J'aime et je déteste faire du shopping. J'aime parce que je n'apprécie l'argent qu'en le dépensant (ce qui me procure un délicieux frisson « oh non, je n'aurais jamais dû acheter ça, c'était vraiment idiot et inutile ») ou, mieux, en ayant la possibilité de le dépenser : je suis un pur produit de la société de consommation, je trouve terriblement jouissif de rentrer dans un de ses temples païens et de savourer ma liberté, le choix qui se présente à moi. Mais je déteste aussi, parce que quand je regarde dans les détails, je ne suis pas content de l'offre : je ne sais jamais ce que je veux mais je sais clairement que ce n'est pas là. (Et c'est sans doute pour ça que je n'arrive pas à dépenser tout l'argent que je gagne, qui n'est pourtant pas mirobolant.) En fait, l'impression que je ressens est exactement celle décrite par Lewis Carroll dans Through the Looking-Glass (De l'autre côté du miroir) :
The shop seemed to be full of all manner of curious
things—but the oddest part of it all was, that whenever [Alice]
looked hard at any shelf, to make out exactly what it had on it, that
particular shelf was always quite empty: though the others round it
were crowded as full as they could hold.
Passons. En ce moment, les températures baissent à une vitesse dingue, il faut que je prévoie quelque chose à me mettre pour l'automne et l'hiver. De l'an dernier (je ne sais pas où les choses disparaissent si vite, c'est effrayant, on dirait qu'un vêtement ne peut matériellement pas tenir plus qu'un an), il me reste une doudoune (celio* sport) bien chaude et un bombers (d'aucune marque identifiable) qui arrête le vent à peu près autant qu'une passoire arrêterait les eaux de l'Amazone. Et mon sweat actuel me va bien pour le moment, mais si la température descend en-dessous de 12°C ce n'est plus suffisant. Alors, comment trouver quelque chose qui aille bien avec mon (absence soigneusement calculée de) look ? Ben je ne sais pas, je n'y arrive pas, je viens de passer l'après-midi à chercher, et je suis rentré bredouille (avec juste un parapluie acheté au BHV et un torchon de chez Gap pour tenir le temps d'ici que je trouve mieux). Normalement je trouve des choses qui me plaisent dans les collections par Quiksilver et Schott (tiens, ils n'ont pas de site Web, eux ?), mais là j'ai été déçu.
Aussi, je suis agacé tant par les grands magasins, qui présendent des vêtements chers (il n'y a pas si longtemps, la Samaritaine avait encore quelques articles à un prix abordable) et un choix minable eu égard à leur superficie, que par les petites boutiques où on a parfois l'impression en entrant, à la manière dont un vendeur vous fonce dessus, d'être un moucheron qui vient de se frotter à une toile d'araignée.
Je croise plein de gens dans la rue dont je me dis, tiens, voilà des vêtements intéressants. Erreur — ou illusion d'optique : en vérité, ce ne sont pas les vêtements qui sont beaux, c'est la personne qui est dedans.