On m'avait signalé récemment un documentaire potentiellement intéressant de la BBC, Make Me a German (l'Allemagne vue par les Anglais). Le lien qu'on m'avait donné était sur YouTube, je l'avais ajouté à ma watch later list et je n'y ai plus trop pensé. Ce soir je me suis dit que je regarderais bien le documentaire en question.
Première constatation : il n'est plus sur YouTube, la BBC l'en a fait retirer. Forcément, j'aurais dû me rappeler : la BBC ne met pas elle-même des choses sur YouTube, donc si elles y sont, elles vont disparaître rapidement. Première morale de l'histoire (que j'ai déjà rencontrée, mais que je n'ai manifestement toujours pas bien intégrée) : dès que je regarde une vidéo YouTube ou dès que je l'ajoute dans ma liste de vidéos à voir, je devrais la télécharger parce qu'elle risque de disparaître et que je risque d'avoir envie de la revoir ou de la voir. (D'autant que j'ai plusieurs téra-octets d'espace disque essentiellement inutilisés, donc télécharger toutes les vidéos YouTube que je regarde n'est pas spécialement problématique.)
(Au passage, si on se pose la question, ce que
j'utilise pour télécharger les vidéos YouTube,
c'est youtube-dl
,
et je le recommande. D'ailleurs, il ne marche pas qu'avec
YouTube.)
Mais bon, cette histoire m'a donné envie de regarder quand même ce documentaire. Il est (pour encore quelques jours) disponible sur le site de la BBC. Alors pas de problème, il suffit de le regarder ?
Sauf que non, parce que la BBC fait du filtrage par pays sur l'adresse IP : or je ne suis pas au Royaume-Uni. J'ai déjà dû dire tous les supplices que j'ai envie de faire subir à ceux qui utilisent la géolocalisation d'adresses IP (je trouve d'ailleurs que les fournisseurs d'accès Internet ne devraient pas avoir le droit de signaler dans quel pays les IP qu'ils routent sont situées, histoire d'empêcher la constitution de ce genre de bases de données). Heureusement, il existe un moyen de contourner ça : installer Tor (que je n'utilise jamais pour l'anonymat mais souvent pour contourner le géofiltrage), demander un nœud de sortie au Royaume-Uni (et au passage, bien se rappeler que le code ISO du Royaume-Uni c'est GB et pas UK), configurer mon navigateur pour utiliser le Tor en question comme proxy, et recommencer.
Bon, la vidéo se lance dans le navigateur, mais là je me dis, regarder ça à travers Tor c'est risqué, l'émission durant une heure, il est fort probable que ça se mette à merder à la moitié, et je préfère ne rien voir du tout que d'en voir la moitié. Je voudrais donc tout télécharger pour être sûr que j'ai l'intégralité de la vidéo avant de commencer à la regarder. (C'est d'ailleurs ce que je fais le plus souvent même sur YouTube pour une vidéo un peu longue ; en plus, ça me permet d'utiliser la télécommande que j'ai configurée sur mon ordinateur pour fonctionner avec MPlayer, c'est plus agréable.)
L'ennui c'est que la vidéo n'est pas proposée en téléchargement.
Enfin si, mais sous un format (WMV) accompagné de
mécanismes de protection (DRM). (Vous comprenez, si on
ne mettait pas ces mécanismes de protection, les gens pourraient
— horresco referens — partager cette vidéo
disponible gratuitement en ligne.) Quant au lecteur Flash dans le
navigateur, il fait du streaming et ne stocke pas la vidéo dans un
fichier temporaire (ce que certaines versions font parfois, auquel cas
il est facile de la récupérer — même, d'ailleurs, si le fichier se
fait effacer immédiatement, puisque Linux permet de le retrouver
dans /proc/$pid/fd/
et j'en profite
souvent).
Heureusement, il y a
un petit
mode d'emploi ici qui permet souvent de récupérer des
flux RTMP : essentiellement, on demande à la couche
réseau Linux de rediriger le port RTMP (1935) sortant
vers un programme local ad hoc (rtmpsrv
), qui va afficher
la requête produite par le lecteur Flash dans le navigateur sous forme
d'une ligne de commande rtmpdump
qu'il n'y a plus qu'à
recopier (après avoir supprimé la redirection !). Ici, il y a eu
quelques petites subtilités qui ont rendu le timing un peu compliqué
(le lecteur Flash de la BBC commence par jouer un petit
logo animé qui dure environ cinq secondes, donc il faut mettre en
place la redirection pendant ce temps-là ; et par ailleurs, dès qu'on
a la bonne ligne de commande pour l'essentiel de l'émission il faut
arrêter le lecteur Flash du navigateur sinon il fait une connexion par
un autre moyen qui invalide le cookie de téléchargrement qu'on a
reçu).
Bref, j'ai fini par pouvoir télécharger ma vidéo ; mais la manip' a été si longue que je n'ai maintenant plus le temps de la regarder. (Je suppose que, comme d'habitude, un petit malin de commentateur va m'expliquer qu'il est capable de la télécharger en trois secondes sur son Mac ou sa machine Windows. 'Fin bon.)
Je me lamente surtout de l'absurdité de la chose. Je ne suis pas en train de téléchager le dernier blockbuster du moment, je suis en train de téléchager un documentaire que la BBC, service public, a diffusé sur les ondes et met maintenant gratuitement à disposition du public sur son site Web : quel sens cela a-t-il d'en restreindre la diffusion ou de chercher à empêcher qu'on le télécharge ? Même s'ils veulent rediffuser l'émission plus tard ou la vendre à un autre pays (seule explication plausible de la limitation aux IP du Royaume-Uni), quelle importance que deux-trois geeks l'aient déjà vue sur YouTube ? Quelle raison de ne pas tout mettre sur YouTube ?
(Tiens, à ce propos, la chaîne d'informations allemande dont je disais tour récemment qu'elle mettait son journal de 20h sur YouTube a cessé de le faire juste après que je me suis mis à le regarder. C'est quand même vraiment un manque de chance, là. Du coup, je suis à nouveau à la recherche de quelque chose d'équivalent.)