de parler du jeu de nim infini, qui est là où ça devient vraiment rigolo !

Je me suis aussi rendu compte qu'il est difficile de se discipliner sur le vocabulaire. Je voulais toujours parler de lignes de bâtonnets pour le jeu de nim, et je n'ai pas arrêté de dire rangées à la place de lignes, et/ou allumettes à la place de bâtonnets. Pas bien grave (je ne pense pas que ça ait pu dérouter sérieusement), mais la morale est que quand on prévoit de parler d'un sujet, il vaut mieux prévoir d'utiliser les termes dont on a l'habitude, ce sera de toute façon ceux qui sortiront spontanément.

J'ai eu aussi des petits soucis matériels, comme un pointeur laser[#2] qui, je ne sais pourquoi, voulait qu'on appuie comme un forcené sur le bouton avant de consentir à s'allumer et du coup je me suis fait mal au doigt ; et une interaction fâcheuse[#3] entre les outils de dinosaure que sont xrandr et xpdf qui m'a fait stresser juste avant le démarrage. Et en plus, je me suis découvert un début de rhume, que le fait de parler en public n'a pas aidé.

Je me consolerai peut-être en postant sur YouTube une vidéo avec mes transparents accompagnés d'un commentaire audio aussi long que nécessaire pour expliquer tout calmement. Au moins si quelqu'un peut m'indiquer un outil que je pourrais utiliser pour servir simplement de pointeur laser virtuel (i.e., créer une vidéo qui soit essentiellement des images statiques, mais sur lesquelles je puisse cliquer avec la souris pour faire apparaître une tache, ou quelque chose comme ça, pour attirer l'attention sur un endroit particulier). Ou alors je peux essayer de présenter ça dans le cadre d'un mini-MOOC, il paraît que c'est à la mode et que ça plaît aux chefs.

En tout état de cause, préparer cet exposé m'aura permis d'apprendre, ou au moins de réviser des choses. Je me suis notamment posé cette question, que je trouve jolie, et qui pourrait bien avoir un rapport avec un problème sur lequel je réfléchissais avec des collègues de manière complètement indépendante.

[#] Quand j'étais au collège (je ne sais plus bien en quelle classe), un camarade d'école m'a présenté le jeu de nim (d'ailleurs dans sa variante misère), qui m'a immédiatement intrigué par sa simplicité, et ce camarade semblait gagner à tous les coups. J'ai parlé du jeu à mon père, qui m'a dit qu'il y avait une stratégie faisant intervenir le XOR des nombres de bâtonnets écrit en binaire, mais qu'il ne se rappelait pas les détails. J'ai passé longtemps à y réfléchir pendant les vacances, j'ai fini par réussir à reconstruire les détails. Je suis retourné voir mon copain, et maintenant c'est moi qui gagnais à tous les coups (au moins quand je laissais l'autre commencer, et souvent quand c'est moi qui commençais). En fait, la stratégie que mon copain connaissait était beaucoup plus simpliste que la vraie stratégie : il se contentait de prendre un nombre de bâtonnets ayant la même parité de celui que son adversaire venait de prendre (ça n'annule que le dernier bit de la fonction de Grundy, mais avec un peu de chances et en évitant les situations évidemment mauvaises, ça suffit souvent). Du coup, j'ai pu frimer un peu à mon tour, mais enfin, l'intérêt du jeu de nim passe très très vite (surtout quand il y a, justement, quelqu'un qui gagne à tous les coups : plus personne ne veut y jouer).

[#2] C'était mon pointeur laser de secours, un rouge Je suis censé en avoir un vert, aussi, mais il ne marche plus (je ne sais pas comment un truc pareil peut tomber en panne mais c'est un fait), et aussi un bleu-violet, dont le seul intérêt est de frimer vu que cette couleur s'avère très malcommode pour attirer l'attention.

[#3] À savoir : je commence par utiliser xrandr pour positionner la sortie VGA(=vidéoprojecteur) à droite de l'écran du portable, j'ouvre xpdf -fullscreen et il décide de se mettre sur l'écran du portable ; je me dis, qu'à cela ne tienne, je vais mettre la sortie VGA à gauche : même effet. Je ne sais pas comment il fait son calcul, mais c'est très fort de toujours mettre sa fenêtre « plein écran » sur l'écran que je ne voulais pas.

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(mercredi)

Exposé pour Math en Jeans : les slides

J'ai mis en ligne ici le support que je compte utiliser pour mon exposé devant des lycéens samedi après-midi à Math en Jeans, intitulé Le jeu de nim : thème et variations.

Soit dit en passant, je ne suis pas spécialement hostile aux anglicismes, mais celui-là m'agace — en fait, le terme anglais n'est pas terrible pour commencer : qu'est-ce qu'on peut dire en français, plutôt que slide, pour parler d'une image projetée, de nos jours, par vidéoprojecteur, et servant à illustrer un exposé ?

Il manque, évidemment, l'accompagnement audio (si je suis très motivé, je ferai une vidéo sur YouTube), mais je me dis que si je n'ai pas trop mal réussi mon coup, on doit pouvoir à peu près comprendre même sans les explications orales. (Évidemment, il y a des endroits où elles sont quand même utiles à la clarté des choses ! Je pense par exemple au calcul des valeurs de Grundy dans l'exemple slide 18, qui est très facile à expliquer de vive voix avec un pointeur laser mais franchement laborieux si on veut l'écrire.)

Je précise que je n'ai pas l'intention de tout présenter : il y en a sans toute trop, peut-être même beaucoup trop (combien n'est pas clair). J'essaierai de m'adapter en fonction de la manière dont mon auditoire réagit. Disons que le minimum est le contenu des slides 3 à 14, ce qui suit contient plusieurs sujets de difficulté inégale, donc j'en traiterai un sous-ensemble, quelque part entre « rien » et « tout », selon le temps disponible et la manière dont j'ai l'impression qu'ils comprennent. (Exemple de parcours possible : 1–16,20–22,29.)

Les commentaires sont bienvenus ; mais ce n'est pas la peine de me dire que j'aurais dû m'y prendre complètement autrement, ou traiter un autre sujet : il est trop tard pour ça ; et ce n'est pas non plus la peine de me suggérer d'ajouter une figure, j'ai suffisamment souffert avec TikZ comme ça. Les suggestions locales d'amélioration/reformulation (surtout en nombre de mots constant !) seront appréciées. Mais ce qui est particulièrement bienvenu est un avis sur la difficulté relative des différentes slides pour des lycéens (motivés), ainsi que leur attrait, ou le temps qu'il faudrait y passer pour les expliquer : relatif, parce que si ça ne sert pas à grand-chose de dire que tout est trop dur, ça a un intérêt de se demander si la slide 30 est plus ou moins difficile à comprendre que la 23 (par exemple), dans la mesure où je devrai certainement faire des choix sur quoi présenter (modulo un hypothétique director's cut sur YouTube).

Bilan : voir l'entrée suivante.

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(dimanche)

Hidden Figures

Mon poussinet et moi sommes allés voir le film Hidden Figures (le titre français — Les Figures de l'ombre — ne rend pas vraiment le jeu de mot le jeu de mot entre une personne et un chiffre dans un calcul), et je voudrais vraiment le recommander.

Il s'agit de l'histoire, vraie mais bien sûr partiellement romancée, de trois femmes noires « calculatrices » à la NASA au début des années 1960 (plus exactement, au centre de recherches Langley en Virginie, entre le premier vol dans l'espace de Ûrij [=Yuri] Gagarin en 1961 et celui de John Glenn en 1962). La manière dont elles sont confrontées à la fois à la discrimination raciale et au sexisme, et leurs différentes façons d'y faire face, sont montrées avec une certaine subtilité, de même que l'atmosphère côté américain de la « course à l'espace ». L'histoire suit une trame hollywoodienne bien formatée et qu'on peut trouver un peu trop schématique, mais les actrices jouent très bien (Taraji Henson, qui interprète Katherine Goble, Janelle Monáe qui joue Mary Jackson, et surtout Octavia Spencer — que je connaissais par un autre film remarquable, The Help — dans le rôle de Dorothy Vaughan), et pour une fois qu'on voit un film dont les personnages principaux sont des femmes noires, et mathématiciennes qui plus est, ne boudons pas notre plaisir. (Et puis j'ai un faible pour l'ambiance course à l'espace, l'ambiance « atompunk », ici illustrée avec une certaine sympathie sans excès.)

Scientifiquement, le film ne commet pas de bourde majeure, en tout cas pas que j'en aie repérée : le moment le plus faux sur ce plan-là est celui où l'héroïne principale, Katherine Goble, effectue au tableau, devant une salle de généraux un peu médusés, un calcul de paramètres de réentrée orbitale avec une précision dont il devrait être à peu près évident pour n'importe qui ayant un chouïa de culture scientifique, qu'il n'est pas atteignable de tête, en tout cas pas un temps tel que présenté ; je suis prêt à ne pas faire mon grincheux pour quelque chose du genre. Il y a aussi un certain nombre de modifications du tempo par rapport à la réalité, imposées pour s'adapter au rythme cinématographique, que je suis également prêt à pardonner.

Il est vrai que j'aurais aimé voir un peu de considération pour la différence entre la notion de calcul symbolique et celle de calcul numérique, choses que le grand public ne doit pas vraiment apprécier, mais qui n'est certainement pas impossible à faire passer. Les équations qu'on entr'aperçoit dans différents plans ont l'air superficiellement sensées, mais mélangent inexplicablement des valeurs numériques à virgules dans des expressions par ailleurs symboliques ; et de façon plus profonde, je n'ai pas vraiment idée de quel genre de calculs on faisait faire à ces « calculatrices », soit en général, soit précisément celles qui sont les héroïnes de ce film.

Et on ne peut pas dire que les répliques m'aident à deviner. À un moment, le chef d'équipe joué par Kevin Costner demande à Katherine Goble si elle sait calculer un repère de Frénet — et elle complète : par le procédé d'orthogonalisation de Schmidt. C'est vraiment amusant comme effet Zahir, parce que je discutais du repère de Frénet avec mon poussinet un quart d'heure avant d'aller voir le film (à propos du tome 5, particulièrement poussiéreux, du Cours de Mathématiques spéciales de MM. Ramis-Deschamps-Odoux), et je mentionnais justement qu'il s'agissait précisément du résultat d'un Gram-Schmidt sur les dérivées successives du mouvement : j'ai eu du mal à ne pas éclater de rire à la coïncidence. Mais même si vois le lien avec des trajectoires dans l'espace, je ne sais vraiment pas précisément dans quel genre de calcul, symbolique ou numérique, on utilise le repère de Frénet.

En vérité, même si je connais ma mécanique orbitale et lagrangienne, je n'ai aucune idée précise du genre de calculs qu'il faut réellement mener pour envoyer un homme dans l'espace. (Bon, je dois dire, je n'ai même pas d'idée précise sur le genre de calculs qu'il faut mener pour construire un pont ou un moteur à explosion. Je suis un peu comme le matheux d'une blague générique sur les ingénieurs, physiciens et mathématiciens, qui démontrerait que le pont, le moteur à explosion ou le vol orbital sont possibles — par une démonstration non-constructibe qui ferait appel à l'axiome du choix.)

Sur la précision scientifique des films hollywoodiens de façon plus générale, j'étais tombé il y a un certain temps sur cette vidéo qui explique que des gens ont mis en place une hotline permettant à l'industrie du cinéma d'être mis en contact avec des scientifiques de tel ou tel domaine quand ils veulent des conseils ou des éléments (phrases, équations à mettre sur un tableau, etc.) pour rendre leurs films scientiquement plus crédibles. Ça expliquerait un certain progrès que j'ai cru constater dans le domaine depuis les années '90 (même si ce progrès est souvent bien superficiel, il faut l'admettre : le fait de prononcer une phrase techniquement sensée à tel ou tel moment ne va pas compenser une absurdité fondamentale de principe ; il y a toujours très peu de films qui, comme The Martian, se donnent pour mission d'être véritablement réalistes scientifiquement, d'un bout à l'autre, ce qui implique d'aller plus loin qu'appeler une hotline de temps à autre).

À part ça, je me rends compte que je ne remplis pas vraiment consciencieusement la catégorie cinema de ce blog : ces derniers temps, j'ai vu en salles, entre autres, Manchester by the Sea et 君の名は (traduit en « français »(?!) par Your Name), et j'ai trouvé que les deux étaient vraiment des chefs d'œuvre. Je n'ai pas le temps d'en faire une critique maintenant (et ce serait un peu du réchauffé), mais je les recommande tous les deux très vivement, ce sont des films d'une très grande subtilité humaine et psychologique.

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(lundi)

Fragment littéraire gratuit #156 (un rêve)

J'attends une audience avec le Premier ministre qui doit me parler d'un roman d'Umberto Eco, mais il est en retard. Pendant que j'attends, je visite le musée du Vatican : le palais est labyrinthique et je ne sais plus bien où je suis. Les tableaux sur les murs me font penser à de Chirico. Je me rends compte qu'il y a un message caché dans les premières lettres des titres. C'est le signe qu'une révolution se prépare. La clé du message est certainement dans la Tempête de Shakespeare. Il faut absolument que je prévienne quelqu'un. Les douze dieux olympiens sont dans l'un des tableaux. Je demande à Hermès s'il a la clé, vu qu'il est le dieu des portes, mais les dieux commencent à m'attaquer et je comprends que ce sont eux les révolutionnaires. Je me mets à voler, et je vois d'en haut que les dieux ne sont en fait que des automates. Nous sommes tous sur un gigantesque système d'engrenages. Je me réveille.

Ceci n'est pas un rêve que j'ai fait mais une tentative pour imiter le style des rêves que je fais, ou du moins le style des compte-rendus des rêves que j'ai jugés assez intéressants pour être notés en me réveillant (il faut d'ailleurs que je me croie moi-même sur parole sur le fait que j'ai rêvé ces choses-là, vu que je n'en ai, pour la plupart de celles que j'ai écrites, plus le moindre souvenir). Et en fait, l'exercice est assez difficile : il faut sans arrêt se forcer à ne pas suivre une idée, parce que les rêves n'arrêtent pas de casser le fil de la continuité, ou en tout cas de la continuité apparente.

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(mercredi)

Sujet d'exposé pour Math en Jeans

Je me suis engagé à donner un exposé (quelque part entre le 24 et le 27 mars) dans le cadre de l'événement Math en Jeans : c'est-à-dire qu'il s'agit de vulgarisation adressée à des lycéens motivés (a priori de seconde).

J'ai toute latitude pour choisir le sujet, donc je vais sans doute choisir un des trucs sur lesquels j'ai déjà fait de la vulgarisation, soit sur ce blog soit ailleurs : la contrainte est que je dois pouvoir raconter ça en une heure (en prévoyant des probables interruptions par des questions) et que ça soit accessible à des lycéens. Et, bien sûr, que ce soit susceptible de les intéresser.

Je n'ai pas une idée très précise de ce qu'un lycéen (motivé !) connaît en maths ni de ce qui l'intéressera : peut-être que certains lecteurs (par exemple s'il y en a qui enseignent en lycée ou qui sont ou out été lycéens il n'y a pas trop longtemps) peuvent m'éclairer un peu.

Globalement, j'ai plutôt trop d'idées que pas assez, donc je me demande si vous avez des conseils sur ce qui passerait plus ou moins bien parmi les thèmes suivants (j'essaie de mettre à chaque fois un lien vers une entrée de ce blog qui raconte de quoi il s'agit, mais il ne s'agit pas forcément de raconter exactement la même chose, notamment quand il s'agit de choses un peu techniques : c'est plus pour donner une idée) :

[Ajout : quelques arguments pour/contre ces différents sujets.]

  • Les (très très) grands nombres et/ou les ordinaux infinis. (On peut donner un côté ludique à la chose avec le jeu de l'hydre. Pour : ça intéresse facilement, voire, ça impressionne ; ça ne dépend pas trop de connaissances qu'ils pourraient avoir ou ne pas avoir. Contre : ça peut donner l'impression d'être peu rigoureux, et on peut facilement larguer les gens dans les définitions sans leur donner de moyen de se rattraper ; certains risquent d'avoir déjà entendu de la vulgarisation à ce sujet.)
  • La géométrie sphérique et la géométrie hyperbolique (voir cette entrée et les quelques suivantes). (On peut donner un côté ludique à la chose en montrant mes différents labyrinthes hyperboliques. Pour : c'est visuel et ça accroche facilement. Contre : ils ne connaissent pas forcément grand-chose en trigonométrie, donc difficile d'introduire la formule fondamentale qui permet de faire plein de calculs réels. Autre problème pratique : les illustrations sont très fastidieuses à réaliser pour moi.)
  • Quelques notions de théorie combinatoire des jeux et notamment comment gagner au jeu de nim (un peu comme ici mais sans les trucs infinis). (Pour : ils ressortent avec quelque chose de vraiment utilisable — à savoir la stratégie gagnante de jeux comme nim, des jeux de retournement de pièces, voir nim⊗nim ; sur les jeux de retournement de pièces, je peux introduire des codes correcteurs ; le tout serait sans doute facile à comprendre et ils n'auront sans doute pas vu avant. Contre : ça peut donner l'impression d'être très anecdotique.)
  • Quelques notions de géométrie finie (voir ici et pour des illustrations). (Contre : n'ayant pas vu de géométrie projective avant, l'élégance de l'idée de construire des structures combinatoires à partir de notions géométriques risque de leur échapper complètement.)
  • …et sans doute plein d'autres choses dont j'ai parlé à l'occasion sur mon blog, comme le problème de Hadwiger-Nelson (pas sûr qu'on puisse tenir une heure avec ça), le lemme de Higman (ça fait une démonstration complète et très accessible, mais c'est sans doute très peu vendeur), l'automorphisme exceptionnel de 𝔖₆ (peut-être pas très motivant).
  • Les cardinaux infinis. (Pour : ça a l'avantage de permettre de faire des vraies démonstrations : argument diagonal de Cantor et/ou théorème de Cantor-Bernstein. Contre : c'est peut-être aride ; et comme pour les ordinaux, ça peut donner l'impression d'être peu rigoureux.)
  • Les groupes finis, vus comme des groupes de permutations, et présentés comme des puzzles (cf. ceci).
  • Une introduction à la géométrie projective.
  • …et encore plein d'autres choses.

(Sujets triés par ordre approximatif d'intérêt/faisabilité a priori.)

PS : Je dois fournir un titre rapidement, donc c'est plutôt pressé !

PPS : Idéalement, j'aimerais arriver à faire au moins une « vraie » démonstration pendant mon exposé, mais je me rends compte que c'est mal parti. Certains sujets le permettent quand même mieux que d'autres.

Fin : Finalement, j'ai choisi de faire un exposé sur la théorie des jeux, dont le titre sera Jeu de nim : thème et variations. (Comme je l'explique en commentaires, les géométries sphérique et hyperbolique m'ont paru trop difficiles à présenter à des élèves qui connaissent a priori très peu de trigonométrie et pas la fonction exponentielle — ni à plus forte raison les lignes trigonométriques hyperboliques. Quant aux grands nombres et ordinaux, c'est sans doute plus facile de trouver en ligne de la vulgarisation à ce sujet, et j'avais peur par ailleurs que ça puisse en perdre rapidement plus d'un, et/ou que ça donne l'impression d'être peu rigoureux, foire fumeux. Les jeux dont je vais parler, au contraire, sont quelque chose de bien concret et sur quoi on peut « mettre les mains ».) • Je parlerai au moins du jeu de nim, de ses différentes variations et déguisements, et de jeux de retournement de pièces (ce que Berlekamp, Conway et Guy appellent, avec leur terminologie inimitablement baroque, Moebius, Mogul et Gold Moidores, et peut-être leurs liens avec les codes correcteurs ; ou de façon générale, de certaines choses qu'on trouve au tout début du volume ♣ de Winning Ways).

Ajout : voir une entrée ultérieure.

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