Comments on Sur la « gauche » et la « droite » et le spectre politique

Nézenne (2023-10-30T15:16:43Z)

Serais-tu intéressé par par préciser ce que tu entends par "on est en droit de penser que l'autre est une mauvaise personne" ?

Est-ce plutôt "dans ce cas, il est naturel que, dans ton système de valeurs, tu considères l'autre comme mauvais ; vos interactions ne seront a priori pas fructueuses, autant s'arrêter là" ? Ou bien "il est alors légitime, voire souhaitable d'estampiller l'autre, dans son être, comme foncièrement mauvais" ? Ou encore n'importe quel sens intermédiaire ou orthogonal ?

A mon sens, juger l'essence des individus (en bien comme en mal) n'a pas de sens ni d'utilité, à la différence du jugement concernant les idées. Par ailleurs, concernant le jugement sur les idées, j'ai pour ma part des difficultés à voir comment dégager un socle de base universel. Pour chaque individu, étant donné son idéal, on peut le prendre pour axiome et déployer de la logique. Mais j'ai l'impression qu'il y a pas mal de socles raisonnables, et ce pas uniquement sur la base d'un "on ne peut jamais se prononcer" de principe : de fait, même sous la contrainte (*) par exemple, j'ai l'impression qu'il y a beaucoup de socles mutuellement incompatibles possibles.

(*) : Formuler notre système de valeurs de telle sorte qu'on soit prêt à jouer au jeu suivant : je nais dans la peau d'un individu choisi uniformément au hasard et vivrai sa vie.

Ayant personnellement des difficultés à discerner un unique socle clair et universel, j'aurais toujours tendance à considérer que les jugement sur les idées sont assez subjectifs ("telle idée est mauvaise de mon point de vue" plutôt que "mauvaise en soi"). Ce qui n'empêche pas d'affirmer son point de vue !

Subbak (2023-08-21T02:01:37Z)

Je ne suis pas d'accord que la droite se caractérise par la "Responsabilité" : je ne vois aucune situation ou, quand l'erreur venait d'une personne dominante, la droite a appelé à ce que cette personne paye les conséquence.
Je mettrais plutôt à la place comme devoir "Respect" ou "Déférence", avec l'idée que ce devoir oblige beaucoup plus les inférieurs que les supérieurs (qui doivent néanmoins le Respect à des concepts abstraits comme "La Nation", ou à une divinité pour les croyants).

Il y a ici une meilleure symétrie avec la Solidarité sui oblige plus les supérieurs que les inférieurs.

Natacha (2023-08-19T10:51:18Z)

Je n'ai pas grand chose d'intéressant à dire sur la Politique (à laquelle je metse une majuscule pour rester dans le sens général du billet, par opposition à la variante en minuscules que j'utilise pour désigner les manœuvres des élites au pouvoir pour le garder), parce que je constate depuis plusieurs années une maturation progressive, qui continue encore aujourd'hui, et pour laquelle je n'ai pas de "checkpoint".

En revanche le paragraphe sur les gens « sophistiqués intellectuellement » m'a fait penser au concept intéressant que j'ai découvert relativement récemment et que j'ai envie de traduire par « découplage », mais qui se google avec les termes "high-decoupler" et "low-decoupler" utilisés pour qualifier des gens.

Si vous ne le connaissez pas, j'encourage à googler ça (je n'ai pas trouvé rapidement de page explicative satisfaisante), principalement pour tester dans quelle catégorie on se trouve et changer de point de vue sur l'autre catégorie en prenant conscience de la différence profonde qui les sépare.

Avec l'avantage que « gros découpleur » (ou une autre traudction française mieux choisie) donne moins l'impression de continir un jugement de valeur que « sophistiqué intellectuellement »…

Dionysos (2023-08-18T20:53:59Z)

Autre remarque factuelle sur la gauche et Macron : je ne pense pas comme tu l'allègues qu'il fournirait une dénégation systématique de cette catégorisation le concernant. Enfin aujourd'hui, sans doute mais ce ne fut pas toujours le cas. Je ne retrouve plus le moment où il se revendiquait socialiste (il l'a fait à un moment si j'en crois mes souvenirs de lecture) et j'ai juste retrouvé sa revendication de la "gauche du réel"
https://www.bfmtv.com/politique/emmanuel-macron-je-suis-de-la-gauche-du-reel_AN-201609040008.html
Ce flottement au grès du vent n'est sans doute pas étranger (et Macron n'est pas une exception aberrante, j'ai l'impression que, pour beaucoup d'hommes politiques, les idées comptent peu et une fluctuation en fonction de ce qu'ils pensent que les cibles électorales majoritaires attendent est coutumière) à l'opacité de ces termes.
Il n'empêche : je vais en sens inverse de la conclusion de ton billet. Même si les termes sont effectivement souvent pliables et modulables au point de servir davantage de réflexe de connivence et de moyen d'ostracisation de la position inverse que de pointeur vers une position nettement identifiée (ça je te l'accorde volontiers), je n'ai pas l'impression qu'on assiste à une utilisation très abusive de ces termes. Au contraire, ils refluent (je crois qu'en Israël il n'y a même plus de partis considérables électoralement qui revendiquent cette appellation alors que la gauche y était si influente jusqu'à la fin des années 70…). Au moins quand ils étaient utilisés massivement, cela appelait un travail intellectuel de réflexivité et de définition idéologique précisément pour compenser leur flou alors qu'on se contente de plus en plus à l'appel à des "valeurs", c'est-à-dire qu'on réduit à l'onomatopée identificatoire avec des mots censément magiques comme liberté, égalité ou environnement le discours politique qui lorsqu'il utilisait plus abondamment ces termes de droite et de gauche essayait de faire des phrases, voire des raisonnements au lieu de l'incantation de termes isolés. Quand on compare les échanges par exemple de Mitterrand et de VGE dans les deux débats présidentiels, les raisonnements circulent bien davantage sur ce fond de l'opposition droite/gauche que, mettons, lors de la dernière confrontation Macron/ Le Pen.

Dionysos (2023-08-18T20:27:38Z)

Je ne suis pas d'accord avec le début pointant la prétendue incohérence de ton interlocuteur de gauche. Je dirais en ce qui me concerne grosso modo la même chose que lui avec l'opposition au capitalisme et le fait que cela englobe une différenciation à la fois au libéralisme sans-frontiériste et au protectionnisme nationaliste ne me donne pas l'impression d'amalgamer des choses n'ayant rien à voir dans "l'autre camp". C'est même une des remarques classiques lors de la montée du fascisme et du nazisme : une réactivation du logiciel nationaliste/racialiste mais sans rompre avec le capitalisme (mais si l'interventionnisme d'Etat dans l'économie était marqué, on restait dans une économie de marché) a pu être analysé au moins partiellement comme favorisée par la grande hostilité de classes dirigeantes au "péril rouge". Tant que le protectionnisme nationaliste continue dans ses frontières à faire la part belle au jeu du marché, je considère que c'est une simple variante du libéralisme (avec cette inconséquente de son côté que la dynamique du capital pousse à l'internationalisation).
Bref, une auto-catégorisation de gauche est sans doute possible mais le terme a pris effectivement tant de connotations et de sens divers que je ne crois pas qu'il soit bien utile aujourd'hui. Et ce sens d'opposition radicale au capitalisme, même s'il englobait au début du XX siècle des auteurs aussi différents que Jaurès ou Rosa Luxemburg, n'a guère plus d'écho de masse dans le champ politique contemporain. Il est en outre évidemment insuffisant : c'est une antienne ancienne chez de nombreux auteUrs de "droite" que la dénonciation du capitalisme dissolvant les entités traditionnelles, sacrifiant les valeurs morales etc. Il y a une spécificité de la solution du côté du contrôle de l'économie par le collectif social dans la gauche selon mon lexique à usage personnel inutile.. Il y a quelques années quand j'avais feulleté un livre de Michéa, il relevait d'ailleurs de manière assez convaincante que ce n'est qu'après l'affaire Dreyfus que le socialisme s'était plus ou moins rallié à cette étiquette d'orientation spatiale et qu'il s'en démarquait nettement dans les décennies antérieures, indice que l'équivoque du terme est ancien.
Mais à tout prendre, je préfère encore un peu de réflexion et de retour de ces termes dans les débats publics que l'insupportable appel au "pragmatisme" de ce qui marche sans jamais réfléchir sur la valeur du cadre à l'intérieur duquel les lemmings marchent… Apparemment appel au bon sens qui masque l'ultra-saturation idéologique de ce pragmatisme pour incultes.

Laurent (2023-08-18T13:50:36Z)

@Thomas
<I>Je serais curieux de voir ce que donne une analyse de type PCA ou autre sur des gros jeux de données de questions de nature politique. Combien de dimensions capturent effectivement la variabilité des réponses ?</I>

C'est une excellente question, partant du principe qu'il s'agit d'identifier les groupes qui diffèrent bien par des tendances marquées et reproductibles, pas de distinguer ceux qui préfèrent le café ou le thé parmi les abstentionnistes de l'élection présidentielle de 81.

D'ailleurs, la pertinence relève bien du fait qu'on s'agglomère bien sur les question clivantes, et notamment celles qui relèvent de la politique, parce que si on se comportait de façon complètement indépendante, la question ne se poserait même pas. C'est bien le fait qu'il existe potentiellement des groupes suffisamment homogènes qu'on s'y intéresse. On peut déplorer l'existence du conformisme idéologique qui nous empêcherait de choisir une position différente du groupe auquel on a tendance à se rattacher, mais malgré tout je pense que ce point est moins important que ce qu'on a tendance à imaginer. En fait c'est la deuxième question importante et d'intérêt: quelle flexibilité nous avons dans nos comportements électoraux? Il semblerait que les intentions de vote montrent de façon persistante une fraction carrément inimaginable de vogue élective, en générale faible et très dispersée. Peut être n'y fait-on pas attention parce que l'on se focalise sur la réponse moyenne, elle massivement homogène et prévisible. Bref, fascinant de toute façon.

Je trouve curieux que le maître séant n'ait pas dans ses pérégrinations de nerd invétéré, réussi à débusquer l'initiative Cluster17, qui a recensé 16 groupes électoraux stables en France, correspondant en gros à des tendances politiques identifiables majoritaires et minoritaires représentatives du paysage politique. Mon opinion c'est que cette agglomération sur les dimensions de base au coeur du descriptif est nécessairement large dans son application (mondial certainement), et que ce qui varie surtout d'une région à l'autre c'est leur proportion relative.

Parmi les questions supplémentaires qui me fascineraient, il y a celles de l'accès au pouvoir de ces tendances, des affinités théoriques et pratiques (je suis persuadé que certaines gauches sont plus proches de certaines droites en terme de proximité philosophique), de leur perception par les autres tendances (ce qu'a débroussaillé trop largement Ruxor ici, mais pouvait-on faire mieux?). Sans oublier la description de la variation géographique de ces tendances, du lien potentiel avec l'histoire globale et locale, Etc.

Voici le lien:
https://cluster17.com/qui-sommes-nous/

Régis (2023-08-15T14:58:39Z)

Je définirais l’orientation politique en fonction des objectifs de vie en société définis par les philosophes contractualistes.
La droite est derrière Hobbes et son objectif de sécurité
Le centre suit Locke et recherche la liberté
La gauche est émule de Rousseau et tend vers l’égalité

Thomas (2023-08-15T11:48:51Z)

Je serais curieux de voir ce que donne une analyse de type PCA ou autre sur des gros jeux de données de questions de nature politique. Combien de dimensions capturent effectivement la variabilité des réponses ?

Sinon, j'ai eu l'occasion d'observer de près ou de loin 3 milieux qui ont chacun un penchant politique parmi ceux identifiés dans l'article : la "startup Nation", l'armée de Terre et le monde de la recherche (je vous laisse relier avec "Gauche", "Droite libérale" et "Droite nationaliste").

Je crois que la constante dans chacun de ces milieux est que :
* quand on parle avec des gens seul à seul, on se rend compte qu'il y a parfois des idées très différentes sur tel ou tel sujet par rapport à la doctrine politique qui domine
* quand quelqu'un s'exprime publiquement sur un sujet politique, c'est toujours dans le sens de la doctrine dominante

Il y a de fait, un mécanisme d'autocensure qui fait qu'à la fin le milieu paraît homogène et proche de l'un des courants majeurs identifiés.

Pour ma part, je trouve cela extrêmement frustrant et je pense que ce genre de phénomènes est responsable de beaucoup de maux qui participent à la "radicalisation" de certains milieux.

Pour donner deux exemples :
- Je suis sûr que dans la police, on doit pouvoir trouver des gens qui remettent en question certaines interventions, mais la doctrine politique majoritaire veut qu'on ne parle pas de "violences policières" ou de tout ce qui s'en rapprocherait et du coup ce sujet est tabou.
- Dans le monde de la recherche (et assimilé : étudiants, anciens, etc.), il semble normal de partager un message comme https://twitter.com/mickaellaunay/status/1643947773744513025 (en lien avec la réforme des retraites, j'imagine ?) et que tout le monde en rigole. Je soupçonne que quelqu'un qui arriverait et exprimerait un propos en faveur de cette réforme serait mal perçu (je ne sais pas dire si cette réforme est "bien" ou pas, je soupçonne juste que dans un tel milieu le sujet soit tranché d'avance et toute discussion contradictoire impossible).
- Quand j'étais à Station F (l'un des lieux saints de la "startup Nation", mais vous pouvez aussi imaginer le salon VivaTech), Macron était toujours présenté positivement et questionner publiquement le caractère positif de tel ou tel aspect de sa politique économique relevait du blasphème.

Bref, tout ce que je veux dire c'est que je déteste ce phénomène qui fait que quand dans certains milieux une tendance politique majoritaire se dégage, il devient très difficile de questionner les dogmes de cette tendance majoritaire.

J'y vois une forme de conformisme de groupe qui tend à réduire la complexité des positionnements possibles.

Mewtow (2023-08-12T23:23:17Z)

Mon avis est que la gauche et la droite sont définies par les idées défendues par les partis qui se désignent eux-même comme de gauche/droite/centre. Au moins, c'est simple à appliquer !

Mais au final, les idéaux politiques sont souvent contradictoires et il ne faut pas chercher beaucoup de cohérence là-dedans. Sauf pour les libéraux, notamment libertariens, qui peuvent se référer à une idéologie philosophique assez claire, cohérente et assez bien formalisée, il faut le leur reconnaitre. Mais pour le reste, si on creuse un peu, on trouvera toujours des incohérences avec certaines idées politiques.

Par exemple, un cas que j'aime bien citer est l'axe progressiste/conservateur, qui a clairement un sens et est souvent associé à l'axe gauche/droite. Ben quand il y a eu un débat sur les OGMs durant mon adolescence, c'était la gauche qui avait des positions fortement conservatrices sur le sujet, à l'opposé de la droite. Pareil sur le principe de précaution, le truc conservateur par excellence, mais rejeté par la droite et adoubé par la gauche de l'époque.

Pareil pour le principe de concurrence/compétition/marché libre. La gauche adore cracher sur l'économie de marché et la droite la défendre. Et pourtant, les démocrates sont au taquet sur les politiques anti-trust qui visent à la maintenir (Biden fait du bon travail là-dessus), alors que les républicains sont paradoxalement assez lâches dessus. Ces derniers se justifient et ont une théorie libérale pour le justifier : l'école de Chicago. N’empêche que l'ordolibéralisme, classé à la droite conservatrice, préconise ce que cherche à faire la gauche américaine en ce moment, à savoir renforcer l'anti-trust et démanteler des monopoles.

Maintenant, pour à expliquer comment les opinions politiques se forment, et expliquer pourquoi elles sont aussi incohérentes… Je sais qu'il y a plein de recherches sur les déterminants du vote politique, mais pas tellement sur l'orientation gauche/droite. Il y a les travaux du spécialiste en psychologie sociale Jonathan Haidt, par exemple, qui tentent de classer la gauche et la droite en fonction de cinq valeurs cardinales. Et pas sur que la vision cynique tienne le coup au vu de ces recherches. Oui, les réactions intuitives et émotionnelles doivent jouer sur les opinions face à tel ou tel sujet. Mais sur l'orientation politique générale, on a des résultats contradictoires. Par exemple, il y a eu des recherches sur l'influence de la sensibilité au dégout sur les opinions politiques, censé être associé au conservatisme, mais ça a foiré. Pourtant, un énorme paquet d'études associent la sensibilité au dégout à des tas de préjugés : racisme, homophobie, rejet des relations avec grand écart d'âge, xénophobie, et un paquet d'autres. Mais au niveau politique, pas d'association ni même de corrélation. Va comprendre !

jeanas (2023-08-12T21:02:58Z)

En voilà une question qu'elle est épineuse. (Et l'article lui-même est fort intéressant, merci.)

Pour ma part, j'ai une opinion sur le sujet qui se rapproche plus ou moins de la partie où vous décrivez une position « cynique ». Je m'explique.

Il est clair à mes yeux comme aux vôtres que « gauche » et « droite » recouvrent des amas d'idées finalement très disparates et que cette distinction est très mal fichue, au sens où elle rend mal compte de la structure de l'espace n-dimensionnel des positionnements politiques individuels.

Le seul moyen que je trouve pour comprendre ce que sont la gauche et la droite est de les définir « extérieurement », comme des phénomènes sociaux (un peu comme on peut observer et tenter de décrire un phénomène physique), et pas comme des systèmes de valeurs cohérentes, même si on peut jouer à essayer de trouver des systèmes plus ou moins (mais plutôt moins) cohérents qui s'en approchent, à déterminer de quelles valeurs les gens de gauche ou de droite ont tendance statistiquement à se sentir proches.

(Et je pense que vous serez d'accord sur le fait que cela ne contredit pas votre partie « Une digression pour réfuter l'association par corrélation », au sens où vous rappelez très bien que corrélation n'est pas causalité, que ce n'est pas parce que des idées sont partagées par un grand nombre de personnes qu'elles sont intrinsèquement liées moralement, mais justement, je me détache de toute conception morale, je définis les termes de gauche et droite par l'usage qui en est fait dans le débat politique.)

J'irais un peu plus loin en proposant l'idée que l'opposition gauche-droite est dans une certaine mesure contingente historiquement.

Prenez par exemple ce qui se produit si, au milieu d'un débat politique tendu et acharné entre deux personnes, vous tentez d'intervenir en expliquant qu'en fait les termes en lesquels le débat est posé ne sont pas du tout bien définis et que globalement la question n'a strictement aucun sens. D'après mon expérience, on vous considérera comme un empêcheur de tourner en rond qui n'est pas capable de voir l'existence du problème.

Vous parlez du faux syllogisme qui consiste à penser que si B et C s'opposent à A, B et C sont proches. J'y ajouterais celui-ci : si A et B sont opposés, alors l'un des deux est à peu près vrai (une forme de tiers exclu en politique ?).

Par conséquent, à partir du moment où un débat quelconque est posé d'une certaine manière, une sorte de piège se renferme sur lui, qui empêche les participants de voir la question différemment.

Il faut aussi prendre en compte des considérations beaucoup plus terre à terre. Pourquoi existe-t-il aux États-Unis un bipartisme quasi-parfait, avec pratiquement aucune alternative aux deux partis principaux, démocrates et républicains, à la différence de la plupart des pays européens ? (Je parle au moins des élections présidentielles, je ne sais pas si des opinions plus nuancées s'expriment dans les élections locales.) Sans doute parce que construire un parti dans un pays aussi immense est une tâche gigantesque, et qu'il serait excessivement difficile de le distinguer suffisamment des deux existants aux yeux de l'opinion publique au vu de ce qui précède.

Bref, je suis pessimiste au sens où il me semble que la « pensée unidimensionnelle » est le sort inévitable de tout groupe de personnes suffisamment important qui doit prendre des décisions démocratiquement. (Une nuance : c'est le cas si les décisions portent sur beaucoup de dimensions à la fois, comme lorsque nous élisons des gouvernants : un président prend des décisions économiques et sociales et environnementales, etc. Il n'y a pas d'option « A pour l'économie et B pour la sécurité » sur les bulletins de vote. C'est sans doute moins le cas lorsque des votes séparés sont organisés régulièrement sur des sujets précis, un peu comme en Suisse. De fait, si j'en crois Wikipédia, la liste des partis politiques notables en Suisse est d'une longueur impressionnante.)

(Soit dit en passant, j'en déduis aussi l'importance des échelons locaux, pas seulement pour prendre des décisions relatives à la vie locale, mais aussi pour faire exister une pensée qui se permette un peu plus de dimensions de temps en temps.)

En poussant les choses encore plus loin, je peux imaginer un monde parallèle où les oppositions politiques se seraient construites différemment au moment où elles se sont cristallisées (plus ou moins vers la Révolution ?), et où les deux grandes familles politiques aujourd'hui seraient des coins différents de l'hypercube des opinions politiques.

Bref, pour résumer : la distinction droite-gauche est à mes yeux intéressante du « point de vue du politologue », mais passablement inintéressante, parce qu'arbitraire, pour se forger ses propres opinions ou discuter de politique.


You can post a comment using the following fields:
Name or nick (mandatory):
Web site URL (optional):
Email address (optional, will not appear):
Identifier phrase (optional, see below):
Attempt to remember the values above?
The comment itself (mandatory):

Optional message for moderator (hidden to others):

Spam protection: please enter below the following signs in reverse order: 537d99


Recent comments