David Madore's WebLog: 2010-01

Vous êtes sur le blog de David Madore, qui, comme le reste de ce site web, parle de tout et de n'importe quoi (surtout de n'importe quoi, en fait), des maths à la moto et ma vie quotidienne, en passant par les langues, la politique, la philo de comptoir, la géographie, et beaucoup de râleries sur le fait que les ordinateurs ne marchent pas, ainsi que d'occasionnels rappels du fait que je préfère les garçons, et des petites fictions volontairement fragmentaires que je publie sous le nom collectif de fragments littéraires gratuits. • Ce blog eut été bilingue à ses débuts (certaines entrées étaient en anglais, d'autres en français, et quelques unes traduites dans les deux langues) ; il est maintenant presque exclusivement en français, mais je ne m'interdis pas d'écrire en anglais à l'occasion. • Pour naviguer, sachez que les entrées sont listées par ordre chronologique inverse (i.e., la plus récente est en haut). Cette page-ci rassemble les entrées publiées en janvier 2010 : il y a aussi un tableau par mois à la fin de cette page, et un index de toutes les entrées. Certaines de mes entrées sont rangées dans une ou plusieurs « catégories » (indiqués à la fin de l'entrée elle-même), mais ce système de rangement n'est pas très cohérent. Le permalien de chaque entrée est dans la date, et il est aussi rappelé avant et après le texte de l'entrée elle-même.

You are on David Madore's blog which, like the rest of this web site, is about everything and anything (mostly anything, really), from math to motorcycling and my daily life, but also languages, politics, amateur(ish) philosophy, geography, lots of ranting about the fact that computers don't work, occasional reminders of the fact that I prefer men, and some voluntarily fragmentary fictions that I publish under the collective name of gratuitous literary fragments. • This blog used to be bilingual at its beginning (some entries were in English, others in French, and a few translated in both languages); it is now almost exclusively in French, but I'm not ruling out writing English blog entries in the future. • To navigate, note that the entries are listed in reverse chronological order (i.e., the most recent is on top). This page lists the entries published in January 2010: there is also a table of months at the end of this page, and an index of all entries. Some entries are classified into one or more “categories” (indicated at the end of the entry itself), but this organization isn't very coherent. The permalink of each entry is in its date, and it is also reproduced before and after the text of the entry itself.

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Entries published in January 2010 / Entrées publiées en janvier 2010:

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(vendredi)

J'en ai marre de voyager entre Univers parallèles

J'ai pris conscience que je naviguais entre des Univers parallèles en regardant attentivement la rue Mouffetard : au 51 de la rue il y a un magasin qui vend des conneries du genre souvenirs pour touristes, oreillers à l'effigie de Claude François ou autres cadeaux pour des amis particulièrement détestés. Une des décorations de ce magasin est une vache volante (un gadget qu'on accroche au plafond et qui fait des tours en battant des ailes : même un maître zen formé dans les meilleurs temples shaolin doit perdre son sang-froid en cinq minutes à le regarder tournoyer, ce qui prouve que les vendeurs de cette boutique ne peuvent pas etre complètement humains).

Sauf qu'un jour je suis passé devant ce magasin et ce n'était plus une vache volante qui était là, c'était un cochon volant. Un petit détail, certes, mais le petit défaut qui trahit l'existence de la Matrice : quelqu'un avait remplacé l'Univers d'où je venais par quelque chose de beaucoup plus bizarre et de plus inexplicable.

Depuis je fais très attention, et je me suis rendu compte que les petits hommes verts (ou peut-être des gros monstres violets, je ne sais pas) n'arrêtent pas de changer l'Univers dans lequel je vis. Cela se manifeste souvent par les choses les plus insignifiantes et les plus enrageantes. Cela ne concerne pas toujours l'informatique, mais c'est tout de même le plus fréquent. Une chose qu'ils aiment bien faire, c'est censurer Internet : une page Web peut disparaître sans laisser de traces, tout laisse à penser qu'elle n'a jamais existé (et de fait, dans l'Univers où je me trouve, elle n'a jamais existé, alors que dans l'Univers dont je viens, je suis certain que j'avais vu une telle page par le passé). Un exemple idiot : dans l'Univers parallèle où j'ai grandi, il existait un mot, logon, qui désigne une quantité d'information égale à la quantité qu'on peut stocker dans un bit (c'est-à-dire, celle dans laquelle on utilise le log base 2 pour calculer la quantité d'information) ; dans cet Univers-ci, personne n'a jamais entendu parler de logon, on parle simplement de bits d'information. Perturbant. Un autre exemple : dans le monde parallèle d'où je viens, mon fournisseur d'accès avait une page Web où il recensait les anomalies récentes sur son réseau ; je me suis rendu compte lors d'une anomalie récente que non seulement cette page n'existait pas, mais que personne dans cet Univers ne l'avait jamais vue. Dans le monde parallèle d'où je viens, il y avait une version 2.5 de Thunderbird, sortie il y a environ un an les versions 2.0 et 3.0 (cette dernière vient de sortir) : dans ce monde-ci, elle n'a jamais existé.

Bon, trêve de plaisanterie, c'est étonnant la facilité avec laquelle on se persuade de quelque chose qui n'a jamais été le cas. (Ce n'est pas la seule explication possible, d'ailleurs : dans le cas du cochon volant, j'ai constaté après coup qu'il y avait tout simplement bien deux gadgets différents mais semblables, l'un représentant un cochon et l'autre une vache…) Et depuis que j'ai commencé à y faire attention, j'en vois vraiment tout le temps.

Un jour je vais finir par me retrouver dans un Univers parallèle où Isabelle de Castille n'aura jamais été convaincue de l'intérêt de financer la mission de Christophe Colomb de trouver une route vers les Indes par l'ouest, et où le Nouveau monde aura été découvert par Amerigo Vespucci ; j'imagine que dans cet Univers parallèle le continent porterait du coup un nom comme Amérique, et là je saurai qu'il y a vraiment quelque chose qui ne va pas.

Ajout : webcomic pertinent.

Ajout 2 () : Le terme psychiatrique standard est confabulation ; mais l'« explication » avec des univers parallèles, que je ne suis apparemment pas le premier à « découvrir », traîne sur Internet, et il y a des gens qui, au moins quand il s'agit d'un phénomène collectif, appellent ça le Mandela Effect (parce qu'ils viennent d'un monde parallèle où Mandela est mort en prison dans les années '80) : voir notamment ici, ici (un peu clickbaitesque, mais bon…) ou enfin cette vidéo qui reprend les mêmes exemples. (Et bien sûr, on peut aussi faire référence au Tlön de Borges.)

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(dimanche)

Comment sont définies les frontières d'un pays ?

Je suis occasionnellement le blog cartographique Strange Maps, dont l'intérêt est assez inégal, mais qui a le don pour dénicher de temps en temps des petits bijoux de bizarrerie géographique à faire frémir le Club Contexte, notamment en ce qui concerne les frontières entre pays. Mais une question à laquelle je n'ai jamais eu de réponse (ou en tout cas, de réponse complète satisfaisante, si tant est qu'il y en ait une), c'est : comment au juste sont définies les frontières d'un pays ? Ou plutôt : comment sait-on où elles sont, notamment en cas de dispute (ou avant de savoir s'il y a dispute) ? Et subsidiairement : à quelle précision sont-elles définies (probablement mieux qu'un décamètre et moins bien qu'un millimètre dans tous les cas, mais entre les deux ça doit dépendre de l'endroit dont on parle) ? Quel chemin y a-t-il entre la définition de la frontière et sa réalisation sur le terrain ? Et quelle est l'histoire de ces définitions ?

Dans beaucoup de cas, il doit y avoir un traité qui spécifie assez clairement où la frontière se situe d'après une topographie physique indiscutable (un fleuve, une ligne de crête, une ligne de partage des eaux, etc.) ou d'après une construction géométrique assez claire (un parallèle, éventuellement un méridien, la droite reliant deux points comme des points culminants, que sais-je encore). C'est un cas favorable : même si ce n'est pas forcément évident de réaliser la ligne, et si la géographie physique peut changer en entraînant des disputes (par exemple, le Rio Grande a connu des petites variations de cours, causant des disputes entre les États-Unis et le Mexique), on conçoit assez bien que la frontière soit bien définie. Dans beaucoup d'autres cas, il doit y avoir une tradition très ancienne dans une région assez peuplée qui fait que chacun sait s'il habite dans tel ou tel pays, que la frontière passe entre tel et tel village au bout de tel champ ou le long de tel sentier, les cartographes ont pu consigner cette tradition dans des cartes assez précises, on imagine que cela ne cause guère de problèmes.

Mais quand je me promène dans la montagne aux alentours de Métabief dans le Jura (où la famille de ma mère a un appartement de vacances), on peut voir la frontière Franco-Suisse qui passe au milieu de nulle part, matérialisée par des vagues peintures sur des rochers ou des petits tas de cailloux : qu'est-ce qui me dit que ces marques sont au bon endroit, et que la frontière est bien censée passer précisément là — comment cela s'est-elle retrouvée passer là plutôt qu'ailleurs ? Est-elle vraiment définie à une fraction de mètre près ? Des gens sont-ils passés avec des GPS pour relever chaque point anguleux, et est-on sûr qu'un petit facétieux n'a pas déplacé les marques ?

(Je pose toutes ces questions pour les frontières entre pays, mais on pourrait aussi les poser pour les limites administratives à l'intérieur d'un pays. La situation est moins grave parce qu'il y a, en principe, des cours de justice pour arbitrer quand les régions administrées ne sont pas d'accord sur leurs limites, mais la question de comment ces frontières sont définies et connues de l'administration mérite quand même d'être posée. Et ce n'est pas une question déconnectée des frontières internationales, puisqu'il est arrivé plus d'une fois que des frontières internes à un pays deviennent des frontières internationales plus tard.)

Il est toujours étonnant qu'on arrive à se retrouver avec des situations où les frontières font des choses tout à fait bizarres, comme des oscillations incompréhensibles, des replis formant des presqu'enclaves, des points doubles (quand la frontière se recroise elle-même, c'est-à-dire qu'on a une enclave attachée par un unique point), ou carrément des enclaves (ou exclaves, selon le point de vue : des petits bouts isolés d'un territoire dans un autre), voire des contre-enclaves ou enclaves d'ordre deux (une enclave dans une enclave).

Parmi les bizarreries frontalières bien connues, rien qu'en Europe, il y a le triangle du Moresnet (évoqué ici sur Strange Maps), un minuscule territoire de 3.5km² à la frontière entre l'Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique (à quelques kilomètres d'Aachen, et en gros au point culminant des Pays-Bas, ici sur Google maps) qui fut peut-être, entre 1908 et la première guerre mondiale, un état indépendant, le seul pays du monde ayant jamais eu l'esperanto comme langue officielle. Là au moins l'histoire est assez claire : le territoire fut explicitement laissé neutre pour des raisons diplomatiques entre les Pays-Bas et la Prusse. À une centaine de kilomètres de là, on a la ville belge de Baarle-Hertog aux Pays-Bas (évoqué ici sur Strange Maps, ici sur Google maps), une ville qui fait partie d'un système compliqué d'enclaves de la Belgique dans les Pays-Bas résultant d'une histoire tout aussi compliquée entre les Sieurs de Breda et les Ducs de Brabant entérinée par le traité de Maastricht de 1843. C'est un des rares endroits du monde où on trouve des contre-enclaves : il y a des petits bouts de Hollande dans une ville belge qui se trouve en Hollande[#]. Il y a aussi, pour parler d'une situation plus conflictuelle, la Transnistrie (ici sur Strange Maps, ici sur Google maps), un état fantoche, reconnu par aucun autre pays au monde (pas même la Russie qu'elle utilise comme base) entre la Moldavie et l'Ukraine, parce que la frontière ouest de l'Ukraine, on ne sait pas pourquoi, est située strictement à l'est du Dniestr, ce qui laisse la place pour cette écharde de territoire, officiellement partie de la Moldavie, mais en pratique à peu près indépendant.

Mais les frontières du monde que le Club Contexte préfère, ce sont peut-être sans doute celles de l'Inde avec le Pakistan et le Bangladesh (créés comme Pakistan occental et oriental). L'histoire est intéressante : alors qu'un Gandhi tout malheureux venait de concéder (ce qui lui vaudrait plus tard d'être assassiné…) à Jinnah de séparer l'Inde et le Pakistan, et alors que les Anglais voulaient partir de là au plus vite, un avocat anglais Sir Cyril Radcliffe reçut la tâche complètement ingrate de tracer la frontière entre les deux pays pour ce qui est des régions soumises directement à l'administration britannique, en pratique le Penjab et le Bengale. Il n'eut pas un travail facile, c'est le moins qu'on puisse dire : il ne connaissait rien à l'Inde (c'était un « gage d'indépendance »), il devait finir en un mois entre le 8 juillet et le 13 août 1947 (et le vice-roi ne cessait de le presser), il était censé présider depuis New Delhi deux commissions (une pour le Penjab et une pour le Bengale) qui se réunissaient à plus de mille kilomètres l'une de l'autre (!), les autres membres de chaque commission (deux non-musulmans et deux musulmans) censés assister Radcliffe refusaient de se parler (et même quand ils se parlaient, cela ne servait à rien puisqu'ils étaient en désaccord sur tout), les cartes et les données de recensement étaient mauvaises et il n'y avait pas de temps pour en établir de meilleures ni même pour visiter le terrain, et Radcliffe avait l'angoisse que tout mouvement de son crayon ferait souffrir des milliers de gens (et il avait aussi l'angoisse d'être assassiné). Avec tout cela, on s'étonne que quelque chose ait pu être fait ! Mountbatten présenta la copie à Jawaharlal Nehru et Sardar Patel pour l'Inde, et à Liaqat Ali Khan et Fazal-ur-Rahman pour le Pakistan, le lendemain de l'indépendance : qui s'engueulèrent copieusement, et accusèrent l'avocat anglais d'avoir trahi sa mission (au sujet des Chittagong Hill Tracts, des districts de Darjeeling et Jalpaiguri et des Sikhs du Penjab) ; elle fut rendue publique le surlendemain : des villages qui avaient levé le drapeau pakistanais apprirent qu'ils étaient en Inde, et vice versa. Quelque chose comme quinze millions de personnes prirent les routes, et il y eut entre cinq cents mille et un millions de morts (ce qui ne signifie pas, bien sûr, qu'il eût été possible de tous les éviter). Radcliffe, qui savait dès le début que tout le monde le détesterait, refusa le salaire important qui devait récompenser ses efforts ; le poète anglais devenu américain Wystan Hugh Auden écrivit un poème, The Partition, en son honneur. Mais le tracé de la ligne n'était pas tout : la mettre en œuvre ne fut pas facile non plus, pour les états nouvellement indépendants de l'Inde et du Pakistan, et je n'ose pas trop imaginer avec quelle précision et comment elle est définie sur le terrain. (Par contre, il y a une jolie cérémonie à regarder à Wagah.)

Ceci ne concerne que les régions soumises directement à l'administration britannique : les états princiers, censément indépendants, avaient le choix entre accéder à l'Inde ou au Pakistan, ou rester indépendants ; on sait que le Mahārājaḥ du Jammu-et-Cachemire (souverain hindou d'un état à majorité pakistanaise) choisit de rester indépendant puis, quelques mois plus tard, de rejoindre l'Inde, et on sait quelles disputes cela provoqua.

Mais le plus amusant, pour ce qui est des frontières, n'est pas de la faute de Radcliffe : c'est la situation résultant des petits jeux de guerre entre le Rājaḥ de Cooch Behar et le Nawab de Rangpur (au Bengale), au début du XVIIIe siècle. La principauté de Cooch Behar devint un des états princiers de l'Inde dominée par les britanniques. Au moment de l'indépendance, le Rājaḥ de Cooch Behar ne signifiant pas à l'avance s'il accéderait à l'Inde ou au Pakistan, Radcliffe attribua au Pakistan les districts britanniques adjacents (pour éviter de consituter d'énormes enclaves indiennes au Pakistan si Cooch Behar devenait pakistanais). Comme finalement le prince choisit d'accéder à l'Union indienne, il apporta avec lui les frontières invraisemblables que Cooch Behar avait reçues de l'histoire. Il y a donc environ 130 enclaves de l'Inde dans le Bangladesh et environ 95 du Bangladesh dans l'Inde, représentant au total 85km² et 50km² respectivement, et la taille allant de 25km² pour la plus grosse à 50m² pour la plus petite ; et il y a plusieurs contre-enclaves et une contre-contre-enclave (la seule au monde), c'est-à-dire une minuscule enclave indienne (700m²) dans une petite enclave bangladeshi (0.5km²) dans la plus grosse enclave indienne au Bangladesh (25km²). Enfin, tout cela est amusant pour les geeks, mais pour les dizaines de milliers de personnes qui habitent là-bas, surtout dans les plus grosses enclaves, ça ne l'est pas trop : les pays (l'Inde contre le Pakistan puis contre le Bangladesh) jouent à un jeu de pouvoir sur ces frontières, n'arrivant pas à se mettre d'accord sur la façon d'échanger les enclaves, et parfois même pas sur une autorisation des habitants à franchir les frontières, et il y a évidemment des endroits où aucune police ne fait régner l'ordre, avec un résultat catastrophique. Pour en savoir plus sur ces enclaves, voyez ce post de Strange Maps, cet article de Time, cet article de Wikipédia, et surtout, si vous voulez connaître tous tous tous les détails ce rapport de Brendan Whyte, Waiting for the Esquimo: an historical and documentary study of the Cooch Behar enclaves of India and Bangladesh (519 pages, quand même…).

Mise à jour () : Il semble que l'Inde et le Bangladesh vont enfin signer un accord d'échange de territoires pour supprimer ces enclaves.

[#] J'en profite pour signaler une facétie de Google street view : il est apparemment activé, dans le coin, en Hollande (à Baarle-Nassau) mais pas en Belgique (à Baarle-Hertog), peut-être pour des raisons légales ; ce qui conduit au fait qu'on peut explorer cette minuscule contre-enclave hollandaise constituée d'un seul coin de rue : Google street view vous empêche de sortir dans l'enclave belge. Inversement, dans ce coin, vous n'avez pas le droit d'entrer dans une petite enclave belge.

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(dimanche)

Aspirateur sans sac

Mon poussinet voulait un aspirateur sans sac (à effet cyclone) Dyson pour Noël[#] : je lui ai offert un modèle DC 20[#2] acheté (en solde) au BHV. Je n'étais pas convaincu a priori par le principe des aspirateurs sans sac, mais je dois avouer que je suis séduit par le produit : la puissance d'aspiration est impressionnante, et il avale une poussière extrêmement fine qu'on ne doit pas attraper avec un aspirateur classique. En plus, le truc roule très bien, sans jamais se renverser, et les accessoires sont bien faits. Il y a maintenant quelque chose de très ludique à passer l'aspirateur et de voir la poussière récoltée tourbillonner dans le gros tube de plexiglas : du coup le petit nid d'amour que je partage avec mon poussinet a nettement gagné en propreté (espérons que nous ne nous lasserons pas de faire joujou avec ce gadget, donc).

Un petit bémol à mettre est que ça fait beaucoup de bruit. Un autre est qu'il faut à chaque fois vider le non-sac, et la poussière très fine n'est pas facile à faire tomber — et une fois j'ai pris une terrible châtaigne avec l'électricité statique. Ah, et c'est un peu cher, aussi (quand ce n'est pas en solde). Mais globalement ça valait le coup.

[#] Enfin, de nouvel an : nous attendons que la période des fêtes soit bien passée avant de nous faire des cadeaux, histoire d'éviter les foules (hum, je sais, je ne suis pas pour autant tous les principes que je prêche… faites ce que je dis, pas ce que je fais).

[#2] Modèle qui n'a pas l'air d'exister sur le site du fabricant (un de ces sites parfaitement crétins qui ont un sous-site par pays, soit dit en passant) : ce lien aurait dû marcher, mais apparemment pas (et comme d'habitude, il redirige vers un endroit complètement con au lieu de fournir un message d'erreur convivial ou de faire une recherche un peu intelligente). Ça donne une image assez déplorable que le site Web d'une compagnie ne soit pas foutue de connaître les produits de sa gamme.

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(vendredi)

Un peu de misogynie ordinaire

Quand je suis en public, j'aime bien écouter les conversations des gens qui m'entourent (et parfois me demander si je dois y glisser un mot) : c'est intéressant pour savoir comment les gens pensent et pouvoir faire de la sociologie de café du commerce.

L'autre jour j'étais attablé chez une enseigne Pomme de pain (où je vais assez souvent quand j'ai laissé passer l'heure de la cantine) quand j'ai remarqué[#] deux jeunes, la vingtaine probablement tout juste passée, habillés légèrement-racaille-mais-guère, qui parlaient de filles (enfin, l'un parlait, et l'autre se contentait surtout d'approuver et de rigoler bêtement). J'ai donc dressé mon oreille de sociologue de comptoir, ce qui n'était d'ailleurs pas nécessaire parce qu'ils discutaient assez fort.

L'intensité de la misogynie qu'ils affichaient m'a impressionné. Celui qui parlait le plus était, si j'ai bien compris, en instance de rupture avec sa copine, et même si cette rupture n'était pas encore certaine (y'a encore des sentiments, disait-il — ils devaient être bien cachés), il attendait avec impatience la vie de célibataire qui l'attendrait après. Les filles, il les voyait comme des créatures manipulatrices (dès que tu dis je t'aime, c'est fini, t'es foutu), qui n'en ont aux hommes qu'après leur portefeuille (quand elles font style qu'elles ont de l'affection, en fait c'est pour te dire, tu m'achètes ça, tu m'achètes ça ; mais moi, non, si je t'achète un truc, c'est pour faire plaisir, c'est moi qui décide) ; toujours fausses et mauvaises (il faut toujours qu'elles cherchent le conflit, moi j'en ai marre, je lui dis t'as qu'à te disputer avec un mur, arrête de me prendre la tête) ; et incapables de se décider (je me dispute avec elle [son ex, j'imagine], je lui dis bon, ben on rompt ?, et elle non, mais non…, et puis deux semaines après, finalement, oui : ben merci la perte de temps). Apparemment, donc, le temps passé en couple était une perte de temps : la vie de célibataire, par contre, semblait avoir beaucoup d'attraits à ses yeux : soirées avec ses potes, pas de prise de tête, et pour ça, y'a la branlette et les putes (je ne sais plus comment il disait). Mais surtout, la possibilité d'humilier les femmes (maintenant j'ai plus aucun respect pour elles) qui, indubitalement, ne manqueraient pas de le courtiser en masse, en leur disant non, pas moyen.

J'hésitais entre le rire et la pitié, et dans ce cas, pour lui ou pour cette fameuse copine.

[#] OK, au début, je les ai surtout remarqués parce que celui qui écoutait était joli à regarder.

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(vendredi)

Fragment littéraire gratuit #128 (un retour)

Là-haut, sur la colline !Regardez !Ce n'est pas possible ? Ce sont eux… Ce sont vraiment eux !

Le cri des lamentations était remplacé par les exclamations, courant d'homme en homme, attirant l'attention sur les deux personnages qui venaient d'apparaître. Ceux-ci marquèrent une pause, comme pour prendre la mesure de la situation.

Éclairé de face à la fois par les flammes de l'incendie et par le rougeoiement de l'aurore, et de dos par la pleine lune qui se couchait derrière ses cheveux blancs, le vieillard avait la figure sévère et bienveillante d'un dieu tutélaire. Il attrapa et leva lentement en l'air la main de la jeune fille qui l'accompagnait. Le diadème au front de celle-ci ne laissait aucun doute sur leur identité.

Ardemond est revenu !Ce sont Invar et Ardemond !La princesse est de retour !

Quelques minutes plus tard, alors que je renouvelais mon serment, le magicien murmura à mon oreille, mystérieux comme à son habitude :

Trois promesses, un féal, un félon, une princesse et un esclave. Les pièces sont joliment disposées, n'est-ce pas ? Vous me pardonnerez, j'espère, mon arrivée peut-être bien théâtrale, mais le monde entier est une scène, et un peu de théâtre bien placé peut faire plus que beaucoup de magie. Il est temps, maintenant, que vous montriez votre courage.

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(lundi)

Fragment littéraire gratuit #127 (journal d'un fou)

11 janvier. • Nouvelle rencontre avec le Dr Taub, et toujours la même question : pensez-vous que ces choses que vous racontez vous soient vraiment arrivées ? — et toujours la même réponse : dans cet univers, non, elles sont le fruit de mon imagination ; dans cet univers. Je le répéterai autant de fois qu'il le faudra, et peu importe qu'elle me croie fou : oui, je suis fou, mais je préfère le rôle de ce fou que l'on soigne plutôt que celui du souverain déchu que l'usurpateur m'a condamné à être.

14 janvier. • Tenter d'expliquer la damnatio memoriæ qui est mon supplice. Comment le pourrais-je ? Ces hommes ignorent tout de l'Empire sur lequel j'ai régné et dont je suis à jamais banni. Dans cet univers, l'Alliance cycladéenne n'a pas eu lieu. L'humanité tout entière réduite à quelques milliards d'individus et confinée à une seule planète ! — ma prison désormais. Je sais assez à son sujet : ce corps où ma conscience est exilée a appris ce qu'il me fallait sur ce monde et sur sa pitoyable petite histoire, ses querelles insignifiantes de tribus primitives. Ils ne me comprendront pas, eux qui méconnaissent leur Empereur.

18 janvier. • Le Dr Taub veut que je lui parle de l'usurpateur. Elle pense que c'est là la clé de ma psychose. Comment donner la mesure de cette trahison ? L'usurpateur m'a tout volé. J'ai connu les délices de la Planète dorée, me voici dans ce taudis où je ne suis plus personne. Ils m'ont aussi retiré Aquila… Aquila, mon amour, à qui on ne m'a pas même permis de faire un adieu, te reverrai-je jamais ? S'ils te réservent le même sort, puis-je espérer te retrouver ici ? Ou ton tombeau sera-t-il différent du mien ? Qui me le dira ?

Dans le même temps qu'ils me privaient de mon empire, ils privaient mes sujets de leur souverain. J'ai sans doute commis des erreurs, je n'ai pas été parfait (une affirmation qui est permise dans ce monde !), mais mon peuple ne méritait pas le joug cruel qui va s'abattre sur lui. Comment ma damnatio leur apparaît-elle ? Sans doute ce qui reste de mon corps là-bas (si on ne l'achève pas) est-il aussi une sorte de fou : un pantin que plus aucun esprit n'anime. Je poserai cette question au médecin, peut-être est-elle capable de m'éclairer.

21 janvier. • Et si Dr Taub était un allié de l'usurpateur ?…

Inspiré entre autres choses (toutes mes excuses à Gogol et aux romains, notamment) d'une étrange histoire, censément vraie : The Jet-Propelled Couch (2e partie ici, quelques précisions là).

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(samedi)

The Third & the Seventh

Ce petit très zen, est en train de faire le tour du 'net (normalement je n'aime pas trop relayer ce genre de phénomènes, mais il faut savoir faire des exceptions). Voici donc The Third & the Seventh, treize minutes de pure poésie semble-t-il entièrement réalisées en images de synthèse (mais on aurait du mal à s'en rendre compte !).

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(vendredi)

Predictably Irrational

Dan Ariely est professeur d'économie comportementale à Duke University, c'est-à-dire quelque chose entre un économiste classique et un psychologue. J'avais entendu parler de lui par ses exposés à TED ; sa spécialité est de montrer, d'analyser et d'expliquer la tendance que nous avons tous à nous comporter de façon irrationnelle quand il s'agit de faire des choix — et de façon non seulement irrationnelle, mais prévisiblement irrationnelle, c'est-à-dire qu'il y a tout un tas de motifs d'erreurs cognitives qui se répètent chez la majorité des gens.

Un exemple d'erreur cognitive que j'ai appris par lui et qui m'avait frappé est le phénomène suivant. On propose à un groupe de gens tirés au hasard le choix entre deux offres, A et B, qui ne sont pas évidentes à comparer ; et à un autre groupe de gens on propose le même choix, mais en ajoutant une troisième option, A′, qui est très semblable à A mais évidemment moins bonne (par exemple il pourrait s'agir d'une offre strictement incluse dans celle de A mais pour exactement au même prix). Personne n'a rationnellement intérêt à choisir A′, et de fait, les gens ne le choisissent pas, mais ce n'est pas là le phénomène intéressant. Le phénomène qui se produit dans beaucoup de situations est que le second groupe (celui qui a le choix entre A, B ou A′ avec A′ moins bon que A) opte plus pour A par rapport au premier groupe (celui qui n'avait pas l'option A′). Autrement dit, la simple existence du choix A′, même si personne ne le prend, rend le choix A plus attirant ; si on était rationnels, l'existence de A′ ne devrait pas jouer sur la comparaison entre A et B, celle-ci ne devant faire intervenir que les mérites respectifs de ces derniers. Le phénomène n'a pas lieu systématiquement ou dans tous les domaines, mais la tendance est générale, et Dan Ariely l'illustre dans des situations assez différentes.

Il s'agit d'un des exemples qu'il évoque dans ses exposés à TED, mais qu'il détaille aussi dans son livre, Predictably Irrational[#], que j'ai récemment fini de lire. C'est un ouvrage que j'ai trouvé très intéressant : il est construit sur autant de chapitres que de types d'erreurs de jugement qu'il illustre, à chaque fois, par un certain nombre d'expériences, et qu'il tente de généraliser à des phénomènes plus larges, comme des phénomènes de société. On peut lui reprocher de ne pas donner systématiquement les conditions exactes de ses expériences, ou de ne pas toujours indiquer si elles ont été reproduites et confirmées par d'autres, et évidemment on peut s'interroger sur le fait que ses généralisations soient parfois hâtives, mais pour un ouvrage de vulgarisation, j'ai trouvé ça très bien. Dan Ariely tient aussi un blog dans lequel il rapporte un certain nombre d'expériences ou de réflexions de ce genre.

Dans un genre semblable, il y a Dan Gilbert (est-ce que tous les chercheurs sur le sujet s'appellent Dan ? ☺️), dont j'ai également beaucoup aimé les exposés à TED. Lui est psychologue (à Harvard), donc a priori moins concerné par l'aspect économique, plutôt par (par exemple) notre relation à notre moi passé ou futur, mais il signale également dans ces exposés quelques réactions irrationnelles que nous avons fortement tendance à avoir. La suivante m'avait amusé. Considérons deux situations : situation 1, je vais au théâtre, j'ai en poche un billet de banque de 20€ et un billet pour la pièce, que j'ai déjà acheté, et qui m'a aussi coûté 20€ ; mais juste en arrivant, mon billet de théâtre tombe de ma poche dans une bouche d'égout où je n'ai aucune chance de le récupérer : vais-je choisir d'en acheter un autre pour aller quand même voir la pièce ? Situation 2 : presque identique, je vais au théâtre, mais cette fois je n'ai pas encore acheté ma place, j'ai en poche deux billets de banque de 20€ ; mais juste en arrivant, un des deux billets de banque tombe de ma poche dans une bouche d'égout où je n'ai aucune chance de le récupérer : vais-je acheter un billet pour voir la pièce ? Dans la situation 2, a priori, on répond oui : on est venu pour voir la pièce, le fait qu'on ait perdu 20€ ne change pas le fait qu'on veut voir cette pièce, donc on achète un billet. Dans la situation 1, souvent, les gens répondent non, au motif qu'on a déjà acheté un billet, on ne va pas en acheter un deuxième même si le premier s'est perdu. Mais quand on y pense, c'est idiot, on est ramené exactement à la même situation que dans le 2, et la décision à prendre ne doit pas dépendre du passé : on est devant le théâtre, avec 20€ en poche, on a envie de voir la pièce, il se trouve qu'on a perdu un morceau de papier qui valait 20€ mais peu importe puisqu'il est perdu dans un égout. Pourtant les gens réagissent souvent différemment[#2].

Cela nous force à remettre un peu en question les principes de l'économie classique (non-comportementale), qui supposent à un certain niveau que les gens se comportent de façon rationnelle, qu'ils ont des désirs (des fonctions d'utilité) bien définies et se reflétant dans les choix qu'ils font selon un certain ordre de préférence… ce genre d'hypothèses. Dan Ariely parle un peu de la façon dont le caractère simplifié (voire carrément faux) de ces hypothèses peut conduire à des conclusions économiques erronées — et, actualité oblige, dans l'édition[#3] que j'ai de son livre il explique notamment son avis sur la crise des subprimes et des conséquences qui ont suivi. Son but n'est pas d'envoyer à la poubelle l'économie classique, mais d'en explorer les limites, et d'essayer de décrire les phénomènes qui peuvent apparaître quand on s'approche de ces limites.

Je ne sais pas comment les économistes classiques réagissent aux mises en gardes de l'économie comportementale ; le tout petit échantillon (totalement non représentatif) que j'ai sous la main a une réaction du type certes, c'est amusant, mais bon, c'est très empirique, et pour le genre de choses qui me concernent, ces phénomènes ne sont pas importants, et de continuer, dans toute discussion politique ou sociétale, à utiliser abondamment comme axiome que les gens se comportent rationnellement par rapport à une relation de préférence. Quand on insiste que, non, vraiment, les gens ne sont pas rationnels, des réactions possibles sont : (A) ce n'est pas important, ce sont des effets individuels qui n'existent plus à l'échelle collective (pur acte de foi), ou bien (B) ce n'est pas grave, faisons quand même comme s'ils l'étaient, parce que c'est plus simple, ou pour « récompenser » les gens rationnels, voire, pour favoriser la survie des mèmes rationnels dans la société (une forme d'eumémisme ? en tout cas, ça devient n'importe quoi). Ou parfois avec des arguments que j'appellerai ad basiursum[#4], consistant à prétendre que l'interlocuteur (=moi, en l'occurrence) rêve d'un monde de bisounours où les irrationalités des gens seraient gentiment prises en compte, et caricaturer sa position. Ce genre de réaction de mauvaise foi (mais je répète que je n'ai qu'un échantillon microsocopique d'environ 1.618 personne) me fait un peu penser à celle d'un physicien newtonien qui refuserait de prendre en compte les corrections relativistes parce que c'est trop difficile à calculer, ou ça ne doit pas exister à l'échelle de l'orbite de Mercure, ou encore les planètes apprendront à se comporter selon les lois de Newton si on calcule leurs trajectoires comme ça…

[#] Le mot predictably me gêne : j'ai toujours envie de l'écrire avec un ‘i’ à la place du ‘a’, à cause du français prédictible (anglicisme qui, d'ailleurs, d'après les puristes, n'est pas du français : il faut dire prévisible ; mais si c'est vraiment un anglicisme, on se demande pourquoi ce n'est pas prédictable).

[#2] Quelque chose de semblable à l'expérience de pensée m'est arrivé, d'ailleurs. Je venais d'acheter un livre de maths très cher, après avoir beaucoup hésité à savoir si je voulais vraiment l'acheter ou non, et le jour même je l'ai perdu (ou plutôt, on me l'a volé — je l'avais oublié dans une salle de l'ENS et il avait disparu une heure plus tard, et mes mails à tout le département demandant si personne ne l'avait vu n'ont rien donné). Je suis donc allé le racheter : j'ai dû combattre la partie irationnelle en moi qui me disait c'est trop cher ! 150€ ça t'a beaucoup fait hésiter, alors 300€ c'est complètement exorbitant — réaction complètement stupide, car j'avais perdu ces 150€, peu importe qu'ils aient pris la forme d'un livre, mais puisque j'avais finalement décidé que je voulais ce livre à ce prix, je devais logiquement être prêt à faire la même dépense dans les mêmes conditions.

[#3] J'ai l'édition d'ISBN 978-0-00-725653-2. Bizarrement, Amazon.com ne la connaît pas, mais Amazon.fr si. Ça doit être une édition britannique plutôt que nord-américaine.

[#4] Basiursus est évidemment le mot latin désignant un bisounours.

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(mardi)

Avatar

Comme je ne sais combien de millions de gens, je suis allé voir le film qui rapporte des milliards. Et comme je ne sais combien de milliers de blogueurs, il faut bien que j'en dise ce que j'en ai pensé.

Je l'ai vu en 2D, un peu par hasard, mais ce n'est pas pour me déplaire parce que les lunettes 3D me fatiguent vite, alors je ne crois pas que je les aurais supportées 160 minutes. J'ai l'impression d'arriver à très bien imaginer ce que ça doit donner en 3D, et je ne crois pas avoir perdu énormément (je veux bien croire ceux qui affirment que c'est beaucoup mieux que ce qui s'est fait jusqu'à présent en la matière, mais même comme ça je doute que ce soit vraiment autre chose qu'un gimmick). La beauté des images est dans les textures, les couleurs (notamment la fluorescence la nuit), les magnifiques paysages très miyazakiens[#], bref, la photographie.

Le scénario est d'une platitude extraordinaire : vous prenez Pocahontas ou Danse avec les loups (voire Lawrence d'Arabie, mais édulcoré) et une petite pincée de Starship Troopers, vous ajoutez la mièvrerie des passages sur Endor dans Le Retour du Jedi, un peu de mythe du bon sauvage et une grosse rasade d'écologisme, vous mélangez bien fort, et vous obtenez Avatar. Aucun risque n'a été pris, aucun personnage n'a de profondeur psychologique, le gentil est vraiment gentil et son parcours initiatique est sans surprise, le méchant est vraiment méchant (ou con et buté à tout le moins) et rien ne vient le sauver ou donner un autre son de cloche, le conflit est mené de façon frontale, sans trahison ou autre subtilité. Tout est cousu de fil blanc et se voit venir quinze minutes à l'avance. La morale est simple, voire simpliste : la gentille tribu gagne à la fin contre les méchants envahisseurs (je spoile autant que si je vous révèle que le pape est catholique).

De même, il va de soi que les extraterrestres sont aussi humains que ce que peut imaginer un enfant à qui on parlerait d'hommes de l'espace : à part qu'ils sont bleus et un peu plus grands, qu'ils ont une queue et qu'ils communiquent (vraiment) avec la nature, ils sont exactement comme vous et moi[#2], ils ont jusqu'au même nombre et au même arrangement des doigts de pieds, ils marchent comme nous, ils voient comme nous, ils entendent comme nous, ils parlent comme nous (une langue à peine exotique, et en tout cas assurément prononçable, même pas avec des voix qui sembleraient bizarres), ils pleurent quand ils sont tristes et ils ont une organisation sociale juste un peu tribale, mais sans aucune originalité et surtout rien qui pourrait nous choquer ou les faire paraître moins gentils. Bien sûr, comme dans absolument tous les films de science-fiction hollywoodiens, les extra-terrestres ont de l'ADN, et on peut apparemment le mélanger au nôtre (ben voyons). Les bestioles sur la planète sont vaguement des dinosaures passées à la peinture des images de synthèse, parfois avec des changements triviaux (six pattes sur les chevaux) ; la plupart des plantes ressemblent à s'y méprendre aux nôtres (et pour commencer, elles sont généralement vertes). S'il y avait la moindre prétention scientifique, on grincerait des dents à tel point c'est ridicule : heureusement, il n'y en a pas. De toute façon, s'il y avait la moindre once de réalisme scientifique, le héros n'arriverait jamais à empathiser en quelques mois avec les créatures en face de lui, et le spectateur du film en quelques heures encore moins : le réalisateur a donc bien eu raison dans ses choix. Au moins, les règles de son monde, pour absurdes qu'elles soient scientifiquement, sont cohérentes avec elles-mêmes : je n'ai pas trouvé de bizarrerie interne dans l'histoire.

Je ne pense pas que ce soit une critique que de dire tout ce que je viens de dire. Certes, je regrette un peu : je regrette qu'on n'ait pas donné au méchant une personnalité un peu tourmentée, et je regrette qu'on n'ait pas montré au moins une chance à la diplomatie ou au compromis entre les deux parties, ce qui aurait permis au scénario d'être un peu moins plat ; je regrette aussi que les extra-terrestres soient confinés au rôle du gentil sauvage au savoir ancestral, sans jamais faire preuve d'ingéniosité inattendue. Mais si on va voir Avatar pour son scénario, c'est probablement qu'on s'est trompé de salle. Il faut le voir pour le graphisme, et pour entendre une histoire qu'on connaît déjà : une sorte de mythe, parfaitement prévisible, mais néanmoins émouvant, et raconté de façon à faire éclater cette émotion. Car c'est justement parce que le scénario est simple et linéaire qu'il est touchant. J'en ai eu, en tout cas, les larmes aux yeux (mais j'avoue que je suis bon public). Je rejoins donc au final les critiques favorables que le film a reçues : il faut juste savoir pour quoi on va le voir. Couper un peu son cerveau, mais ouvrir grands ses yeux et son cœur.

[#] Les montagnes qui flottent dans l'air, ça fait vraiment bipper mes neurones à Miyazaki.

[#2] Enfin, je n'en sais rien, peut-être que mon blog est lu sur la galaxie d'Andromède ou bien par des IA qui ont émergé spontanément dans Internet.

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(dimanche)

Le petit bonnet rouge

Il fut un temps où je parlais plus souvent sur ce blog de mes expérimentations vestimentaires (genre, ou ), c'est-à-dire ma façon de mélanger n'importe quoi jusqu'à satisfaire — en me regardant dans un miroir — mon attirance instinctive pour la provocation involontaire (ou pour le ridicule), mon sens esthétique d'ado post-attardé et décalé, ou mon goût de chiottes notoire en matière de garçons (le poussinet ne doit pas se sentir vexé, ce n'est pas systématique).

Récemment je me suis acheté le livre Dictionnaire du look (Une nouvelle science du jeune) de Géraldine de Margerie et Olivier Marty (éditions Laffont) (présenté ici) : c'est un inventaire assez éclectique et disparate de tout un tas de looks de djeunz ou de moins djeunz (bcbg, bling-bling, bobo, caillera, fluokid, metalleux, modasse, punk à chien, skateur, teuffeur…), tentant parfois de présenter les modes de vies de tribus urbaines. Ce n'est pas très sérieux, mais c'est justement rigolo parce que ça ne se prend pas au sérieux. Par contre, on peut regretter que le choix des looks traités manque un peu de cohérence ou d'exhaustivité, au moins superficielle (pourquoi, par exemple, ne pas avoir consacré un chapitre aux gothiques alors qu'il y en a un pour les plus spécifiques gothic lolitas ?).

Mais j'ai au moins apprécié qu'ils proposent un nom pour un look dont je me suis souvent demandé comment l'appeler : ces jeunes dreadlockés bohême, vaguement néohippies ou cirqueux, en pantalon bouffant, vieux pull, keffieh et parfois bonnet péruvien, qu'on imagine facilement arpentant, pétard à la bouche, les couloirs d'un hypothétique cours de médiation culturelle à Paris VIII. (Mon poussinet les appelle les je-vais-sauver-le-monde.) Le dictionnaire en question les nomme les Jah-Jah : même si une recherche Google images ne confirme pas trop la popularité du terme, il a le mérite d'être assez inambigu.

Mon look actuel n'est pas recensé, évidemment. Pour ceux qui veulent l'imaginer (non, je n'ai pas de photos, il faudra que je propose au poussinet d'en prendre), je peux le décrire façon magazine de mode et avec des liens[#] puisque j'ai quasiment tout acheté en ligne. Le Ruxor, donc, porte un hoodie DC Shoes noir avec logo blanc au ventre[#2], un pendentif dent en acier Oxbow (au-dessus du sweat), un blouson en cuir Schott[#3] à capuche avec logo au dos, un treillis camouflage de surplus[#4] militaire (armée française) et ceinture assortie (ou bien, certains jours, un jean baggy non marqué), des baskets « street » DC Shoes ou Rip Curl[#5] et des mitaines en cuir portées sur des sous-gants en soie noirs Go Sport[#6][#7]. Les tee-shirts (généralement plusieurs épaisseurs, le Ruxor étant frileux) varient évidemment beaucoup. Mais l'accessoire vraiment unique pour parfaire la Ruxor touch et s'habiller en rouge et noir, accessoire fort approprié en cette saison de saturnales, c'est le bonnet rouge (mais alors vraiment rouge vif, uni : en fait, c'est un bonnet de pompier[#8]), à porter bien enfoncé sur la tête (en laissant juste dépasser une ou deux mèches dans le cou), et avec un air gentiment niais. Le bonnet rouge permet qu'on me repère de loin (pratique quand le poussinet s'est attardé pour faire une bêtise, et se demande où je suis passé), ou d'attirer le regard. D'ailleurs, hier, à la Fnac, je me suis fait draguer[#9] par un djeunz habillé assez comme moi (treillis, chaussures de skate, hoodie sur les épaules et pendentif au cou) mais qui n'avait pas un joli bonnet rouge comme le mien : je suis sûr que c'est ça qui l'a rendu envieux !

[#] Liens qui seront inévitablement cassés dans trois mois, puisque les gens qui tiennent des sites marchands tels que ceux-ci n'ont pas encore compris l'avantage qu'il pouvait y avoir pour eux à ne pas casser leurs URL à chaque refonte du site.

[#2] Le logo me vaut d'ailleurs un certain nombre de questions (les gens qui ne connaissent pas lisent souvent DG et demandent par exemple si c'est Dolce & Gabbana : décidément, non, par contre, il y a une ressemblance indéniable avec le logo Chanel).

[#3] Tiens, il est nettement plus cher que quand je l'ai acheté, celui-là.

[#4] Ce n'est pas par ce site-là que je l'ai acheté, mais le principe d'un article réglementaire doit être qu'il ne varie pas beaucoup.

[#5] Ce modèle précis n'a plus l'air d'exister.

[#6] Article que je renonce à trouver sur le site Web de la marque Go Sport, vu combien celui-ci est mal organisé (les articles ne semblent trouvables que dans le rayon d'un certain — et unique — sport, et je ne sais pas quel serait le sport dont des sous-gants en soie seraient un accessoire).

[#7] Je suis content de la trouvaille de porter des sous-gants en soie sous des mitaines : quand il ne fait pas atrocement froid, c'est un bon compromis pour se protéger les mains tout en gardant une certaine dextérité et sensibilité digitale.

[#8] Enfin, paraît-il ! Je n'ai en fait jamais vu un pompier porter un pareil bonnet. Mais au moins c'est la couleur emblématique rutilante.

[#9] Le poussinet et moi ne nous privons pas de mater copieusement (et de nous signaler mutuellement) les jolis garçons que nous croisons, et il y a sans doute du vrai dans l'idée que les homos sont sans doute les seuls à le remarquer — ou en tout cas, à comprendre pourquoi on les regarde. Le mec en question, j'ai commencé à le regarder par les pieds (parce que je regardais d'abord des livres situés au niveau du sol), j'ai remonté le regard parce que le look me plaisait, et le temps que j'arrive à la tête et que je m'aperçoive qu'il n'était pas mal du tout, il avait bien vu que je le zyeutais : il me souriait copieusement, et il a engagé la conversation. Ce sur quoi j'ai fui dare-dare, parce que (malgré mon bonnet rouge) je suis timide comme un écureuil bleu. Quand je lui raconte ce genre de choses, mon poussinet rigole gentiment de moi.

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(vendredi)

Comment nommer les décennies

On parle des années '20, des années '30, et ainsi de suite jusqu'aux années '90 : mais quel nom faut-il donner à la décennie qui vient de se finir[#] (si on les appelle les années '00, comment faut-il prononcer cela ? ou faut-il dire les années 2000 ?). En anglais, des gens ont proposé un nom sympathique : après les seventies, les eighties et les nineties, non venons de finir les naughties ! (Mais la question se repose pour les dix prochaines années.)

Une autre question, c'est comment prononcer le nom des années : pour lire 2010, quasiment tout le monde dit deux mil[le] dix en français, et two thousand [and] ten en anglais. Mais 1810, s'agissant de l'année, se prononce dix-huit cent dix et eighteen [hundred [and]] ten : du coup, 2010 devrait être vingt cent dix et twenty [hundred [and]] ten. Je pense que cette façon de nommer sera effectivement ce qui prendra le pas en anglais : autant il n'est pas harmonieux de lire 2009 comme twenty o'nine, autant 2013 se lit agréablement twenty thirteen. En français, à cause de la confusion avec Vincent, je pense que ce n'est pas ce qu'on dira.

Mais mon poussinet interrompt ces considérations onomastiques passionnantes pour me sommer de me coucher.

[#] Bon, si on convient, comme il est logique de le faire dans notre calendrier, que le XXIe siècle et le 3e millénaire commençaient le 1er janvier 2001, il faut aussi considérer que la 201e décennie commençait ce même jour, et se finit donc à la fin du 31 décembre 2010 ; du coup, en étant maniaque, il reste encore (presque) un an à cette décennie. J'avais essayé d'expliquer ça à ma prof d'histoire de 4e qui, en janvier 1990, nous avait souhaité non seulement une bonne année mais même une bonne décennie : elle m'avait dit d'arrêter de faire le malin (et si tu ne veux pas, je ne te souhaite rien du tout !). Elle avait raison, Mme Fernandez : ce qu'on souhaitait en 1990, ce n'était pas la 200e décennie du calendrier (qui commencerait le 1er janvier 1991), mais la décennie des années '90, qu'on a bien le droit de définir. Après tout, chaque instant commence une décennie qui termine précisément dix ans plus tard…

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