Comments on L'enseignement et les raisonnements incorrects

JML (2018-03-29T21:54:19Z)

Ce qu'on m'avait enseigné, c'est :
quand tu écris quelque chose de faux au tableau, écris d'abord FAUX en gros souligné en rouge à côté et barre d'avance l'espace où tu vas écrire.
Le problème serait la mémoire visuelle d'un étudiant qui a du mal à faire recoller les morceaux du cours dont il arrive à se souvenir. Il risque de revoir la formule fausse sans bien se souvenir que son intérêt est qu'elle est fausse. Après le recollage déraille.
Dieu lui vienne en aide s'il a imprimé avant que tu ne barres.
Mes expériences de recollage en situation d'examen sur cours imparfaitement appris vont dans ce sens. Un vide, puis un bout de truc, qui fait ressortir d'autres trucs, mais parfois on se retrouve avec des contradictions, et là on est dans le caca. Les trucs initiaux sont souvent des bouts de formule ou de schémas.

En ce qui concerne certains de mes cours, j'aurais souhaité que les profs nous retestent un an après. Avec un groupe témoin qui n'aurait jamais été exposé au cours pendant le cursus. Pas forcément directement sur la matière précise du cours, mais disons résoudre un certain problème et avoir compris le cours aide à bien s'y prendre.
Je pense que les résultats auraient été très difficiles à digérer pour les profs.
Et qu'une digestion réussie aurait grandement amélioré ces cours.

PS J'étais MDR sur ton autre billet au sujet du tableur et des notes. Je m'imaginais recevoir un mail :
Après calibrage des notations par les différents correcteurs, vous avez obtenu les résultats suivants :
Question 1 : 1,3256 sur 1,9635
Question 2 : …

Ruxor (2018-03-29T17:38:13Z)

@fakbill: Pourquoi enseigner la calculabilité dans une école d'ingénieurs ? Un peu tout ça à la fois :

• Certains de nos élèves vont faire des cursus théoriques (notamment l'anciennement-nommé-MPRI), et même si on va leur réexpliquer les choses plus précisément, il est utile qu'ils en aient déjà un peu vu.

• Ça fait partie de la culture générale que j'estime indispensable pour n'importe qui qui fait quelque chose de vaguement lié à l'informatique de savoir qu'il y a des choses qu'on ne peut pas faire algorithmiquement pour des raisons théoriques.

• Ça peut être important du point de vue pratique de pouvoir reconnaître un peu ces choses et dire d'emblée « ça, on ne pourra jamais faire », et pourquoi. (Ça peut aussi servir, de façon plus anecdotique, à ne pas être ridicule dans un entretien d'embauche. Je me souviens d'un thread je ne sais plus où où quelqu'un s'était amusé à aller sur des sites où des ingénieurs — souvent indiens — proposent de coder des choses pour de l'argent et demander de coder des choses trivialement équivalentes au problème de l'arrêt pour rigoler des réponses « oui, bien sûr, je peux vous coder ça pour xxx¤ ».)

• Je pense qu'à part l'utilité pratique directe (qui, il faut bien le dire, est un peu douteuse), ça aide à avoir du recul sur l'algorithmique en général, par exemple de comprendre que la notion importante de « machine de Turing universelle » est la même chose qu'un interpréteur, ce que ça implique qu'un langage soit Turing-complet, ce genre de choses.

• De façon encore plus générale, je suis persuadé que les raisonnements généraux utilisés en calculabilité sont un mode de pensée qu'il est important d'intégrer pour tout ce qui est en rapport proche ou lointain avec l'informatique. Notamment :

• Des historiens des sciences ont établi un rapport de descendance assez direct entre la résolution par Turing de l'Entscheidungsproblem et l'invention de l'ordinateur. (Je renvoie à ce sujet par exemple au chapitre de B. Jack Copeland, « From the Entscheidungsproblem to the Personal Computer — and Beyond » dans le volume *Kurt Gödel and the Foundations of Mathematics* édité par Baaz, Papadimitriou, Putnam, Scott et Harper chez Cambridge en 2011. Et il va encore plus loin, traçant, un fil direct pas seulement entre les idées de Turing et l'ordinateur mais même celles de Gödel encore avant.) Il y aurait un certain hubris à se dire qu'on a épuisé ce que ces idées peuvent apprendre à un ingénieur et qu'on peut maintenant les oublier.

L'argument « ce sont de futurs ingénieurs, il ne faut leur apprendre que des choses concrètes et immédiatement utiles à leur futur métier » est toujours compliqué à réfuter, il serait bien d'écrire une fois pour toutes un texte démolissant cette idée de façon générale. Mais sinon, je peux aussi invoquer le fait que dans plein d'autres endroits (pays) on enseigne les rudiments de la calculabilité à des gens qui ne sont pas destinés à faire des études théoriques (encore moins à devenir des logiciens), ou le fait qu'on enseigne à nos étudiants des choses que je considère comme bien plus inutiles en pratique, mais je ne donnerai pas d'exemple pour ne pas me faire d'ennemi.

En fait, si je rencontre une certaine résistance, ce n'est pas tant sur le principe, c'est plutôt sur le nombre d'heures : on est d'accord que c'est important, mais impossible de trouver plus de temps, ils ont déjà tellement de choses, l'emploi du temps est super serré, etc.

fakbill (2018-03-29T15:26:27Z)

Quel est le but de ton enseignement sur la décidabilité?
Qu'ils sachent que ça existe pour la culture?
Qu'ils aient l'idée de s'orienter dans le domaine?
Autres?

En école *d'ingé*, puisque c'est bien de ça dont on parle, on forme des cadres avec une culture scientifique. On peut donc avoir plusieurs buts.

Laurent (2018-03-28T14:44:53Z)

Une année, j'ai eu un nombre incroyablement élevé d'étudiants (environ 10 à 20%) qui prétendaient que le test de l'équilibre de Hardy-Weinberg d'une population se vérifiait si p + q = 1, qui est la façon la plus élémentaire de dire que les probabilités de deux évènements exclusifs de probabilité p et q respectivement représentent l'ensemble des évènements possibles de l'ensemble considéré (je sais, c'est un peu trivial). Ce qui ne correspond bien évidemment pas du tout au théorème en question, c'en est juste une conséquence logique pour les exercices simplifiés que l'on se propose d'explorer. Comme on passe par des estimations de cas pratiques, on se donne la peine de vérifier simplement qu'on n'a pas fait d'erreur de cacul quelque part, c'est donc juste une vérification pratique, simple et rapide. Rien de plus.

L'année suivante, j'ai donc pris la peine de souligner que c'était une erreur impardonnable, en insistant clairement sur ce qu'était le théorème en question et en précisant que les étudiants qui écriraient dans leur copie l'insanité précédente auraient automatiquement zéro. J'ai même vérifié que l'information était bien comprise en les faisant répéter ce qui relève du théorème et ce qui relève d'une vérification de calculs.

Cette année là le taux d'erreur est passé à plus de 50%. C'est à peine croyable, mais quand on interdit aux étudiants de faire quelque chose, c'est exactement ce qu'ils feront avec une très forte probabilité.

Si quelqu'un sait comment on peut arriver au résultat contraire, je suis intéressé…

B. (2018-03-23T17:24:28Z)

Je parierais facilement sur un taux de réussite bien faible à ton dernier exercice. Surtout dans un cours où la partie calculabilité a dû faute de temps être traitée rapidement.

En effet, les erreurs de raisonnement ne sont pas si « stupides » à mon sens :

- dans le premier cas, j'ai tout de suite soupçonné que l'erreur était dans le premier raisonnement à cause du résultat (informel) « on ne peut pas décider quoi que ce soit (ou presque) en lisant le code » (± le théorème de Rice disons…). Cependant, le second raisonnement étant légèrement incomplet (ou disons rédigé sans tous les détails nécessaires) il m'a fallu vérifier que je pouvais bien compléter avant d'être sûr qu'il était bon et donc d'en déduire que le premier était forcément faux ; ce n'est qu'ensuite que j'ai trouvé la vraie source de problème du premier raisonnement ;

- dans le second cas, l'erreur du premier raisonnement est un peu subtile (comme tu l'écris dans le corrigé) et facilement loupable : j'ai dû lire la seconde démonstration, correcte, pour me dire que quelque chose devait clocher dans la première.

Dans les deux cas, c'est la démonstration correcte qui m'a convaincu de la fausseté de l'autre, et c'est une fois convaincu de la fausseté que j'ai pu détecter l'erreur. Tout ça pour dire que le problème vient peut-être de mon niveau limité sur ce sujet… mais en réalité j'enseigne la calculabilité en ce moment, et j'ai fait beaucoup de calculabilité dans mes études et malgré cela, je trouve ton exo pas trivial. Pas dur, mais pas trivial : vu mon expérience du sujet, j'en déduis que c'est un exercice (très) difficile pour des étudiants peu au fait.

Cigaes (2018-03-23T16:39:12Z)

On trouve, dans les livres de maths de lycée, quelques exercices du style « trouver l'erreur » ou « le quel de ces deux raisonnements est juste », souvent typographiés en police pseudo-cursive sur fond blanc à quadrillage. Mais comme ça ne tombe jamais aux examens, on ne les exploite souvent pas.

Ce qui peut arriver bien plus souvent, c'est d'envoyer un élève au tableau pour corriger un exercice, le laisser continuer malgré une erreur (et répondre « on verra à la fin » à « c'est bon c'qu'il a écrit ? », puis l'envoyer à l'ordinateur pour vérifier son résultat et constater qu'il est faux, pour enfin demander à l'élève et la classe : où est l'erreur ?

Quant à au fait d'écrire ou pas quelque chose de faux au tableau… Si on estime que ça aide beaucoup les élèves attentifs, j'ai envie de dire que c'est tant pis pour les inattentifs. Il y a un équilibre à trouver. De toutes façons, des choses fausses au tableau, il y en aura toujours de temps en temps, ne serait-ce que parce que le prof peut être interrompu au milieu de l'écriture d'une formule, et encore plus parce que le prof peut faire des erreurs d'inattention. Les affirmations absolutistes comme celle que tu rapportes sont souvent suspectes.

Frank Wolff (2018-03-23T16:32:13Z)

>mener des évaluations, du type chercher l'erreur dans le raisonnement suivant

J’ai souvenir au collège de « démonstrations » de 0=1 basée sur une division par 0 à détecter. Aussi au lycée une preuve par récurrence que tous les élèves sont des feignants, basée sur une erreur que je n’avais pas comprise et que j’ai négligé d’étudier, parce que j’étais alors un élève feignant.


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