David Madore's WebLog: Avatar

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(mardi)

Avatar

Comme je ne sais combien de millions de gens, je suis allé voir le film qui rapporte des milliards. Et comme je ne sais combien de milliers de blogueurs, il faut bien que j'en dise ce que j'en ai pensé.

Je l'ai vu en 2D, un peu par hasard, mais ce n'est pas pour me déplaire parce que les lunettes 3D me fatiguent vite, alors je ne crois pas que je les aurais supportées 160 minutes. J'ai l'impression d'arriver à très bien imaginer ce que ça doit donner en 3D, et je ne crois pas avoir perdu énormément (je veux bien croire ceux qui affirment que c'est beaucoup mieux que ce qui s'est fait jusqu'à présent en la matière, mais même comme ça je doute que ce soit vraiment autre chose qu'un gimmick). La beauté des images est dans les textures, les couleurs (notamment la fluorescence la nuit), les magnifiques paysages très miyazakiens[#], bref, la photographie.

Le scénario est d'une platitude extraordinaire : vous prenez Pocahontas ou Danse avec les loups (voire Lawrence d'Arabie, mais édulcoré) et une petite pincée de Starship Troopers, vous ajoutez la mièvrerie des passages sur Endor dans Le Retour du Jedi, un peu de mythe du bon sauvage et une grosse rasade d'écologisme, vous mélangez bien fort, et vous obtenez Avatar. Aucun risque n'a été pris, aucun personnage n'a de profondeur psychologique, le gentil est vraiment gentil et son parcours initiatique est sans surprise, le méchant est vraiment méchant (ou con et buté à tout le moins) et rien ne vient le sauver ou donner un autre son de cloche, le conflit est mené de façon frontale, sans trahison ou autre subtilité. Tout est cousu de fil blanc et se voit venir quinze minutes à l'avance. La morale est simple, voire simpliste : la gentille tribu gagne à la fin contre les méchants envahisseurs (je spoile autant que si je vous révèle que le pape est catholique).

De même, il va de soi que les extraterrestres sont aussi humains que ce que peut imaginer un enfant à qui on parlerait d'hommes de l'espace : à part qu'ils sont bleus et un peu plus grands, qu'ils ont une queue et qu'ils communiquent (vraiment) avec la nature, ils sont exactement comme vous et moi[#2], ils ont jusqu'au même nombre et au même arrangement des doigts de pieds, ils marchent comme nous, ils voient comme nous, ils entendent comme nous, ils parlent comme nous (une langue à peine exotique, et en tout cas assurément prononçable, même pas avec des voix qui sembleraient bizarres), ils pleurent quand ils sont tristes et ils ont une organisation sociale juste un peu tribale, mais sans aucune originalité et surtout rien qui pourrait nous choquer ou les faire paraître moins gentils. Bien sûr, comme dans absolument tous les films de science-fiction hollywoodiens, les extra-terrestres ont de l'ADN, et on peut apparemment le mélanger au nôtre (ben voyons). Les bestioles sur la planète sont vaguement des dinosaures passées à la peinture des images de synthèse, parfois avec des changements triviaux (six pattes sur les chevaux) ; la plupart des plantes ressemblent à s'y méprendre aux nôtres (et pour commencer, elles sont généralement vertes). S'il y avait la moindre prétention scientifique, on grincerait des dents à tel point c'est ridicule : heureusement, il n'y en a pas. De toute façon, s'il y avait la moindre once de réalisme scientifique, le héros n'arriverait jamais à empathiser en quelques mois avec les créatures en face de lui, et le spectateur du film en quelques heures encore moins : le réalisateur a donc bien eu raison dans ses choix. Au moins, les règles de son monde, pour absurdes qu'elles soient scientifiquement, sont cohérentes avec elles-mêmes : je n'ai pas trouvé de bizarrerie interne dans l'histoire.

Je ne pense pas que ce soit une critique que de dire tout ce que je viens de dire. Certes, je regrette un peu : je regrette qu'on n'ait pas donné au méchant une personnalité un peu tourmentée, et je regrette qu'on n'ait pas montré au moins une chance à la diplomatie ou au compromis entre les deux parties, ce qui aurait permis au scénario d'être un peu moins plat ; je regrette aussi que les extra-terrestres soient confinés au rôle du gentil sauvage au savoir ancestral, sans jamais faire preuve d'ingéniosité inattendue. Mais si on va voir Avatar pour son scénario, c'est probablement qu'on s'est trompé de salle. Il faut le voir pour le graphisme, et pour entendre une histoire qu'on connaît déjà : une sorte de mythe, parfaitement prévisible, mais néanmoins émouvant, et raconté de façon à faire éclater cette émotion. Car c'est justement parce que le scénario est simple et linéaire qu'il est touchant. J'en ai eu, en tout cas, les larmes aux yeux (mais j'avoue que je suis bon public). Je rejoins donc au final les critiques favorables que le film a reçues : il faut juste savoir pour quoi on va le voir. Couper un peu son cerveau, mais ouvrir grands ses yeux et son cœur.

[#] Les montagnes qui flottent dans l'air, ça fait vraiment bipper mes neurones à Miyazaki.

[#2] Enfin, je n'en sais rien, peut-être que mon blog est lu sur la galaxie d'Andromède ou bien par des IA qui ont émergé spontanément dans Internet.

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