David Madore's WebLog: À quoi sert la démocratie ?

[Index of all entries / Index de toutes les entréesLatest entries / Dernières entréesXML (RSS 1.0) • Recent comments / Commentaires récents]

↓Entry #1712 [older| permalink|newer] / ↓Entrée #1712 [précédente| permalien|suivante] ↓

(dimanche)

À quoi sert la démocratie ?

No one pretends that democracy is perfect or all-wise. Indeed, it has been said that democracy is the worst form of government except all those other forms that have been tried from time to time. — Winston Churchill (discours à la Chambre des communes, 1947-11-11)

À part dans la citation ci-dessus, qui exprime très bien quelle est ma position sur la démocratie, quand les gens (par exemple, mais pas uniquement, des hommes politiques) s'expriment sur la question, il domine une sorte de mystique sur le rôle ou le but de la démocratie : une mystique selon laquelle la majorité, parce qu'elle est majorité, aurait forcément raison ou ne pourrait pas être tyrannique ; mystique dans laquelle je ne me reconnais pas.

Cette idée que je qualifie de mystique est celle selon laquelle la démocratie serait une fin en soi, une chose bonne pour elle-même, un idéal à atteindre, quelque chose de ce genre ; et, par conséquent, que le peuple, ou la majorité des citoyens, non seulement a un avis bien défini et mesurable sans ambiguïté par des élections, mais que cet avis est, de plus, infaillible. L'idée à laquelle je veux l'opposer (et que je revendique), une idée que j'appellerai plus pragmatique de la démocratie, est que cette dernière est simplement un moyen, un moyen imparfait et incomplet mais qui est pourtant le meilleur connu, pour construire un régime juste, repectueux des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Un moyen qui consiste essentiellement à espérer que de tenir des élections régulières empêchera des gouvernements trop pourris ou corrompus d'être portés au pouvoir ou de concentrer trop de pouvoir entre leurs mains, et finira par chasser ceux qui le sont ou le font[#].

Ce que sont exactement les droits fondamentaux qu'il faut respecter est, évidemment, un problème épineux, parce qu'ils ne sont pas très exactement définis : ils ne sont qu'esquissés de façon générale par des textes fondamentaux (dont la portée juridique est soit directement applicable soit essentiellement symbolique) — la Déclaration universelle de 1958, aux États-Unis les dix premier amendements de la Constitution, en France la Déclaration de 1789 et le préambule de la Constitution de 1946, dans l'Union européenne la charte des droits fondamentaux de l'UE, en Europe de façon plus générale la Convention européenne des droits de l'Homme. Mais ce sont les cours de justice chargées d'appliquer ces textes ou la loi en général qui dégagent progressivement ce qui, dans l'acquis du droit, constitue un droit fondamental. Il est normal[#2] que la liste des droits de l'Homme ne puisse pas être définie complètement et exhaustivement, car le problème est complexe, comme il est normal qu'on ne puisse pas définir exhaustivement ce qu'est la notion philosophique du Bien ou de la morale. Ceci soulève au moins deux observations : on fait défendre et délimiter les droits fondamentaux par des juges, et ces juges ne sont pas élus (au contraire, ils ont souvent un très grand degré d'indépendance).

Certains feront certainement remarquer que les droits de l'Homme incluent de toute façon l'exigence d'un système démocratique : pour prendre la formulation de la Déclaration de '58, c'est son article 21 qui affirme que : (1) Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis. (2) Toute personne a droit à accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays. (3) La volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics ; cette volonté doit s'exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté du vote. Certes, mais je ne vois pas dans cette formulation l'idée que l'expression de la volonté du peuple est infaillible ou souveraine contre autre considération (seulement qu'elle est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics) ; et, de fait, je ne crois pas qu'on puisse décemment respecter les libertés fondamentales sans aucune mesure de démocratie. Ce que je rejette, c'est l'idée que parce que la démocratie est une bonne chose il faut la pousser à son extrême.

Mais le point important me semble surtout être l'alinéa 2 de cet article 21 : le droit fondamental de s'impliquer dans la vie politique d'un pays n'est pas celui d'être électeur, mais plutôt celui d'être éligible — c'est-à-dire de pouvoir, peut-être, un jour, devenir parlementaire, ministre ou président. Pour souligner la différence (car j'ai parfois du mal à me faire comprendre quand j'essaie de l'expliquer), faisons la comparaison avec les postes du pouvoir judiciaire. Il me semble essentiel que chacun puisse faire une carrière en droit et devenir juge dans son pays : mais pour le faire, justement, il faut faire des études, passer des concours et dans la plupart des pays démocratiques (et c'est une bonne chose), les juges ne sont pas élus, ce qui n'empêche pas que le pouvoir judiciaire soit ouvert à chacun. C'est aussi le cas de toutes sortes de fonctions à la frontière entre le technique et le politique, par exemple celui de gouverneur d'une banque centrale. On pourrait imaginer qu'il en soit de même du pouvoir législatif ou exécutif : je ne pense pas que ce soit possible en pratique (notamment en évitant de se retrouver avec un haut degré de népotisme au sommet de l'État) car il semble impossible de demander au législateur ou au gouvernement l'impartialité des juges, mais cela n'a rien d'absurde a priori ; et cela me paraît illustrer la manière dont la démocratie n'a rien de structuralement indispensable a priori à une société juste, elle est nécessaire seulement dans la pratique.

Le fait que les juges soient indépendants et non élus (tant qu'il est possible pour chacun d'espérer poursuivre cette carrière) me semble même une condition essentielle de la sauvegarde effective des droits fondamentaux, car ils peuvent être un rempart effectif contre la tyrannie de la majorité. C'est là que la thèse que je défends ici acquiert des conséquences réelles : qu'il n'y a rien de scandaleux au fait qu'un juge ou un conseil non élu (comme le Conseil constitutionnel en France) puisse faire obstacle à la volonté des représentants du peuple (typiquement, les législateurs), et donc de la majorité, en lui opposant les droits supérieurs de minorités qu'il est censé défendre. Je ne prétends pas avoir de justification profonde au fait que ce système ne tourne pas à la dictature des juges : c'est une constatation empirique que, dans la pratique, lorsqu'on confie à une cour suprême le devoir de défendre les droits fondamentaux, et qu'on lui en donne les moyens, elle le fait généralement de façon assez satisfaisante, et souvent d'autant plus satisfaisante qu'on lui donne une grande latitude pour fixer ses propres limites[#3]. On peut ensuite se demander quelle est la meilleure façon de faire fonctionner ces cours (faut-il nommer les juges à vie comme à la Cour suprême des États-Unis, ou seulement pour un terme ? faut-il prévoir un moyen de les révoquer ? faut-il leur permettre de signer leurs avis ou les rendre complètement anonymes ? faut-il admettre la publication des opinions dissidentes ?), ces questions sont très délicates et différents pays y répondent de différentes façons, mais l'idée générale est là : le fait qu'un juge (et même, dans une moindre mesure, un procureur) soit élu est peut-être plus démocratique mais néanmoins extrêmement malsain, car la Justice n'est pas l'expression de la volonté de la majorité. Au contraire, elle est souvent un contre-pouvoir à celui de la majorité.

Car la tyrannie de la majorité peut exister, et ce n'est qu'en feignant d'oublier cette évidence qu'on peut avoir de la démocratie cette image quasi mystique que je dénonce. On en trouve une analyse soigneuse, dans le cadre des États-Unis, ainsi que des forces qui la tempèrent, dans le remarquable De la démocratie en Amérique d'Alexis de Tocqueville[#4], auquel j'emprunte le résumé suivant : Je regarde comme impie et détestable cette maxime, qu'en matière de gouvernement la majorité d'un peuple a le droit de tout faire, et pourtant je place dans les volontés de la majorité l'origine de tous les pouvoirs. Suis-je en contradiction avec moi-même ? […] Quand donc je refuse d'obéir à une loi injuste, je ne dénie point à la majorité le droit de commander ; j'en appelle seulement de la souveraineté du peuple à la souveraineté du genre humain. (De la démocratie en Amérique, livre 1, deuxième partie, chapitre VII, section tyrannie de la majorité.) On ne pourrait s'exprimer plus clairement.

Le problème avec la tyrannie de la majorité est multiple : le premier d'entre eux, c'est qu'on ne voit pas pourquoi la raison du plus nombreux serait quelque chose de plus valable que la raison du plus fort (concrètement, si quarante millions de personnes veulent ma mort, elles finiront certainement par l'obtenir, mais je ne vois pas pourquoi elles auraient intrinsèquement plus « raison » que si quelqu'un de particulièrement bien armé la veut). Il y a aussi le fait, sur lequel je vais revenir, que la volonté de la majorité n'est pas vraiment quelque chose de bien défini, mais même en admettant qu'elle le soit, l'avis du citoyen moyen est par définition celui d'une intelligence moyenne, il est un peu absurde de prétendre qu'il a forcément toujours raison. Et évidemment, le fait que les citoyens — ceux qui sont censés avoir le pouvoir — ne sont pas les mêmes que les habitants du pays — ceux sur qui s'exerce le pouvoir : certains pays comme le Canada tendent à rendre extrêmement ténue la différence (pas de vote des citoyens résidant l'étranger, très grande facilité à acquérir la nationalité quand on est résident), mais elle existe toujours, et le juge a pour devoir de protéger tout le monde, pas seulement les citoyens.

Il se trouve que je tiens ces opinions depuis longtemps, et que je dis par exemple depuis longtemps que la Suisse a un système de démocratie beaucoup trop direct pour que les contrôles soient efficaces (je vais y revenir), or l'actualité me fournit un exemple éclatant de ce dont je veux parler : à part prouver que les gens ne sont généralement pas assez sophistiqués pour comprendre la différence fondamentale entre je suis opposé à <truc> et je suis favorable à ce que <truc> soit interdit (hint : je suis opposé à la connerie, mais je n'ai certainement envie que soit votée une loi interdisant la connerie), je crois que ceci illustre clairement mon propos selon lequel la majorité peut très bien piétiner les droits d'une minorité, y compris s'agissant de droits fondamentaux[#5]. Pour prendre un autre exemple, j'ai également déjà évoqué ici le cas d'un referendum récent en Californie sur le mariage des couples de même sexe qui avait pour seul objet de renverser une décision de justice par une modification de la Constitution de l'État : ce n'est pas moi qui affirme que ce referendum était contraire aux droits fondamentaux (spécifiquement celui de non discrimination), c'est la Cour suprême de l'État de Californie. Laquelle cour a bien dû se plier à la volonté de la majorité du peuple californien de modifier sa Constitution pour en retirer un des droits fondamentaux qu'elle accordait (pour ce qui est du Tribunal fédéral suisse, je ne suis pas assez calé en droit helvétique pour savoir quels sont les moyens qui permettraient éventuellement de faire échec à l'application du referendum de la semaine dernière).

Pour autant, il est normal que l'opinion de la majorité soit suivie quand il s'agit, par exemple, de faire un choix de société. La morale de tout cela, c'est qu'il faut atteindre un équilibre délicat entre le pouvoir de la majorité et le droit des minorités. Je pense qu'il devrait certainement y avoir moyen de forcer le juge constitutionnel (par exemple) à renverser sa décision, si on l'estime mauvaise, en changeant la règle qu'il a appliquée ; mais que ce changement doit être singulièrement plus difficile que le vote d'une loi « ordinaire ». Aux États-Unis, une modification de la Constitution fédérale requiert le vote des 2/3 de chacune des deux chambres du Congrès, puis la ratification par les 3/4 des États de l'Union : ceci est peut-être un peu excessif dans la difficulté, mais c'est le genre de choses qu'on attend. En tout cas, je m'attends à ce qu'un referendum sur un tel sujet ait des exigences plus sévères qu'une simple majorité des votants (peut-être une majorité qualifiée et/ou une condition sur la proportion de suffrages exprimés) : la constitution de la confédération helvétique et celle de la Californie, au moins, me semblent pécher par ce qu'elles sont modifiables par un vote à la majorité simple même avec une participation assez faible. Même chose au parlement : modifier la loi fondamentale ne doit pas être un simple acte du parlement, et en cette matière je reprocherais au Royaume-Uni de ne donner aucun contre-pouvoir au parlement de Westminster (du moins en droit interne, puisqu'il y a maintenant le droit communautaire et la CEDH qui peuvent s'imposer contre lui).

On peut d'ailleurs souhaiter qu'il existe des obstacles de ce genre même pour faire une loi ordinaire. Dans le cas d'un referendum d'initiative populaire, il me semble qu'il faut mettre quelques garde-fous évitant qu'il soit trop facile à faire[#6]. Même dans le cas d'un parlement représentatif (qui me semble une bien meilleure forme de gouvernement que la démocratie directe), on peut souhaiter que l'opposition ait des moyens, sinon d'empêcher le vote d'une loi, de la retarder, d'y soulever des obstacles juridiques ou procéduraux[#7], ou peut-être justement, politiquement, d'obtenir un referendum sur la question[#8]. Tout est une question de trouver le bon équilibre, et malheureusement il n'est guère mené de réflexion sérieuse sur la façon de trouver le bon équilibre, les constitutions sont écrites un peu au hasard des événements du moment et sans prendre en compte toute l'expérience des régimes ayant déjà existé.

Mais je dois encore évoquer une dernière fiction dans la mystique de la démocratie : c'est l'idée que l'opinion de la majorité est quelque chose de bien défini et qu'il est possible en théorie de lui donner le pouvoir. Or, comme je l'ai déjà dit à mainte reprise, non seulement il est notoirement impossible pour des raisons théoriques de tirer des ordres de préférence individuels un ordre de préférence collectif cohérent mais, pour commencer, les gens n'ont même pas un ordre de préférence cohérent à l'échelle individuelle puisqu'il répondent de façon différente selon l'ordre dans lequel on leur demande de faire les choix ou selon la façon dont on tourne la question. À ce stade-là, dire le peuple souverain a tranché après une élection est à peu près aussi mystique que de dire qu'Apollon a tranché quand on a posé une question à l'oracle de Delphes. N'en déplaise aux hommes politiques qui s'estiment légitimés dans leurs idées parce qu'ils ont remporté une élection, les électeurs ont simplement préféré les voir au pouvoir que le(s) candidat(s) d'en face, et encore, par une majorité souvent ténue et avec une participation faible : alors on leur donnera le pouvoir parce que c'est bien la règle du jeu, mais il ne faudrait pas qu'ils se vantent de l'onction du suffrage universel comme s'ils avaient été adoubés par la main d'un dieu. Parfois tout ce qui s'est passé est que les électeurs s'étaient lassés de l'autre principal parti[#9].

D'où mon opinion pragmatique sur la démocratie : son rôle n'est pas tellement de donner le pouvoir absolu à l'expression de la volonté de la majorité, mais simplement de s'assurer que le régime ne tourne pas à l'autocratie ou à l'oligarchie, que les hommes politiques vraiment trop corrompus, trop pourris ou trop dangereux soient finalement écartés, que chacun puisse espérer jouer un rôle en politique et, surtout, que les droits fondamentaux soient maintenus. Cela ne marche pas toujours bien, mais c'est le mieux qu'on ait. Simplement, il ne faut pas en faire une religion.

[#] En général, quand je dis ça, les gens bondissent et me rétorquent que le gouvernement de <tel pays démocratique, souvent le leur> est vraiment pourri et corrompu. Certes. Mais d'une part je n'ai pas dit que le moyen était infaillible : je dis juste que c'est le meilleur moyen connu ; d'autre part, ces gens sont en général de mauvaise foi parce que, comparé à des pays vraiment non démocratiques, leur exemple est tout de même un mal bien modéré. D'ailleurs, les gens qui me sortent cette répartie sont souvent les mêmes qui par ailleurs portent la démocratie aux nues : je trouve que c'est un peu gonflé de prétendre à la fois que la démocratie est un idéal à atteindre et en même temps qu'elle ne marche pas.

[#2] Je souligne ce point car il m'est arrivé qu'on me prétende que c'était une faiblesse de ma position : qu'il est beaucoup plus difficile de définir ce qu'est un droit de l'Homme qu'une démocratie (et donc par un bizarre syllogisme, qu'il serait préférable de prendre la démocratie comme le point de départ de tout). Je trouve cet argument particulièrement stupide : ce n'est pas parce qu'un concept est difficile à définir (et qu'on n'y arrive que par l'accumulation de quantité de jurisprudence) qu'il a une existence vague et incertaine. La langue française ne peut se définir que par des dictionnaires et des grammaires volumineux, et pourtant il y a peu de doute qu'elle existe bien.

[#3] J'ai entendu Robert Badinter exprimer cette opinion, et c'est de lui que je la tiens (ceci n'est pas, évidemment, un argument d'autorité : je veux simplement rendre à César ce qui est à César).

[#4] Qu'on devrait lire et relire, car il est étonnant de constater à quel point ce livre écrit sous la monarchie de Juillet est encore d'actualité.

[#5] Il faudra voir, naturellement, la façon dont cette phrase complètement mal définie — la construction de minarets est interdite — sera interprétée, et la manière dont la Cour européenne des droits de l'homme jugera les cas qui résulteront de cette interprétation. Il est possible qu'aucun droit fondamental ne soit violé (si la phrase est considérée comme une simple directive générale sur le droit de l'urbanisme) ; mais je pense que personne ne mettra en doute le fait que le contraire est plus qu'envisageable.

[#6] Je proposerais typiquement : la signature de 5% du corps électoral et de 10% du parlement, ou de 15% du corps électoral, le contrôle par le Conseil constitutionnel (ou autre institution équivalente) en amont du vote, et le fait que le résultat du vote ne soit impératif que si la proportion de suffrages exprimés est d'au moins 60% du corps électoral (sinon le parlement aurait seulement l'obligation de voter sur le texte, mais il pourrait encore le refuser). Quand je dis quelques garde-fous, il ne faut pas aller trop loin non plus. Un changement récent de la Constitution française prévoit la possibilité théorique d'un referendum d'initiative parlementaire, mais absolument tout a été prévu pour que cette possibilité soit complètement inutilisable dans la pratique : non seulement le nombre de signatures exigées pour le demander est assez astronomique (10% des électeurs inscrits, c'est extrêmement difficile à réunir), et encore il doit être complété par la signature d'un certain nombre de parlementaires, mais en plus il y a toutes sortes de limitations de forme, et surtout, la possibilité pour le parlement d'enterrer complètement la proposition en se contentant de débattre la question mais sans la voter. Bref, c'est une blague. De toute façon, la loi organique censée rentre l'article opérant n'a même pas été publiée.

[#7] Là aussi, tout est question de mesure. Aux États-Unis, comme on le voit avec la tentative de réforme du système sociale voulue par le président Obama, le pouvoir d'obstruction de l'opposition parlementaire est (entre les multiples possibilités de faire mourir une loi en commission, et le fait que la majorité au sénat soit de facto de 2/3 à cause du filibuster) considérable : trop considérable à mon avis, en fait. Un sénateur qui veut faire un filibuster devrait au moins être obligé de venir lui-même réciter l'annuaire téléphonique et de pisser dans une bassine pour prouver sa détermination réelle. Ces évolutions sont, d'ailleurs, postérieures au livre de Tocqueville.

[#8] On pourrait imaginer, en France, qu'un groupe de cent vingt parlementaires puisse obtenir qu'un texte proposé au parlement ne puisse être adopté qu'en vertu d'un referendum ; mais avec une limitation pour éviter les abus : que si le referendum a lieu et que le texte est effectivement adopté, les signataires en question ne puissent plus déposer de telle demande pour toute la fin de la législature (ils auraient « grillé leur cartouche »). Cette limitation obligerait l'opposition à bien choisir le texte sur lequel elle veut en appeler au corps électoral, et éviterait la multiplication des referendums par manœuvre d'obstruction.

[#9] Qui peut-être applique strictement la même politique : ce n'est pas forcément scandaleux si cette politique est bonne — ceux qui veulent changer la politique ont intérêt à le faire de l'intérieur des partis.

↑Entry #1712 [older| permalink|newer] / ↑Entrée #1712 [précédente| permalien|suivante] ↑

[Index of all entries / Index de toutes les entréesLatest entries / Dernières entréesXML (RSS 1.0) • Recent comments / Commentaires récents]