David Madore's WebLog: Compte-rendu de voyage à Dublin

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(lundi)

Compte-rendu de voyage à Dublin

Mon poussinet et moi avons passé un week-end étendu à Dublin. Destination choisie selon le critère que je ne consens à peu près à voyager que dans des villes où je ne me sente pas trop dépaysé, or il s'agissait d'une des quelques capitales de l'Union européenne que mon poussinet n'avait pas encore visitées. Et sinon, le fait qu'il s'agisse d'une grande ville anglophone où on utilise l'euro (plutôt qu'une monnaie désagréablement surévaluée comme la livre), voilà qui est plutôt positif. Nous avons eu de la chance avec la météo, puisque nous n'avons pas eu de pluie.

☞ Mes photos sont ici (globalement sans intérêt, comme d'habitude, d'autant qu'il y en a beaucoup qui me servent simplement à prendre note du fait que j'étais à tel heure à tel endroit ; cliquer sur le ‘i’ entouré dans le coin pour voir le titre, l'heure et le lieu).

Il faut préciser que notre façon de passer notre temps en vacances n'est pas de faire le marathon des musées ou des attractions touristiques mais de flâner tranquillement à la recherche des quartiers sympa, en rythmant cette balade par des repas (petit-déjeuner, déjeuner ou brunch, goûter, dîner… chacun pouvant éventuellement être séparé en deux — plat et dessert — si on veut prendre le café ailleurs), si possible en des endroits d'où on peut regarder les gens passer. Dublin est très bien de ce point de vue-là : là ville est à la fois assez grande pour qu'il y ait beaucoup d'endroits intéressants (en tout cas largement de quoi meubler trois jours) et assez petite pour qu'on puisse se promener tout le temps à pied. Et pour ce qui est de manger, il y a une abondance et une concentration assez impressionnantes de restaurants et de cafés, surtout quand on vient de Paris où on a la sensation que tous les commerces du centre se transforment en boutiques de fringues hors de prix. Et si l'Irlande n'est pas spécialement renommée pour sa gastronomie, ce n'est pas important : d'une part, il y a beaucoup de diversité dans le style des cuisines, d'autre part, nous cherchons plutôt des endroits agréables que de la haute cuisine.

Ce qui m'a plus surpris, c'est d'une part que ce n'est pas spécialement bon marché : je ne sais pas exactement pourquoi, mais j'imaginais que Dublin le serait — or dans les faits, les prix étaient sans doute en-dessous de ceux de Londres, mais à peine en-dessous de ceux de Paris. D'autre part, et ce n'est sans doute pas sans rapport, à quel point c'est populaire : quasiment chaque endroit où nous avons mangé était plein (mais nous avons eu beaucoup de chance, c'était plein juste après notre arrivée). Je ne sais pas si c'est toute l'Europe qui vient ici pour boire de la Guinness ; mon poussinet et moi ne buvons pas, mais il y avait beaucoup de Français et d'Allemands, quelques Italiens et Espagnols, et j'imagine énormément d'Anglais même s'ils sont moins évidents à repérer, et à partir d'une certaine heure on sentait bien que le taux d'alcoolémie moyen des touristes était plutôt élevé. Par ailleurs, le centre-ville (autour de ce coin-là et les deux quais de la Liffey) est un peu un embouteillage permanent : excepté dimanche autour de 10h, à chaque fois que nous passions, c'était pare-choc contre pare-choc. Le fait qu'ils soient en train de mettre en place une nouvelle ligne de tramway ne doit pas aider, mais il sera certainement utile parce que les transports en commun ont l'air assez nuls. Il faut aussi dire qu'Élizabeth Ire a été un peu pénible à fonder une université qui bloque tout en plein milieu de la ville, elle aurait pu penser à la circulation des voitures.

À part ça, Dublin m'a semblé très hétéroclite. Certains endroits ressemblent comme deux gouttes d'eau à Londres, mais on peut faire deux pas et arriver quelque part qui titillait mes neurones à Amérique du Nord (peut-être à cause du nombre d'églises modernes en faux gothique). Certains endroits me faisaient penser spécifiquement à New York, d'autres à Toronto (je serais incapable de dire pourquoi exactement). D'autres encore, à un lieu non spécifié en Allemagne. Les quartiers à l'architecture moderne vers l'est de la ville évoquent Rotterdam ou la HafenCity de Hambourg — d'autres endroits où on a reconverti des installations portuaires en immeubles d'habitations tout neufs. (J'aime facilement ce style architectural — le problème est surtout que ces quartiers nouveaux peuvent manquer de vie.) Quant à l'ouest du centre-ville, où tout semble appartenir à Guinness, il est plutôt déprimant, dans le style des entrepots immenses aux façades aveugles. • La rivière donne une orientation claire à la ville, mais elle n'est pas large au point de la couper en deux (c'est juste dommage qu'elle soit flanquée de quasi-autoroutes des deux côtés). Les parcs ne sont pas très nombreux, mais j'ai bien aimé St. Stephen's Green où les goélands et autres laridés sont bien plus nombreux que les canards et autres anatidés sur les plans d'eau, et surtout Iveagh Gardens, juste à côté mais beaucoup moins visité, un petit bijou un peu caché. Nous avons aussi apprécié quelques quartiers piétons agréables (si Temple Bar est un peu trop touristique et bondé, il y a des rues comme Grafton Street ou Henry Street qui semblent un peu plus fréquentées par les locaux), ainsi que quelques centres commerciaux bien aménagés. • Enfin, je dois dire que je n'avais jamais entendu parler de la Spire de Dublin (aiguille ? colonne ? tour ? spirale ?), une sculpture(?) d'acier en forme d'aiguille de 121m de haut, franchement impressionnante à voir. (Je ne sais pas comment j'ai réussi à ne pas la prendre en photo ; mais bon, ce n'est pas comme si c'était difficile d'en trouver des photos.)

Tout ce qui est officiel est écrit en irlandais (=gaélique irlandais) avant de l'être en anglais : c'est d'ailleurs un bon indicateur pour savoir si quelque chose est officiel, parce qu'à part les autorités qui essaient de maintenir cette langue en vie, il semble qu'essentiellement personne[#] n'utilise l'irlandais, au moins à Dublin. Je ne sais pas vraiment ce qu'il faut penser des tentatives pour garder des langues vivantes face à l'anglais et leur éviter d'être oblitérées par lui (problématique qui concerne d'ailleurs peut-être toutes les langues du monde à l'exception du chinois ? ça me fait penser que je dois toujours écrire la suite de cette entrée). • Toujours est-il que l'irlandais est une langue au moins intéressante à voir écrite : les mots paraissent à la fois totalement invraisemblables et bizarrement poétiques jusqu'au moment où on comprend qu'elle ne se prononce pas du tout comme elle s'écrit. (Exemple au pif : le mot amhlaidh, qui veut dire ainsi, ne se prononce pas du tout comme on peut se l'imaginer à partir de son écriture, mais bien [auliː], à peu près comme le mot anglais owly.) Cette prononciation semble d'abord complètement chaotique (comme celle de l'anglais, en fait…), mais en fait elle n'est pas si irrégulière que ça. Il y a juste quelques choses un peu surprenantes, comme le fait que ao se prononce [iː] ou mh [w] ou [v] (pour combiner les deux, le prénom Caoimhe, qui se donne parfois en Angleterre ou aux États-Unis, se prononce [kiːvə], et se note donc parfois Kiva en anglais). Il y a beaucoup de façons d'écrire un même son et pas mal de lettres qui ne se prononcent pas. Et surtout, il y a la règle qui veut que les consonnes de l'irlandais soient ou bien « larges » (en gros l'équivalent des consonnes « dures » du russe, c'est-à-dire, essentiellement, vélarisées) ou bien « fines » (en gros l'équivalent des consonnes « molles » / « mouillées » du russe, c'est-à-dire, essentiellement, palatalisées) et que pour marquer quelle consonne est quoi l'orthographe demande qu'une voyelle adjacente (=avant ou après) à une consonne large soit a/o/u tandis qu'une voyelle adjacente à une consonne fine soit e/i, quitte à introduire des voyelles qui ne se prononcent pas et qui servent juste à marquer le caractère large ou fin de la consonne. Ainsi, le mot irlandais seaicéad, prononcé [ʃakʲeːd], est-il juste la transcription du mot anglais jacket, le premier ‘e’ servant juste à marquer que l'‘s’ qui précède est fine, le ‘i’ servant à marquer la même chose pour le ‘c’, et le ‘a’ servant à marquer que le ‘d’ est large, si bien que ces voyelles ne se prononcent pas et qu'au final le mot ressemble plus ou moins au mot anglais qu'il transcrit. Une fois qu'on a compris ça, la prononciation de la langue devient soudainement moins mystérieuse.

[#] Tous les écoliers irlandais sont censés l'apprendre, mais apparemment le niveau qu'ils atteignent à la fin de leur scolarité est souvent déplorable, et à peine 40% de la population de la république d'Irlande est capable de parler l'irlandais. La langue est encore vivante dans des régions (Gaeltachtaí) de l'ouest de l'Irlande, mais même là elle est en voie d'être supplantée par l'anglais. D'après Wikipédia, il y aurait un certain renouveau de l'irlandais dans les centres urbains, notamment Dublin, mais le fait est que je n'ai entendu personne le parler dans la rue, sauf peut-être une fois, et encore je n'en suis pas sûr.

Nous sommes partis juste sur le week-end du changement d'heure, ce qui veut dire que nous avons été successivement en +02:00 (en France avant le départ), +01:00 (en arrivant en Irlande), +00:00 (dimanche après le changement d'heure) et de nouveau +01:00 (en rentrant en France). Ce n'est pas comme si c'étaient des gros changements, mais tout ça était tout de même un peu confusant. • Par ailleurs, on sentait bien l'approche de Halloween, qui a l'air très fêté en Irlande (ou du moins à Dublin) si on en juge par le nombre d'affiches et de ventes spéciales à ce sujet.

Sinon, il n'y a pas qu'avec la météo et avec les restaurants que nous ayons eu de la chance. Nous nous sommes rendus compte, hier dimanche à peine une heure avant l'heure limite d'enregistrement des bagages pour notre vol de retour, que nous avions totalement sous-estimé le temps nécessaire pour rejoindre l'aéroport dans l'embouteillage géant qu'est le centre-ville de Dublin : voyant que nous venions de rater un bus à l'arrêt où nous pensions le prendre, et que le suivant n'arrivait décidément pas, mon poussinet m'a fait courir en direction des arrêts suivants, alors même que nous ne savions pas vraiment quel trajet faisait la ligne (d'ailleurs, je n'y comprends toujours rien) ; nous avons doublé un bus comme ça, et peut-être même un deuxième, et sommes tombés un peu miraculeusement sur un autre arrêt de la ligne où un véhicule vide sorti de nulle part nous a ramassés et amenés à l'aéroport tout juste à temps pour courir à l'enregistrement.

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