J'ai assisté à la thèse d'un de mes amis d'enfance (à peu près mon plus vieil ami d'enfance, en fait[#]) : une thèse en biologie, sur l'évolution de la morphologie du pollen chez les asparagales (pour déterminer ce qui est dû à la sélection naturelle et ce qui l'est aux contraintes développementales). Je ne dirai rien sur le contenu de la thèse elle-même, même si j'ai compris quelques choses et que j'ai trouvé ça très intéressant ; le jury a d'ailleurs abondamment félicité l'impétrant pour la qualité de sa présentation, même s'il a aussi assez sévèrement (voire lourdement) critiqué la forme du mémoire.
Ce qui est amusant, c'est de voir à quel point le cérémonial d'une soutenance de thèse varie selon les disciplines (et parfois selon d'autres facteurs que je ne devine pas bien).
Un des facteurs dont la variabilité est des plus marquantes est la manière dont les membres du jury posent des questions : dans la branche des maths où je suis, les questions à la fin de l'exposé sont rares (j'ai même assisté à une soutenance de thèse où il n'y en a pas eu une seule), dans d'autres branches elles sont un peu plus nombreuses, en informatique encore un peu plus, en physique (au moins théorique, je n'ai pas vu de soutenance de thèse de physique expérimentale) cela tourne vraiment à l'interrogatoire, et, là, la séance de questions a duré plus d'une heure et demie après l'exposé. En lettres, on m'a dit (je n'ai pas assisté à une soutenance pour le constater par moi-même) que la soutenance elle-même dure typiquement très peu de temps, et que les membres du jury s'expriment ensuite de façon interminable sans poser vraiment de questions. Parfois on voit aussi des questions vaguement politiques effleurer la surface (ici, un paléontologue a insisté bien lourdement, dans ses questions, sur la différence entre phylogénie moléculaire et cladistique — enfin, c'est ce qu'il m'a semblé comprendre, mais je ne suis pas sûr de saisir toute la subtilité du débat) ; heureusement pour moi, en maths, il y a rarement des querelles d'écoles de pensée (et on arrive assez bien à éviter de fâcher qui que ce soit — il faut juste penser à citer tout le monde). Sinon, pour ce qui est des questions, parfois le président du jury invite les membres du public à poser des questions s'ils en ont, parfois non ; aujourd'hui, j'ai été surpris que le président du jury présente les membres du jury au public avant de commencer les questions.
La solennité de la soutenance varie aussi, mais pas vraiment en fonction de la discipline, je pense que c'est plutôt la personnalité des membres du jury qui importe. J'ai assisté à des soutenances qui se faisaient presque religieusement, avec toutes les formules rituelles qui s'imposent, l'assistance qui se lève quand le jury revient après sa délibération, tout ça tout ça, et d'autres qui étaient presque un petit exposé informel. Une autre chose qui varie bizarrement, c'est la taille et la composition de l'assistance : il y a toujours d'un côté les amis et famille de l'impétrant et de l'autre les gens intéressés par le contenu scientifique (l'intersection peut, bien sûr, être non vide, mais la plupart des gens se classent quand même assez aisément), la taille du premier groupe dépend de la personnalité de celui qui soutient, la taille du second dépend notamment de l'ambiance du labo ; j'ai vu des soutenances où le jury formait la moitié de l'assistance et d'autres où la salle était pleine à craquer.
Et puis, évidemment, la qualité du pot à la fin varie énormément.
Celui-ci était dans la catégorie bien, voire très
bien
. (Ceci dit, je n'avais pas eu le temps de
manger à midi, donc j'aurais autant baffré même si ça n'avait pas été
aussi bon.)
[#] Je trouve d'ailleurs amusante l'idée que, quand lui et moi avons fait connaissance, un certain nombre de mes amis actuels n'étaient pas encore nés.