Je vais vite parce que je dois me coucher. Les vidéos de la
conférence qui s'est tenue ce soir à
l'ENS sur la loi DADVSI est
maintenant disponible
sur le site Web de la Diffusion des Savoirs de
l'ENS (et sous licence
Creative Commons). Il s'est
dit des choses vraiment intéressantes, donc j'encourage
à aller voir. (Et on ne le soulignera
jamais assez : ça vous concerne, vous, ça ne
concerne pas qu'une poignée de geeks estampillés logiciel
libre
.)
Je voudrais cependant faire part d'une réflexion qu'on m'a suggérée
récemment et qui me semble très pertinente, et profondément
démoralisante, concernant la possibilité de faire évoluer un jour les
choses dans le bon sens au niveau du droit d'auteur. Je me lamente
souvent que la majorité des citoyens se refuse à prendre conscience
que le droit de la propriété intellectuelle la concerne vraiment, et
qu'elle est en train de se faire priver de libertés véritablement
importantes. Or on m'a fait remarquer la chose suivante : en assez
peu de temps on est passé d'une situation où tout le monde se fout de
l'écologie à une situation où tout le monde se sent concerné —
mais ne fait quand même rien ; pareil pour le droit des minorités :
maintenant, tout le monde est pour
, mais, évidemment, personne
ne fait rien, concrètement ; pareil pour le libéralisme :
actuellement, l'opinion publique va très largement dans le sens le
libéralisme, c'est affreux
, et pourtant, on continue à libéraliser
à tour de bras (les télécoms, les transports, etc.). Il semble assez
plausible que la même chose se passe pour la propriété
intellectuelle : les gens vont peut-être rapidement prendre conscience
du problème dans ces lois sans cesse plus dures et plus répressives
mais, contrairement à ce que j'espérais, ça ne nous aidera peut-être
pas du tout à le résoudre.
Un des problèmes très sérieux c'est que nous sommes, actuellement, gouvernés par des traités internationaux et non plus par des lois. Or les traités internationaux sont un domaine où le lobbying de la part de groupes financiers puissants et bien constitués est particulièrement facile, alors que l'opinion publique n'en a conscience souvent[#] que quand il est trop tard (le traité est définitif et lie les États contractants). Quant au pouvoir économique du consommateur, il est bidon, faute de moyens convenables de concertation : les produits verts ou commerce équitable, ça ne marche pas, malheureusement, et je pense que tout espoir que les DRM échoueront pour des raisons économiques se heurtera à la dure réalité de la force économique de Microsoft (qui arrive à faire payer pour un système d'exploitation objectivement pas meilleur qu'un autre qui est gratuit, alors le pouvoir économique du consommateur, dans tout ça…) ou Apple.
[#] Contre-exemple : le Traité Constitutionnel Européen. Mais comme je l'ai déjà expliqué au moment de ce débat, je pense que le citoyen français a eu le douteux privilège de refuser tout ce qu'il y avait de bon dans ce traité et de subir quand même ce qu'il y a de mauvais. [Note préventive : je n'accepterai pas de commentaires sur la présente entrée parlant essentiellement du TCE ; si quelqu'un veut faire un commentaire à ce sujet, qu'il le fasse sur l'entrée passée.]