David Madore's WebLog: Sur les vaches des Highlands de Saint-Lambert-des-Bois

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(vendredi)

Sur les vaches des Highlands de Saint-Lambert-des-Bois

Je suis tout étonné de voir que je n'en ai jamais parlé sur ce blog (à part très brièvement dans cette entrée sur l'été 2020 ; j'en ai surtout parlé sur Twitter, mais c'est un peu dispersé entre plusieurs fils, donc je vais reprendre de façon plus systématique). La race Highland de l'espèce Bos taurus (vous savez, ces vaches aux longues cornes et au poil long si caractéristiques, et si vous ne voyez toujours pas, allez suivre cette chaîne YouTube finlandaise) est certainement très haut dans ma liste d'animaux préférés[#]. Mais je ne veux pas parler ici des bovins Highland en général, mais d'un troupeau bien précis, celui de la prairie de la Gravelle à Saint-Lambert-des-Bois (Yvelines). Reprenons donc depuis le début.

[#] Sans doute à égalité, et quoique dans un genre très différent, avec la mésange à longue queue Aegithalos caudatus notamment la sous-espèce japonaise shima enaga, qui a l'air d'avoir évolué pour que les humains craquent complètement en disant que c'est meûgnôôon !!! (et, sans doute, lui donnent à manger). Je soupçonne vaguement que la sélection des vaches Highland a suivi un peu la même approche. En tout cas, je suis sûr que si un jour une mésange à longue queue se pose sur une vache Highland et que quelqu'un photographie ça, l'Univers disparaîtra dans un trou noir de mignonitude : le mieux que je peux vous proposer est donc avec une pie sur la tête.

[Vaches des Highlands dans la prairie de la Gravelle à Saint-Lambert-des-Bois, en train de ruminer (et un cheval au fond)]Les vaches Highland, je pense qu'il n'y en a pas énormément en France, et les vaches tout court il n'y en a pas tant que ça en Île-de-France, et les vaches d'agrément ou de décoration ce n'est certainement pas ce qu'il y a de plus courant (ça coûte cher à entretenir, ces choses-là, cf. ci-dessous), aussi[#2] ai-je été tout surpris de découvrir, en faisant une de mes premières balades à moto, le , en passant sur la D46 après Saint-Lambert-des-Bois, un troupeau de vaches des Highlands en train de brouter. Pourtant, je connaissais déjà le coin (cf. ci-dessous), mais je ne les avais jamais vues ou remarquées.

[#2] Entre temps j'ai appris l'existence de quelques autres vaches des Highlands en Île-de-France. Il y en a deux[#2.1] sur l'île Panchout à Yerres (Essonne), j'en ai aperçu une par hasard dans le Vexin du côté de Labbeville (Val d'Oise), et on me signale qu'il y en a aussi à Gambaiseuil (Yvelines). J'imagine qu'il peut y en avoir en Seine-et-Marne, aussi, je connais beaucoup moins le coin. Mais en tout cas, ça ne court pas les rues.

[#2.1] Avec une histoire assez triste, d'ailleurs, parce qu'un de ces bovins des Highlands installés là par la mairie d'Yerres est mort assez rapidement d'une occlusion intestinale sans doute parce que quelqu'un lui avait jeté quelque chose qu'il a mangé. La mairie a mis de grandes pancartes incitant les visiteurs à ne pas donner à manger aux vaches et surtout ne pas leur jeter de déchets.

(Une assez longue digression sur la géographie du coin, cliquez ici pour sauter.) La vallée de Chevreuse (voir cette entrée passée pour plusieurs cartes) est la vallée de la rivière Yvette entre, grosso modo, sa source et Villebon-sur-Yvette (plus loin la rivière continue jusqu'à se jeter dans l'Orge, mais elle ne fait pas vraiment une vallée nette). Cette vallée est assez rectiligne est-ouest, avec, de la source vers l'aval, c'est-à-dire de l'ouest vers l'est, Lévis-Saint-Nom, Maincourt-sur-Yvette, Dampierre-en-Yvelines, Saint-Forget, Chevreuse, Saint-Rémy-lès-Chevreuse, Gif-sur-Yvette, Bures-sur-Yvette, Orsay et Villebon-sur-Yvette. Il y a quelques affluents de l'Yvette qui creusent des vallées secondaires dans les plateaux au nord et au sud, les trois plus significatifs étant (de l'amont vers l'aval) le ru des Vaux de Cernay (affluent rive droite, dont le confluent est à Dampierre), le Rhodon (affluent rive gauche, dont le confluent est à Saint-Rémy) et la Mérantaise (affluent rive gauche, dont le confluent est à Gif). Tout ce coin est très bucolique et ça vaut la peine de s'y balader (à pied, à vélo, en moto…), et c'est pour ça que je mentionne les vallées du ru des Vaux, du Rhodon et de la Mérantaise, parce que c'est particulièrement joli, mais celle qui m'intéresse ici c'est celle du Rhodon, qui prend sa source quelque part vers le Mesnil-Saint-Denis et se jette dans l'Yvette à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, en traversant en chemin Saint-Lambert-des-Bois et Milon-la-Chapelle.

La vallée du Rhodon est notamment connue à cause du site historiquement important de l'ancienne abbaye de Port-Royal-des-Champs (fondée au XIIIe siècle comme une sorte de spinoff féminin de l'abbaye des Vaux de Cernay mais qui devient rapidement autonome, et dont le Port-Royal à Paris est d'ailleurs une extension créée au XVIIe). On retient Port-Royal-des-Champs notamment pour une des plus célèbres traductions en français de la Bible (celle de Lemaistre de Sacy, ou bible de Port-Royal), ou pour quelques pensionnaires célèbres (Blaise Pascal et Jean Racine), mais aussi et surtout pour avoir été un haut lieu du jansénisme qui lui a valu sa fermeture, son expulsion et sa démolition ordonnées par le pape Clément XI et le roi Louis XIV (vers 1709). Les bâtiments ont été rasés, mais il reste quelques ruines ainsi qu'un pigeonnier, et une ferme secondaire (la ferme des Granges). Le site, techniquement situé sur la commune de Magny-les-Hameaux mais en fait surtout proche de Saint-Lambert-des-Bois, se visite : il n'y a pas grand-chose à voir aux ruines, mais le musée des Granges, sur le plateau, a un très joli jardin et un beau point de vue. (J'avais parlé de Port-Royal par exemple dans cette entrée passée[#2b].)

[#2b] On m'informe au passage que l'âne qui y est mentionné (et photographié le recevant des gratouilles du poussinet) est maintenant mort de vieillesse.

L'endroit est aussi bien connu des promeneurs à cause du chemin Jean Racine qui relie Chevreuse à Port-Royal parce le dramaturge, alors âgé d'une vingtaine d'années, l'empruntait vers 1661 alors qu'il logeait à Port-Royal (où il avait été élève plus tôt) et se rendait régulièrement au château de la Madeleine à Chevreuse pour superviser des travaux de réfection du donjon (ce château de la Madeleine appartenait aux ducs de Chevreuse et de Luynes dont Racine était le protégé). Il y a une vue magnifique sur la vallée de Chevreuse depuis le château de la Madeleine. Le chemin de Racine (qui semble commencer « officiellement » ici mais la plupart des gens le prennent à partir du château de la Madeleine) descend dans la vallée du Rhodon et suit ce dernier jusqu'au site de Port-Royal. (Cela représente à peu près 5km, et il y a des bornes ornées de vers bucoliques et parfaitement niais que Racine a écrits.)

Pourquoi je raconte tout ça, moi ? Pas juste pour situer un peu l'endroit, et pour recommander les balades dans le coin[#3], mais aussi pour dire que c'est un endroit que je connaissais depuis longtemps, ayant grandi à Orsay et fait de nombreuses fois avec mon papa la balade du chemin de Racine, soit pour aller à Port-Royal soit pour manger au restaurant La Terrasse de Sauvegrain[#4] à Saint-Lambert-des-Bois, qui était alors moins chic et plus traditionnel. Les vaches dont je parle n'étaient pas là quand j'étais petit (je comprends qu'elles ont été installées en 1995), mais j'y étais retourné plusieurs fois depuis, et je ne les avais quand même pas vues, sans doute parce que le chemin Jean Racine suit vraiment le Rhodon alors que les vaches sont plus près de Saint-Lambert (donc si on suit le chemin sans chercher à les voir, on va les rater).

[#3] Par exemple on peut prendre le RER jusqu'à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, marcher jusqu'à Chevreuse par le chemin de Coubertin, monter au château de la Madeleine, admirer la vue, ensuite suivre le chemin de Racine jusqu'à Port-Royal, monter aux Granges et admirer le jardin et l'autre vue, et revenir par exemple par Milon-la-Chapelle. Cela se combinera fort agréablement avec un repas au restaurant La Terrasse de Sauvegrain à Saint-Lambert-des-Bois (voir la note #4 en-dessous) et un petit bonjour aux vaches qui sont le sujet/prétexte de ce billet — si elles sont encore là et veulent bien se montrer. ❧ Mais sinon, la vallée de la Mérantaise entre Gif-sur-Yvette et Châteaufort (cf. par exemple cette trace-ci, ou même au-delà) est aussi très jolie aussi, et il y a un bon restaurant à Châteaufort aussi.

[#4] Ce restaurant est excellent. Je le mentionne parce qu'à chaque fois que le poussinet et moi y allons nous en profitons pour dire bonjour aux vaches du pré voisin, mais autant leur faire une pub que j'estime bien méritée : contrairement au restaurant La Table des Blot (Auberge du Château) à Dampierre, ils n'ont pas d'étoile au Michelin, mais je considère qu'ils sont tout à fait du même niveau en qualité.

(Fin de la digression.)

[Deux vaches des Highlands dans la prairie de la Gravelle à Saint-Lambert-des-Bois, en train de ruminer]Bref. En novembre 2019, donc, je découvre l'existence de ces vaches des Highlands (au nombre de neuf, je crois), ainsi que de deux chevaux, dans une prairie (étiquetée la Gravelle sur la carte topographique IGN) au niveau de l'intersection entre les routes départementales D46 (qui passe par Saint-Lambert-des-Bois) et D91 des Yvelines, juste de l'autre côté de cette dernière par rapport au site de Port-Royal (et à quelques centaines de mètres de ce dernier). Depuis, j'ai pris l'habitude de passer souvent par là et de m'arrêter admirer les vaches.

Il s'agit d'une prairie humide, sans doute en partie marécageuse puisque c'est le lit étendu du Rhodon. On voit ici sur Google Street View[#5] et sur mes photos ci-contre et au-dessus le type de végétation qui s'y trouve. La prairie est assez grande, peut-être une dizaine d'hectares, mais je ne sais pas où les vaches peuvent aller exactement : selon les jours elles sont plus ou moins près de la route, si bien qu'on les voit plus ou moins facilement.

[#5] Où y voit aussi la pancarte dont je parle juste après : Ici le Parc naturel régional de la Haute Vallée de Chevreuse restaure les clôtures, entretient les mares et les milieux remarquables pour garantir la présence de la flore et de la faune patrimoniale des prairies humides. Pas un mot sur les vaches.

Que font-elles là et à qui sont-elles ? Je n'en ai longtemps pas eu la moindre idée (je m'imaginais que c'était soit un agriculteur local soit l'hôtel associé au restaurant La Terrasse de Sauvegrain). En fait, j'ai fini par remarquer une pancarte assez discrète (voir la note #5 au-dessus) parlant d'entretien des prairies et qui semblait indiquer que c'était le Parc naturel régional (PNR) de la Haute Vallée de Chevreuse.

Le PNR de la Haute Vallée de Chevreuse est un ensemble assez vaste (beaucoup plus grand, en tout cas, que la seule vallée de Chevreuse que son nom évoque : il devrait s'appeler Parc naturel régional du massif de Rambouillet ou ou Parc naturel régional du Hurepoix ou quelque chose comme ça), dont je n'ai pas vraiment compris les compétences[#6] (la gestion des forêts, par exemple, ne leur revient pas puisque c'est l'ONF qui est responsable des forêts domaniales), mais d'après Wikipédia, il est au moins écrit qu'un PNR favorise le contact avec la nature, sensibilise ses habitants aux problèmes de l'environnement, incite ses visiteurs à la découverte de son territoire à travers des activités éducatives, culturelles et touristiques et aussi favorise le contact avec la nature, sensibilise ses habitants aux problèmes de l'environnement, incite ses visiteurs à la découverte de son territoire à travers des activités éducatives, culturelles et touristiques, donc certainement mettre des vaches des Highlands en écopaturage dans les prairies humides du coin, et les montrer au public, peut faire partie de ses attributions.

[#6] Il y a quatre PNR en Île-de-France (Haute Vallée de Chevreuse, Gâtinais français, Vexin français et, partagé avec la région Hauts-de-France, Oise Pays de France) ; et un cinquième en projet (Brie et Deux Morins). Le PNR de la Haute Vallée de Chevreuse est le plus petit, mais ça reste grand. Et en tout cas, je n'ai pas vraiment compris ce que ces parcs font exactement (même si je suis d'accord que ce sont de très beaux endroits où se promener).

Je me suis dit que ces bovins avaient certainement été installés là par quelqu'un qui avait ensuite plus ou moins oublié leur existence, et en tout cas que c'est dommage de ne pas mieux les mettre en valeur, parce qu'ils sont très populaires, pas juste auprès de moi.

Comme je l'ai dit plus haut, le coin est une destination fréquente de balades, que ce soit en voiture (les week-ends de beau temps il y a beaucoup de belles voitures de collection qui sont de sortie), à moto[#7] ou à vélo. (À pied, aussi, mais comme je l'ai expliqué, quand on passe à pied, on va avoir tendance à rester sur le chemin de Racine de l'autre côté du Rhodon, et on peut ne pas voir les vaches.) Et je ne suis pas le seul à les admirer, ni même à m'arrêter pour les regarder : souvent lors de mes balades à moto, quand les vaches sont proches de la clôture, j'ai vu d'autres gens (automobilistes, autres motards, cyclistes, piétons…) qui s'arrêtaient au bord de la route pour photographier ces vaches des Highlands, lesquelles restent royalement indifférentes à toute cette attention. (Et elles intriguent, aussi, parce que les Français connaissent assez peu les vaches des Highlands. L'oncle du poussinet est passé par là avec sa copine en chemin vers Port-Royal-des-Champs, quand il m'a raconté ça et que je lui ai demandé s'il avait vu les vaches, il m'a avoué qu'il avait cru que c'étaient des bisons.)

[#7] Et il faut reconnaître qu'il y a un tas de pénibles dans le tas qui, avec leurs pots d'échappement non homologués (style Akrapovič, hypocritement indiqués comme réservés à la course) exprès bruyants contribuent à la pollution sonore d'un coin très bucolique en accélérant à fond sur la D91 bien connue pour sa section « 17 tournants » un peu plus au sud.

J'ai quand même trouvé un ou deux endroits en ligne qui parlaient de ces vaches, notamment ce petit post sur Facebook[#8] daté du , et cet article de Actu 78 du intitulé un petit bout d'Écosse en vallée de Chevreuse. On y apprend notamment que les vaches sont entretenues au quotidien par un agriculteur (Frédéric Pelletier, de la Ferme de la Grand Maison à Chevreuse, je crois que c'est celle-ci) et on a confirmation qu'elles sont en liberté dans cette prairie hiver comme été. [Ajout : je peux encore mentionner ce mini-documentaire d'une chaîne de télé locale (du ) où il est expliqué que des vaches sont abattues (et vendues à des restaurateurs locaux) quand leur nombre dépasse ce qu'on estime la prairie capable de supporter.]

[#8] Je recopie au cas où Facebook ne serait pas accessible par tous : La prairie de la Gravelle est pâturée toute l'année par des Highlands Catlle [sic] habituées au climat d'Ecosse. Elle conserve ainsi toute sa riche biodiversité de milieu humide. Le Parc a programmé des petits travaux pour l'été (rénovation des clôtures et entretien de la mare et des milieux). Ce magnifique paysage ouvert et rustique de fond de vallée pourra donc continuer d'inspirer les photographes (merci Hélène Rochas !) Et il y a un lien vers cette page sur le fond de vallée de Port-Royal-des-Champs et quelques photos.

J'ai fini en juillet par me décider à écrire une lettre au PNR pour leur dire en quelque sorte c'est vraiment super d'avoir mis ces vaches là, félicitations ! mais vous devriez faire de la comm autour, parce qu'elles ont une popularité dingue :

Parc Naturel Régional
 de la Haute Vallée de Chevreuse
Maison du Parc
Château de la Madeleine
Chemin Jean Racine
78 472 Chevreuse cedex

Paris, le

Au sujet des vaches des Highlands de la prairie de Gravelle

Madame, Monsieur,

Je me permets de vous écrire[¹] au sujet des bovins des Highlands que vous avez installés dans la prairie de Gravelle en bord des départementales 46 et 91 près de Saint-Lambert-des-Bois.

D'abord, ces animaux sont magnifiques et rencontrent un énorme succès auprès des gens qui se baladent par là et qui s'arrêtent souvent au bord de la route pour les photographier. Je voudrais féliciter la personne qui a eu l'idée de les acquérir.

Je trouve cependant qu'ils pourraient être mieux mis en valeur. Il n'y a qu'une toute petite pancarte explicative sur l'écopaturage, et ce n'est même pas clair en la lisant que c'est le parc régional qui en est responsable : c'est dommage. Permettez-moi de vous conseiller de mettre une notice explicative plus conséquente, et/ou une page sur votre site web, pour présenter la race en général, et ces individus en particulier (sexe, âge, et nom s'ils en ont reçu un) avec des photos, ainsi que les chevaux, et l'espace dans lequel ils broutent. Vous pourriez prendre exemple sur la mairie d'Yerres, qui a installé deux vaches des Highlands sur une prairie près de la rivière éponyme, et qui en a fait de véritables stars locales. (La chaîne YouTube « Highland Cattle of Saarela » peut également être une source d'inspiration dans un genre différent.)

Je pense en outre qu'il y aurait un véritable intérêt si vous proposiez des animations pour présenter ces animaux de plus près, en vrai, au grand public (adultes ou enfants).

En espérant que ces suggestions ne seront pas inutiles, je vous prie d'agréer, Madame, Monsieur, l'expression de mes cordiales salutations.

David Madore

[¹] Par courrier papier parce que le formulaire de contact sur votre site web semble ne pas fonctionner dans mon navigateur et je ne trouve pas d'adresse mail directe pour vous contacter.

J'écrivais ça plutôt pour m'amuser et je ne pensais pas vraiment recevoir une réponse, mais j'en ai quand même eu une (…trois mois plus tard), même si elle ne dit pas grand-chose, au moins ça confirme que c'est bien le PNR qui a installé là ces vaches :

À Chevreuse, le

Objet : troupeau de Highlands Cattle de la prairie de la Gravelle

Monsieur,

J'accuse bonne réception de votre courrier en date du 23 juillet 2022 portant sur le troupeau de bovins Highlands Cattle de la prairie de la Gravelle à Saint-Lambert-des-Bois. L'installation de ce troupeau en 1995 entrait dans le cadre d'une expérimentation nationale de pâturage d'animaux rustiques.

Je tiens à vous remercier pour l'intérêt que vous portez à ce projet du Parc naturel régional de la Haute Vallée de Chevreuse. Aussi, nous allons étudier vos propositions et voir dans quelles mesures elles peuvent être utiles pour la communication autour du troupeau et de ce projet.

Je vous prie d'agréer, Monsieur, l'expression de mes salutations distinguées.

Anne Cabrit
Présidente du Parc naturel régional
de la Haute Vallée de Chevreuse
Conseillère régionale d'Île-de-France

À ce moment-là je restais sur l'idée que quelqu'un avait installé ces vaches à cet endroit et ensuite plus ou moins oublié leur existence et que personne ne s'en souciait à part l'agriculteur qui leur donne à manger de temps en temps, mais voilà que the plot thickens!

Ma maman attire mon attention sur Twitter sur cette pétition intitulée Abattage de 4 vaches dans un parc naturel : la protection de la nature inclut la protection animale ! (je ne trouve pas de date d'ouverture de la pétition). Même s'il y a beaucoup de chose dans la pétition qui montrent que l'auteur est mal renseigné (il n'y a pas quatre vaches mais au moins neuf) ou ne connaît pas le coin (notamment le fait d'écrire Saint Rémy de Chevreuse pour Saint-Rémy-lès-Chevreuse[#9]), et même si je ne fais pas trop confiance à ce qu'écrit un random Jean-Luc Simon, faisant partie d'une association de protection de l'environnement (non identifiée ?), et même si le site hébergeant la pétition ne semble vraiment pas sérieux (cf. par exemple cette pétition pour le droit au débat pour une nouvelle cosmologie qui défend les crackpoteries de Jean-Pierre Petit), tout de même, il s'agit clairement des vaches dont je parle (que je croyais ignorées de tout le monde sauf des passants) et me voilà tout perplexe. Je me suis même inquiété si ma lettre n'avait pas accidentellement réveillé quelqu'un au PNR qui se serait dit mais qu'est-ce que c'est que cette histoire de vaches ? il faut s'en débarrasser.

[#9] Une autre erreur que j'avais relevée est l'affirmation que la prairie de la Gravelle serait classée Natura 2000 : elle n'apparaît pas sur la carte des zones en question. [Correction () : En fait, si, c'est juste que la carte est mal faite : si on clique sur lire la suite sous l'item tourbières et prairies tourbeuses de la forêt d'Yveline, on est renvoyé à cette page qui contient une carte plus précise montrant bien le classement de la prairie de la Gravelle.]

Heureusement, une personne qui lit mon blog et occasionnellement mes fils Twitter (merci à elle !) m'a apporté une bonne partie de la réponse. La référence principale est dans le quoi de neuf du maire de Saint-Lambert-des-Bois (voir notamment les nº17 de février 2022 et nº21 d'octobre 2022) ; au moins la commune de Saint-Lambert-des-Bois est bien au courant de l'existence de ces vaches, et les aime beaucoup au point de s'en servir dans la décoration de sa comm.

De ce que je comprends la situation est que le Parc naturel régional voudrait (ou en tout cas, a voulu, ou en tout cas, quelqu'un au PNR a ou aurait voulu) se débarrasser de ces vaches, soit parce qu'elles coûtent trop cher à entretenir, soit parce qu'il y a des règles d'entretien (sur les vaches elles-mêmes ou sur la prairie où elles paissent) qui sont compliquées à satisfaire. Il n'est apparemment pas question de les envoyer à l'abattoir (heureusement !) mais dans le parc du château de Dampierre[#10]. Néanmoins, j'ai tendance à trouver que ces vaches sont mieux à cet endroit où elles sont depuis longtemps où elles font vraiment bien dans le paysage (elles s'harmonisent bien avec l'aspect rustique de la prairie qui est elle-même assez mignonne) et où tout le monde peut les voir, qu'au château de Dampierre qui est un domaine privé. La mairie de Saint-Lambert voudrait bien les garder, et le Parc serait prêt à les leur laisser, mais les coûts d'entretien sont estimés à environ 30k€/an(!), ce qui est trop important pour cette petite commune : à défaut, ils ont donc décidé d'installer d'autres vaches (moins coûteuses, probablement parce que le terrain ne serait que prêté à un agriculteur qui aurait des vaches par ailleurs).

[#10] Le Château de Dampierre est celui des ducs de Chevreuse (et de Luynes), racheté en 2018 par Francky Mulliez (fondateur de Kiloutou) qui a entamé la rénovation (il faut dire que ce château était dans un état absolument épouvantable), dont la première phase s'est achevée il y a quelques mois. Le parc, en tout cas, mérite une visite, même si la plus grande partie est fermée au public.

Ajout : on trouve ici le projet de convention aimable de gestion entre le PNR et la commune de Saint-Lambert, dans l'éventualité où les vaches seraient laissé dans la prairie de Gravelle, qui donne quelques éléments de réponse (ou d'interrogation), notamment dans le préambule : Les enjeux écologiques du site et les obligations de conservation des habitats et des espèces nécessitent entre autre de recourir à un pâturage extensif pour la gestion de la prairie. Jusqu'à présent le Parc possédait un cheptel de bovins Highland Cattle qu'il conduisait en régie directe avec son équipe technique. Or cette gestion d'animaux rustiques relève de compétences professionnelles d'éleveur, que ne possède pas les agents du Parc. Le Parc a donc décidé de se séparer de son cheptel bovin et de recourir à un troupeau de vaches tiers géré par un éleveur professionnel, comme il le pratique pour de nombreuses autres prairies patrimoniales sur le territoire. Par ailleurs, les différents suivis, diagnostics et expertises liés au statut Natura 2000 conduisent le Parc à réduire la présence des bovins sur une période moyenne annuelle de mi-avril à mi-novembre, et donc à sortir les animaux du site. La pression de pâturage doit également être réglée chaque année entre les différents enclos de la prairie.

Bon, j'avoue être quand même assez perplexe sur le fait que ce soit si cher d'entretenir une dizaine de vaches (et peut-être deux chevaux) qui sont juste laissées dehors toute l'année dans leur champ et semblent juste recevoir un peu de foin et de luzerne ; je suis aussi assez perplexe quant au fait que le PNR, qui d'après sa propre réponse aurait installé ces vaches il y a plus de 25 ans, découvre tout d'un coup qu'elles sont chères ou compliquées à entretenir (ou qu'il faut tout d'un coup les enlever cinq mois par an, alors que ça fait des années qu'elles passent l'hiver là). Je soupçonne vaguement que quelqu'un a découvert ou redécouvert une règle d'hygiène vétérinaire que tout le monde avait ignorée jusqu'à présent, mais je n'ai pas (encore ?) la clé de ce mystère.

Quoi qu'il en soit, j'aimerais bien que ces vaches restent là où elles sont, et je crois comprendre que je ne suis pas le seul. Même en ces temps difficiles, je trouverais assez fou qu'un Parc naturel régional, ou une communauté de communes, ou même une petite commune, ne puisse pas trouver l'argent ou les moyens pour entretenir une dizaine de vaches qui ont l'air de très bien se débrouiller toutes seules et qui sont justement d'une race « rustique » sélectionnée pour nécessiter un minimum d'entretien (et pour pouvoir passer l'hiver dehors). À défaut d'argent public, je me demande si le fait que >38 000 personnes aient signé une pétition pour les défendre n'indiquerait pas qu'on pourrait crowdfunder leur entretien (il suffirait que ces signataires acceptent de payer 1€/an). Encore une autre possibilité serait de faire appel à du mécénat (vu que ces vaches sont incroyablement populaires, je pense que plus d'une entreprise serait prête à payer pour mettre son nom sur une pancarte montrant qu'elle a contribué à les entretenir) : le père de mon poussinet (qui est responsable chez Veolia) semble trouver concevable que la fondation Veolia pourrait être intéressée par une action de ce genre. Bref, je vais essayer de me mettre en contact avec la mairie de Saint-Lambert (on m'a donné un nom au conseil municipal) et/ou avec le Parc pour savoir si ce n'est pas trop tard et s'ils peuvent envisager ce genre de financement. (Si j'ai du nouveau je tâcherai de mettre à jour ce billet.)

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