David Madore's WebLog: XY — de l'identité masculine

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(samedi)

XY — de l'identité masculine

Je viens de finir de lire ce petit livre d'Élisabeth Badinter (XY — de l'identité masculine, qui n'a pas de rapport avec le magazine). Comme son nom l'indique, il s'agit d'un essai (tiré de séminaires donnés par l'auteur à l'École polytechnique dans les années '80) sur l'identité masculine, structuré en deux grandes parties : Construire un mâle et Être un homme.

Pendant des siècles, les hommes (viri) ont cherché à identifier leur identité à celle de l'humanité tout entière (homines) si bien qu'on a beaucoup plus de mal à cerner, maintenant, ce qu'est l'identité masculine que ce qu'est l'identité féminine. Et, lorsqu'on entend dire à un garçon sois un homme (un vrai) ! ce n'est pas le pendant d'une fille à qui on dirait — et cela semble plus rare — sois une femme (une vraie) ! ; le continent inconnu, de nos jours, nous explique É. Badinter, ce n'est plus la femme, c'est l'homme. Et c'est de cette interrogation qu'elle part pour tenter de comprendre comment un homme se construit, ce qu'il est, et ce qu'il doit être. Elle note judicieusement : Contrairement à la vieille histoire de la damnation d'Ève, Dieu s'est fait son complice. Non seulement il a ôté le pouvoir créateur à Adam pour le donner à sa compagne, mais du même coup, il a accordé aux femmes le privilège de naître d'un ventre du même sexe. Il leur a ainsi épargné tout un travail de différenciation et d'opposition qui marque de façon indélébile le destin masculin. Car encore maintenant ce sont souvent beaucoup plus les mères que les pères qui élèvent les enfants : on sait combien Élisabeth Badinter combat cette idée que les rôles des parents seraient figés et que l'instinct maternel aurait quelque chose d'unique. En attendant, pour parodier Simone de Beauvoir : On ne naît pas homme, on le devient.

J'ai déjà expliqué à de nombreuses reprises que j'avais souffert, en tant qu'homosexuel, dans ma construction de mon identité masculine (et gay) de cette idée — absurde[#] — fréquemment renvoyée par la société en général et parfois les homosexuels eux-mêmes[#2], que l'homme homosexuel est moins masculin que l'hétérosexuel. À ce sujet, justement, É. Badinter met pas mal de points sur les ‘i’, notamment dans la partie intitulée L'homosexuel est-il un homme mutilé ?, examinant tour à tour des clichés opposés pour les réfuter.

Bref, globalement, j'en conseille la lecture à tous les hommes, de 7 à 77 ans, quelle que soit leur perception personnelle de leur propre identité masculine. Il est vrai que j'ai généralement de l'admiration pour l'auteur. Le livre a malheureusement l'air épuisé les jours impairs, ou peut-être selon la phase de la lune, mais j'ai pu l'acheter sur Amazon.fr et je l'ai vu récemment chez Gibert (dans une autre édition, je ne sais pas si le contenu diffère).

[#] L'explication que je propose à l'apparence qu'on peut avoir est que le phénomène s'auto-entretient : si la rumeur populaire veut que les hommes homosexuels soient moins masculins que les hétérosexuels, ceux qui ne s'identifient pas à cette image vont avoir plus de mal à s'assumer, donc être moins visibles, ou tout simplement moins identifiables comme homosexuels, et du coup la rumeur semblera confirmée. Il ne faut pas chercher plus loin. Ceci expliquerait aussi pourquoi, dans des milieux traditionnellement considérés (et de façon assez douteuse, aussi) comme très masculins, par exemple l'armée : il n'y a pas d'homos, il n'y a que des hommes qui s'aiment… On ne sort pas du raisonnement circulaire.

[#2] Par exemple dans l'insistance que certains ont de parler d'eux au féminin (surtout au féminin pluriel pour un collectif). Si j'objecte, on me rétorque qu'il faut accepter sa part de féminité… bullshit : si j'appelle une femme Monsieur et qu'elle s'en offusque, il me faudrait un sacré culot pour lui dire qu'elle ne doit pas se vexer mais plutôt accepter sa part de masculinité.

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