Comments on Jouons un peu avec les subordonnées relatives

phi (2016-03-12T23:28:38Z)

Pour "ce que", j'aurais tendance à rapprocher:

je cherche une personne que j'ai rencontrée hier (défini)
je cherche une personne que je pourrais rencontrer pour passer le temps (indéfini)

j'ai ignoré ce qu'il m'a dit, je m'en fichais (défini+volontaire)
j'ignorais ce qu'il m'a dit, je n'étais pas au courant (défini+involontaire)
j'ignorais ce qu'il me disait, je n'entendais presque rien (indéfini)

je cherche ce qu'il m'a dit, je l'ai oublié (défini)
je cherchais ce qu'il me disait, je n'entendais presque rien (indéfini)

je demande ce qu'il m'a dit au serveur (défini)
je demande ce qu'il m'a dit à mon voisin (indéfini)

Cela s'analyse souvent par la position du quantificateur, extérieur ou intérieur à la subordonnée. Je ne suis pas persuadé que ça explique tout…

Ruxor (2016-02-17T17:10:17Z)

@Arthur: Merci pour toutes ces remarques et précisions !

Arthur (2016-02-17T16:27:02Z)

@Ruxor : ce que tu dis sur le latin me paraît juste. Quelques précisions :

a) comme tu le sais, ayant cité par le passé la phrase de l'évangile « Pater, ignosce illis, quia nesciunt quid faciunt. », le latin dit vulgaire mettait souvent l'indicatif dans les interrogatives indirectes. Félix Gaffiot, dans son ouvrage _Le vrai latin_, dit que bien des exemples où l'on a l'indicatif et non le subjonctif, y compris chez Cicéron (p. ex. Fin. IV, 24, 67), peuvent être expliqués en analysant les subordonnées comme des relatives et non des interrogatives indirectes, mais sa démonstration n'est pas entièrement convaincante car on a aussi des interrogations indirectes globales (en -ne ou num) à l'indicatif.

b) À propos de « audivi quod dicebat / quid diceret », tu dis « je crois que le latin va nettement préférer l'interrogative ». Je ne sais pas trop, mais je sais que le même ouvrage de Gaffiot commence par une attaque en règle contre cette idée…

c) sur la phrase (française) « je vois qui tu as aimé ». Il ne peut s'agir que d'une interrogative indirecte, d'après moi. Le "qui" simple, employé pour "celui qui", a en effet une valeur indéterminée, comme dans « invite qui tu veux » : on ne peut pas donner de nom à ce "qui". Pour la morphologie, ce "qui" est un interrogatif, puisqu'il ne désigne que des animés et peut être sujet ou objet. Son équivalent pour les inanimés est "que", qui ne subsiste que dans quelques expressions comme « advienne que pourra », où "que" = "ce qui". Le phrase « j'ai rencontré {qui tu aimes} » me paraît très étrange pour cette raison, puisqu'on ne peut l'analyser comme une interrogative indirecte et qu'on suppose que la personne est bien déterminée.

Même remarque pour "où" : c'est "là où" si je peux nommer le lieu (s'il est déterminé), "où" ou "là où" sinon. Donc je ne dirais pas « je reviens où nous nous sommes rencontrés », mais « je reviens là où nous nous sommes rencontrés ». En revanche, « Retourner (là) où on a rencontré l'être aimé est émouvant » me semble aller. Même remarque que pour "qui/que" : ce "où" est un interrogatif, puisqu'il n'a que le sens spatial (cela fait partie de la fameuse asymétrie qui t'agaces). La phrase « je serai présent où tu auras besoin de moi » me semble bizarre non pas à cause des questions de détermination évoquées précédemment, mais parce que le sens de la subordonnée est plus temporel que spatial ; « je serai présent là où tu auras besoin de moi » est moins étrange, car l'interprétation est plus ouverte.

Bref, ces subordonnées sont bien des relatives (indéterminées) mais introduites par des interrogatifs ! C'est pourquoi :
- elles n'ont pas d'antécédent
- le subordonnant a le sens de l'interrogatif et non du relatif
- elles définissent une entité ou un lieu indéterminé

Elles peuvent toujours, néanmoins, être remplacées par de vraies relatives avec antécédents. Cf. le grand poète Florent Pagny, qui fait alterner les deux formes et montre bien, par sa question, que ledit lieu est indéterminé :
« Je vais où le feu brûle, où le froid glace
Je vais là où les faux semblants s'effacent
Où, je sais pas, mais, est-ce que tu me suis ? »

Peut-être as-tu des contre-exemples, toutefois ?

c) Le système que tu proposes pour simplifier les relatives, avec un subordonnant comme "tel que", existe dans bien des langues, mais sous une forme moins spécifique puisqu'il ne s'agit pas de "variables locales" mais de simples anaphoriques :
- en grec moderne démotique, le subordonnant που introduit une relative sans être pronom (τὸ παιδί που είδα τὴ μητέρα του « l'enfant dont je connais la mère ») ;
- idem en syriaque avec le subordonnant ܝ (d)
- même chose en français populaire (Ma gonzesse / celle que j'suis avec / Ma princesse / Celle que j'suis son mec) ou en ancien français

En ce cas, les fonctions subordonnante et anaphorique du relatif sont dissociées (cf. Chr. Tour., _La relative. Essai de théorie syntaxique_, qui traite longuement de ce sujet).

Il semble que j'avais d'autres choses à ajouter, mais c'est déjà assez long comme ça…

mantory (2016-02-06T14:40:09Z)

Et si on donnait l'orthographe anglaise comme parfait produit de l'anti-prescriptivisme ?

♥♥♥♥♥ “When you correct someone's grammar, try to remember those roles are like the stars you see through the telescope, just pretty echoes of the long dead.” <URL:http://asofterworld.com/index.php?id=1003>

SB (2016-02-05T19:43:49Z)

@Régis: ce qui manque au billet de Forator, c'est une argumentation: pourquoi voit-on un « monstre » dans « une double indéfinition, ou indétermination, structure par laquelle on ne fait que poser du flou sur du flou » ? Au contraire, on peut bien avoir « une double indéfinition » si, en disant « un songe d'une nuit d'été », on décide de ne préciser *ni* de quelle nuit on parle ni, parmi les rêves relatifs à ladite nuit, de quel rêve on parle.

Je ne comprends pas non plus le reproche fait à « un temple de la futilité triomphante »: outre qu'il me semble très exagéré de dire que « _triomphant_ [est] voisin de _suprême_ », rien n'empêche d'avoir *plusieurs* temples: Zeus est peut-être un dieu suprême, ça n'empêche pas de lui consacrer de nombreux temples et donc de parler d'*un* de ces temples.

Ruxor (2016-02-05T01:22:23Z)

@XTO: Ça aussi c'est un commentaire qui illustre des présupposés prescriptivistes intéressants. L'idée que l'Académie française, ou l'Éducation nationale française (en vérité, si j'ai compris, l'Académie a avalisé cette réforme à reculons il y a 25 ans, l'Éducation nationale a tergiversé pendant tout ce temps et rien n'a changé récemment à part que des gens se sont mis à en parler) auraient le pouvoir de changer la langue française, comme si la langue française dépendait d'autorités qui décident ce qu'on a le « droit » ou pas d'écrire, ce qui est « correct » et ce qui ne l'est pas. C'est vraiment amusant, comme idée. (Surtout celle de conférer à 40 personnes élus par leurs pairs, c'est-à-dire par personne, ou même aux autorités d'un seul pays, un pouvoir sur une langue parlée par plus de 200 millions de personnes dans le monde entier, et qui est une langue officielle de quatre pays rien qu'en Europe. En plus d'être amusant, c'est un peu franco-centré…) Mais il y a aussi le présupposé, que je signale pour la troisième fois rien que dans ce thread, que chaque mot a une seule écriture « correcte », donc que les accents circonflexes seraient « supprimés » lorsqu'on décide d'accepter une variante orthographique sans eux.

J'avais mis de côté un bout d'entrée où je cherchais à enfoncer le clou sur le prescriptivisme, mais finalement je vais sans doute la ressortir.

XTO (2016-02-04T23:49:04Z)

Très intéressant, merci.
Et pendant ce temps, l'académie supprime l'accent circonflexe…

Régis (2016-02-01T12:47:52Z)

Sur la redondance de l'indéfini:<URL:http://la-grammaire-de-forator.over-blog.fr/article-l-abus-de-l-article-indefini-ou-la-double-indetermination-103497224.html>
Notons que Victor Hugo et Leconte de Lisle écrivent: "le soir d'une bataille"

Ruxor (2016-01-31T18:02:12Z)

Je pense en effet qu'il serait temps de clore cette discussion, la valeur ajoutée de laquelle tend vers 0 à une vitesse assez effarante.

Ce que je trouve surtout dommage, c'est qu'à part quelques questions de jonas et le commentaire de Gabriel au début, personne ne s'est apparemment intéressé au sujet dont j'ai vraiment parlé (à savoir, la complexité des constructions des relatives, et la difficulté à décider quelles fonctions dans une phrase on peut subordonner ou pas), seulement à rabâcher ce que j'ai utilisé comme prétexte pour amener ce sujet (la phrase de départ). Il y a même des gens qui ont réussi l'exploit de ne pas lire au point de penser que toute l'entrée était écrite pour défendre cette phrase. Alors certes, qui sème le troll récolle les trollions [←nom des bébé trolls], je suppose que je ne peux m'en prendre qu'à moi-même, mais ma plainte contre les grincheux au message précédent était surtout qu'ils ignoraient complètement le fond de ce dont je parle (genre, la calculabilité) pour parler de quelque chose de complètement accessoire, et ce message est passé apparemment inaperçu.

Arthur, toi qui es fin latiniste, tu ne voudrais pas plutôt me dire si mes conjectures sur « video [eum] quem amas / video [id] quod amas / audivi quod dicebat » contre « video quem ames / video quid ames / audivi quid diceret » te semblent sensées, par exemple ?

Quentin (2016-01-30T23:25:23Z)

@Arthur

On ne va pas refaire la discussion… Je pense que ma réécriture convient, et d'ailleurs peu importe j'en ai proposé deux.

Arthur (2016-01-30T14:53:42Z)

@Dionysos : « chouette, un nouveau distributeur de noms d'oiseaux… » ?? Y a-t-il quelqu'un qui distribue des noms d'oiseau ici ??? (à part « chouette », bien sûr)

@Quentin : comme déjà dit, « le groupe du cours » n'est pas « un groupe du cours » ni « un des groupes du cours », donc ta réécriture ne convient pas. En fait, c'est l'expression « groupe du cours » qui est bancale : ça passe dans bien des contextes, mais ça peut poser problème dès que la construction de la phrase n'est pas claire. Remplacer « groupe » par « sous-groupe » ou « section » clarifierait pas mal les choses, mais ce n'est pas la terminologie en vigueur dans l'école de David (on aurait pu s'attendre à ce que des scientifiques soient un peu plus rigoureux, mais bon…).

N (2016-01-30T13:22:16Z)

Selon Ruxor, le grammairien prescriptiviste est un être lâche qui s'appuie sur un système pseudo-logique pseudo-représentatif pour écraser certains énoncés de son weblog qui lui semblent défendables sur la forme parce que non-ambiguës et attestées par de nombreux auteurs. Pour se défendre, il écrit un long post qui explique pourquoi les grammairiens prescriptivistes sont des grammai-rien-s.

Ruxor est pour moi un super-héros qui défend l'Univers, contre les pseudo-scientifiques, contre leurs apparats pseudo-logico-numérique. Ruxor veut que l'Univers résiste à cette magie funeste. Souvent d'ailleurs, il a affaire à des Rats qui veulent écraser des énoncés Véritablement Scientifique. Ça vient de se produire dans le commentaire 22210 (*), mais c'est beaucoup plus drôle (et juste àmha) quand on parle d'autres crackpots (**).

(*) <URL:http://www.madore.org/cgi-bin/comment.pl/showcomments?href=http%3a%2f%2fwww.madore.org%2f~david%2fweblog%2f2016-01.html%23d.2016-01-16.2353#comment-22210>
(**) <URL:http://www.madore.org/~david/weblog/d.2015-03-17.2283.html>

Tout cela est associé à deux questions, chères je crois à tout scientifique :
A) Un système mathématique peut-il décrire de la réalité ?
B) Peut-on et doit-on écraser les énoncés des autres sous prétexte d'écart à la logique ou au système ?

Nous vivons dans un monde où le faux-chiffre et la pseudo-science envahissent tous les discours (question A) pour écraser les discours des autres (question B) -- c'est là en partie la barbarie de Michel Henry (***). Par exemple, toute phrase à un politique qui commence par «les sondages vous…» est une parfaite phrase pseudo-scientifique faite pour réduire la parole des autres à VRAI/FAUX suivant le système précité.

(***) <URL:https://fr.wikipedia.org/wiki/Michel_Henry#La_barbarie>

Et je comprends que face au commentaire 22210, Ruxor se fâche, et tous les super-héros avec lui, parce que justement on est face à un grammai-rien. Ruxor expose sa théorie : une grammaire qui prescrit davantage a tendance a décrire moins bien les phénomènes linguistiques et leur évolution, donc il ne faut rien prescrire du tout.

Mais la grammaire prescriptiviste n'est-elle vraiment qu'un outil pseudo-logique pseudo-représentatif ? N'a-t-elle pas des vertus ? Pourquoi est-ce qu'il faut jeter l'eau avec le bébé du bain ? Ça marche pas mal la grammaire prescriptiviste, non ? Je parle là, non pas de la grammaire prescriptiviste en tant que système formel pour décrire la réalite (A), ou de système pour écraser les énoncés des autres (B), mais bien de la grammaire prescriptiviste en tant que système pédagogique. Ce sont des questions sur lesquelles je n'ai aucune donnée et aucune référence pour le moment.

PS : et euh Ruxor, crois-moi, si l'humain du commentaire 22210 n'avait pas utilisé la grammaire pour écraser un de tes énoncés, il aurait utilisé autre chose. Le mépris prend tous les outils qu'il trouve sur son chemin.

Quentin (2016-01-29T12:54:51Z)

Je maintiens que le double "un" ajoute à la confusion pour la raison suivante. La principale source de confusion vient de ce qu'on ne voit pas immédiatement que le "dont" est censé relier le groupe et le cours dans la phrase, et on est naturellement tenté de le remplacer par un "que". Or l'utilisation d'un article défini (sans référence préalable à un groupe) laisse penser que le groupe se rapporte en effet au cours, ce qui est la bonne interprétation :

- "Un cours dont j'enseigne au groupe"

Ou si vous préférez :

- "Un cours dont j'enseigne à l'un des groupes"

Plus difficile de remplacer par "que" s'il n'est fait aucune mention de groupes dans ce qui précède… Et alors l'interprétation du "dont" comme visant à spécifier de quel(s) groupe(s) on parle prend le dessus.

Bref il y avait différentes façons simples de lever l'ambiguïté qui correspondent toutes je pense à un "bon usage", qu'il soit stylistique ou grammatical.

Dyonisos (2016-01-29T08:30:27Z)

@ Arthur : chouette, un nouveau distributeur de noms d'oiseaux…
Bon, ma phrase correspondait à un moment où je devinais bien qu'il y avait quelque chose qui m'échappait dans mon impression que la phrase en discussion initiale clochait, mais où je n'avais pas repéré le principe où ça se jouait et avait juste pour but de suggérer que la phrase avec un que eût été préférable, et le un cours au lieu du le cours était là pour parler du cours qu'on enseignait à l'intérieur du cours en bloc comme entité administrative ou "contenant" par rapport au contenu. Désormais je l'enlève et je crois avoir mieux compris (c'est le jeu des synonymies sur les deux sens du mot cours, classe etc dans les deux commentaires initiaux qui m'a fait réaliser mieux la source de mon impression que quelque chose clochait) et il va de soi que cette proposition que j'avais faite tombe à l'eau, n'a plus de pertinence pour moi.
Par contre, je ne crois pas comme Arthur dans cette dernière remarque que la question sur le terme "enseigner" soit si étrangère que cela à la perplexité sur "cours". Bien sûr que cours se prend parfois au sens de classe, quand on dit "j'ai cours de maths" etc et tous les lecteurs du blog saisissent je pense cette acception dans CE contexte. Mais "enseigner un cours" est tellement répandu avec le sens du "contenu didactique" par opposition au contenant/classe que la méprise de la quasi-totalité des lecteurs je suppose est inévitable, et c'est de négliger cette espèce de réflexe sémantique dans ce contexte précis que provient à mon sens la maladresse de Ruxor lorsqu'il a rédigé ce passage.

Arthur (2016-01-28T14:52:14Z)

Chouette, un nouveau participant à la discussion de l'année, qui propose une nouvelle réécriture de la phrase !

Le problème, à mon avis, avec l'expression « …dans le cadre d'un cours dont j'enseigne à un groupe… », c'est qu'à la fois
[1] elle ne respecte pas les règles d'usage de « dont » prescrites dans les grammaires (ce que David revendique)
[2] *et* elle emploie les mots « cours » et « groupes » dans des sens légèrement différents de leur sens habituel.

Sur [2] : David a expliqué ailleurs les règles d'organisation des « cours » et des « groupes » dans son école, et c'est beaucoup plus clair quand on l'a lu. Cette terminologie est cependant devenue tellement naturelle à David que je pense qu'il ne voit pas ce qui peut poser problème à d'autres (enfin, ce doit être un petit problème car beaucoup de gens extérieurs à son école ne le voient pas non plus, et moi-même j'ai mis du temps à mettre le doigt dessus. J'avais écrit un long rant sur la question (que je n'ai jamais posté) : je pense qu'une bonne partie du problème vient de là).

C'est pour ça, à mon avis, que toi et d'autres êtes troublés par cette phrase. Si David avait écrit "…dans le cadre d'un cours à un groupe duquel j'enseigne…" (point [1]), cette incompréhension aurait été évitée (on n'aurait eu que des discussions interminables sur la construction du verbe « enseigner »).

C'est peut-être utile, finalement, de respecter les règles de grammaire…

Dyonisos (2016-01-27T21:46:09Z)

Ah non je viens de comprendre, cours au sens de classe comme indiqué au début par Vicnent et Nil. Bon en même temps "enseigner un cours" est tellement courant avec le sens de contenu et non pas d'organisation de l'auditoire que c'est normal de s'être trouvé confronté à cette remarque. C'est donc à mon avis correct bien que mal dit, parce que négligeant le sens massivement présent à l'esprit du lecteur lorsqu'il tombe sur cette phrase.

Dyonisos (2016-01-27T21:12:59Z)

Sur tout le buzz desciptiviste/prescriptiviste en matière de grammaire, je reste songeur : qu'est-ce que ça peut bien signifier que la grammaire n'est pas normative en soi ?? Elle se compose de règles par définition, et ces règles ont vocation à s'appliquer dans une langue, il y a d'ailleurs tout un processus et des institutions chargés d'y veiller de l'école à l'académie. Si on dit, comme Booba, "je voulais savoir pourquoi l'Afrique vit malement", non cet adverbe bien que très compréhensible (c'était d'ailleurs son argument dans une interview, tout le monde comprend !) n'est pas correct, de même que si on écrit les fleurs que j'ai offert, tout le monde comprend mais la règle du participe passé n'est pas respectée. A la limite le plus drôle que j'ai entendu à ce sujet était un passage de rap dans les 90s avec Oxmo et Bauza je crois "nique les règles grammaticales, on est pire que des animals, là c'est clair que c'est conscient et réfléchi donc pas une véritable faute puisque la saveur de cette phrase joue sur la maîtrise implicite de la règle violée.)
Ce qui a retenu mon attention c'est qu'il y avait dans tes commentaires des commentaires sur ce post plus ou moins le même schème que ce qui affleurait dans les quelques mots récents sur les règles morales : 1) l'axiome/théorie que ces règles découlaient 'd'un processus de sélection" 2) le lien (pour moi très mystérieux et discutable) de cette idée avec l'absence de normativité "absolue" des règles considérées.

Dyonisos (2016-01-27T20:42:25Z)

Bon les explications ont leur pesant de logique et de force argumentative. Pourtant, c'est un choix contestable que de négliger l'oreille des locuteurs relativement à leur langue maternelle. J'avoue que cette expression "un cours dont j'enseigne à un groupe" m'a fait l'effet d'une incorrection, elle sonne très mal. L'usage est peut-être justifiable théoriquement mais très hétérodoxe. La pente hyper spontanée est bien à ce qui me semble d'écrire "le cours que j'enseigne à un groupe" ou plus exactement "UN cours que j'enseigne à un groupe", là tout le monde comprend : tu enseignes un cours et le que vient indiquer la fonction COD.
Je ne crois pas qu'il faille trop s'exciter pour une question aussi mineure ! Si de ton côté, au lieu de taxer de noms d'oiseaux les personnes ayant pointé la bizarrerie, tu reconnaissais que l'expression "un cours que j'enseigne à un groupe" est parfaitement correcte et bien plus naturelle, ça pourrait aussi être un pas avant dans la direction du français bien compris.

Arthur (2016-01-26T19:54:07Z)

@Ruxor: Le truc avec les prescriptivistes, c'est qu'on les cherche en vain (à moins que forator n'écrive ici sous un pseudo) ;-).

Même Quentin, à qui j'imagine que ce message s'adresse, a dit plus haut qu'il était « globalement d'accord (en faveur du descriptivisme) »…

Alors qui ?

Par ailleurs, dire « on ne dit pas "on ne dit pas (B), on dit (A)" », est-ce du prescriptivisme ? Est-il interdit d'interdire ?

Et les gens qui emploient souvent des tournures comme « on ne dit pas (B), on dit (A) » pensent-ils nécessairement qu'entre deux formulations, il y en a forcément une qui est plus correcte que l'autre ?

Et même l'Académie dit (entre autres) qu'il faudrait écrire « évènement » et non « événement » ? Alors, n'est-on pas en train de brûler des hommes de paille (j'espère que tout le monde comprendra cette expression) ?

Et l'important n'est-il pas de déterminer dans quelles conditions « un X d'un Y » est acceptable et pourquoi, et dans quel cas ça sonne bizarre ?

Ruxor (2016-01-25T23:24:18Z)

Le truc avec les prescriptivistes c'est qu'ils ont souvent cette idée (absurde) qu'entre deux formulations il y en a forcément une qui est plus correcte que l'autre — qu'ils expriment souvent avec des tournures comme « on ne dit pas (B), on dit (A) ». Seulement, ce n'est pas du tout comme ça que le langage fonctionne : quand il y a deux tournures entre lesquelles on hésite, ce qui se passe n'est typiquement pas que l'une déplace l'autre, mais qu'elles prennent une nuance de sens qui les sépare. Et le présupposé sous-jacent à « on ne dit pas (B), on dit (A) » est idiot : le fait qu'on dise (A) ne signifie pas qu'on puisse *aussi* dire (B), qui pourra très bien avoir exactement le même sens, mais, encore plus probablement, avec une différence subtile d'emploi, de connotation ou de coloration. Je l'ai déjà dit dans le deuxième paragraphe du commentaire daté 2016-01-23T18:41:26+0100, mais c'est passé inaperçu parce que les gens sont tellement obsédés par l'idée d'avoir « la » formulation la plus correcte que l'idée que cette notion soit tout simplement basée sur un présupposé faux leur a échappé.

Pour dire les choses plus concisément, le fait qu'il y ait plusieurs manières également bonnes de dire quelque chose est une caractéristique essentielle du langage humain. (Et ce n'est pas un hasard que Larry Wall, l'inventeur de Perl et linguiste à ses heures perdues à moins que ce soit le contraire, ait fait de « There's More Than One Way To Do It — TMTOWTDI », un slogan essentiel de son langage.)

Donc oui, bien sûr, on peut demander à des gens leur avis sur « le X d'un Y », mais on peut aussi leur demander sur « un des X d'un Y » ou sur « un X de Y » ou encore plein de variantes (si on en teste deux, autant les tester toutes) : je crois que personne n'a exprimé de doute sérieux sur le fait que ces différentes variantes sont, au moins dans beaucoup de cas, correctes et satisfaisantes. Le point sur lequel il y avait doute, c'était de savoir s'il y avait quelque chose à reprocher à « un X d'un Y », c'est pour ça que j'ai demandé à mes volontaires de réagir à cette tournure-là (et en grosse majorité ils en étaient contents). Si on demande aux gens s'ils préfèrent (A) ou (B), on les pousse à se former une préférence, ce qui falsifie l'expérience (après, je leur ai demandé de s'exprimer librement après, et la majorité ont dit qu'ils préféraient effectivement « un X d'un Y », mais ça me semble relativement peu intéressant de savoir qu'ils le préféraient par rapport au fait que spontanément ils ne trouvaient rien à y redire, et en tout cas je n'en tire pas la conclusion que « le X d'un Y » est mauvais).

frankie (2016-01-25T23:01:31Z)

« Il me montre une page d'un livre ancien : j'y reconnais une prière propitiatoire d'une religion aujourd'hui oubliée. »
"La prière" indiquerait qu'elle est par ailleurs bien connue- et peut-être bien plus que la religion réputée oubliée-, au moins par le sujet, ou qu'elle est "la prière propitiatoire" associée à cette religion. Dans le premier cas, je préciserai(s!) en plaçant une virgule après "propitiatoire", ce qui lèverait l'ambiguïté.
Ici, "une prière" indique un élément cognitif identifié comme une prière (propitiatoire…Hum…"sacrificielle" sonne mieux).
"Une page" ne signifie a priori pas qu'elle aurait été prise au hasard. Au contraire, on peut imaginer qu'elle a été choisie par avance. Usage déboussolant donc…
« nous avons mis la main sur la copie d'un document confidentiel » et « …sur une copie d'un document confidentiel »
On insiste plus sur le document précis (cette copie d'un document confidentiel) dans le premier cas, et sur le fait qu'il existe des copies dans le second cas (au moins une sur laquelle on a mis la main…). Mais le contexte s'éclairant par la suite, on peut aussi être amené à faire sauter la seconde assertion, et la remplacer par la première. Ou inversement… On peut facilement anticiper un changement de sens. D'où une tendance du lecteur à confondre les deux assertions dans une sorte d'assertion moyenne, qui s'orientera en fonction de la suite. Pourtant, dire que la phrase est équivoque me semble inexact. Je dirais plutôt qu'on s'ouvre des portes, avec de temps en temps la possibilité d'en refermer. On se crée des arbres de lecture avec parfois de multiples ramifications, et par moment la nécessité d'en élaguer certaines. C'est pour ça que je préfère dire que la phrase (et la langue qui la supporte) est éventuellement multivoque (c'est un néologisme).
"Un poème, c'est un ami que l'on rencontre sur la page jaunie d'un livre, d'un vieux cahier oublié, qui va cheminer a vos côtés."
C'est évocateur. "la page jaunie" désigne génériquement une page que l'on a l'habitude de lire et relire, et sûrement pas la page jaunie à laquelle une lecture au premier degré nous ferait accroire. Dans cette seconde hypothèse, on écrirait "une page jaunie d'un livre".

Quentin (2016-01-25T22:35:39Z)

@Ruxor
Non il s'agit de savoir quelle est la formulation la plus correcte.

Camille (2016-01-25T18:38:37Z)

@Quentin

Il est possible que, sans la discussion précédente et en lisant rapidement, je ne vois pas ces problèmes. Je testerai en reprenant d'anciennes lectures. Par contre si on me demandait mon avis sur le texte je critiquerais l'usage de certains articles définis.

@Ruxor

Les deux questions m'intéressent. Ton « il ne faut pas » me semble bien directif !

Ruxor (2016-01-25T18:24:14Z)

Ah non, il ne faut pas faire le test "dans les deux sens" : la question n'était pas de savoir si « la page d'un livre » était bon, mais de savoir si « une page d'un livre » l'était (puisque c'est cette construction qui a été critiquée, à la limite peu importe ce qu'on peut dire d'autre).

Arthur (2016-01-25T18:14:36Z)

@Ruxor : Outre l'âge, il serait bon de faire varier aussi la formation des personnes interrogées. C'est une remarque de Camille, qui évoque sa possible déformation professionnelle de matheux, qui m'y fait penser. De fait, dans les réponses du forum reviennent beaucoup les notions de correction et de logique, et personne n'évoque la question du style ni la possibilité d'écrire les phrases autrement pour que leur compréhension soit plus simple. Je crains de manquer de temps pour mener une recherche plus poussée, mais cette discussion m'aura au moins fait réfléchir.

Quentin (2016-01-25T17:02:29Z)

@Ruxor

Le problème est qu'il faut faire le test dans les deux sens et à des personnes différentes pour ne pas biaiser le résultat.

@Camille

Je soupçonne que ce soit à cause de la discussion qui a précédé.

SB (2016-01-25T16:42:57Z)

« le genre de grincheux dont j'imagine qu'ils doivent lire des blogs sans aucun intérêt pour le fond, par simple plaisir de pinailler sur la grammaire »

J'ai l'impression que les grincheux et les pinailleurs sont à l'origine de l'un des billets les plus commentés de ce blog :-)

Camille (2016-01-25T15:34:29Z)

Il serait effectivement intéressant de faire l'autre test (par exemple avec le dernier texte de Quentin ou un texte plus court pour qu'on ne devine pas le jeu). Personnellement (mais je me répète) le texte de Quentin me pique le cerveau !

Ruxor (2016-01-25T14:12:38Z)

J'aurais dû ajouter dans mon dernier commentaire la précision que les gens qui ont répondu ont, à la louche, entre 25 et 45 ans (ça peut avoir de l'importance si la langue a évolué ; j'essaierai de penser à poser la même question à des collègues plus âgés).

Ruxor (2016-01-25T11:29:25Z)

@Quentin: J'ai posé une question de ce genre sur le forum des anciens élèves de l'ENS (ou peut-être un forum d'anciens élèves, en fait… ;-). J'ai demandé spécifiquement à ceux qui lisent les commentaires de mon blog de ne pas répondre. Il s'agit de locuteurs natifs du français, et qui maîtrisent raisonnablement bien la langue mais ne sont pas grammairiens ou linguistes (sauf le "Arthur" de ce thread de commentaires, mais qui n'a pas répondu à la question initiale puisqu'il était déjà spoilé). Sans préciser quelle pouvait être la difficulté, je leur ai demandé de me dire s'ils trouvaient quelque chose d'incorrect, problématique, bizarre, artificielle, difficile à comprendre ou inélégant avec la phrase suivante :

« Il me montre une page d'un livre ancien : j'y reconnais une prière propitiatoire d'une religion aujourd'hui oubliée. »

Six personnes ont répondu qu'elles n'avaient absolument rien à redire à la phrase (sauf éventuellement le mot « propitiatoire », que j'avais semé là pour que ce soit un peu moins évident quel phénomène je voulais tester). Une personne a répondu que « la prière » avait le même sens et semblait « plus usuel », mais que pour le premier membre de la phrase il garderait de toute façon « une page ». Une huitième personne a dit qu'elle aurait écrit « une page de livre » (mais n'a pas commenté sur le deuxième membre).

Il y a ensuite eu une discussion à chaud (une fois que le phénomène à découvrir a été révélé) : les participants sont globalement restés sur leurs positions, et tout le monde est d'accord, il me semble, sur le fait que *dans certains cas* on *peut* remplacer « un X d'un Y » par « le X d'un Y », que *parfois* c'est même légèrement préférable, mais que la formulation initiale n'est pas problématique en elle-même. Le fait qu'on puisse faire ce remplacement a été jugé plus ou moins logique par les participants et expliqué par divers phénomènes (pas seulement la détermination).

Arthur a demandé de commenter aussi les phrases suivantes :

Il vit dans une province reculée d'un pays arriéré.
Je me suis pris la branche d'un arbre dans la figure.
Un poème, c'est un ami que l'on rencontre sur la page jaunie d'un livre, d'un vieux cahier oublié, qui va cheminer a vos côtés.
J'enseigne à un groupe d'un cours intitulé "Théorie des Langages".

— mais c'est un peu tôt pour synthétiser des avis. Globalement, les phrases avec articles indéfinis ne choquent pas, celles avec l'article défini non plus mais certains considèrent qu'on pourrait aussi bien mettre l'article indéfini. Il y a eu un petit débat pour savoir si « nous avons mis la main sur la copie d'un document confidentiel » et « …sur une copie d'un document confidentiel » ont exactement le même sens ou non (les deux qui ont réagi là-dessus semblent penser qu'il y a une très légère différence de sens, mais que les deux phrases sont également bonnes).

Quelqu'un a trouvé un article de blog (par ailleurs terriblement péremptoire en mode « c'était mieux âââvant ») qui dénonce cette double indétermination : <URL: http://la-grammaire-de-forator.over-blog.fr/article-l-abus-de-l-article-indefini-ou-la-double-indetermination-103497224.html >. Mais ma synthèse de l'ensemble, c'est que l'idée que ce serait une mauvaise tournure est un délire de prescriptiviste.

Regis (2016-01-25T08:05:45Z)

@ Quentin @camille
Je pense que les deux sont corrects (la chambre et une chambre) mais que la chambre est plus soutenu, la répétition des indéfinis étant peu agréable à l'oreille.
En outre, si la chambre en question est la chambre d'un hôtel, on peut souligner qu'elle n'est plus si indéfinie que cela…

Ellen (2016-01-25T08:01:32Z)

Puisqu'on est dans la grammaire, tu écris "une des difficultés qui va survenir est qu'il n'y a tout simplement pas assez de pronoms relatifs". Si on décompose la phrase, (difficultés qui va survenir) forme une partie indépendante du reste, qu'on pourrait renommer par "problématiques" (pour garder un mot féminin) ; la phrase deviendrait alors "une des problématiques est qu'il n'y a pas…", ce qui a un sens. Par conséquent, "va" devrait s'accorder en nombre avec "difficultés" (dans "difficultés qui va survenir"), et ce serait plutôt : "une des difficultés qui vont survenir est qu'il n'y a pas…", non ? (en d'autres termes, il me semble que "qui" est le pronom pour "des difficultés", et non pas pour "une").

Quentin (2016-01-25T07:50:23Z)

Je propose de faire lire le texte suivant à des cobayes pour leur demander s'ils voient quelque chose qui cloche, puis la même version avec des "un" à d'autres cobayes :

"C'était au fin fond de la province reculée d'un pays lointain. J'ai pris mes quartiers dans la chambre d'un vieil hôtel délabré du centre ville qui en comptait en tout une dizaine. Il était géré de manière assez peu efficace par l'ancien étudiant d'une grand école d'hôtellerie parisienne, qui n'y prêtait en fait aucune espèce d'attention. J'eus juste le temps de prendre en hâte quelques notes sur la page jaunie d'un vieux carnet avant de me rendre à la faculté pour y donner cours. En chemin, distrait, je manquais à plusieurs reprises de marcher sur le pied d'un passant ou de me prendre la branche d'un arbre (ou la portière d'une voiture) en pleine figure, mais j'arrivai enfin sain et sauf à la faculté. Les différents cours y étaient chacun divisés en plusieurs groupes d'étudiants, et j'enseignais pour ma part au groupe d'un cours de théorie des langages."

Pour moi il n'y a aucun problème, par contre si je met des "un" partout ça pique un peu les oreilles (y compris la dernière occurrence…).

Camille (2016-01-24T18:23:52Z)

@Quentin

« J'ai marché sur le pied d'un passant »

Je dis effectivement cela.

« Je me suis installé dans la chambre d'un hôtel du centre ville »

Pour moi ce n'est pas correct (à moins qu'il n'y ait qu'une chambre). Je dis sans hésiter « une chambre » et je suis choqué par ta formulation.

« je me suis pris la branche d'un arbre dans la figure »

Là j'hésite. Ça ne me choque pas trop et je pense qu'à l'oral je pourrais utiliser « la ». Dans un écrit soigné j'utiliserais « un » ou alors je formulerais autrement la phrase (« une branche d'arbre » peut-être).

Sur « la page » ou « la page jaunie » j'y vois la marque de l'unicité de la page en question. Je dirais « une page » sans hésiter si ce n'est pas le cas.

Comme dit précédemment, c'est peut-être une déformation professionnel de matheux. Mais l'usage d'un article défini quand le sens réclame un article indéfini est clairement une bizarrerie de la langue. Je ne m'en étais pas rendu compte, j'ai donc appris quelque chose !

Dans les bizarreries beaucoup plus ennuyeuses en français il y a le fait que « ne … pas » n'est pas toujours une négation.

Quentin (2016-01-23T23:34:33Z)

@Arthur

Et "je regarde les passants depuis la chambre d'un hôtel du centre ville" ?

avs (2016-01-23T22:52:18Z)

"La page jaunie" peut se comprendre comme un matériau.
Comme dans "J'écris sur le bois de l'arbre"
Et comme dan "j'écris sur le bois pourris de l'arbre" on ne sait pas si j'écris sur le sous ensemble pourris de l'ensemble du bois, ou si je précise au passage qu'il est pourris.

En tout cas j'écris sur la page extra fine de la Bible, personne n'a l'impression que j'ai choisi celle qui est extrafine.

Arthur (2016-01-23T21:36:00Z)

@Ruxor : Ton exemple avec la page jaunie est amusant, parce que, contrairement à toi, « un mot sur la page jaunie d'un livre de sa bibliothèque » ne me suggère absolument pas qu'il y a une seule page jaunie dans le livre. Je trouve ce tour plus élégant que « sur une page jaunie d'un livre de sa bibliothèque », mais je ne rejetterai pas le second. D'ailleurs, une recherche Google sur les deux expressions donne des résultats comparables, avec un très léger avantage pour le premier.

Je lis d'ailleurs sur <URL: http://poesie.webnet.fr/vospoemes/poemes/edmond_marijon/poeme.html > :
Un poème,
C'est un ami, que l'on rencontre,
Sur la page jaunie d'un livre,
D'un vieux cahier oublié
Qui va cheminer a vos côtés.
et je n'ai pas pantoute l'impression que le livre ou le cahier d'écolier n'ont qu'une page.

Par contre, je n'aime pas « je me suis installé dans la chambre d'un hôtel du centre ville », qui me donne bien l'impression que l'hôtel n'a qu'une chambre, mais « je me suis pris la branche d'un arbre dans la figure » ne suggère pas, d'après moi, que l'arbre n'a qu'une branche.

Alors, comme toi, je pense qu'il y a certainement des règles mais que c'est complexe, et que ce serait bien si nous avions les réflexions d'un linguiste ayant étudié sérieusement la question sur un corpus.

Je reste persuadé que ces « règles » relèvent du style et de la bonne présentation des informations, et que si David a écrit « Je donnais jeudi matin une très courte[#] introduction à la calculabilité, dans le cadre d'un cours intitulé "Théorie des Langages" (donc un sujet plutôt connexe que contenant) dont j'enseigne à un groupe », il n'aurait pas écrit « J'enseigne à un groupe d'un cours intitulé "Théorie des Langages" (donc un sujet plutôt connexe que contenant), dans le cadre duquel je donnais jeudi matin une très courte[#] introduction à la calculabilité ».

Quentin (2016-01-23T20:07:38Z)

@Ruxor

Enfin en effet il dit y avoir des cas où ça se dit (par exemple je vois dans les résultats "ce peut être une page d'un livre" ou "chacune correspond à une page d'un livre" qui me semblent sonner juste). Ok il y a sûrement des subtilités mais j'ai l'impression que ce sont des cas différents de celui qui nous intéressé et qu'il y a quelque chose comme : quand l'objet est finalement déterminé comme objet d'une action (enseigner, se prendre sur la figure…), même si c'est l'un des objets d'un ensemble, on dit "le".
Quelqu'un connait un grammaticien prescriptiviste ?

frankie (2016-01-23T20:04:33Z)

N écrit : la question centrale dans la grammaire, c'est d'être univoque et compréhensible par tous immédiatement.
Je me permets de soulever une réserve, si cette phrase est prise trop littéralement.
On peut vouloir utiliser des tournures "multivoques". Et la langue n'a pas vocation à n'être que précise et claire et dénuée de toute ambiguïté. Prenons cette expression qui me passe par la tête : "je loue une voiture"; en dehors de tout contexte, elle peut dire une chose et son opposé.
Etudier la logique de la langue en dehors des enjeux de pouvoir et de situations entre locuteurs est un aspect qui certes me motive mais ne réduit pas le sujet. Pour autant, j'ai été élevé dans un milieu où la langue était considérée comme digne d'intérêt, mais plutôt comme objet dynamique et souvent logique que témoin d'une tradition vouée à sclérose. On accordait du poids à l'écrit bien rédigé, à la phrase bien tournée, au mot idoine, et à plus grande échelle à ce que l'on estimait de la "bonne littérature".
Sans tout lire, si je suis en général d'accord avec le français de Rr. et la philosophie qui sous-tend son usage, je tique un peu sur ce passage :
"Ce qui est plus intéressant, c'est sans doute de se demander comment on devient prescriptiviste en matière linguistique : comment se fabrique-t-on cette étrange idée qu'il y a des « fautes » de langage, des usages « incorrects », etc. ? Est-ce l'enseignement scolaire qui fait ça ? Une sorte d'incapacité à dépasser le stade de la dictée ? Je devrais plutôt écrire une entrée pour méditer sur ce sujet."
J'admets qu'on peut être incorrect sans qu'autrui puisse vous opposer que vous faites des "fautes de français". Parce que vous avez réfléchi à ce que vous voulez dire et au moyen de son expression, dans le cadre d'une certaine logique inhérente à la langue, en dépit de qu'elle recèle parfois. Il n'en reste qu'il faut d'abord apprendre la langue et à se tromper avant de s'autoriser ce type de licence.
Une bonne méthode d'apprentissage combine le prescriptif (les règles) avec une certaine observation de cette langue, une pratique "naturelle" prolongée aux non-natifs, une découverte de l'orthographe par la lecture (voie détournée donc) mais aussi son apprentissage systématique par voies écrite et orale…
J'observe cependant que le terreau moderne se prête moins à cet apprentissage que l'ancien (cette observation n'est pas absolue et le début de l'argumentation qui suit ne se veut pas une démonstration) : les heures de français ont fondu au soleil, les jeunes ont du mal avec les règles dont leurs parents les déchargent un peu systématiquement, et ce dès leur plus jeune âge, l'image prend le dessus sur le symbolique…

Quentin (2016-01-23T19:50:28Z)

@Ruxor

Pour le pied : j'avais anticipé cette réponse possible (on dit "je te marche sur le pied" et aussi "je te tire l'oreille") c'est pourquoi j'ai donné d'autres exemples. Pour la page jaunie je ne suis pas d'accord avec cette interprétation. Je suis juste d'accord pour dire qu'il y a ambiguïté sur le fait qu'il n'y ait qu'une page jaunie ou plusieurs et que le français n'est pas optimal à ce titre, comme sur de nombreux points (précisément parce-que les prescriptivistes tiennent compte de l'usage !).

Je pensais qu'une justification n'était pas nécessaire, quelques exemples suffisant à convaincre les locuteurs qu'effectivement c'est ce qui se dit, en l'absence de contre-exemples convaincants. Mais puisque par un mystère que je n'explique pas tout le monde n'est pas naturellement convaincu que les doubles articles indéfinis sonnent "faux", il faudrait en effet l'avis d'un spécialiste. Je ne suis pas grammairien. Au mieux je peux faire remarquer qu'une recherche google sur "une page d'un livre" renvoi pour les premiers résultats à des phrases du type "comment supprimer une page d'un livre" (c'est à dire que ce n'est pas un "de" associé au livre, mais au verbe qui précède).

Ruxor (2016-01-23T17:41:26Z)

@Quentin: Je crois que ce que Camille et d'autres voudraient, c'est que cette affirmation soit étayée : au moins par une référence à une grammaire (pour convaincre les prescriptivistes) ou par une analyse statistique ou une référence à une analyse de ce genre (pour convaincre les descriptivistes), selon qu'il s'agit de prouver que la construction « un X d'un Y » est incorrecte-au-sens-des-prescriptivistes, ou rare, ou les deux. Dire « c'est l'usage » ne fait vraiment pas avancer le schmilblick, surtout quand on s'adresse à un autre locuteur qui ne maîtrise pas bien la langue et qui conteste ce fait.

Moi mon sentiment est que ça dépend de façon très complexe de ce que sont X et Y, de la nature exacte du lien d'appartenance de X à Y, du fait que chaque Y ait habituellement un ou plusieurs X, du fait que X et Y soient qualifiés ou généraux, et sans doute d'encore plein de facteurs. Ce qui est incontestable, c'est qu'il y a effectivement une absurdité du français qui donne au moins *dans certains cas* à « le X d'un Y » le sens que devrait avoir « un X d'un Y » : je crois que personne ne nie que « j'écoute la chanson d'un artiste à la mode » peut se dire dans le sens de « j'écoute une chanson d'un artiste à la mode », mais ce n'est pas parce que (A) peut se dire dans le sens de (B) que (B) n'est pas tout aussi correct ou tout aussi fréquent — il y a peut-être une nuance de sens entre les deux ou peut-être les deux sont-ils interchangeables. Donc pour disqualifier (B), il ne suffit pas de dire « on dit (A) » — ben oui, on dit (A), personne ne le nie, mais peut-être qu'on dit (B) tout aussi bien.

Personnellement, j'ai l'impression que si je prends une phrase comme « il me montre un mot sur une page d'un livre de sa bibliothèque », si je remplace « une page » par « la page », la phrase devient vraiment bizarre (cela suggère qu'il y a une page spéciale), et si je remplace par « une des pages », elle devient plus lourde ; et c'est encore plus vrai si je rajoute « jaunie » après page (« un mot sur la page jaunie d'un livre de sa bibliothèque », pour moi, suggère très fortement qu'il y a une seule page jaunie dans le livre, et « un mot sur une des pages jaunies d'un livre de sa bibliothèque » suggère qu'il y a un petit ensemble de pages jaunies et que c'est très important que le mot soit sur une de ces pages-là, pas que c'est une information au passage qu'elle est jaunie). De même, j'ai vraiment du mal avec le remplacement de « j'enseigne à un groupe d'un cours intitulé "théorie des langages" à Télécom ParisPloum » en « j'enseigne au groupe d'un cours… », cette dernière formulation suggérant fortement que le groupe et le cours sont consubstantiels — elle est donc, à mon sens, créatrice d'une grande confusion (en revanche, « j'enseigne à un des groupes d'un cours intitulé "théorie des langages" » ne me pose aucun problème). Mais je répète que je pense que ça dépend beaucoup de toutes sortes de facteurs. En tout cas, une affirmation du genre « on ne dit pas "un X d'un Y" » n'a d'intérêt que si elle est justifiée.

Pour ce qui est de « j'ai marché sur le pied d'un passant », c'est vrai qu'on ne dit pas « sur un pied d'un passant » sauf à vouloir donner un sens spécial, mais à mon avis c'est pour une raison différente : en gros la même qui fait qu'on dit « j'ai mal au pied » ou « on m'amène le patient : le pied est en sang » avec l'article défini (je prends des exemples où il n'y a pas de possession). C'est une autre bizarrerie du français, mais qui ne me paraît pas avoir de rapport avec ce qui précède.

Quentin (2016-01-23T16:05:15Z)

@Camille

Ou encore "je me suis installé dans la chambre d'un hôtel du centre ville" ou "je me suis pris la branche d'un arbre dans la figure".
(J'imagine volontiers "je me suis pris une branche d'un arbre dans la figure" prononcée avec le léger accent étranger d'une personne qui ne maîtrise pas parfaitement le français… Et on rectifiera : "une branche d'arbre" ou "la branche d'un arbre".)

Quentin (2016-01-23T15:44:26Z)

@Camille

Mais si ! C'est l'usage.
"J'ai marché sur le pied d'un passant", pas sur "sur un pied d'un passant". Etc, etc.

N (2016-01-23T10:33:20Z)

J'ai mis du temps, mais j'ai complètement arrêté de corriger 'gratuitement' les gens, comme quand j'avais 10-12 ans, et je fais très attention désormais quand je ne comprends pas quelqu'un (surtout un non-natif) à ne pas proscrire une utilisation du français qui me semblerait localement impossible. Je me contente de dire «je ne comprends pas» et de redemander d'autres phrases. Si on me demande conseil, j'ai tendance à dire non pas
(a) «c'est une tournure grammaticale que les natifs (en proportion X -- notamment les plus illustres auteurs) utilisent», mais plutôt
(b) «c'est une tournure grammaticale que les natifs (en grande majorité) comprennent sans ambiguïté».

Pour rappel, la phrase (iii) est :
(iii) {Ce système {dont je suis confronté à la complexité} est assez incohérent}

Je suppose que face à un étranger, tu expliquerais (iii) en prescrivant (a), sans vraiment préciser à quel point la proportion X est grande.

***************************
La phrase (iii) et moi
***************************

Si on analyse cette phrase comme tu le dis,
* «dont» a un antécédent («ce système») et
* il complète quelque chose («à la complexité»), c'est-à-dire un complément d'objet indirect (COI) du verbe.

Hélas, face à la phrase (iii), mon cerveau a fait ça :
# Il y a un système.
# Je suis confronté de ce système. BUG je ne connais pas le verbe «confronter de» tout seul, sans complément.
# BUG sur «à la complexité». J'attendais plutôt «à la clarté de la lampe» ou «à la tombée de la nuit».

Je sais, il y a mille erreurs possibles sur cette phrase et une seule façon de comprendre cette phrase, comme tu le dis, mais je ne suis pas sûr que je l'aurais trouvée tout seul si je n'avais pas lu tout ton argumentaire. Je n'ai pas réfléchi 1000 ans, cela dit, et je suis passé à une autre phrase, comme quand je ne comprends pas un étranger.

***************************
DONT avec un COI
***************************

J'ai trouvé un exemple du même acabit dans le TLFi <URL:http://www.cnrtl.fr/definition/dont>
(TLFi) Tous ceux qui viendront prendre leurs degrés dans l'école dont il aspire à devenir le chef (Jouy, Hermite,t. 3, 1813, p. 214).

Comme je fais confiance au TLFi pour ne conserver que les phrases fréquentiellement courantes, je te crois quand tu dis que de très bons auteurs utilisent cette construction, mais je ne prescrirais pas d'utiliser «dont» dans une phrase où il 'complète' un complément d'objet indirect. Autant il peut compléter un sujet de la relative :
(Suj) L'homme dont la figure est rouge

ou complèter un complément direct de la relative :
(COD) L'homme dont j'aime la figure

Mais un complèment d'objet indirect, ça buggue dans mon cerveau :
(COI) L'homme dont j'aspire à l'amour

Bref, je mets l'utilisation de «dont» avec un COI dans la case «licence poétique», ou «construction alambiquée», et je pipoterais une proportion X de gens qui comprennent parfaitement cette construction dans tous les cas et immédiatement telle que X < 50%.

***************************
Les Grincheux
***************************

Il faut chercher l'origine de ceux que tu appelles les «grincheux» dans les écoles de théâtre, de diction, dans les professeurs qui apprenaient aux impétrants à parler correctement pour mériter leur place prestigieuse au sein d'un univers qui se voulait capable univoque dans le discours, et immédiatement perceptible et compréhensible.

Tu peux ridiculiser les grincheux (je kiffe des extraits des /Fâcheux/ de Molière !), mais je ne crois pas que cette utopie que je décris soit ridiculisable facilement. C'est pareil partout : facile de se moquer sérieusement de l'homme, difficile de se moquer des idéaux. C'est en tout cas un idéal que je respecte infiniment : c'est un véritable métier que de savoir s'exprimer pour que la majorité des gens qui t'écoutent n'aient aucun doute grammatical sur ce que tu veux réellement dire -- je ne parle pas de «décevamment», et de ces choses que tout le monde comprendrait presque sans effort, je parle de tout le reste.

Je soutiens, à l'inverse, ce que tu essayes de faire : tu expliques vaillamment que tes constructions sont syntaxiquement justifiables, et utilisées, et qu'il y a au fond une brèche grammaticale en français. Mais là où tu as raison de fustiger les «grincheux» (sur «décevamment»), je pense que tu rates quelque chose : la question centrale dans la grammaire, c'est d'être univoque et compréhensible par tous immédiatement. Je ne crois pas que ce soit le cas de DONT avec un COI.

Camille (2016-01-22T23:08:08Z)

@Quentin

« Sinon en effet le double article indéfini sonne vraiment bizarre et il faut plutôt dire "la province reculée d'un pays éloigné" (même si le pays a plus d'une province).»

Je ne suis pas du tout d'accord.

« De la même façon il faudrait dire "un cours au groupe duquel j'enseigne" même si le cours a plusieurs groupes. »

Heu… Ben non.

« D'ailleurs même sans "duquel", la phrase "un cours dont j'enseigne au groupe" est plus compréhensible que l'originale et ne prête plus à ambiguïté »

Heu… Mais non pas du tout !

Bon, je ne suis pas grammairien mais je ne comprends pas ce que tu racontes Quentin ! Je me contente de parler d'une manière logique et « qui sonne bien » (sans chercher à définir ce qui précède). Étant matheux, il est possible que j'ai une certaine déformation professionnel. En tout cas, utiliser un article défini quand il n'y a pas unicité… No way !!!

Quentin (2016-01-22T19:34:31Z)

@Typhon non ce n'est pas démocratique, voilà justement un argument pour le prescriptivisme. Après qu'il y ait des difficultés à la rendre cohérente n'élève rien au fait que c'est le but recherché.

@Ruxor oui tu as le droit de faire des néologismes. A mon sens on pourra les qualifier de "français" si leur usage se répend. Enfin peu importe. Toujours est-il que tu obéit à certaines règles : tu ne réinvente pas la roue, tu es prêt à mettre a jour ton orthographe en fonction du dictionnaire, tu utilises la même grammaire que tout le monde dans 99% des cas comme le remarque Arthur. Donc la grammaire française a bien un aspect normatif non négligeable qui s'impose aux locuteurs : s'il y a place pour la liberté, on ne fait pas strictement ce que l'on veut.

Arthur (2016-01-22T18:15:22Z)

Bon, en relisant la conclusion de mon précédent message, il me semble qu'elle donne une impression plus négative que celle qu'il était dans mon intention de donner.

Je voulais dire que ce n'est pas une mauvaise chose que d'employer des mots particuliers ou des tournures qui sortent un peu de l'ordinaire, du moment qu'on n'en abuse pas. Moi-même, je le fais : il est possible que ça en irrite certains, même si personne ne me l'a fait remarquer jusqu'à présent, mais j'estime que si c'est sporadique, ça ne devrait pas gêner les gens.

Bref, c'est comme la fantaisie dans l'habillement : c'est bien d'en avoir un peu, mais pas d'en exagérer. (Mais chacun fait ce qu'il veut quand même, hein.)

Arthur (2016-01-22T17:21:22Z)

Quelques remarques en vrac sur ta dernière réponse à Quentin :

* au Québec, on dit « mêler » là où tu dis « confuser », et « mêlant » et « mêlé » : c'est un québécisme que j'aime bien parce qu'il est imagé et n'est pas un anglicisme (personnellement, je n'aime pas « confuser »).

* quand on dit « ce n'est pas français », on veut souvent dire « ce n'est pas du bon français ». C'est pour la fin de ton message : personne ne peut dire que tu ne parles pas français, en effet, mais certains critiquent certaines de tes tournures qu'ils jugent, à tort ou à raison, n'être pas du bon français (comme celle avec « dont », point de départ de tout cela). [L'idée de ce paragraphe n'est pas de dire s'ils ont raison sur le fond ou non ou de dire s'ils ont raison ou tort d'exprimer leurs critiques, mais de préciser ce qui est, me semble-t-il, l'objet de leur critique.]

* pour tes « néogrammatismes », la principale critique qu'on peut te faire, c'est de ne pas tourner autrement tes phrases pour éviter ce genre de constructions alambiquées.

En conclusion, même si tu revendiques haut et fort la liberté de t'exprimer comme tu le veux en français, force est de constater que 99,9% du contenu de ton blog est du français tout ce qu'il y a de plus standard. Je trouve même qu'il y a un singulier contraste entre David Madore (l'auteur du blog) et Ruxor (qui répond aux commentaires) ;-)

Avec tout ça, je n'ai répondu ni à ta réponse à ma réponse, ni sur la question des relatives…

Ruxor (2016-01-22T14:47:51Z)

@Quentin: Voici le genre de situation qui me font dire qu'on peut avoir raison contre tout le monde. Si j'écris une phrase comme « la grammaire française est décevamment rigide », les prescriptivistes vont me dire qu'il y a une erreur parce que « décevamment » n'est pas un mot français, il ne figure dans aucun dictionnaire, et le nombre d'occurrences recensées par Google est minuscule (une des plus hautes étant, d'ailleurs, une entrée de mon blog où je mentionne justement ce fait), et je pourrais sans doute trouver des adverbes en -ment qui n'apparaissent vraiment nulle part. Pourtant, ma position est que la construction des adverbes en -ment, en français, est productive, et que ça n'a aucun sens d'aller chercher dans un dictionnaire si le mot « existe » bien : dès lors qu'on l'utilise, et que les gens le comprennent, il existe. On peut dire que c'est un néologisme, si on veut, mais ce n'est pas une remarque plus intelligente que de dire que la phrase « le chapeau mou bleu hurle une phrase en chinois » serait une néo-construction ou serait du français douteux sous prétexte que personne ne l'a jamais utilisée.

Et je n'hésite absolument pas à faire des néologismes quand il y a un mot qui manque inexplicablement dans la langue française (« régressivité », « résistible », « inhabitualité »), ou quand je pense que la construction est élégante et se comprend bien, ou encore qu'elle est amusante (« hétéroïne » pour une fille hétérosexuelle, « tôtif » pour le contraire de tardif). Ou quand un anglicisme me semble apporter un bien plus haut degré de précision que le mot français censé tenir ce sens (j'insiste pour dire « confuser », « confusant », etc., parce que le mot français « confondre » est… confusant, l'anglicisme est bien préférable, bien meilleur, car bien plus précis). Ou quand il faut utiliser des dérivations sur un sens un peu inhabituel d'un mot (en mathématiques, le fait qu'un morphisme soit étale s'appelle, pour moi, l'« étalitude » de ce morphisme, ce qui implique par exemple sa « platitude »). Je suis bien conscient que les dictionnaires ne sont pas d'accord avec moi sur ces mots, et je suis peut-être même le seul, ou partie d'un tout petit groupe, à m'en servir comme je m'en sers, mais les gens à qui je m'adresse me comprennent, et surtout, je sais exactement ce que je fais, c'est une décision réfléchie et informée. Par comparaison, quand je fais une faute de frappe, ou un mot que je vais changer parce que je n'avais pas bien pris conscience de son usage (et ça m'arrive régulièrement : par exemple, jusqu'à récemment, j'écrivais « succint » à la place de « succinct », et c'est une erreur parce que ce n'était pas mon intention de m'écarter des dictionnaires), c'est que ce n'est pas réfléchi et informé. Pour moi c'est donc ça le critère essentiel qui détermine si quelque chose est correct ou non : le locuteur a-t-il bien réfléchi, était-il bien informé, et donc en clair, maintiendra-t-il son texte si on lui présente des arguments contraires ?

Et il n'y a pas que les néologismes que je défends, il y a aussi les néogrammatismes : je peux parfaitement imaginer écrire « si je saurais » en toute connaissance de cause, par exemple si je veux écrire (A⇒B)⇒C en français, je vais devoir écrire « si si A alors B alors C » et on a un conflit sur le mode à utiliser sur B parce que le fait qu'il soit dans la protase/subordonnée de la conditionnelle extérieure suggère l'imparfait tandis que le fait qu'il soit dans l'apodose/principale de la conditionnelle intérieure suggère le conditionnel, et je pense que le choix du conditionnel se défend. Par exemple, imaginons le dialogue suivant :

— Tu saurais me répondre si tu en prenais le temps.
— Si vraiment je saurais te répondre si j'en prenais le temps, alors je me dirais intelligent.

…j'ai volontairement écrit « si je saurais », c'était une décision réfléchie et informée, et je la défends (ici A="j'en prends le temps", B="je sais te répondre" et C="je me dis intelligent"). Dans le registre des néogrammatismes, je peux aussi parfaitement défendre la phrase « les gens quand lesquels étaient petits la seconde guerre mondiale s'est terminée » (j'ai écrit (†) à côté dans cette entrée, mais à mon avis, quiconque l'utilise en ayant bien conscience de la complexité de sa construction a raison de le faire).

Bref, ce que je dis en gros, c'est que je fais indiscutablement des fautes de français (« succint » pour « succinct », i.e., utilisation *involontaire* d'un mot pour un autre, ou toute autre production involontaire, de la faute de frappe à la construction ratée en passant par le lapsus), mais quand j'ai bien réfléchi à quelque chose et que j'ai fait un choix en connaissance de cause, ça n'a aucun sens de me dire « c'est une erreur, ce n'est pas du français » : j'ai la sensation de m'exprimer en français, mes lecteurs qui comprennent le français me comprennent, pour moi c'est la définition de parler français et je ne vois pas l'intérêt d'en chercher une autre. Et je dis ça pour « moi », mais ça n'a rien de spécifique à ma personne : j'applique le même raisonnement à n'importe qui.

Typhon (2016-01-22T14:29:34Z)

@Quentin : la langue n'est pas une démocratie. Et avant de prétendre montrer que quelqu'un parle "pas français", faut déjà définir ce qu'est le français et comment on le délimite.

L'idée que les grammaires prescriptives promeuvent une langue plus cohérente est assez difficile à avaler quand on sait à quel point ces grammaires peuvent être muettes sur tout un tas de cas, ou pire, se contredire elles-même (voir à ce sujet les critiques de Pullum sur The Elements of Style).

« j'ai l'impression que c'est encore un débat byzantin. »

Y a globalement pas de questions simples en linguistique. Quand on croit qu'on en a vu une, en général, on a mal regardé.

Quentin (2016-01-22T12:00:37Z)

@Ruxor ok je vois mieux la distinction faite entre prescriptivisme et descriptivisme et je suis globalement d'accord (en faveur du descriptivisme), à quelques nuances près.

J'aurai tendance à interpréter les choses comme ceci : la grammaire reste essentiellement normative (ce sont des règles implicites ou explicites de construction de phrases "bien formées"). La différence tient à ce qu'on considère être source d'autorité : soit un ensemble restreint de personnes spécialistes, garantes du bon usage, soit l'ensemble des locuteurs de la langue.

Là où je ne suis pas d'accord par exemple c'est sur l'idée qu'on puisse avoir raison contre tous. Si quelqu'un n'est pas convaincu qu'on ne dit pas "si j'aurais su" après qu'on lui ait montré des références ou prouvé que la grande majorité des gens ne le disent pas, il est dans l'erreur : il ne comprend pas ce qu'est une grammaire (des règles communes), un langage, ou bien il a décidé de parler une autre langue que le français.

Je pense aussi qu'il peut exister un moyen terme entre prescriptivisme et descriptivisme, dans la mesure où un prescripteur justifiera les règles qu'il impose par le fait qu'elles correspondent à l'usage le plus répendu. Au final son souci n'est pas forcément de décréter les choses de manière autoritaire mais d'améliorer le langage en le rendant plus cohérent, uniforme, logique, pratique… Il n'y a pas de différence si grande avec les règles de circulation finalement, qui visent aussi à rendre le trafic plus fluide (même s'il n'y a pas mort d'homme quand on parle mal). Griller un feu rouge en pleine nuit quand il y a une visibilité parfaite peut être sans aucun danger, mais on peut reprocher à quelqu'un de ne pas suivre la règle, comme on peut reprocher à quelqu'un de mal s'exprimer même si on comprend ce qu'il veut dire.

Ruxor (2016-01-22T10:50:58Z)

@Quentin: L'argument de la compréhension est de la plus parfaite mauvaise foi, et il suffit de regarder la manière dont les gens ont réagi à ma phrase pour s'en convaincre : il y a des gens qui ont dit « elle est difficile à comprendre », en effet, et il y a des gens qui ont dit « elle est incorrecte », *mais ce ne sont pas les mêmes* et les arguments ne sont pas les mêmes non plus. Les arguments avancés pour dire qu'elle est « incorrecte » ne parlent jamais du fait que quelque chose soit ou non compréhensible, mais de règles ad hoc, comme le fait qu'on ne « devrait » pas dire « j'enseigne à des élèves » (il est impossible de défendre sérieusement l'idée que « j'enseigne à quelqu'un » causerait confusion !).

Et si le but est vraiment d'éviter les confusions, alors le critère premier pour savoir si une construction est correcte ou non devrait être de savoir si les locuteurs natifs l'utilisent ou non — par exemple en faisant des recherches Google — mais ça c'est le genre de test que les descriptivistes utilisent, pas les prescriptivistes, qui préfèrent se référer à des « bons auteurs » ou à des grammaires de référence. En vérité, si on prend une conjonction comme « malgré que » (je pense que c'est un exemple assez typique de ce que les prescriptivistes critiquent), le problème n'est pas que ça peut causer confusion, le problème est que c'est jugé laid (ce avec quoi je suis, au demeurant, assez d'accord), et en matière de style même les plus fanatiques admettent quand même que les jugements sont essentiellement subjectifs et qu'il n'y a pas de règles codifiées, ni même codifiables.

La raison pour laquelle on n'a pas besoin de fixer des règles pour la langue, c'est que (à par des cas très particuliers, comme quand on écrit un texte de droit) quand quelqu'un s'exprime de façon incompréhensible, il se punit lui-même : il n'arrive pas à se faire comprendre, c'est tout. Ce n'est pas comme quelqu'un qui conduirait une voiture du mauvais côté de la route, qui mettrait aussi les autres en danger.

Encore une fois, personne ne nie l'évidence qu'il y a des choses qui se disent et se comprennent en français (« le chat est noir ») et d'autres qui ne se disent ni se comprennent (« zfsbune hjges aeulha »), ni même le fait qu'on peut tenter de comprendre une partie des phénomènes qui font que certains énoncés sont d'un côté et certains de l'autre. Le débat entre prescriptivistes et descriptivistes porte sur le rôle à donner aux règles codifiées par les grammairiens : pour les descriptivistes, la définition du français est celui que les gens qui pensent parler français utilisent (parlent, écrivent, comprennent), pour les prescriptivistes, prééminence est donnée soit à une catégorie de locuteurs (les « bons auteurs ») soit à des règles codifiées (grammairiens et dictionnaires de référence). Pour dire les choses de façon encore plus concise : pour les prescriptivistes, un mot devient français parce qu'il entre au dictionnaire (de l'Académie), pour les descriptivistes, un mot entre au dictionnaire parce qu'il devient français.

Ou pour dire encore les choses autrement, la question est de savoir si cela a un sens de dire que « tout le monde fait la faute suivante » : pour un descriptiviste, cette phrase est un oxymore — si tout le monde dit quelque chose, c'est que c'est du français, ça n'a pas de sens de prétendre que c'est une faute. (Le critère que j'utilise, moi, est un tout petit peu différent : si X écrit ou dit quelque chose, c'est une faute si, et seulement si, on peut persuader X que c'en est une, i.e., si quand on signale à X la raison pour laquelle on trouve qu'il aurait du écrire/dire les choses différemment, il va convenir qu'il aurait dû faire autrement ; ceci permet de dire, par exemple, que les fautes de frappe et d'inattention existent, même quand elles sont répandues.)

Les linguistes sont essentiellement descriptivistes, parce que ce sont des scientifiques : un scientifique ne cherche pas à réguler le phénomène qu'il observe, il cherche à le comprendre. L'idée de chercher à dire aux Français comment « il faut » parler français est aussi bizarre que si un biologiste essayait de dire aux cellules comment elles doivent se reproduire : dans les deux cas, il s'agit d'un phénomène apparu par un type de sélection (de ce qui se comprend bien ou se reproduit efficacement) et mutation. L'idée de le réguler est bizarre.

Ce qui ne veut pas dire que les grammaires n'ont aucun intérêt si on les voit comme des recueils de recommandations sur la manière de bien se faire comprendre et/ou d'écrire de façon agréable. Mais cela signifie qu'une grammaire n'a d'intérêt que si elle justifie les règles, ou au moins les règles non-évidentes, qu'elle propose. Je considère une grammaire comme je considère le manuel de savoir-vivre de Nadine de Rothschild : les préconisations qui y figurent ont indiscutablement une certaine valeur, mais je ne considère en aucun cas que celui qui ne les suit pas commet une « erreur », et si Nadine de Rothschild veut me persuader qu'il faut me comporter d'une certaine manière, ou l'Académie qu'il faut écrire d'une certaine façon, elles doivent justifier ces préconisations (par exemple sur le mode « ne pas les suivre peut entraîner la confusion suivante »).

En tout cas, si on me dit qu'il est incorrect ou même bizarre d'écrire « une page d'un livre ancien » et qu'il faudrait écrire « la page d'un livre ancien » quand bien même le livre aurait plusieurs pages, je ne peux que lever les yeux au ciel. Voilà une règle qui non seulement n'est pas suivie (cette fois-ci j'ai bien vérifié que Googler « "une page d'un livre" » en français ne donne pas un nombre de réponse qui change brutalement quand on avance), mais en plus est horriblement mauvaise sur le plan de la compréhension, puisque « le chef d'une tribu nomade » peut laisser penser que la tribu n'a qu'un seul chef alors que « un chef d'une tribu nomade » ne le suggère pas. Bref, si on ne me fournit même pas une référence vers un grammairien qui aurait, à défaut de justifier, au moins commenté, une telle règle, je ne peux que m'émerveiller de la taille du chapeau DUQUEL on sort de telles merveilles.

Quentin (2016-01-22T10:06:49Z)

@Ruxor
"Le groupe (ou l'un des groupes) d'un cours de théorie du langage",
"L'élève (l'un des élèves) d'une grande école parisienne"
"la page (l'une des pages) d'un livre ancien"
sonnent plus justes.

Ruxor (2016-01-22T09:38:11Z)

@Gabriel: Non, je veux bien dire x>t (les réels t tels que tous les réels x>t soient positifs sont positifs) ; pour voir les choses plus clairement, on peut écrire la formule avec des quantificateurs et prendre la contraposée (i.e., si t est un réel négatif, il existe x>t qui est [encore] négatif), et là c'est beaucoup plus clair. Il se trouve que c'est aussi vrai que les réels t tels que tous les réels x<t soient positifs sont positifs, mais c'est, pour ainsi dire, à cause d'un problème légal : il n'existe pas de réel t tels que tous les x<t soient positifs, du coup tous ceux qui vérifient cette condition (impossible) sont positifs.

@jonas: In the case of a direct question, there is more leeway to place the interrogative pronoun/adjective/adverb in a different place. The prescriptivists in this comment thread would probably say it's wrong, but at least when speaking (where, admittedly, the tone helps make it clear that something is a question) it's fairly common to take a complex phrase and drop in "qui" or "quoi" pretty much anywhere inside, even inside nested structures, to ask a question about that. (A typical case would be if one misheard a word or two.) So it would not seem particularly odd to ask « La seconde guerre mondiale s'est terminée quand qui était petit ? », perhaps with emphasis on the « qui ». But then, even in simple phrases, the entire practice of putting the interrogative at the start seems to be dying out in spoken French : people will say « tu manges quoi ? » over « qu'est-ce que tu manges ? », let alone « que manges-tu ? ».

@Arronax Axolotl: Ah oui, et surtout, le droit pour les matheux.

@Typhon: La difficulté que je vois surtout, c'est que si on ne donne au pronom relatif que le rôle (B), il faut expliquer pour quelle raison il se trouve quand même très souvent en tête de proposition : cette raison s'explique très bien s'il doit remplir le rôle (A), et qu'il y a un conflit entre ces deux rôles. Enfin bon, j'ai l'impression que c'est encore un débat byzantin.

@Arthur: Je ne crois pas que ce soit un effet stylistique, c'est juste que la phrase « un X d'un Y » est bizarre quand le Y n'est pas autrement qualifié, mais peut devenir naturelle s'il l'est. Si je dis « un groupe d'un cours » tout court [pun unintended], c'est effectivement un peu bizarre, mais si je dis « un groupe d'un cours de théorie des langages » ou « un élève d'une grande école parisienne » ou encore « une page d'un livre ancien », je trouve ça tout à fait naturel, et en tout cas beaucoup plus (ou sémantiquement différent) que si je remplace « d'un(e) » par « de ».

Sinon, oui, Google me joue le même tour étonnant. Et oui, j'ai permuté « devant "cours" » et « devant "groupe" » dans la première phrase du deuxième paragraphe du commentaire daté 2016-01-21T23:03:08+0100 (en fait, la raison est que je l'ai d'abord écrit correctement, puis je l'ai relu et je n'ai pas vu la négation dans la phrase en relisant, du coup j'ai permuté pour remettre les mots à l'endroit, ce qui les a en fait inversés) ; bon, je pense que les choses sont assez embrouillées comme ça.

Quentin (2016-01-22T09:29:43Z)

"Comment on devient prescriptiviste en matière linguistique"

A l'évidence, une grammaire est un ensemble de règles de construction, c'est à dire une *norme*. Cette norme a pour but d'assurer la compréhension : puisque le langage est par essence une entité publique, il faut bien qu'on en partage les règles. Il ne s'agit donc pas de décrire la façon dont les gens s'expriment naturellement (comme s'ils se comprenaient par miracle sans jamais suivre de règles ne serait-ce qu'implicites--mais on a tous été repris par ses parents ou ses profs en apprenant à parler non ?). Il s'agit de réguler cette expression en en stabilisant les règles jusqu'ici implicites de la manière la plus cohérente et intuitive possible. Je vois donc mal comment on peut être *autre chose* que prescriptiviste à propos de la grammaire puisqu'il y est toujours question de ce qu'il *faut* dire.

Sinon en effet le double article indéfini sonne vraiment bizarre et il faut plutôt dire "la province reculée d'un pays éloigné" (même si le pays a plus d'une province).
De la même façon il faudrait dire "un cours au groupe duquel j'enseigne" même si le cours a plusieurs groupes.

D'ailleurs même sans "duquel", la phrase "un cours dont j'enseigne au groupe" est plus compréhensible que l'originale et ne prête plus à ambiguïté : on voit bien que le "dont" se rapporte à "groupe" et non à "enseigner" comme on le pensait naturellement au départ.

Il y avait donc double faute ! Les grincheux avaient doublement raison, et cette phrase n'est plus du tout défendable…

Arthur (2016-01-22T05:45:07Z)

@David : Il me semble que « un X d'un Y » pose un problème informationnel et stylistique car on définit un SN indéfini par un autre SN indéfini. Ce n'est pas en soi un problème insurmontable, mais c'est maladroit, je trouve, à moins qu'on veuille créer un effet de style. Ton exemple « il vit dans une province reculée d'un pays arriéré » est bon, mais il semble qu'il y ait là une volonté de l'auteur :-) d'insister sur le fait que c'est vraiment un trou paumé. De même, si je dis « Tu auras affaire à moi si tu touches à un cheveu d'une de mes filles », il y a un effet d'insistance. Si maintenant je lis « Il m'a menacé avec un pied d'une chaise » et que je ne voie pas quel est l'effet recherché, je me dirai que l'auteur écrit comme un pied (de chaise ?).

Revenons donc à nos moutons, i.e. à « un groupe d'un cours ». Je trouve cette formulation peu heureuse[£] vu qu'il n'y a pas d'effet de style recherché, mais, encore une fois, tu avais dit au départ « dans le cadre d'un cours dont j'encadre un groupe »[*] et donc n'avais pas défini un SN indéfini par un autre SN indéfini, ce qui fait que le problème ne se posait pas. C'est ce que j'essayais de te faire remarquer à propos de ta réponse à Quentin (dans ta réponse à Subbak, il n'en était pas question), mais je te concède que ma réponse était décalée par rapport à ce dont Quentin et toi discutiez précisément, à savoir la possibilité de dire « un groupe du cours X » plutôt que « un groupe qui suit le cours X ». Tu sembles par ailleurs ne pas avoir la même appréciation que moi de la phrase « j'enseigne à _un_ groupe d'_un_ cours intitulé … », donc nous en resterons là.

Reste deux questions en suspens :
1) N'as-tu inversé « devant "groupe" » et « devant "cours" » dans le 2e § de ta réponse à mon message ?
2) Pourquoi Google m'affiche-t-il 246 000 résultats puis 17 pour "un groupe d'un cours" ? Est-ce ton cas aussi ?

Désolé si mon commentaire porte finalement sur un tout autre sujet que les relatives, qui sont, je trouve, un sujet passionnant sur lequel j'aurais eu bien des précisions à t'apporter mais ç'aurait été trop.

[£] Même « un groupe du cours X » ne me paraît pas très heureux : je préfèrerais en ce cas « un des groupes du cours X ». Il faudrait que je trouve des références plus précises car ce genre de constructions a bien dû être étudié.

[*] J'ai changé « enseigner » par « encadrer » pour des raisons évidentes. Désolé pour la redondance « cadre »/« encadrer ».

Typhon (2016-01-22T03:07:19Z)

« Le mot "que" indiqué en rouge est le pronom relatif ; il a un double rôle : (A) introduire la subordonnée (B) préciser la fonction occupée par le groupe commun (l'antécédent de la relative) […] il serait beaucoup plus clair d'avoir deux mots séparés pour les remplir. »

Je me dois de mentionner ici que les syntacticiens générativiste (X-barre et compagnie) vont absolument dans ce sens.

Pour eux, une phrase est intégrée dans une autre au moyen d'une partie du discours appelée complémenteur (qui comprend donc le "que" de "je pense que", "si"…) et ils considèrent que le complémenteur qui introduit les relatives n'a pas de réalisation phonologique (ce qui veut dire concrètement qu'on ne le voit pas). Du coup, le pronom relatif n'a plus qu'un seul rôle à jouer, le deuxième, et on est bien content…

(Bon, ensuite on s'aperçoit que c'est pas forcément une bonne idée de postuler l'existence de "mots invisibles" pour expliquer les phénomènes syntaxiques, et Zeus sait si les générativistes en ont abusé par la suite. Mais pour ce genre de phénomène spécifiquement, ça pouvait paraître une bonne idée.)

Arronax Axolotl (2016-01-22T02:21:26Z)

Comme j'aurais aimé qu'on m'explique les subordonnées relatives en utilisant la notation mathématique. Il y a un (petit) marché pour une collection de livres "Foobar pour mathématiciens", je pense. La grammaire, la musique, la typographie, pourquoi pas les maths!

jonas (2016-01-22T00:30:05Z)

Thank you for the reply.

I have another question. You mention how it's hard to create a relative clause where the antecedent occurs inside a subclause of that relative clause, because the relative pronoun is the most often at the start of the relative clause, and can indicate only the case of the antecedent. Does French have a similar problem if there is no double nesting, but you are trying to ask a direct question, and the variable you are asking for occurs only inside a subclause? I believe that a question word is also usually put at the start of the sentence in French, just like in English.

Gabriel (2016-01-21T23:09:33Z)

> les réels t {tels que les réels x {tels que x>t} vérifient x≥0} vérifient t≥0, construite selon le même modèle que la phrase ci-dessus, et par ailleurs juste

Il ne faudrait pas plutôt x<t ?

Gabriel (2016-01-21T23:07:20Z)

Cette histoire de "où" me rappelle l'institutrice bornée qui me comptait une erreur quand j'analysais "l'année où il est né" comme un complément circonstanciel de temps "parce que si c'est où, c'est forcément un lieu, c'est comme ça". La règle pour la règle, sans aucun souci de sens…

Cargo du mystère (2016-01-21T22:18:24Z)

San-Antonio rapporte des phrases de son collègue et ami Bérurier comme (je paraphrase) "c'est un un gonze dont auquel que je vais lui enseigner la politesse à coups de targettes dans la terrine".
Pour dire que les considérations sur les subordonnées relatives préoccupaient déjà les érudits d'antan.

frankie (2016-01-21T22:12:20Z)

"Je vois la chose que tu aimes."
Je comprends que "vois" peut être pris avec deux sens différents. La subtilité des couleurs m'échappe.
Un enseignant attaché à la langue française aurait eu plaisir à vous en montrer les méandres et à suivre les vôtres. Il en existe mais tous n'y accordent pas la même importance.
Le commun des gens pense que la communication se passe d'art, et que celui-ci conduit à l'ennui ou pousse à l'incompréhension. Grand bien leur* fasse; je leur préfère les autres. D'où mon plaisir fugace à vous survoler, ou continu à vous lire.
Quel plaisir d'avoir une langue si l'on n'y pinaille pas ?
Quel plaisir d'avoir un bon vin si l'on ne le déguste pas ?
* pourquoi ce pluriel subit ? Il est clair, même si l'on peut le voir comme correct ou non.

Ruxor (2016-01-21T22:03:08Z)

@Arthur: Tu ne dirais pas, par exemple, « il vit dans une province reculée d'un pays arriéré » ? Ça me semble exactement selon le même modèle que « un groupe d'un cours » (voire, « un groupe d'élèves d'un cours intitulé "théorie des langages" »).

Enfin, de toute façon, ce n'est pas l'article (défini ou indéfini) devant « groupe » sur lequel j'attirais l'attention, c'est celui devant « cours » : je soulignais que le cours était divisé en plusieurs groupes et que j'enseignais à un de ces groupes (alors que si c'est « le groupe du cours » cela suggère complètement autre chose). Pour l'article devant « cours », j'ai repris un indéfini parce que dans la principale je dis « dans le cadre d'un cours », donc si j'évoque juste le sujet de la subordonnée sans avoir mentionné le cours avant, je vais dire « j'enseigne à un groupe d'un cours intitulé "théorie des langages" » ; mais bien sûr, si je mets la principale et la subordonnée côte à côte, la deuxième fois je vais dire « le cours » ou « ce cours » puisque j'en ai parlé juste avant, et c'est bien ce que j'ai écrit dans ma réponse à Subbak (le premier commentaire que j'aie posté).

Ruxor (2016-01-21T21:47:42Z)

Allons bon, après que j'ai expliqué en détail la construction de la relative et que j'ai défendu l'idée qu'un cours pouvait être divisé en groupes, les grincheux chercheurs de poux attaquent maintenant le régime du verbe « enseigner ». Je ne sais pas à quel endroit exactement le dialogue suivant devient pécheur dans leur religion linguistico-normalisatrice,

— Quel métier exerces-tu ?
— J'enseigne.
— Et à qui enseignes-tu ?
— À des sots.
— Tu enseignes à des sots ? Et que leur enseignes-tu ?
— Il faut bien vivre. J'enseigne. J'enseigne la grammaire. J'enseigne à des sots. Je dirais même plus : j'enseigne la grammaire à des sots.

…mais je crois que ça ne vaut même pas la peine de chercher à comprendre.

Il est vrai qu'il est amusant de remarquer que dans une langue un peu vieillie on enseigne quelqu'un sur quelque chose ou à faire quelque chose, et que les compléments direct et indirect se sont en quelque sorte échangés (puisque maintenant on enseigne quelque chose à quelqu'un) ; mais on ne voit vraiment pas ce qui permet de dire que, lors de cette permutation des compléments, une des quatre combinaisons (entre présence ou non de l'objet désignant la personne instruite et présence ou non de l'objet désignant le savoir transmis) serait devenue « incorrecte » — de quel chapeau on sort l'idée qu'on peut enseigner, enseigner la grammaire, enseigner la grammaire à des sots, mais pas juste enseigner à des sots (et avant la permutation, on pouvait quoi ? enseigner, enseigner des sots, enseigner des sots sur la grammaire, mais pouvait-on aussi enseigner sur la grammaire tout court ?). Disons juste que je vois assez de textes, et même de livres édités par des gens respectables, ayant des titres comme « enseigner à des adultes », pour conclure que je ne suis pas le seul à trouver ça délirant.

Ce qui est plus intéressant, c'est sans doute de se demander comment on devient prescriptiviste en matière linguistique : comment se fabrique-t-on cette étrange idée qu'il y a des « fautes » de langage, des usages « incorrects », etc. ? Est-ce l'enseignement scolaire qui fait ça ? Une sorte d'incapacité à dépasser le stade de la dictée ? Je devrais plutôt écrire une entrée pour méditer sur ce sujet.

Arthur (2016-01-21T19:57:40Z)

@Ruxor : personnellement, je ne dirai pas non plus « un groupe d'un cours », tout simplement parce que je ne dis pas « un X d'un Y ». Par exemple, je dirais « un pied de chaise » ou « le pied d'une chaise », mais pas « un pied d'une chaise ».

En ce qui concerne les résultats d'une recherche par Google avec guillemets sur "un groupe d'un cours", il m'affiche comme toi 246 000 résultats, mais seulement 2 pages. Quand je passe à la deuxième page, il me dit qu'en fait, il n'y a que 17 résultats ! Je ne comprends pas pourquoi.

Dans la phrase originale de ton post, cependant, il y a un « dont », qui n'est pas équivalent à « d'un(e) » mais à « du/de la » : « il m'a prêté une chaise, dont un pied était cassé ». Donc le problème n'est pas là et je ne comprends pas pourquoi tu réponds à Quentin que tu n'as pas dit « le groupe d'un cours » mais que tu as dit « un groupe d'un cours », alors que tu as dit en fait « un groupe du cours » !!

Qu'en penses-tu ?

Quentin (2016-01-21T19:27:35Z)

@SB c'est à dire qu'il y aurait élision de "une partie" ? Ça me semble un peu étrange comme formulation.

Renard asthmatique (2016-01-21T19:07:26Z)

L'exemple introductif de cette entrée est incorrect (en plus d'écorcher les oreilles), et le gloubi-boulga qui suit n'y change rien.
Le problème vient à mon sens d'une mauvaise utilisation du verbe "enseigner".
On peut dire "J'enseigne {qqch} à {qqn}.", ou éventuellement "J'enseigne {qqn}." (dans le sens de "J'instruis {qqn}.").
En revanche on ne dit pas "J'enseigne à {qqn}."
Dans le cas de ton exemple, tu pourrais écrire "…dans le cadre d'un cours dont j'enseigne un groupe…" ou "…dans le cadre d'un cours dont j'enseigne {la calculabilité} à un groupe…",
mais cette dernière formulation est beaucoup plus lourde que "…dans le cadre d'un cours à un groupe duquel j'enseigne {la calculabilité}…" qui me semble la plus correcte.

Régis (2016-01-21T18:54:22Z)

Moui. Mais tout de même, répondre à un besoin d'éclaircissements par une logorrhée aussi pléthorique que labyrinthique, c'est un peu se ménager un écran de fumée. Allez, je vais me plonger dans le Grevisse pour tâcher d'y voir plus clair. Ce n'est pas gagné…

Quentin (2016-01-21T17:42:07Z)

Je retire mon dernier point sur les interrogatives (pas vraiment de désaccord en fait)

Quentin (2016-01-21T17:26:16Z)

Ce n'était pas une question de grammaire mais de sens. Certaines phrases ne se disent pas même si elles sont grammaticalement correctes (c'est ce qu'on appelle "erreur de catégorie"). Cependant j'admet que c'est acceptable si c'est "un" groupe, je n'avais en fait pas lu les commentaires de l'ancien billet qui expliquent la situation. Reste que la phrase est plus qu'ambiguë quand on ne connait pas le contexte, voire incompréhensible, sinon je ne me serais jamais permis ce commentaire provocant.

Concernant la question de l'objet de l'article : ok. Ceci dit je ne suis pas convaincu. Dire que la grammaire a ses limites d'expression, ce n'est pas dire qu'elle n'est pas codifiable. En l'occurrence je pense qu'il y a des règles assez précises concernant les subordonnées, et que la bonne façon de faire est d'utiliser "dont" pour les "de" qui accompagnent un verbe et "duquel" sinon. On peut toujours discuter de la tolérance qu'il y a à avoir envers les erreurs grammaticales les plus usitées, qui finissent même parfois par devenir règle, mais dire que c'est parce-qu'il est impossible d'avoir des règles précises n'est pas le bon argument. C'est possible même si tout n'est pas exprimable.

Quelques autres remarques sur l'article :

- pour moi "dont" n'est pas une simple astuce mais une reformulation, car on peut toujours dire "je pense *de* cette mesure qu'elle est liberticide". Je ne vois pas de cas où ça ne marche pas. L'exemple donné plus bas dans l'article d'une utilisation possible de cette astuce "j'aime les concepts {dont leur nom les éclaire}" me semble faux, à moins que je ne le comprenne pas.

- je ne suis pas convaincu sur l'importance de la distinction entre interrogative et relative. Dans les seuls cas ambigus donnés, toute l'ambiguïté est portée par la polysémie du verbe ("voir" et "ignorer" ont deux sens bien distincts). Il y a peut être une distinction proposition sur le monde / objet du monde, mais au final interpréter "qui tu aimes" comme "celui ou celle que tu aimes" ou comme "la réponse à la question 'qui tu aimes'" ne fait pas grande différence…

SB (2016-01-21T17:19:25Z)

« "voici l'endroit {où nous nous sommes rencontrés}", même si dans ce cas la nature exacte de la phrase subordonnée n'est pas entièrement claire ("nous nous sommes rencontrés à cet endroit" ? ou "en" cet endroit ?) »

Il me semble que la « nature » - si vous entendez par là la fonction - de la subordonnée est claire: complément de lieu. Le choix de la préposition (« à » ou « en ») me semble être une pure question de *forme* qui ne pose pas de problème: quand on demande « où vas-tu ? », on n'a pas besoin de savoir si cette question se paraphrase par « à quel endroit vas-tu ? » ou « en quel endroit vas-tu ? ».

@Quentin: « On ne dit pas "j'enseigne d'un cours" »

On pourrait dire « un cours dont j'enseigne » quand on enseigne *une partie* de ce cours ?

Guego (2016-01-21T16:45:32Z)

Je me demande comment ça marche dans les langues flexionnelles avec des formulations à la "tous ceux qui" ou "quiconque" (whoever en anglais, quisquis ou quicumque en latin) lorsque ce groupe joue deux rôles différents dans la principale et dans la subordonnée. Quel cas utilise-t-on ?
Exemple : comment traduire "Et il briserait comme une paille quiconque résisterait" (Zola) ?
Déjà en anglais, la situation n'est pas claire pour certains natifs : http://www.antimoon.com/forum/t10197.htm
Après, la réponse est peut-être bêtement "on essaie de tourner la phrase autrement pour éviter le problème", mais d'un point de vue de "grammaire théorique", je trouverais ça décevant. :)

Ruxor (2016-01-21T15:56:53Z)

@Quentin: Bien sûr que si, on dit « un groupe d'un cours » ! (Je souligne que c'est « un » groupe, pas « le » groupe : le cours est divisé en plusieurs groupes, c'est comme ça qu'on dit, moi et les ~247k résultats que renvoie Google pour la recherche de « "un groupe d'un cours" » en français, guillemets compris.) Je serais d'ailleurs bien curieux de savoir quelle preuve du contraire tu prétendrais avancer, quelle grammaire poussiéreuse tu as pu dénicher qui préciserait au §1729.42(C)(I)(b)(γ)(ix) que le nom « groupe » ne peut pas prendre le nom « cours » comme complément, parce qu'une telle grammaire m'intéresserait à ajouter à ma collection des objets rares et précieux. Ou est-ce que c'est juste un oukaze tiré de ton chapeau ?

Mais la mauvaise foi mêlée de condescendance dans ton commentaire (rendons la politesse) tombe d'autant plus à l'eau que tu t'imagines apparemment que j'aurais cherché à « expliquer en longueur les règles », alors que je cherche précisément le contraire, à expliquer que la complexité des phénomènes des subordonnées relatives en français est bien plus grande que ce que les grammaires prescriptivistes n'arrivent à codifier. À aucun moment je n'énonce de règle (où as-tu cru voir un début de commencement de quoi que ce soit qui y ressemble ?), j'expose simplement un certain nombre d'exemples de phénomènes dont l'analyse demande une certaine finesse. Alors oui, pour comprendre ce que je dis, il faut le lire, c'est dur, mais c'est comme ça.

Quentin (2016-01-21T15:03:34Z)

C'est indéfendable, les grincheux ont raison. Les accuser de ne pas maîtriser la grammaire en leur en expliquant en longueur les règles est de la pure mauvaise foi mêlée de condescendance.
On ne dit pas "j'enseigne d'un cours" ni "le groupe d'un cours" (au mieux par abus de langage mais c'est du mauvais français : il faut dire "le groupe qui suit ce cours"). Il faut donc utiliser "que" ou reformuler la phrase.

Edith (2016-01-21T13:32:18Z)

Belle réaction d'intelligence grammaticale à des réflexions sourcilleuses sans grandeur, mais… On peut voir la langue d'une manière prescriptrice, en estimant que tout ce qui est correct et incorrect est prévu à l'avance et que des experts de cette langue sont capables de porter un jugement définitif sur une phrase. Mais on peut aussi considérer (c'est le point de vue généralement admis par les linguistes) que la description objective d'une langue englobe la manière de parler de TOUS ses locuteurs, et que les genres de langage, y compris les "fautes" commises par les étrangers par exemple, y ont leur place.
Dès lors, il y a une langue officielle qui possède ses gardiens diplômés par l'Etat, et une langue tout simplement, lue, écrite, parlée, rêvée, bidouillée, que personne ne possède et qui tient son rôle d'outil de communication (ou de mensonge) dès lors qu'elle est compréhensible par nos interlocuteurs.
Et voilà déjà ce qu'en disait Victor Hugo dans sa préface à Cromwell : "Les langues sont comme la mer : elles oscillent sans cesse. À certains temps, elles quittent un rivage du monde de la pensée et en envahissent un autre. Tout ce que leur flot déserte ainsi sèche et s’efface du sol. C’est de cette façon que des idées s’éteignent, que des mots s’en vont. Il en est des idiomes humains comme de tout. Chaque siècle y apporte et en emporte quelque chose. Qu’y faire ? cela est fatal. C’est donc en vain que l’on voudrait pétrifier la mobile physionomie de notre idiome sous une forme donnée. C’est en vain que nos Josué littéraires crient à la langue de s’arrêter; les langues ni le soleil ne s’arrêtent plus. Le jour où elles se fixent, c’est qu’elles meurent".

Ruxor (2016-01-21T11:37:34Z)

@jonas: Excellent questions!

One can indeed replace "tel(le)(s) que" by "où" almost everywhere in mathematical writing, just like "such that" and "where" in English. I would tend to say that there is a slight difference (both in French and in English), but it's more stylistic than semantic, namely that "tel que" binds more strongly, so it's probably more suited to shorter conditions, whereas "où" is more "global" in character, something which may be related to the other point you raise, but I haven't given it that much thought and maybe I'm just splitting hair. (Also, I'd tend to use a comma before the "où", and also, "tel que" can be used with the indicative or subjunctive mood, the difference in meaning being very slight, whereas "où" can only have the indicative.)

The issue of whether "où" introduces (1) a "subordonnée relative" (the kind for which I used the red color) or (2) a (non-essential) "subordonnée conjonctive" (for which I used the blue color) or even (3) an "interrogative indirecte" (green) is very thorny. I would say that it can be all three, and the difference in meaning can be slight. For example, "voici l'endroit où nous nous sommes rencontrés" is unquestionably an example of (1), whereas "je reviens où nous nous sommes rencontrés" is probably one of (2) (it could be argued that there is an implicit "là" and they one might possibly analyse it as (1)), and "je sais où nous nous sommes rencontrés" is one of (3). Also, I've always been bothered by the lack of symmetry between "où" and "quand" in that "où" can work as (1) or (2) but "quand" can only work as (2) (you can say "je serai présent où tu auras besoin de moi" and "je serai présent quand tu auras besoin de moi", but "je serai présent à l'endroit où tu auras besoin de moi" versus "je serai présent au moment OÙ tu auras besoin de moi" — this is maddeningly illogical).

Nil (2016-01-21T08:58:28Z)

À mon avis, le principal problème n'est pas la construction de la subordonnée, dans ce qui a été reproché dans l'entrée précédente, mais de la polysémie du mot "cours" et de sa subtilité.

"dans le cadre d'un cours {dont j'enseigne à un groupe}" -> David emploie "cours" comme l'organisation administrative formelle des élèves et des enseignements, ce qui n'est pas forcément ce à quoi le lecteur va s'attendre ici. Personnellement, j'avais compris "cours" comme le contenu didactique, pédagogique et tout ce qu'on veut-ique.

Si on remplace "cours" par "classe", on obtient "dans le cadre d'une classe dont j'enseigne à un groupe" et il n'y a plus aucun problème.
Alors que si on remplace "cours" par "leçon", on obtient "dans le cadre d'une leçon dont j'enseigne à un groupe", qui ne veut pas dire grand chose ; on attend donc : "dans le cadre d'une leçon que j'enseigne à un groupe".

Personnellement, dans le contexte (et je pense que c'est ce que les "lecteurs grincheux" ont aussi compris), je m'attendais à "cours" dans le sens de "leçon".

Ah mince, je viens de voir que @Vincent dit la même chose que moi %)

jonas (2016-01-20T23:51:01Z)

You show examples of using “tel que” to introduce a relative clause with a separate word for the antecedant variable in it. I believe French can also use the word “où” for this function. Is that correct? (The English analogs of these subclause introducers are “such that” and “where”.) If so, does “où” syntactically introduces a relative clause, so that you would mark that word red, or does it instead introduce a subclause of the kind you call “une circonstance non-essentielle” and mark in blue? Does such a subclause have to follow the qualified noun phrase immediately, or can it move to later in the sentence, and does “où” versus “tel que” differ in this regard?

A remark. The relevant chapter in WALS for the syntax of relative clauses is <URL: http://wals.info/chapter/90 >. That chapter may point to references about relative clauses in various languages.

Ruxor (2016-01-20T23:47:15Z)

@Subbak: {…dans le cadre d'UN COURS} # {J'enseigne à un groupe dU COURS} (un groupe de ce cours parce que les cours sont divisés en groupes d'élèves).

Subbak (2016-01-20T23:36:02Z)

Au risque de passer pour un idiot, à défaut d'un grincheux, je ne comprends pas comment "Ce système {dont je suis confronté à la complexité} est assez incohérent" et "dans le cadre d'un cours {dont j'enseigne à un groupe}" sont construites selon le même modèle. Le premier est "Ce sytème est assez incohérent" # "Je suis confronté à la complexité *de* ce système" alors que le second serait "(…) dans le cadre d'un cours" # "J'enseigne ce cours". I.e., sauf erreur grossière de ma part, on a un COI dans un cas et un COD dans l'autre. Quoi qu'il en soit je ne vois pas comment faire apparaître dans la phrase sur le cours le "de" qui est nécessaire à ce que le pronom relatif utilisé soit un "dont".
https://fr.wiktionary.org/wiki/dont

Vicnent (2016-01-20T23:23:51Z)

Je ne sais pas dans quelle mesure tu as fait une sorte de rétro engineering, mais de façon assez surprenante, la page wikipedia FR du pronom relatif expose bien de façon exhaustive tous les cas d'utilisation (règles, syntaxe etc…). Et de façon un chouilla plus claire que toi. (ta présentation est intéressante aussi)

<URL: https://fr.wikipedia.org/wiki/Pronom_relatif#Syntaxe_du_pronom_.C2.AB_dont_.C2.BB >

à priori, ok sur l'explication "J'enseigne à un groupe DE ce cours → Un cours DONT j'enseigne à un groupe. "

Si on remplace "cours" par "classe" (pour éviter de confondre le cours générique (des mathématiques en générale), et le cours qui est la leçon elle même) cela donnerait "J'enseigne à un groupe DE cette classe" → "Cette classe dont j'enseigne à un groupe" marche mieux

Je crois que la confusion vient de la métonymie, non ? Et donc la nature du complément change : on enseigne une leçon, _à_ une classe, _dans_ une classe => la leçon que j'enseigne, cette classe à laquelle j'enseigne, cette classe dans laquelle j'enseigne et … Cette classe dont j'enseigne à une partie.


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