Comments on Quelques réflexions sur le genre grammatical et l'écriture inclusive

reck (2023-12-11T09:55:08Z)

Sur cette thématique, il peut y avoir des désaccords sur ce qu'on veut, pas seulement sur les moyens d'atteindre l'objectif. Dans ce commentaire, je postule vouloir activement que la langue devienne neutre, mettant totalement de côté le premier pan pour mettre la focale sur le second conditionnellement à une certaine réponse au premier. Bref, que ce soit réellement le cas ou non, imaginons l'espace d'un commentaire que mon objectif ainsi que le vôtre est de rendre la langue française neutre sur la question du masculin et du féminin.

Il me semble alors qu'une solution très naturelle serait d'introduire un neutre. Mais j'ai l'impression qu'une manière sensée de procéder serait de déclarer la forme masculine classique neutre et d'introduire une nouvelle forme masculine. En effet, je n'ai pas fait d'étude de corpus mais j'ai tendance à penser que le masculin grammatical est plus souvent employé dans son acception neutre que dans sa mâle acception.

Durant la période de transition, parler de groupes mixtes serait très fluide et parler d'un groupe mâle requerrait d'y prêter une attention explicite (de même qu'en français classique, on doit faire attention pour parler d'un groupe de femmes puisque c'est la tournure qui se distingue par sa forme de celle dévolue aux autres groupes).

Il est amusant de réfléchir à comment un texte du passé serait lu par un être du futur.

Bon, après, c'est pas comme si j'avais médité cela pendant des plombes donc à prendre avec quelques grains de sel, du citron et une téquila.

JML (2021-12-19T11:30:26Z)

Comme toi je suis régulièrement agacé par certaines contraintes de la langue française. Mais je n'adhère pas à la conception répandue « le sexisme est un problème majeur de la société et l'écriture inclusive un bon moyen d'y remédier » : le sexisme est plutôt un millionième du déséquilibre de la société moderne, et une écriture inclusive n'est qu'un moyen cosmétique d'éviter de se faire prendre pour cible par des fanatiques.
Le sexisme n'est qu'un avatar parmi tant d'autres d'une tendance à la discrimination envers des catégories d'humains facilement identifiables et assimilées à des ennemis à abattre, tendance elle-même avatar parmi tant d'autres d'une mentalité où il y aurait sens à réduire les phénomènes du monde à des idéologies que l'on peaufine dans sa tête. (Je ne prétends pas que cette classification en poupées russes serait forcément la plus pertinente : c'est juste un moyen de sortir d'un effet loupe sur le sexisme en particulier.)
Dans ce billet, ta manière d'identifier un problème, et la démarche que tu suis pour proposer une solution, ne font malheureusement que renforcer le véritable ennemi : la mentalité moderne, intellectuelle, qui façonne la pensée depuis les élites jusqu'au bas peuple inculte en poussant à utiliser sa tête d'une certaine manière, pleine de raisonnements, sans place pour la prise de conscience que (sauf pour de rares phénomènes techniques bien circonscrits) ces raisonnements ont lieu dans le vide, le virtuel, et qu'il n'en sort que des paroles toxiques, qui font obstacle à la perception du monde tel qu'il est, des malédictions qui veulent figer le monde selon des conceptions naïves, ignorantes, plutôt que de laisser aller l'aventure douloureuse et merveilleuse de la vie, celle de la découverte d'un monde qui ne cesse de nous surprendre et d'échapper à notre maîtrise, une aventure qui ne peut que se vivre et ne saurait se réduire à une certaine mise en mots.
Dans les cours de récré, les enfants qui viennent d'accéder aux capacités de raisonnement rivalisent pour asseoir leur conception que batman est plus fort que superman, ou l'inverse, et les adultes que ça amuse ne se rendent pas compte qu'ils font exactement la même chose lorsqu'ils abordent tel ou tel sujet en situation sociale ou sur internet, et que les médias auxquels ils consacrent leur attention n'échappent que rarement à l'illusion fallacieuse qu'ils feraient autre chose que du batman-vs-superman ; simplement croire qu'il pourrait être utile de raisonner est une erreur stérilisante (hors domaine technique circonscrit), et malheureusement la mentalité moderne est un obstacle presque infranchissable à l'évitement de cette erreur.

Alors, si une certaine inclusion de langage vient facilement, pourquoi pas, mais s'il s'agit de beaucoup tordre les habitudes, on peut se référer à la verve biblique : c'est prendre soin de filtrer le moucheron alors que l'on avale le chameau. Nous ne sommes pas dans la situation d'un peu de toxicité à évacuer d'habitudes de langage globalement saines, nous sommes plutôt dans la situation d'un langage employé presque exclusivement au service de processus toxiques ; quant à remédier à la chose, nous sommes en slip (démunis).
C'est pourquoi je propose de laisser la pratique des écritures inclusives aux idéologisés robotisés, et pour ceux qui sont parvenus à rester à peu près en vie, à peu près capables de garder un peu d'espoir qu'il y a quelque chose de bon pour eux derrière tout ce qui fait peur, je leur propose de tenter d'abandonner d'un seul coup la tendance à se réfugier derrière les illusions idéologiques rassurantes en acceptant qu'il n'y a aucun algorithme qui permettrait de décider si un comportement est bien ou mal : alors on s'en prend plein la gueule, mais qu'il est bon de se sentir en vie !

Chat laid (2021-08-13T14:03:46Z)

La phrase suivante dans l'article de Hofstadter m'a fait réagir:

« To misperceive it this way would be like calling someone a vicious racist for telling other people "The word 'nigger' is extremely offensive." »

Dans la ville où j'habite (Ottawa, Canada), des enseignants universitaires ont eu droit à des réprimandes publique justement parce que, dans leurs cours, ils ont cité le mot "nigger" (utilisé dans un roman écrit au siècle dernier), et que ça a fait serrer leurs perles à certains étudiants.

Je trouve qu'en général, l'incompréhension de la distinction entre l'usage et la mention est un critère utile pour identifier les fanatiques.

Apokrif (2021-08-04T17:12:06Z)

« Et quand je lis "Bonjour à toutes et à tous(*)" je me croit dans une mosquée… »

Alors qu'il est facile de dire « aux gens » ou « à tout le monde » par exemple: plus court, et plus inclusif (inclut les gens qui ne sont ni hommes ni femmes).

De même qu'il est absurde de dire « hommes et femmes » au lieu de « gens » ou « personnes ».

Cigaes (2021-08-04T11:20:46Z)

@Nick : excellente idée !

@Consigliere ZARF : les non-binaires peuvent écrire comme ça leur chante. (Pourquoi avoir ajouté « locuteurs » alors que le reste de la phrase était épicène ? Échec critique.)

Laurent (2021-08-03T22:06:39Z)

@Cigaes

> Encore une fois, cette disposition continuerait à renforcer l'idée réflexe que parler d'un homme est le cas normal et que parler d'une femme est l'exception qui mérite d'être mentionnée.

C'est un bon point. Je vais tout de même essayer de le contredire, quitte à très légèrement franchir le seuil de la mauvaise foi :)

Au lieu d'exprimer la situation comme «parler d'un homme est le cas normal», je l'exprimerais par «le neutre est le genre fourre tout, et on mets les hommes dedans».
Exprimé de cette façon, c'est plus conforme à l'esprit de ce que signifie un «neutre».

Après, quoi qu'on fasse, on est victime du principe des tiroirs. Il y a deux genres grammaticaux, mais au moins 5 cas à exprimer :

1. on parle d'un homme, et on veut que ça se sache
2. on parle d'un homme, et on ne veut pas le préciser
3. on parle d'une femme, et on veut que ça se sache
4. on parle d'une femme, et on ne veut pas le préciser
5. on veut parler de tout le monde : homme, femme, binaire, pas binaire ou autres.

La proposition de substituer masculin -> neutre couvre bien les cas 2, 3, 4 et 5 (qui sont à mon avis les plus courants dans les discours usuels).

La proposition de David couvre bien les cas 2, 4 et 5 seulement.

Les proposition de points médians et de féminisation de tout couvrent uniquement les cas 1 et 3. (et rendent très difficile d'exprimer le cas 5)

Bref, quoi qu'on fasse, il y a des cas pour lesquels il faudra faire appel à des périphrases.

Tout ça pour dire que rebaptiser «masculin» en «neutre» n'est pas une solution miracle à toutes les objections, mais ça fait déjà une bonne partie du boulot tout en restant très simple. Même pas vraiment besoin de réformer une règle de grammaire, parce que, dans l'usage, c'est déjà largement comme ça que sont les choses.

Consigliere ZARF (2021-08-03T21:47:34Z)

@Nick

> une règle simple: Le locuteur utilise comme genre par défaut son genre opposé.

Brillant! (Jusqu’à ce que quelqu’une demande, quid des locuteurs non-binaires 😇)

Nick (2021-08-03T16:38:58Z)

Pour moi l'écriture inclusive sert à rappeler que les femmes peuvent être pilote d'avion et le hommes infirmiers. En français le genre masculin étant le genre pas défaut cela donne, en français correct:
"Les chercheurs se sont alarmés de cette situation."

Je trouve toutes les déclinaisons de l'écriture inclusive très très désagréables à lire. Et quand je lis "Bonjour à toutes et à tous(*)" je me croit dans une mosquée…

"Les chercheuses et chercheurs se sont alaramés de cette situation."

pire
"Les chercheus.e.s se sont alarmé.e.s de cette situation"

Je propose de ne (presque) strictement rien changer au français et d'appliquer une règle simple: Le locuteur utilise comme genre par défaut son genre opposé.

Je suis un homme et motard. Je dirais donc: "Nous, les motardes, sommes en colère en raison des limites de vitesse excessivement basses. "

Si j'écris un livre de maths je dirais: "La lectrice peut facilement vérifier
que …"

L'avantage avec ce système, en plus de sa simplicité biblique, est que, si dans un domaine il y a un déséquilibre homme/femme, le corpus de textes qu'on y trouve sera plus inclusif du genre minoritaire.

(*) d'ailleurs, n'est-il pas sexiste de toujours mettre le "toutes" avant le "tous"?

Ô Bélix ! (2021-08-03T16:38:21Z)

« Maintenant, avant de me mettre vraiment à remplacer dans mes mails les formules comme *chers étudiants* par *chères personnes étudiantes* (en attendant le jour glorieux que j'appelle de mes vœux où *chères étudiantes* fera référence à toute personne qui étudie sans rien dire sur son genre)… »

Ou sinon, ô Grand Démiurge, faites le chemin inverse : posez « chers étudiants = chers individus étudiants », et basta così.

Et, non content de rejoindre le commun des mortels, vous aurez le temps de lire Lucien représentant le Grand Platon dans sa République, seul.

Frank Wolff (2021-08-03T08:43:36Z)

@Peut-être que, dans ces pays, la situation des gens qui ne sont pas des hommes serait encore pire si ces langues marquaient plus le genre.

> Oui enfin ce genre d’argument marche dans les deux sens, on peut toujours dire que peut-être cette situation serait-elle encore meilleure. On dit ce qu’on veut, puisque justement on est confrontée à une absence de preuve. Tout ce qu’on a c’est que les femmes et non binaires ne sont pas mieux traitées là-bas qu’ici.

@Cigaes « soyons réaliste, ça n'a aucune chance de prendre. »

> C’est très proche d’être mon sentiment – sans preuve :) . Je ne vois pas bien le moyen de faire évoluer le langage par prescription, sauf peut-être en pratiquant une forme d’oppression à préciser. Et encore ne parle-t-on ici que du français de France, quid de celui du reste de la francophonie, bien plus nombreuse, et essentiellement indifférente à nos petits soucis.

L’utopie me semble totale, dans les effets supposés de cette réforme, comme dans sa faisabilité. Le sol est si meuble que si toutefois un tel élan était réellement entrepris, le plus probable est que ses exécuteurs se seront entre-tués avant même de s’être entendus sur la moindre modalité commune.

Laurent (2021-08-02T20:17:12Z)

@apokrif

«
Ne pas confondre corrélation et causalité. Peut-être que, dans ces pays, la situation des gens qui ne sont pas des hommes serait encore pire si ces langues marquaient plus le genre.
»

Peut-être pas aussi.
J'avoue être tenté par une enquête d'utilité.
J'ai du mal à croire que l'aspect plus ou moins genré d'une langue ait une influence sur le comportement des gens.
L'influence dans l'autre sens (l'organisation de la société sur la langue) semble, elle, historiquement établie.

Apokrif (2021-08-02T15:25:51Z)

@Frank Wolff :

> On apprend que l’Indonésien et le Japonais sont moins genrés. Les femmes et les non binaires sont-ils moins exclus, et leur situation est-elle meilleure dans ces pays que dans d’autres ?

Ne pas confondre corrélation et causalité. Peut-être que, dans ces pays, la situation des gens qui ne sont pas des hommes serait encore pire si ces langues marquaient plus le genre.

Cigaes (2021-08-02T12:01:17Z)

@DOFP, laurent et quelques autres :

Il est sûr qu'en termes de logique de la langue, il serait préférable que la forme non marquée soit considérée comme neutre.

Mais il faut se rappeler *pourquoi* certains ont envie de faire évoluer les choses, que David rappelle pourtant dès le début de l'article, dans le deuxième point de son troisième paragraphe, et développe en rappelant la devinette avec la chirurgienne.

En outre, si on considère que la forme non marquée est le neutre, il n'y a alors plus de masculin, ce qui pose la question de pourquoi il y aurait un féminin.

Encore une fois, cette disposition continuerait à renforcer l'idée réflexe que parler d'un homme est le cas normal et que parler d'une femme est l'exception qui mérite d'être mentionnée.

Ou alors il faudrait introduire une autre forme marquée, spécifiquement pour le masculin, mais soyons réaliste, ça n'a aucune chance de prendre.

Frank Wolff (2021-08-02T10:54:36Z)

J’avoue manquer de repères pour adhérer à cette vision créationniste du langage. On suppose sans preuve qu’en corriger artificiellement les raccourcis et absurdités mène à quelque chose… mais à quoi ?

On apprend que l’Indonésien et le Japonais sont moins genrés. Les femmes et les non binaires sont-ils moins exclus, et leur situation est-elle meilleure dans ces pays que dans d’autres ? Très douteux. Je réclame une enquête d’utilité.

laurent (2021-08-01T19:09:37Z)

J'aime bien l'idée.
Comme mentionné par certains, l'académie française disait en gros qu'on pourrait simplement barrer partout "masculin" pour remplacer par "neutre", et ça irait très bien.
L'usage de la langue fait déjà que le masculin est le plus souvent utilisé comment neutre. ex: "un témoin anonyme". Le masculin est utilisé dans le but de masquer le genre.

La fameuse règle du "le masculin l'emporte" qui irrite tout le monde serait remplacée par "quand on ne peu pas ou on ne veut pas préciser le genre, on utilise un neutre". Après, les personnes de genre masculin s'accordent au neutre, alors que les personnes de genre féminin s'accordent au féminin.

Donc si on veut préciser qu'une personne est un homme, il faut faire une périphrase, alors que pour préciser que c'est une femme, l'accord suffit.

Cela ne va pas aussi loin que ta proposition de truc/chose, mais ça a le mérite d'être sémantiquement rétro-compatible avec les textes déjà existants.

À titre personnel, je trouve que c'est la solution la plus simple : on arrête de dire "masculin" et on dit "neutre". C'est pas aussi élégant que ta solution, mais c'est plus simple, tout en allant dans le même sens.

DOFP (2021-08-01T16:30:59Z)

À ce jeu le masculin est meilleur car l'écart avec l'usage actuel est moindre, donc la probabilité d'adoption plus grande. Mais il y a parallèlement un mouvement de féminisation des mots (maitresse de conférence) dont les défenseuses se sentiront heurtées.

Charlie (2021-07-30T20:18:53Z)

Je ne vois pas moi non plus quel problème on cherche à résoudre en modifiant ainsi la langue. Est-ce que le monde serait vraiment moins dur si on avait un genre neutre ? Ce qui est gênant dans cette histoire, c'est qu'une toute petite minorité veut imposer au reste des français une novlangue au nom d'une idéologie qui n'est partagée par personne.

Iel (2021-07-29T15:22:13Z)

Est-il possible de rappeler en quoi le caractère genré d'une langue est problématique, et suffisamment problématique pour qu'on souhaite modifier la pratique de la langue ?

Je pose la question strictement au premier degré, dans le seul but de comprendre, et je ne considère pas comme un dû qu'on me réponde. Comme il est très facile de se braquer contre une idée pour de mauvaises raisons ou de caricaturer les arguments des personnes qui soutiennent des idées qui ne nous sont pas familières, je préfère demander.

Je précise que je n'ai pas de contre-argument à opposer : on ne peut pas vraiment dire que j'ai à ce jour quelque chose qui mérite de s'appeler une réflexion sur ce thème.

zEgg (2021-07-28T22:59:41Z)

J'ai toujours dit "marqué" et "non-marqué" pour ce que tu appelles respectivement "chose" et "truc". Je croyais que c'était standard. Il faudrait enseigner cela ainsi : En français et en suédois on a historiquement tendance a mettre en non-marqué quand on ne sait pas ou qu'on s'en fout. Ce n'est pas très important et peut-être que l'usage s'inversera un jour (chères étudiantes). Idéalement il faudrait même plutôt qu'il y ait un flottement ou tout le monde fait au pif selon l'humeur et on ne sait plus très bien si la règle c'est marqué ou non-marqué par défaut (comme ces mots dont plus personne ne sait vraiment le genre, tentacule, échappatoire, après-midi ; en vrai il suffit de faire au pif et d'accorder et y a pas mort d'ho- y a pas mort de personne). Et en note de bas de page : en français les femmes sont marquées, en suédois ce sont les hommes, mais c'est devenu facultatif et rare ou archaïque hors régionalisme : "den galne pojken", "den galna flickan", "det galna barnet". Il n'y a pas de raison de penser que ça ne puisse pas aussi devenir archaïsant en français.

Cigaes (2021-07-28T17:45:42Z)

Je m'étais fait la remarque suivante il y a quelques temps : Un des avantages d'avoir des pronoms genrés, c'est que quand il y a deux personnages de genres différents dans une scène qu'on décrit, on a deux pronoms différents pour les désigner. Je me demande si ça peut être une incitation pour les auteurs à aller vers la parité.

Si on accorde tout comme chose, on perd cet avantage, il faudra y remédier. Peut-être inventer des pronoms variés, al, oul, ul, eul, anl, onl, etc., à utiliser non pas en fonction du genre de la personne mais de la proximité phonétique avec la personne qu'ils désignent.

Plus sérieusement, je tiens à souligner que le français a déjà des pronoms neutres pour la troisième personne du singulier, qu'on peut assez facilement utiliser dans des phrases qui ne font pas artificielles : on, soi.

Apokrif (2021-07-28T12:30:47Z)

@ETC:

« Bref, "chères étudiantes" est acceptable car cela fait référence à des "personnes étudiantes". Mais par contre "chers étudiants" n'est pas acceptable car il y a confusion possible »

Pas plus que dans le premier cas si « chers étudiants » = « chers individus étudiants ».

Thomas (2021-07-28T09:25:58Z)

@titipukhân tout à fait, et c'est là la limite de cette réflexion je trouve.
On est sur un sujet qui vit, qui a évolué et continuera à le faire.

L'auteur s'exprime généralement de façon rationnelle, il chercher des vérités comme il le fait sur d'autres sujets.

Mais des vérités ici, en existe-t-il vraiment ?

Sur ces sujets, la notion de vérité, de ce qui est mieux, etc. est fortement influencée par son propre vécu, ses a priori, sa vision de ce qu'est une "meilleure société", etc.

Le passage sur "les réacs" résume un peu les choses. C'est en quelque sorte une guerre culturelle dans laquelle il faudrait diaboliser l'autre camp, faute de pouvoir rationaliser complètement le problème pour montrer qu'on a raison et que l'autre a tort.

Il ne faut bien sûr pas en vouloir à David. Ses textes sont généralement bien plus argumentés que ce qu'on trouve ailleurs, et si ses propres biais ressortent parfois c'est peut-être car il nous a habitués à des raisonnements d'une rigueur implacable.

Si les plus rationnels se limitent à des raisonnements parfaitement logiques, ne sont-ils pas condamnés à perdre la bataille des idées, cette bataille se jouant sur un terrain où toute proposition n'est pas démontrable ?

a3nm (2021-07-28T08:59:16Z)

C'est intéressant comme idée ! j'insère déjà spontanément du "personne" un peu partout (mais je n'étais pas allé jusqu'aux noms propres). C'est un peu dommage niveau concision de tendre vers un usage généralisé des formes marquées plutôt que non-marquées, mais dans la situation actuelle ça semble aussi être la moins mauvaise solution.

Quelques remarques :

- Comme Cigaes, je pense un TL;DR serait utile
- "l'un désignant une personne catégorisée comme homme dont le métier est de pratiquer la vente et l'autre désignant une personne catégorisée comme homme dont le métier est de pratiquer la vente" je pense que le 2e devrait être "femme" ?
- Sur la non-divulgation du genre des personnages, il y a aussi le roman _Sphinx_ de l'oulipienne Anne Garréta, qui raconte une histoire d'amour entre deux personnes sans donner aucune information sur leur genre.

Thomas (2021-07-28T08:59:02Z)

Toute cette entrée mentionne le "genre", étant entendu, j'imagine, que l'on parle de cet ensemble de constructions sociales établies plus ou moins indépendamment par les sociétés pour définir des normes (comportementales, vestimentaires, etc.) auxquelles devraient correspondre les individus (homo sapiens) de ces différentes sociétés en fonction de leur sexe biologique.

Cette entrée n'aborde pas le sujet de la biologie, j'imagine volontairement, étant entendu que cette construction sociale a évolué et que les liens avec une quelconque réalité biologique sont aujourd'hui assez faibles.

Je soupçonne que ce sujet — le lien entre ces constructions sociales et une quelconque différence biologique — soit en fait le sujet majeur autour de ces questions.

Mon interrogation de fond est la suivante :

Si l'on partait de zéro, en mettant des bébés homo sapiens sur une île déserte — on se contente de leur apprendre à se nourrir — puis en les laissant évoluer pendant des millions d'années. Ils finiraient par réinventer une / plusieurs langues.

Ces langues seraient-elles "genrées" et pourquoi ?

En fait, nous ne pouvons pas reproduire ce scénario mais nous en observons une instance : le monde tel qu'il est aujourd'hui.

Dans cette instance, cette notion de genre s'est développée dans les différentes civilisations sous une forme ou une autre, et s'est construite autour de la différenciation sexuelle de notre espèce.

A minima, nous pourrions nous poser les questions suivantes :
* Observe-t-on une quelconque corrélation entre le degré de "genrage" d'une langue et les normes des sociétés correspondantes ?
* Dans les sociétés où la langue est très peu genrée, observe-t-on une tendance à compenser par la création d'autres expressions ou mots pour désigner les personnes en fonction de ce que serait leur sexe biologique ?

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Enfin, je me demande aussi ce qu'on entend par "personne non-binaire". Est-ce un qualificatif intrinsèque d'une personne, ou est-ce une construction sociale en opposition à une autre construction sociale ?

Puis-je créer le mouvement des "personnes non-ternaires" qui ne sont ni hommes, ni femmes, ni non-binaires ? (je troll, mais en vrai je trouve que cette propension des gens à créer des catégories puis à s'y enfermer est assez dingue)

Dr. CaSo (2021-07-28T03:53:00Z)

Je suis tombé(e) ici grâce à Matoo et je reviendrai! Merci pour ce superbe texte. Je n'en pense pas moins! Il faut absolument que vous lisiez Betty, d'Arnaldur Indridason, traduit de l'islandais en français avec un talent extraordinaire qu'on ne remarque que vers la moitié de l'histoire (je ne peux pas en dire plus pour ne pas gâcher l'histoire)! Quant à moi, je vais aller lire Hofstadter, je suis linguiste et choqué(e) de ne pas l'avoir déjà lu!

JBMSL (2021-07-28T02:24:14Z)

Quelques remarques :

1) Concernant les noms de métiers épicènes, je pense comme contre-exemple à "médecin", qui est du genre truc, mais qui peut bien désigner indifféremment un homme ou une femme.

2) J'ai l'impression que votre titre est mal choisi. Vous ne parlez pas vraiment d'écriture inclusive, mais de réforme de la langue. L'écriture inclusive, telle que généralement comprise (du moins en français), c'est simplement une convention d'écriture, qui a donc trait au codage écrit de la langue, et pas de la langue elle-même. Les personnes avec qui j'en ai parlé sont généralement d'accord que "les étudiant-e-s" (écrit comme ça, ou avec le point médian, ou avec une autre convention) se prononce, à l'oral, comme "les étudiants". Le fait d'utiliser ou non l'écriture inclusive ne change rien à la manière dont un texte est lu (et, a fortiori, ne change rien à la manière dont un discours non-écrit est prononcé).

3) J'aime bien le principe de votre proposition. A l'inverse, le principe de l'écriture inclusive me pose un gros problème, à savoir que, sous prétexte de lutter conte le sexisme, ça revient à apporter systématiquement des informations non pertinentes sur les genres des personnes dont on parle. Au contraire, en écriture traditionnelle, dans beaucoup de cas, on utilise le masculin comme neutre sans que cela implique qu'on parle effectivement d'un homme : "Bonjour à tous", "Tu devrais aller voir un psy", "Je voudrais bien voir la tête du fonctionnaire qui a validé cette attestation dérogatoire"… Et évidemment, c'est particulièrement problématique lorsqu'on parle de personnes non binaires qui rejettent les notions de masculin et féminin les concernant. Au moins, l'écriture traditionnelle nous offre, dans le masculin, un neutre facile à employer.
Le souci, c'est que je pense que votre proposition n'est pas réaliste, parce qu'elle consiste à changer la langue et pas seulement son orthographe. Du coup, faute de meilleure solution, je préfère quand même rester sur l'écriture traditionnelle.

ETC (2021-07-27T13:13:24Z)

Bref, "chères étudiantes" est acceptable car cela fait référence à des "personnes étudiantes". Mais par contre "chers étudiants" n'est pas acceptable car il y a confusion possible, et c'est sans doute sexiste.
C'est logique, et pas du tout absurde.

Apokrif (2021-07-27T13:03:26Z)

« on ne veut pas forcément révéler cette information qui dans l'immense majorité des cas est complètement sans intérêt »

Peut-être pourriez-vous ajouter un lien vers http://www.madore.org/~david/weblog/d.2011-01-31.1844.html ?

Pierre Driout (2021-07-27T11:59:42Z)

Ca effraie ! Mais c'est chouette quand même …

Bubu (2021-07-27T11:03:57Z)

Le malais/indonésien est un autre exemple de langue où les genres ont rarement besoin d'être mentionnés (pas de morphologie de genre, pas de pronom personnel genré, pas de genre grammatical mais des catégories n'ayant rien à voir avec le genre). La seule exception que je vois (mais je ne suis pas expert), c'est les termes pour désigner les membres de la famille (même s'il y a aussi des noms génériques).

Cigaes (2021-07-27T09:38:01Z)

@Livius : Je ne peux m'empêcher de remarquer que la plupart des mots que tu cites sont péjoratifs.

Thomas L (2021-07-27T09:12:26Z)

Une réflexion, non pas sur l'ensemble, mais sur "la personne auteure de ce livre".

Est-ce que le choix de "auteure" n'est pas un choix, disons, "le cul entre deux chaises" entre l'objectif 1 (ne pas faire de présupposé sur le genre ni du locuteur, ni de la personne adressée, ni d'une tierce personne dont il serait question) et l'objectif 2 (éviter de propager des présupposés sur le genre des personnes en question, voire lutter contre des préjugés déjà installés (par exemple en attirant l'attention sur le fait qu'une personne pratiquant tel ou tel métier peut être une femme comme un homme), sans en remplir aucun des deux ?

À l'écrit, "auteure" semble servir l'objectif 2, mais à l'oral, pas du tout, on entend "auteur" : donc échec sur ce point. Et pour l'objectif 1, c'est l'inverse.

Je crois qu'en français, pour servir l'objectif 2, il n'y a que la féminisation ostentatoire qui vaille https://revuelespritlibre.org/parler-feministe (et pour l'objectif 1, on verra plus tard).

Livius (2021-07-27T09:00:04Z)

Ta proposition est hyper… normative. Je trouverai toujours plus naturel de considérer le masculin comme le genre non marqué.
Merci de m'avoir fait découvrir le texte satirique de Douglas Hofstadter, un chef-d'oeuvre dans le genre. "After all, white is a mixture of all the colors of the rainbow, including black."
Des noms de genre féminin qui désignent aussi bien un homme qu'une femme: une victime, une estafette, une vigie, une recrue, une ordonnance, une mauviette, une andouille, une crapule, une fripouille, une canaille, une sainte nitouche, une star, une dupe, une caution, une altesse, une brute.
Le latin explique sans doute certaines préférence:
Roma --> la Rome
Lutetia Parisiorum --> le Paris

Arnaud Spiwack (2021-07-27T06:55:37Z)

Je me souviens que l'Académie Française recommande (recommandait?) de d'appeler les genres marqué (chose) et non-marqué (truc).

J'ai, comme toi, beaucoup de sympathie pour le programme de neutralisation du genre des gens dans la langue. Plus que pour celui de mélanger les deux genres (sociaux), pour toutes les raisons que tu as soulignées, et aussi parce que, dans ce cas, pourquoi s'arrêter à deux catégories? Doit-on aussi y ajouter la mention que le juge peut être, disons, arabe?

Ce qui me gêne un peu à utiliser le genre marqué (j'en comprends la motivation, elle me paraît d'ailleurs vraiment robuste) est que beaucoup des mots vont utiliser une forme marquée crée récemment (et pas forcément élégante à mon goût) et donc perdre leur forme historique (auteure plutôt qu'auteur). J'aurais une préférence pour les formes historiques. Mais peut-être que ta proposition d'utiliser le genre non-marqué est malgré tout la moins radicale.

jonas (2021-07-27T01:50:45Z)

> mais il me semble que le hongrois […] sont à peu près idéales dans le sens de non divulgation inutile d'informations de genre

More or less. Though you are often effectively forced to guess the gender if you want to politely address someone, and it's preferable to know the gender if you want to politely talk about a professional such as a doctor to their colleagues. Mind you, you may be already screwed when you want to address a doctor, because they expect to be addressed in three different ways depending on just their rank: “doktor úr” or “doktornő” for younger doctors; “főorvos úr” or “főorvos asszony” for doctors who have attained the rank főorvos at their job, this being a rank active doctors typically get five years after they get their specialization; “professzor úr” or ”professzor asszony” in the rarer case when they have an academic rank.

titipukhân (2021-07-27T00:28:49Z)

Bonsoir,

L'évolution que vous proposez n'est-elle pas une sorte d' "équilibre linguistique instable"?

Si on arrivait à cet équilibre, précisément: si on (même les grincheux réacs) réussissait à complètement intégrer dans notre langage votre proposition "David est idiote", construite à partir de l'inclusion "David est [une personne] idiote", l'usage courant nous conduirait avec le temps à oublier l'inclusion à l'origine de votre proposition, ou à en minimiser l'importance, ou ça nous gaverait de mettre un 'e' alors qu'on a un mot plus court sans le 'e', ou à se dire que remplacer "une personne" par "un être vivant" ça marche aussi très bien, ou encore je ne sais quelle autre raison de derrière les fagots, et finalement on trouverait là une bonne raison de simplifier la règle orthographique par réduction de signes (comme pour les 'ph' qu'on transforme en 'f' parce que c'est plus court, plus simple, et parce qu'on ne connaît pas l'étymologie, ou alors on la connaît mais on s'en fout parce qu'on a plus court, plus simple, et c'est tout ce qui compte).

On réformerait alors "David est idiote" en "David est idiot". Mais "Monique est idiote" créé à partir de la même inclusion deviendrait alors aussi "Monique est idiot", ce qui ne serait pas plus genré que "David est idiote". Mais on n'est pas encore sur un équilibre vraiment stable: après l'étape "Monique est idiot", ne s'acheminera-t-on pas vers la fin généralisée du 'e' final, du 'elle', de toutes les marques "féminines" de l'ancienne langue? Et tout aura été complètement dégenré, raccourci, simplifié. Il est tard.

Cigaes (2021-07-26T21:11:44Z)

Tu le sais, je trouve cette idée excellente.

Peux-tu ajouter un TL;DR encadré au début avec seulement la proposition pratique ? Je pense que ce serait utile.

Pour moi, ±x±y veut forcément dire que le signe pour x celui pour y sont indépendants, parce que sinon on aurait écrit ±(x+y).

Plus pertinemment : Imperial Radch est une trilogie, formée d'Ancillary Justice, Ancillary Sword et Ancillary Mercy, de romans de science fiction multi-primés d'Ann Leckie se déroulant principalement dans une culture où le genre a peu d'importance et dont le protagoniste est une intelligence artificielle qui y accorde encore moins d'importance. Pour traduire ce fait, à part quelques passages en discours direct dans une langue étrangère genrée, les romans sont écrits entièrement au féminin. C'est une expérience assez intéressante de les lire.

En outre, ce sont d'excellents romans (bien que le deuxième soit un peu mou), et Ann Leckie arrive très bien à écrire un personnage non-humain. D'ailleurs, je serais curieux de savoir ce que tu as pensé de The Raven Tower.

Je me rappelle avoir lu Ann Leckie mentionner que ses personnes lectrices ont souvent des avis très prononcés sur le genre réel des personnages dans l'histoire, mais que cet avis s'avère ne presque jamais être le même.

(J'ai le premier tome physique en français.)

a34 (2021-07-26T20:16:24Z)

Cela me semble une excellente idée. Bien que ce jour glorieux ne répondra sans doute pas à votre appel de sitôt, en l'attendant, "chères personnes étudiantes" et analogues (quand elles ne sont pas trop lourdes) ne me choqueraient pas (alors que les points médians, parenthèse ou 'ə' me gênent un peu à la lecture).

Sinon, je fais et entends (je vis en Wallonie) la différence à l'oral entre "fatigué" et "fatiguée" (le second [e] est plus long et parfois suivi d'un léger schwa).

Hors sujet, je me demandais si les anciens considéraient ou non le crapaud comme le mâle de la grenouille (le hibou de la chouette, le corbeau de la corneille, le goéland de la mouette, etc.); après tout, certaines paires mâle-femelle semblent encore bien plus différentes (chez certains oiseaux ou insectes notamment).

Dr FionsD (2021-07-26T18:59:02Z)

Traumatisme à 7 ans lorsque mon institutrice m'a corrigé devant toute la classe, m'affirmant que la femelle du hibou était la chouette (je soutenais mordicus qu'il s'agissait de deux espèces différentes).

Consigliere ZARF (2021-07-26T18:47:06Z)

> il me semble que les seuls noms communs désignant des personnes qui ont réussi à rester épicènes en français sont de catégorie chose

Non: «un mannequin». Cf. «les amours tumultueuses du mannequin et de la sentinelle» (Jean Genet).


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