Comments on Contre la Loi Fontaine sur l'Économie numérique

phi (2004-01-15T00:32:02Z)

Je ne connais guère les détails de la Loi en question et j'avoue que l'étudier ne fait pas partie de mes priorités…
Ce qui m'inquiète est la montée des protections orientées fournisseurs sans aucune contrepartie pour le consommateur. L'idée est dans doute de dresser une barrière entre l'honnête citoyen crédule et le malhonnête pirate: on ne peut plus tricher sans préméditation.
Malheureusement, cela entrave le droit à la copie privée, garanti en France contrairement à beaucoup d'autres pays. Un droit qui *nous* sera indispensable lorsqu'il faudra dupliquer (sans les racheter!) les CD d'il y a 20 ans devenus quasi-opaques.
Le chemin est ainsi tracé vers des restrictions toujours plus drastiques: il arrivera un moment ou l'on ne pourra tout simplement plus brancher sur le réseau électrique un appareil non préalablement validé par l'autorité en place, quelle qu'elle soit. Avec l'informatisation des moyens de paiement, l'outlaw, ou celui décrété tel par l'autorité en place, en sera réduit au mieux à une vie mouyen-âgeuse de troc, en espérant qu'il restera encore quelques forêts non transformées en jardins publics.

phi (2004-01-14T23:30:10Z)

Ruxor: le simple fait de se dire homo peut déà poser des problèmes, presque autant que vitupérer suidesquement contre des gens qui jouissent de la richesse momentanée de leur pays avec la plus grande désinvolture quant à l'avenir à moyen terme de sa population. Même les nouveaux dirigeants de la ferme orwellienne faisanient mieux.
La règle semble assez générale; plus on parle d'éthique ou de morale, plus on est ignoble.

Tiens un touriste (2004-01-14T22:36:16Z)

J'envisageais un paragraphe sur la question, et je l'avais sauté pour alléger. N'oubliez pas qu'une décision de juridiction étrangère doit obtenir un exequatur pour être exécutée en France ; le juge doit en gros vérifier que le jugement n'est pas contradictoire avec l'ordre public français (autant que je sache, je crains de simplifier outrageusement).

Pour le pénal, je n'en sais trop rien, mais je suppose qu'il n'y a pas de procédure d'exécution hors accord explicite spécifique. Donc en cas de condamnation à mort en Arabie Séoudite, pas d'exécution possible en dehors de ce pays, et extradition possible depuis d'autres pays (pas la France qui n'extrade pas ses nationaux) ; cas plus intéressant, celui d'une condamnation civile : vous êtes condamné à sept zorkmids de dommages et intérêts à l'associaton des joyeux oulémas boulistes de Djeddah pour le préjudice moral que votre blasphème aura occasionné. Aucun tribunal français n'acceptera de donner l'exequatur, donc la condamnation est platonique tant que vous ne voyagez pas en Arabie Séoudite (ou dans un pays susceptible d'accorder l'exequatur à de tels jugements, il y en a peut-être parmi les européens un peu blindés (Pologne, Autriche ??)). (En revanche, vous perdez votre emploi pour avoir violé le principe de neutralité religieuse défini par le Glorieux Président Chirac, mais vous l'aurez cherché).

Donc il faut savoir ce que vous voulez : en publiant des propos anti-islamistes, vous vous exposez à la saisie de vos tournevis, Têtu, paracétamo, Hartshorne et à mourir d'une crise d'angoisse en conséquence immédiate si vous décidez ultérieurement d'aller faire du tourisme en Arabie Séoudite. Mais je ne trouve pas condamnable en principe que si vous faites le choix d'aller un jour dans un pays, les conséquences de vos actes passés soient alors évaluées en fonction de la juridiction de ce pays. Vous pouvez toujours préférer le tourisme à Paris, tellement plus sûr.

Ruxor (2004-01-14T22:22:12Z)

Et si je critique l'Islam sur mon site web j'encours peut-être la peine de mort en Arabie Saoudite : est-il normal que les cours de justice saoudienne aient le droit de censurer mon site en vertu de leurs lois ?

Tiens un touriste (2004-01-14T22:01:35Z)

Pas du tout convaincu par l'argument selon lequel internet "a des spécificités qui sont irréductibles, comme, tout bêtement, le fait d'être mondial". Le courrier papier aussi est mondial, et il est même universel (cf. le nom de l'UPU).

Ce qui est assez spécifique à internet, effectivement, c'est que quand on y publie quelque chose, on peut s'attendre à ce que cette publication ait des effets matériels dans l'ensemble des juridictions de la planète, alors que quand on poste un courrier de l'Uruguay vers la France, on sait que seuls la France et l'Uruguay sont concernés. Mais ça concerne d'autres media qu'internet, notamment les quotidiens de référence. Un article publié dans _Le_Monde_ ou le _Wall_Street_Journal_ doit être lu presqu'autant qu'une insertion du blog de David Madore.Je suis très sensible à l'argument du paragraphe 125 de l'arrêt australien que je cite plus bas selon lequel "Rules should be technology-neutral".

Les juges français qui ont imposé les règles françaises à Yahoo ne méritent pas un point d'exclamation ironique : je viens avant d'écrire ce commentaire de lire (en diagonale) le très détaillé arrêt http://www.austlii.edu.au/au/cases/cth/high_ct/2002/56.html
Dow Jones & Company Inc. v Gutnick (10 décembre 2002)
de la cour suprême australienne qui fait l'état de la jurisprudence sur le sujet ; la position française est partagée par d'autres juridictions, ainsi l'australienne à cette occasion - l'Italie est citée http://serforma.it.omnint11.omnibit.it/lexfor2002/2002-10/2002-10-Pen-Giu-1685.asp
(arrêt du 27 décembre 2000).

L'argument selon lequel "on ne peut pas connaître toutes les législations mondiales" ne me convainc pas. En pratique, je peux me douter raisonnablement de la liste, généralement limitée, de pays dans lequel une publication pourra être fautive. Si je souhaite traiter le sous-commandant Marcos de bouffon sur mon site web, il sera peut-être prudent de lire préalablement le code pénal mexicain, mais je peux raisonnablement m'abstenir de consulter un avocat laotien.

jko (2004-01-14T20:08:50Z)

Si ca continue y'aura plus de FAI et tout se fera en wireless p2p entre utilisateurs, avec un cryptage à la freenet, et on sera tranquile.

Ruxor (2004-01-14T19:37:20Z)

Il y a un problème de fond plus grave, c'est qu'on réglemente, ou, pire, on légifère, sur Internet sans tenir compte du fait que c'est Internet, ce n'est pas n'importe quel média, et il a des spécificités qui sont irréductibles, comme, tout bêtement, le fait d'être mondial (ce que les législateurs des différents pays qui y ont mordu n'ont toujours pas compris, apparemment, ou les juges français qui ont essayé d'imposer des règles françaises à Yahoo!) : au lieu de prendre ces spécificités en compte intelligemment, on semble s'obstiner à foncer dedans tête baissée. Globalement, c'est plus pour les FAI français que je crains, qui doivent s'amuser avec cet imbroglio législatif, que pour les utilisateurs finaux.

Tiens un touriste (2004-01-14T18:51:14Z)

Je suis un peu attristé de voir un être intelligent reprendre sans nuances les outrances d'odebi. Bon on considèrera votre heure de lever et on excusera.

Sur le filtrage prétendument "à la chinoise" :
j'ai eu du mal à comprendre dans le texte de loi à quoi les pétitionnaires faisaient allusion ; un peu de Googling me laisse penser qu'il s'agit de la disposition « L'autorité judiciaire peut prescrire en référé [] toutes mesures propres à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d'un service de communication publique en ligne [] ou, à défaut, à cesser d'en permettre l'accès. »

Bon ben ça c'est le rappel du droit existant (CPC article 809). Se plaindre que la loi française est rédigée par des cochons, ça je ne suis pas contre ; mais sur le fond je ne vois pas plus de raison de crier demain qu'hier.

Voir l'argumentation de www.foruminternet.org/telechargement/forum/cp200305.pdf
qui pense effectivement que l'article n'apporte rien en droit, mais le critique pour son effet d'affichage inopportun ; une telle critique modérée ne me gêne pas -simplement ça paraît un problème tellement dérisoire.

Sur le détachement de l'e-mail de la notion de correspondance privée :
le projet de loi fournit une définition de "courrier électronique" - un amendement rédactionnel allège de deux mots cette définition déjà lourde. Je ne vois pas pourquoi il faudrait se plaindre que la loi, déjà verbeuse (*), contienne deux mots de moins.

Sur la machine à gaz concernant les hébergeurs : là je suis beaucoup plus d'accord pour râler (mais pas pour crier à l'atteinte aux libertés, juste pour dire que c'est du n'importe quoi). Maintenant il faut tout de même regarder ce que ça change vraiment au droit positif. Actuellement, et en l'absence du texte, si une personne s'estimant lésée par un délit commis via un site web envoie un petit recommandé à l'hébergeur pour l'informer de ses doléances, il me paraît plausible que celui-ci -dès lors que le contenu du site est pénalement répréhensible- devienne effectivement complice s'il ne le ferme pas. De même que si un ami me demande de stocker sa collection de cinq cents autoradios dans mon grenier, je ne suis sans doute pas coupable de recel si j'ignore qu'ils ont été dérobés, mais que ça tourne au vinaigre si leurs propriétaires m'en informent par recommandé. J'ai moins d'avis dans l'hypothèse d'une faute civile non pénale, mais j'ai du mal à en imaginer des vraisemblables, tant l'imagination du législateur pour créer des délits est fabuleuse (ah s'asseoir dans les escaliers, il fallait l'inventer).

Dire que la loi matraque les hébergeurs, alors que les articles les plus significatifs commencent par "Les personnes (…) NE peuvent voir leur responsabilité civile (resp. pénale) engagée (…)" (forme négative) ça me paraît quand même la lire à contre-sens. La situation APRÉS le vote de la loi me paraît plus libérale qu'AVANT.

Maintenant ça ne veut pas dire pour autant que la loi est bonne. À mon goût, il serait raisonnable de l'amender au niveau de l'alina I-6 de l'article 2 bis (qui en l'état est bâclé ; qu'est-ce c'est que ce "facultative" dans la marge, alors qu'il est par ailleurs écrit que si la procédure n'est pas suivie, l'hébergeur est considéré comme ignorant du litige) ; on pourrait par exemple délier l'hébergeur de toute responsabilité lorsque l'éditeur du site peut être identifié (c'est un peu ce qui se passe dans la loi de 1881 sur la presse qui prévoit un régime de responsabilité décroissante éditeurs/auteurs/imprimeurs/distributeurs).

(*) ce commentaire aussi.


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