Quand je suis en public, j'aime bien écouter les conversations des gens qui m'entourent (et parfois me demander si je dois y glisser un mot) : c'est intéressant pour savoir comment les gens pensent et pouvoir faire de la sociologie de café du commerce.
L'autre jour j'étais attablé chez une enseigne Pomme de pain (où je vais assez souvent quand j'ai laissé passer l'heure de la cantine) quand j'ai remarqué[#] deux jeunes, la vingtaine probablement tout juste passée, habillés légèrement-racaille-mais-guère, qui parlaient de filles (enfin, l'un parlait, et l'autre se contentait surtout d'approuver et de rigoler bêtement). J'ai donc dressé mon oreille de sociologue de comptoir, ce qui n'était d'ailleurs pas nécessaire parce qu'ils discutaient assez fort.
L'intensité de la misogynie qu'ils affichaient m'a impressionné.
Celui qui parlait le plus était, si j'ai bien compris, en instance de
rupture avec sa copine, et même si cette rupture n'était pas encore
certaine (y'a encore des sentiments
, disait-il — ils
devaient être bien cachés), il attendait avec impatience la vie de
célibataire qui l'attendrait après. Les filles, il les voyait comme
des créatures manipulatrices (dès que tu dis
), qui n'en ont aux hommes qu'après leur
portefeuille (je t'aime
,
c'est fini, t'es foutuquand elles font style qu'elles ont de l'affection,
en fait c'est pour te dire, tu m'achètes ça, tu m'achètes ça ; mais
moi, non, si je t'achète un truc, c'est pour faire plaisir, c'est moi
qui décide
) ; toujours fausses et mauvaises (il faut toujours
qu'elles cherchent le conflit, moi j'en ai marre, je lui dis t'as qu'à
te disputer avec un mur, arrête de me prendre la tête
) ; et
incapables de se décider (je me dispute avec elle [son ex,
j'imagine], je lui dis
).
Apparemment, donc, le temps passé en couple était une perte de temps :
la vie de célibataire, par contre, semblait avoir beaucoup d'attraits
à ses yeux : soirées avec ses potes, pas de prise de tête, et
pour ça, y'a la branlette et les putes (je ne sais plus comment
il disait). Mais surtout, la possibilité d'humilier les femmes
(bon, ben on rompt ?
, et elle non,
mais non…
, et puis deux semaines après,
finalement, oui
: ben merci la perte de tempsmaintenant j'ai plus aucun respect pour elles
) qui,
indubitalement, ne manqueraient pas de le courtiser en masse, en leur
disant non, pas moyen
.
J'hésitais entre le rire et la pitié, et dans ce cas, pour lui ou pour cette fameuse copine.
[#] OK, au début, je les ai surtout remarqués parce que celui qui écoutait était joli à regarder.