David Madore's WebLog: Fragment littéraire gratuit #127 (journal d'un fou)

[Index of all entries / Index de toutes les entréesLatest entries / Dernières entréesXML (RSS 1.0) • Recent comments / Commentaires récents]

↓Entry #1725 [older| permalink|newer] / ↓Entrée #1725 [précédente| permalien|suivante] ↓

(lundi)

Fragment littéraire gratuit #127 (journal d'un fou)

11 janvier. • Nouvelle rencontre avec le Dr Taub, et toujours la même question : pensez-vous que ces choses que vous racontez vous soient vraiment arrivées ? — et toujours la même réponse : dans cet univers, non, elles sont le fruit de mon imagination ; dans cet univers. Je le répéterai autant de fois qu'il le faudra, et peu importe qu'elle me croie fou : oui, je suis fou, mais je préfère le rôle de ce fou que l'on soigne plutôt que celui du souverain déchu que l'usurpateur m'a condamné à être.

14 janvier. • Tenter d'expliquer la damnatio memoriæ qui est mon supplice. Comment le pourrais-je ? Ces hommes ignorent tout de l'Empire sur lequel j'ai régné et dont je suis à jamais banni. Dans cet univers, l'Alliance cycladéenne n'a pas eu lieu. L'humanité tout entière réduite à quelques milliards d'individus et confinée à une seule planète ! — ma prison désormais. Je sais assez à son sujet : ce corps où ma conscience est exilée a appris ce qu'il me fallait sur ce monde et sur sa pitoyable petite histoire, ses querelles insignifiantes de tribus primitives. Ils ne me comprendront pas, eux qui méconnaissent leur Empereur.

18 janvier. • Le Dr Taub veut que je lui parle de l'usurpateur. Elle pense que c'est là la clé de ma psychose. Comment donner la mesure de cette trahison ? L'usurpateur m'a tout volé. J'ai connu les délices de la Planète dorée, me voici dans ce taudis où je ne suis plus personne. Ils m'ont aussi retiré Aquila… Aquila, mon amour, à qui on ne m'a pas même permis de faire un adieu, te reverrai-je jamais ? S'ils te réservent le même sort, puis-je espérer te retrouver ici ? Ou ton tombeau sera-t-il différent du mien ? Qui me le dira ?

Dans le même temps qu'ils me privaient de mon empire, ils privaient mes sujets de leur souverain. J'ai sans doute commis des erreurs, je n'ai pas été parfait (une affirmation qui est permise dans ce monde !), mais mon peuple ne méritait pas le joug cruel qui va s'abattre sur lui. Comment ma damnatio leur apparaît-elle ? Sans doute ce qui reste de mon corps là-bas (si on ne l'achève pas) est-il aussi une sorte de fou : un pantin que plus aucun esprit n'anime. Je poserai cette question au médecin, peut-être est-elle capable de m'éclairer.

21 janvier. • Et si Dr Taub était un allié de l'usurpateur ?…

Inspiré entre autres choses (toutes mes excuses à Gogol et aux romains, notamment) d'une étrange histoire, censément vraie : The Jet-Propelled Couch (2e partie ici, quelques précisions là).

↑Entry #1725 [older| permalink|newer] / ↑Entrée #1725 [précédente| permalien|suivante] ↑

[Index of all entries / Index de toutes les entréesLatest entries / Dernières entréesXML (RSS 1.0) • Recent comments / Commentaires récents]